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Adhémar Léonce Gédéon Fluet, petit fonctionnaire qui travaille dans un ministère, voit sa vie perturbée par une série d'événements pour le moins... inhabituels. Il va, par exemple, gagner une génisse à une tombola, être confondu avec un individu recherché par la police suisse, se trouver dans un bus qu'un passager tente de détourner vers Cuba, ou encore rencontrer un quidam qui pense être décédé en bas âge...
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Seitenzahl: 142
Veröffentlichungsjahr: 2017
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L’EXTRAORDINAIRE LUNDI DE MONSIEUR FLUET
L’EXTRAORDINAIRE MARDI DE MONSIEUR FLUET
L’EXTRAORDINAIRE MERCREDI DE MONSIEUR FLUET
L’EXTRAORDINAIRE JEUDI DE MONSIEUR FLUET
L’EXTRAORDINAIRE VENDREDI DE MONSIEUR FLUET
L’EXTRAORDINAIRE SAMEDI DE MONSIEUR FLUET
L’EXTRAORDINAIRE DIMANCHE DE MONSIEUR FLUET
MONSIEUR FLUET PASSE UN CONCOURS
MONSIEUR FLUET ET LE QUIDAM
Ce matin là, Monsieur Fluet s’éveilla dès que le sommeil le quitta.
— Nous sommes lundi, pensa-t-il, ce qui n'était pas fait pour l'étonner outre mesure, la veille était un dimanche (bien qu'il eut plu toute la journée) et le lendemain un mardi (malgré un ciel légèrement couvert en matinée).
Il se leva, mit un pied dans une mule, s'aperçut qu’il s’agissait de son pied droit et de sa mule gauche, rectifia l’erreur, mit son autre pied dans son autre mule, et s’arrêta là parce qu’il n’avait que deux mules et bien sûr un nombre de pieds en rapport.
Puis il brancha la cafetière, dans laquelle la veille au soir il avait précautionneusement introduit la dose idoine de café moulu ainsi que l’eau nécessaire à la confection de ce breuvage aussi matinal que revigorant.
Il passa ensuite à la salle de bains, laquelle portait d’ailleurs cette appellation de façon abusive puisque dépourvue du moindre ustensile permettant ce type d’ablutions, elle comportait seulement une douche et un lavabo, mais on emploie assez peu le terme de salle de douche et encore moins celui de salle de lavabo.
Revenu à la cuisine où une bonne odeur de café chaud s’amplifiait à vue d’œil, il se margarina deux tartines. Auparavant, il les beurrait, mais un excès cholestérolique l’avait incité à remplacer le délicieux Charente Poitou sur ses toasts et sur les conseils de son médecin par de la margarine allégée comme le renard de la fable. Vous savez : « Maître Renard, par l’odeur allégé… ».
A noter que même allégée, celle-ci ( la margarine, pas la fable) pesait malgré tout exactement comme l’autre, 250 grammes. Comprenne qui peut.
Tout en petit-déjeunant, il caressait machinalement un chat qui avait d’une part le pelage blanc et roux, et d’autre part sauté sur ses genoux. Il s’agissait d’un mâle castré recueilli par Monsieur Fluet quelques années auparavant (évidemment, ça ne pouvait pas être quelques années auparaprès), et qui répondait au nom curieux de Poussette.
En fait, comme tout félidé normalement constitué, le brave animal n'était pas doté de la parole, il ne répondait pas vraiment, c'est juste une expression, la langue française offrant de curieuses particularité, je trouve.
Donc, Poussette était son nom, tout comme blanc et roux son pelage et sur les genoux de Monsieur Fluet sa place actuelle.
En réfléchissant bien, ce n’est pas sur les genoux de Monsieur Fluet qu’il avait sauté, mais pour être plus précis, sur ses cuisses. Vous voyez un matou en équilibre sur les rotules de son maître, vous ? Aussi peu confortable pour l’un que pour l’autre, à mon avis !
Toujours est il qu’il était blanc et roux, de sexe ex-mâle (hou-là, c'est plutôt difficile à prononcer, ça, heureusement je l'écris) puisque castré (attention, là je parle du matou, pas du maître) et qu’il s’appelait Poussette. Monsieur Fluet l’avait appelé comme ça en souvenir. Mais il avait oublié de quoi.
Il se sentait quelque peu de méchante humeur (pas le chat, Monsieur Fluet) en se rappelant sa journée néfaste de la veille. En effet, il avait perdu plusieurs tournées de blanc-cassis-limonade en jouant au 4-21 avec Monsieur Monsieur Guéricheval le vétérinaire, Monsieur Clédhuite le plombier et Monsieur Lamèche le coiffeur
Ah, passion du jeu, quand tu nous tiens...!
