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L’homme aux papillons est un récit initiatique qui passe par la rencontre entre un homme en situation de handicap et une jeune femme aux prises avec ses démons. Au fil des lignes, l’amour s’avérera alors être une belle arme pour renouer avec l’espérance.
À PROPOS DE L'AUTEURE
Dans le but de satisfaire son insatiable appétit de créer et raconter des histoires,
Brigitte Primault nous propose son deuxième roman,
L’homme aux papillons.
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Seitenzahl: 107
Veröffentlichungsjahr: 2022
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Brigitte Primault
L’homme aux papillons
Roman
© Lys Bleu Éditions – Brigitte Primault
ISBN : 979-10-377-6487-4
Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L.122-5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L.122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L.335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.
Merci, madame la Vie, de m’avoir fait connaître tout cela.
Laurent P.
Avant-propos
Doit-on avoir un parcours de vie particulier pour souhaiter en partager l’histoire ? Tout simplement, peut-être aimer l’idée de laisser une trace écrite de son passage sur terre… Et de surcroît si le lecteur se retrouve parfois entre les lignes, s’il déniche quelques similitudes avec sa propre existence ou puise une certaine force et surtout l’amour de la vie, je n’aurais pas perdu mon temps…
Il y a plus d’un demi-siècle que j’ai posé les pieds sur cette terre. Et l’expression : « Poser les pieds sur la terre »revêt ici toute son importance, mais n’allons pas trop vite. Goûtons aux instants lumineux, à ceux qui font trembler un peu le cœur, parfois mouiller l’œil, tellement le bonheur nous inonde…
Dans le récit, le « je » devient « il » ou « Édouard… ». Quant à la fiction, elle s’invite parfois. Sous les traits de « Pauline », elle se glisse dans les petits interstices de notre imagination pour en fleurir la monotonie des jours.
La vie est belle…
Prologue
Il lève les yeux vers le ciel constellé d’étoiles. La nuit est chaude. L’intérieur de la maisonnette, insoutenable. Il passera sa nuit dehors, encore une, assis dans son fauteuil. Tant pis pour la putain de couche qui ne sera pas changée. Il esquisse un sourire, perdu dans ses pensées, et reprend l’exploration du ciel. Si seulement je voyais une ou deux étoiles filantes, histoire de faire un vœu. Chienne de vie. M’en faudrait bien une pluie entière pour un miracle. Ses yeux s’embrument trop vite. Il essuie une larme venue se percher au coin de l’œil, cherche son briquet enfoui derrière un pli du plaid, peste contre sa spasticité qui le fait souffrir puis sa main gauche attrape le briquet et la cigarette. Les cloches viennent de sonner douze coups. Son téléphone est resté muet depuis des heures. Il se sent, d’un coup, seul au monde, coincé sur ce bout de terre au fond d’un village où les âmes dorment depuis longtemps. Il termine son pétard. La nuit va être longue.
Dans sept heures, les filles viendront me laver, me changer, et une autre journée merdique commencera.
Cinq heures du matin. La lune est encore pleine. Il discerne l’ombre d’un chat sur le mur du jardin. Le matou semble danser autour d’une motte de terre. Sans doute une malheureuse souris dans les pattes du greffier. Une grimace marque son visage. La douleur dans sa tête persiste. Elle devient plus lancinante. Il se frotte le cuir chevelu pour en extraire la chaleur. Anormale ! la myéline est encore attaquée. Les signaux électriques se font douloureux, angoissants. Une nouvelle poussée pointe le bout du nez. Le chat se fige, surpris d’entendre une voix humaine pester contre l’invisible.
« Tu ne me laisseras jamais en paix, salope. T’es assise là sur mes genoux, comme une enragée à me susurrer ta berceuse. Tu me racontes quoi ? Que tu m’aimes et que tu me quitteras jamais. Toi et moi pour la vie avec un beau doigt d’honneur. Ah mon Dieu, faites-la décamper cette maudite SEP1 qui me bouffe. Redonnez-moi la force de croire en la vie. »
Une vague de larmes le submerge d’un coup. Au-dessus de lui, les hirondelles sont déjà réveillées. Elles lui crient des messages inaudibles. Il aurait souhaité les compter mais elles sont trop nombreuses. Quelques-unes rasent le sol. Leur vol discontinu l’étourdit et leur danse permet à Édouard de chasser ses pensées noires. Il accroche un timide sourire à son visage. Merci, les filles, d’être avec moi. Tiens, en parlant des filles, voilà celles du SSIAD2 qui arrivent. Enfin du monde.
Amandine jette un œil à la pendule qui indique déjà sept heures trente-cinq. Elle fait signe à sa collègue d’accélérer le rythme. Les soignantes doivent encore doucher, habiller le patient. Elles ne quitteront Édouard, qui ne tarit pas en paroles, qu’après lui avoir donné son indispensable café.
Premier café avalé et première cigarette fumée sur la petite terrasse relativement fraîche encore à cette heure-ci, il entre maintenant s’installer devant son ordinateur. Le rituel du matin. Consulter sa messagerie et son réseau social. Il allume péniblement l’appareil avec sa main valide. Lorsqu’il arrive sur sa page « Facebook », il se retrouve connecté avec Eva, sa nièce de Serbie qui vient de lui envoyer les dernières photos de ses adorables fillettes. Par écran interposé, les deux petites illuminent son quotidien.
