La conspiration des chats - Joël Carobolante - E-Book

La conspiration des chats E-Book

Joël Carobolante

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Beschreibung

Les chats pourraient-ils un jour ourdir une conspiration pour dominer le monde ? Insidieusement, à pas feutrés, ils se sont mis à remplacer les chiens dans nos foyers. Le plus vieil ami de l'homme a cédé sa place à un être qui a pris ses aises chez nous. Jusqu'à présent, de gré ou de force, tous les animaux obéissaient à l'homme. Mais le chat n'obéit qu'à lui-même, et maintenant l'homme lui obéit. Veut-il entrer ou sortir, veut-il manger, ou quoi que ce soit d'autre ? L'homme lui ouvre les portes et le nourrit, se tient à sa disposition, lui donne son fauteuil, son canapé, son lit, partout la meilleure place. Le chat ne vit pas chez l'homme, c'est l'homme qui vit chez le chat. Que lui manque-t-il alors pour être vraiment le maître du monde ? Une ultime mutation ? Une véritable conspiration ?

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Seitenzahl: 118

Veröffentlichungsjahr: 2023

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L'image de couverture représente un chat couronné, car seule une couronne sied à Sa Majesté le Chat (ou la Chatte).

Avec un chat portant chapeau, on aurait eu un chat chapeauté.

Avec un chat portant sur lui, pour éviter les chatouillis, un châle dans un chalet, voire une chapka sur un chariot menant à un châtaigner près d'un château, on aurait eu un joli chat un petit peu trop chatouilleux.

Mais, qu'il soit couronné ou chapeauté, avec ou sans châle, qu'il soit chat de chanoine portant chasuble et chapelet dans une chapelle pour faire du prêchi-prêcha à chaque chaland de chacun des commerçants du coin, ou chat d'un châtelain chasseur chevauchant un chameau pour faire passer un fil dans le chas d'une aiguille à l'aide d'un chamallow chauffé au chalumeau lors d'un show sous un chaud chapiteau, adressez-vous donc à lui (ou elle) avec un langage châtié car Sa Majesté le Chat (ou la Chatte) est toujours chatoyant (e).

Chats de tous les pays, unissez-vous !

Le monde est à vous !

Sommaire

Le nuage

Les chats pourraient-ils dominer le monde ?

La mutation

La conjuration

La révolution

La contre-révolution

Le retour de bâton

La conspiration ? Quelle conspiration ?

Appendice

*

I

Le nuage

Contrairement à la légende, il ne s'était pas arrêté pile-poil à la frontière. En 1986, le nuage de Tchernobyl, faisant fi de contrôles douaniers d'ailleurs inexistants à son altitude, avait allègrement survolé la France.

Contrairement à la légende encore, le nuage n'avait pas été sans conséquences sur les organismes vivants de notre pays. Tout d'abord, il avait rendu les Français follement inquiets, ce qui n'avait pas manqué de susciter moult débats. Et puis surtout, il y avait eu le cas de Moumouche.

Moumouche ? Ben, oui, Moumouche ! Moumouche, une belle petite chatte irradiée qui avait mutée peu après l'arrivée du nuage : Moumouche, une mutante !

Si l'évolution des espèces a pu se produire sur notre planète, ce fut grâce aux mutations. Il n'y avait donc rien de déshonorant pour Moumouche à être une mutante. Du reste, elle n'avait rien demandé, ça lui était tombé dessus comme ça, sans prévenir. En génétique, les mutations sont normales. La plupart ne sont pas positives et disparaissent avec les générationssuivantes, faute d'avoir pu apporter une utilité quelconque à l'espèce. Mais pour Moumouche, ce fut bien différent. La mutation qui la frappa était destinée à changer la face du monde. Grâce à elle, la gent féline allait pouvoir dominer le monde !

Mais tout d'abord, vous êtes-vous jamais demandé pourquoi c'est l'homme qui régente tout sur notre belle planète ? Pourquoi pas les chats, par exemple ? Certes, des esprits savants pourraient faire remarquer que le règne de l'homme est bien précaire : il n'a commencé qu'il y a quelques milliers d'années à peine, et il est possible qu'il s'achève déjà dans quelques siècles, ou même beaucoup plus tôt. En comparaison, des organismes moins complexes, microscopiques, comme les tardigrades, peuvent survivre dans les conditions les plus extrêmes mortelles pour l'homme. À l'opposé en matière de taille, les dinosaures ont vécu pendant des millions d'années. Il n'empêche : aujourd'hui, c'est bien l'homme qui domine la planète et qui la transforme au point de menacer de la rendre inhabitable. Qu'a donc l'homme de plus, ou de moins, que le chat ? Pour le savoir, regardez donc Moumouche avant sa mutation, et comparez-vous à elle.