Bref, passons, aujourd’hui était un autre jour. Se refusant à ressasser ces soucis et chassant ceux-ci (petite allitération à répéter dix fois de suite très vite, merci) symboliquement d’une main aussi énergique que droite, il se prépara à se rendre à son travail.
Il était employé dans un tout petit mètre cube de bois. Mais qu’est ce que je raconte, moi...? Je veux dire un ministère, bien sûr ! Le Ministère des Décorations pour les Agents du Trésor Public du Quart Nord-Est du Troisième Arrondissement de Paris.
Comme, outre le Français, il parlait couramment le Vaudois et le Wallon -il possédait donc trois langues-on l'avait affecté au collage des timbres.
Il s’acquittait d'ailleurs très consciencieusement de sa tâche et en à peine vingt-trois ans, il avait été promu au grade d’Adjoint de Troisième Classe du Sous-Chef de Bureau, ce qui, on s’en doute, ne manquait pas de susciter envie et jalousie de la part de beaucoup.
Permettez-moi d'affûter mon crayon pour vous décrire le personnage en quelques traits de plume. Adhémar Léonce Gédéon Fluet était un homme assez petit puisque pas très grand, avec un début de calvitie à la taille et un léger embonpoint sur la tête, et je viens de relire c’est exactement le contraire mais tout le monde à compris alors c’est pas la peine que je rectifie, et il était célibataire, ce dernier point étant dû au fait qu’il ne s’était jamais marié.
Il était assez difficile de lui donner un âge, ce qui n’aurait servi à rien d’ailleurs vu qu’il en avait déjà un lui convenant parfaitement.
Comme il était en avance, Monsieur Fluet pas l’âge, et que le temps était aussi beau qu’un frère après son mariage avec votre sœur, il décida, plutôt que de se rendre au bureau par le plus court chemin, de prendre un itinéraire un peu plus long, la marche étant un exercice salutaire ne pouvant qu’avoir une influence faste sur un organisme encrassé par trop de sédentarité.
Comment aurait-il pu se douter que cette banale entorse à l’habitude allait le plonger au cœur d’un drame marquant fatalement de façon indélébile la vie bien réglée d’un brave employé de ministère...
Sa flânerie l’amenait à traverser la Place Delautre, et juste au moment où il était sur le point d' y arriver, des cris en provenance de ladite place retentirent :
— Os court, os court !
Un tibia ou un fémur, voire une banale clavicule, même de longueur réduite, n’étant pas susceptible de générer un émoi justifiant de telles clameurs, force lui fut d’en déduire qu’il s'agissait probablement d’une prononciation incorrecte, par suite de l’élision incongrue du « e » non muet, de la locution « Au secours ! Au secours ! »
Conclusion : quelqu’un sollicitait une aide.
Il se précipita, pour découvrir un spectacle qui le glaça de froid. Tiens, la température avait chuté si rapidement ? Ah non ! Qui le glaça d’effroi, pardon.
Un jeune voyou (du moins Monsieur Fluet le catalogua-t-il ainsi parce que les honnêtes garçons ne se livrent pas à ce genre de passe-temps) avait jeté, tout d’abord son dévolu sur le sac à main d’une passante, et ensuite, un regard aux alentours pour s’assurer que, les lieux étant déserts, nul ne serait témoin de son acte dont il ne pouvait ignorer l'aspect répréhensible.
La dame le tenait solidement par l’anse (le sac à main, pas le jeune voyou), mais on sentait que sa résistance faiblissait (à la dame, pas à l’anse du sac à main).
Son premier élan (à Monsieur Fluet, pas au sac à main ni au jeune voyou, enfin !) le poussa en avant. Son deuxième, en arrière... Prudence, il y avait peut-être du danger. Tout bien pensé, le « peut-être » était superflu, il y avait du danger. Mais qu’importe. Son troisième élan le porta donc à nouveau en avant (tiens, encore une petite allitération).
Seulement, un hasard malicieux plaça fort malencontreusement un caillou sur son chemin, caillou dans lequel son pied droit –le meilleur, celui avec lequel il donnait les coups aux fesses, et qu’il avait introduit par erreur, rappelez-vous, dans sa mule gauche au saut du lit mais ça n’a aucun rapport-caillou sur lequel, redis-je parce que la longueur de la phrase a pu vous en faire oublier le début ce qui nuirait à sa compréhension, pas au début de la phrase mais à la phrase entière, caillou sur lequel, redis je pour la dernière fois, il buta de façon très inopportune.
Déséquilibré, Monsieur Fluet tendit par réflexe ses mains en avant pour éviter un éventuel contact, tant brutal que dommageable pour son physique, de son menton avec le bitume.