Deux rayons de soleil dans sa vie grisâtre.
Une heure plus tard, Mariette s’active dans l’espace cuisine sous la direction d’un chef soucieux de ses papilles.
Une matinée bien banale, en somme…
***
L’effervescence sur la place de la mairie habituellement paisible, agite tous les voisins et le bruit va s’étendre jusqu’à la porte d’Édouard. Il rajuste son chapeau de paille et son fauteuil prend le chemin du vacarme. À cinq cents mètres de là, près du petit bistrot, des badauds parlent fort, en gesticulant. Un terrible accident sur la route principale vient de se produire et les premières informations sont alarmantes. Les explications d’un témoin de l’accident encore sous le choc s’entrechoquent aux questions de certains curieux. Il eut semblé que le conducteur conduisait trop vite. La voiture avait quitté la route après le virage pour suivre son chemin dans le champ de blé tout juste coupé. Mais le véhicule fou avait été déporté pour finir sa course dans le poteau électrique qui ne rompit pas. Le conducteur, un certain Nicolas, bien connu dans le village, fut transporté aux urgences de Poitiers.
Le fauteuil électrique reprend un plus tard le chemin de la maison et l’esprit d’Édouard prend la fuite vers un passé douloureux.
Il a quoi Titi, maman ? Il a quoi ? Il est où maintenant ?
Du haut de ses sept ans, le gamin, qu’il était alors, avait interrogé ses parents qui étaient restés muets, les yeux rougis par les larmes. Titi ne reviendra pas à la maison… Ce jour d’août restera gravé dans les têtes comme une plaie mordante qui ne se refermerait pas. Depuis l’âge de ses deux ans, le petit Ed avait été sous la haute protection de son oncle Titi de dix ans son aîné. Un vrai repère pour le petit. Un grand frère toujours aux petits soins, toujours présent. Rassurant, drôle, aimant, le garçon prenait son rôle de chaperon très au sérieux. Une odeur fugace de chicorée lui rappelle les matins bruyants remplis de rire et de soleil. Titi dévalait les escaliers de la chambre, attrapait Édouard et le jetait sur ses épaules comme un paquet.
Les enfants riaient. Grand-mère faisait semblant d’être choquée.
Les journées étaient trop courtes avec Titi. Chaque fin de semaine, les parents quittaient les Yvelines pour descendre dans la Vienne. Puis le week-end passé, ils remontaient vers Paris et laissaient parfois Édouard entre les mains rassurantes des grands-parents secondés par un Titi responsable.
Ce mois d’août 1970 ressemblait aux autres mois d’été, chauds et pleins de rires dans la famille. Ce dimanche-là, tout le monde avait rejoint « la Goulfandière » pour un repas. Tous s’étaient installés autour de grandes tables dressées dans la cour. Le soleil inonderait bientôt la place et le grand platane ferait office de parasol pour les peaux trop sensibles. On attendait le retardataire parti avec trois compères à Châtellerault. Les jeunes avaient obtenu leur permis de conduire depuis peu. Ils avaient tiré à la courte paille celui qui ferait le copilote, qui aurait la mauvaise place. Titi, grand gaillard de dix-neuf ans, cigarette au coin des lèvres, sourire ravageur, avait crié un : « C’est moi » en rigolant. Quelques heures plus tard, le téléphone avait sonné, annonçant l’accident. Un adulte avait hurlé dans la cuisine. Un autre s’était précipité à l’intérieur. L’oncle avait tapé du poing sur la table et certains adultes s’étaient engouffrés dans une voiture. Ils reviendraient plus tard…
Les enfants veulent savoir. Les plus grands seront mis dans le secret. On protégera les plus jeunes. Et surtout Édouard, il faut protéger Édouard.
On aura tenu trois jours avant de lui avouer la tragique nouvelle. La voiture folle s’était enroulée autour d’un platane ne laissant aucune chance de survie à Titi. Cinquante mois d’août n’auront pas eu raison de la guérison de la plaie dans le cœur d’Édouard.
Moins béante, elle suinte encore parfois, lui laissant un tremblement au coin des lèvres. Alors il ferme les yeux et entend les éclats de rire de Titi…
Elle s’apprête à descendre du véhicule et jette un dernier coup d’œil dans le rétroviseur. Une mèche rebelle vient de tomber sur le front qu’elle s’empresse de remettre derrière l’oreille. Non mais quelle gourde !Il s’en balance de ton physique. Il a besoin d’une aide à domicile. Pas d’une call-girl. Elle efface le rouge sur ses lèvres, secoue sa tignasse auburn et se dirige vers la petite maison. Une nuée d’hirondelles virevoltent au-dessus d’elle, si proches qu’elles auraient presque pu la toucher. Le tableau lui fait penser aux mouettes criardes au-dessus d’un chalutier de Saint-Malo. Sauf qu’ici, elle ne sent pas les embruns. L’air est sec comme une trique. Un soleil de plomb inonde l’espace. Des gouttelettes de sueur perlent sur son front qu’elle essuie d’un revers de main. La mèche revient se placer entre ses yeux. Elle prend une longue inspiration en arrivant à la porte, puis une deuxième, et frappe.
Il se tient là, juste devant elle, face à la porte, assis légèrement de guingois, dans son fauteuil électrique.