Moumouche a un petit cerveau, le vôtre est plus gros, donc vous êtes plus intelligent, pensez-vous. Mais la taille du cerveau dépend de la taille de l'animal qui le porte : le cerveau des femmes est en moyenne plus petit que celui des hommes et, si vous êtes un homme, ne vous aventurez pas à des conclusions hâtives, comme de dire qu'elles sont moins intelligentes que les hommes, vous risqueriez d'avoir des problèmes. Disons donc que le cerveau de Moumouche, si petit soit-il, lui convient très bien par rapport à sa morphologie et à son style de vie. Cependant, c'est bien votre cerveau, ou disons le cerveau humain, qui a découvert la théorie de la relativité et qui a envoyé des hommes dans l'espace. Le cerveau de Moumouche, lui, se cantonne à des activités plus terre à terre, comme manger ou dormir, ou chasser s'il en a l'occasion.

Pour mieux comprendre cette différence entre le cerveau de Moumouche et le vôtre, il faut faire un petit voyage dans le passé. Une fois descendu de son arbre, notre ancêtre primate s'est mis à marcher debout, ce que sa morphologie lui permettait, libérant ainsi ses pattes avant. Chacune de ses pattes avait une main avec un pouce opposable grâce auquel il pouvait s'agripper dans son arbre et, plus tard, attraper ce qu'il voulait. Cela lui a donné des idées, comme de se lancer dans le bricolage. Pour fabriquer des outils, des armes de chasse notamment, il a dû cogiter, et ce fut ainsi que son cerveau s'est développé jusqu'au point de créer des langues pour communiquer et se mettre à fabriquer des fusées pour aller sur la Lune ou sur Mars.

Et l'ancêtre de Moumouche ? Lui, il s'est spécialisé dans la chasse. Il ne pouvait par marcher sur deux pieds, donc il ne s'est pas mis debout. Sans pouces opposables aux pieds, il ne pouvait guère manipuler des objets et se lancer dans le bricolage. Ni donc développer son cerveau pour concurrencer celui des primates. Par contre, étant digitigrade et non plantigrade comme les primates, il marchait sur la pointe des pieds, sur ses doigts donc, tout en silence, cequi était bien utile pour attraper une proie sans se faire remarquer, et sans avoir besoin de fabriquer une arme quelconque. Que demander de plus ? Une mutation pour devenir plantigrade et marcher comme nous sur la plante des pieds, une autre pour avoir des pouces opposables, une autre encore pour ceci ou cela ? Mais pourquoi donc subir tout un tas de mutations, puisqu'il avait déjà tout ce qui lui convenait dans la vie ? Il chassait très bien, et passait le reste du temps à se prélasser dans un coin, tout était déjà pour le mieux dans le meilleur des mondes. Une mutation le transformant en plantigrade, par exemple, l'aurait handicapé, au point peut-être de le faire carrément disparaître.

Au final, qu'est-ce qui différencie vraiment l'homme du chat ‒ à part, bien sûr, les petites différences que nous avons vues ? C'est que l'homme est un animal social, plus que le chat. L'homme vit en société, et tout son savoir est le cumul du savoir de tous ses congénères et de celui de tous ses ancêtres. Grâce à cela, il a pu inventer le fil à couper le beurre et Internet. Le chat, lui aussi, est un animal social qui peut vivre en groupe. Mais, par contre, c'est un chasseur solitaire. Et comme la chasse est au chat ce qu'est le travail pour l'homme, voilà pourquoi c'est l'homme qui poste des photos et des vidéos de chatons sur les réseaux sociaux, et non le chat. C'est le travail en groupe qui a fait la civilisation humaine, et c'est la chasse qui a fait le chat.

Pour autant, pourquoi le chat ne pourrait-il pas dominer le monde ? Après tout, pourquoi pas ?

II

Les chats pourraient-ils dominer le monde ?

Pour savoir si les chats pourraient un jour dominer le monde, il faut tout d'abord apprendre à les connaître. Il faut tout savoir d'eux, sur leur histoire, leur morphologie, leur caractère. Ce n'est qu'après cela que nous pourrons revenir au cas de Moumouche, le chat mutant.

Le chat fait partie des petits félins, des mammifères carnivores prédateurs de petite taille ou de taille moyenne qui ne peuvent pas rugir, mais qui ronronnent. Les petits félins ou Félinés comportent plus de trente espèces, dont plusieurs espèces de chats, ainsi que le puma, le lynx, le guépard, et le serval. Pour leur part, les grands félins ou Panthérinés sont de taille moyenne et grande. Ils comprennent notamment le tigre, le jaguar, le léopard ou panthère, et le lion.

Le mot chat vient du bas-latin cattus, dont l'origine est incertaine (peut-être d'un autre mot latin signifiant rusé, ou d'un autre mot signifiant guetter, ou plutôt d'un mot d'Afrique ou du Proche-Orient). Ce terme latin a donné naissance aux mots employés aujourd'hui dans les langues européennes : cat en anglais, kater/katze en allemand, gato en espagnol, gatto en italien, kat en néerlandais et en danois, katt en suédois et norvégien.