A ce moment là, le j.v.v.d.s.a.m. (le jeune voyou voleur de sac à main, je voulais simplifier mais ce n’est peut-être pas très compréhensible) ayant tant tendu... Excusez-moi, j’ai été trahi par la liaison, je reprends : ayant entendu un bruit de pas précipités, tourna la tête dans la direction d'où écourbaient ces sons. Pardon, je voulais dire émanaient, je me suis trompé de peintre.
Vous devinez la suite. Monsieur Fluet, emporté par son renne... Comment, quel renne ? Ah oui, son élan. Ben quoi, ça se ressemble un peu, non, ces cervidés ! Et puis on est à six mois juste de Noël, on peut se tromper.
Je reprends : Emporté par son élan, Monsieur Fluet percuta avec violence et la paume de ses mains la face du j.v.v.d.s.a.m. (maintenant, vous savez ce que ça veut dire, je n’ai plus de raisons de m’en priver) qui se mit illico à sanguinoler de l’appendice nasal.
Il n’en fallut pas plus au d.j.d.d.s.a.i.l.b.d.a. (Ben oui, le délinquant juvénile désireux de s’approprier illégalement le bien d’autrui, faites un effort, quoi !) pour partir en courant et en appelant sa mère, deux actions très facile à réaliser simultanément, même sans entraînement préalable.
L’auteuse de ses jours se trouvait sans doute à une distance trop importante pour permettre aux ondes sonores émises par sa progéniture de parvenir à ses tympans. Elle s’abstint de paraître et Monsieur Fluet se retrouva donc seul avec la personne à qui il venait de porter secours.
Celle-ci, éperdue de reconnaissance, l’embrassa sur les deux joues en lui disant :
— Mirci, Massiou. Vous estez mon sauvage.
Visiblement, cette dame était d'origine étrangère, mais Monsieur Fluet ne voulut point la peiner en lui révélant qu’elle avait encore des progrès à faire en ce qui concerne notre beau langage national, et que celui qui vous sauvait n'était pas un sauvage mais un sauvant.
Aussi s’en fut-il vers son bureau sans lui faire subir la mutilation de l’éléphant. Attendez, je vois un lecteur qui lève le doigt... C’est quoi la mutilation de l’éléphant ? Eh bien, c’est détromper, voyons…
Il n’était pas huit heures, ce matin là… Au fait, pourquoi le dire, dans ce cas ? En effet, il n’était pas huit heures. Mais il n’était pas neuf heures non plus, ni dix, ni onze, ni douze, ni n’importe quelle autre heure qu’il vous plaira, je ne vais pas vous énumérer toutes les heures de la journée, quand même. Bref, à quoi bon mentionner l’heure qu’il n’était pas ? C’est quand même plus simple de dire simplement quelle heure il était, non ?
Je reprends :
Huit heures sonnaient ce matin là à tous les clochers dont l'horloge avançait de cinq minutes... Vous voyez, on sait tout de suite qu’il était huit heures moins cinq, donc ni huit heures, ni neuf, ni dix, ni onze, et j’arrête là parce qu’on va me reprocher de vouloir faire du remplissage.
Ouais, seulement il n'y a peut-être pas tellement de clochers qui ont tout juste cinq minutes d’avance. Ce n’est pas très heureux, cette formulation, il vaudrait peut-être mieux en trouver une autre.
Début du récit :
Huit heures moins cinq sonnaient, ce matin-là... Attendez, vous me faites écrire n’importe quoi, là ! Aucun clocher ne sonne cinq minutes avant l’heure, enfin.
Commencement de l’histoire :
Huit heures allaient sonner cinq minutes plus tard à tous les clochers bien réglés, ce matin là... Non, non ! C'est bien trop alambiquée, cette tournure de phrase. On devrait pouvoir faire plus simple, bon sang.
Point de départ de l’anecdote :
Il était seulement huit heures moins cinq (Eh bien voilà ! On y est arrivé) ce matin là, quand Monsieur Fluet fut tiré de ses songes par un doigt, et j’en vois qui froncent le sourcil parce que la relation de cause à effet leur saute aux yeux moins vite qu’un cheval affamé sur son picotin d’avoine.
J'explique. Ce doigt en appuyant vigoureusement sur le bouton de sonnette de la porte d’entrée, venait de déclencher un carillon certes très mélodieux mais également inopportun.
Parce que ce mardi était pour Monsieur Fluet un jour de RTT (Repos et Tranquillité Totale) et il avait espéré faire la grasse matinée jusqu’à au moins huit heures.
Il enfila en maugréant et en toute hâte sa jupe de salon… Non, non, c’est pas ça. Ah oui ! Sa robe de chambre. Vous voyez ce que c’est d’être réveillé en sursaut, on n’a pas les idées très claires. Il s’agissait d’un magnifique vêtement en soie rouge sang avec une ceinture du même métal et dont le dos (de la robe de chambre, pas de la ceinture) s’ornait d’un superbe paysage : un lever de soleil en automne sur les plaines d'Écosse.
En fait, un gros rond d’un blanc grisâtre, mais le vendeur lui avait vanté le réalisme d'un tel motif parce que, sitôt l’été fini, il y a un brouillard pas possible sur les plaines d'Écosse le matin au lever du soleil et on ne voit rien du paysage.
Il s’en tonneau... Non, pas tonneau… Il s’en barrique... Attendez, pas barrique non plus, mais de quel récipient s’agit-il, mille diables...? Ah oui ! Il s’en fut ouvrir la porte d’entrée, laquelle offrait comme ingénieuse particularité de se transformer en porte de sortie lorsqu’on quittait l’appartement.
Cette ouverture sur le monde extérieur lui permit de découvrir que le doigt réveilleur se trouvait être l’index d’une main terminant un bras attaché à un thorax surmontant un bassin, lui-même posé sur une paire de cuisses reliées à deux jambes prolongées de pieds, le tout constituant le fils aîné (il avait un frère et une sœur moins âgé que lui) d’un de ses voisins dont la conjointe souffrait d’arthrose, mais ce dernier détail n’a rien à voir avec l’histoire qui nous occupe.
Vous dites ? Pas de tête… ? Si, bien sûr, seulement c’est tellement évident que je n’avais pas jugé bon de le mentionner. Même que cette tête lui permit de reconnaître le fils aîné d’un de ses voisins (dont l’épouse ratait fréquemment ses teintures capillaires mais quel rapport pourrait-il y avoir avec les faits dont je vous instruit ?)
— Qu’est ce qu’il te prend de me réveiller quand je dors encore ? demanda-t-il d’un ton bourru.
— B’jour, M’sieur, répondit le gamin sans se démonter, heureusement car notre ami Adhémar était assez peu bricoleur et ne disposait d’aucune notice permettant le remontage d'un gamin en pièces détachées.
— Oui, bonjour. Alors ?
— C’est rapport au billet de tombola que je vous ai vendu le mois dernier, la grande tombola du BETA (Bureau d'Études des Techniques Agricoles). Vous vous rappelez ?
— Et tu veux m’en vendre un autre ? s’inquiéta Monsieur Fluet réticent à l'idée de dépenser inconsidérément un argent si difficile à gagner, mais il n’avait pas pu refuser parce que les parents du petit lui rendaient parfois de menus services comme par exemple celui de venir nourrir son chat lorsqu’il lui arrivait de s’absenter un jour ou deux, pas le chat, Monsieur Fluet.
— Non, M’sieur. Mais on m’a dit comme ça : C’est toi qui lui a vendu le billet, alors va lui annoncer la bonne nouvelle.
— Tu es premier à l’école, crut deviner l'employé de ministère bien qu’à priori, il ne vit point en quoi ce résultat, dont effectivement le bénéficiaire avait lieu de s’enorgueillir, lui valait de voir son sommeil écourté.
Le fils aîné du voisin (dont la femme était affligée d’un bec de lièvre mais je n’avais pas mentionné ce détail parce que, pour important qu'il fût, il se trouve ne pas avoir la moindre incidence sur ce récit) parut légèrement décontenancé.
— Non, M’sieur, la bonne nouvelle, c’est que vous avez gagné le premier prix de la tombola.
La surprise lui fit écarquiller les yeux (mais oui, à Monsieur Fluet, pas au premier prix et évidemment, les yeux, ça n’allait pas être les oreilles). C’était bien la première fois qu’une mise à un jeu de hasard se transformait pour lui en investissement et non pas en perte sèche.
— Et j’ai gagné quoi ?
— Ah ça j’sais pas, M’sieur, faut aller demander au BETA (Bureau d'Études des Techniques Agricoles). Là, ils vous diront.
— Eh bien, c’est gentil d'être venu me prévenir. Tu mérites une récompense, dit Monsieur Fluet.
— C’est pas la peine, M’sieur, rétorqua hypocritement le gamin avec déjà les yeux en forme de pièces de deux euros. (Au passage, je ne crois pas vous en avoir déjà informé, mais sa mère avait dû subir une ablation de l'appendice à l’âge de vingt ans et deux mois. Hein ? Oui, c'est vrai, ça n'a guère d'intérêt pour vous de savoir ça.)
— Si, si, insista Monsieur Fluet en allant chercher une boîte métallique décorée de tulipes multicolores dont il sortit une pastille de menthe enveloppée dans un joli papier bleu transparent qu’il offrit à celui qui venait lui annoncer cette bonne nouvelle.