Dans l'Égypte antique, il était appelé d'un mot qui peut être orthographié mau ou miou, d'après sans doute l'onomatopée qui a donné notre miaou et miauler. Dans la Grèce antique, il était appelé ailuros, mot signifiant probablement qui remue la queue. Ailuros a donné les mots ailurophilie (qui aime les chats) et ailurophobie (qui en a la phobie). Dans la Rome antique, le chat était aussi appelé felis, mot qui a donné félin. Au Moyen Âge, on employait encore des mots associés au terme latin désignant la souris (mus) : par exemple, muriceps ou murelegus (attrape-souris).

Comme tous les animaux, le chat a évolué, mais beaucoup moins que d'autres. Petit mammifère, il est resté petit. Un de ses lointains ancêtres avait le corps allongé et une longue queue, comme les genettes, martres ou civettes actuelles : c'est dire que dès le départ il avait presque trouvé sa perfection anatomique. Le chat domestique est une sous-espèce du chat sauvage ou Felis silvestris. On trouve différentes espèces de celui-ci en Afrique, en Europe et en Asie occidentale. Felis silvestris lybica, le chat sauvage d'Afrique ou chat ganté, serait ainsi l'ancêtre du chat domestique.

L'Égypte est la mère patrie du chat domestique. Cependant, le chat s'est rapproché de l'homme dès que celui-ci a amassé des récoltes qui faisaient un excellent garde-manger pour les rongeurs. Cela s'est passé dans le Croissant fertile, il y a plus de 7500 ans. On a découvert à Chypre les restes d'un chat et d'un enfant enterrés ensemble. Ils auraient autour de 7500 ans. Le chat a ensuite suivi les agriculteurs néolithiques dans leurs migrations. En Égypte aussi, il fut un auxiliaire précieux pour préserver les céréales contre les rongeurs et les oiseaux, tout en protégeant les habitations des serpents. Les Égyptiens l'apprécièrent tellement qu'ils lui vouèrent un culte, comme intermédiaire avec la divinité. Le chat fut tout d'abord perçu comme un avatar du dieu Ré, en tant que pourfendeur du serpent Apophis, dieu du chaos et de la nuit, ennemi de la création divine. Puis il fut surtout vénéré en tant qu'incarnation de la déesse Bastet, représentée dans les statues comme une femme à tête de chat. Bastet a été associée à la protection du pharaon et des défunts, puis à la fécondité et à la maternité, à la protection des femmes enceintes et des enfants, ainsi qu'à la beauté. Une ville importante, Boubastis, lui était même dédiée (le livre biblique d'Ézéchiel la mentionne en la maudissant sous le nom de Pi-Béseth). Selon l'historien grec Hérodote, il s'y déroulait d'importantes festivités attirant des centaines de milliers de pèlerins. Le chat était plus sacré que d'autres animaux, et tuer un chat pouvait valoir une condamnation à mort. Quand un chat mourait, sa maisonnée se rasait les sourcils en signe de deuil. Le défunt chat était embaumé, des souris pouvaient l'être aussi pour l'accompagner dans l'audelà. Cette vénération du chat avait en grande partie remplacée celle du lion, plus encombrant et de tempérament plus difficile, et qui de plus avait disparu de la région. On raconte que quand les Perses assiégèrent la ville de Péluse, à l'embouchure du Nil, ils attachèrent des chats aux boucliers de leurs six cents soldats. Plutôt que de faire du mal aux chats, les Égyptiens préférèrent capituler.

Mais l'Égypte fut-elle vraiment le paradis des chats ? Même vénéré, on attendait quand même de lui qu'il continuât son travail de prédateur contre les rongeurs. Par ailleurs, on a retrouvé des centaines de milliers de momies de chats dans les premiers cimetières pour animaux créés par l'homme. Au XIXe siècle, elles étaient envoyées en Europe, principalement en Angleterre, pour en faire de l'engrais. De nos jours, elles sont sauvegardées et étudiées. Selon des archéologues, les prêtres sacrifiaient des chats souvent très jeunes par milliers, voire par millions : c'était déjà l'abattage rituel, et même tout un commerce. Offrir un chat en sacrifice à Bastet, c'était probablement un exvoto pour obtenir ses faveurs, ou pour la remercier. La vénération des chats s'accompagnait donc aussi d'un prix à payer : le sacrifice de milliers et de milliers de vies. Un paradis quelque peu cruel, finalement. En parallèle, le chat sauvage continuait lui aussi de vivre sa vie en Égypte, mais une vie bien différente.

Après l'Égypte, la Grèce. Les Grecs auraient bien voulu acquérir des chats égyptiens, mais l'Égypte interdisait leur exportation. Il ne leur restait plus alors qu'à en voler, ce qu'ils firent. Ils en élevèrent à leur tour, et purent en vendre aux Romains, aux Gaulois et autres Celtes. À l'origine, le chat était un cadeau pour les courtisanes, puis il se popularisa, quoique les Grecs lui préférèrent toujours le chien. Pour les Romains, le chat était à la fois un animal de compagnie et un dératiseur, longtemps en concurrence avec la fouine. Animal populaire, aussi bien chez les soldats qui l'utilisaient pour protéger leurs vivres que dans les foyers, il avait néanmoins une réputation sulfureuse. Les miaulements des chattes en chaleur l'associaient à la luxure.

La naissance du christianisme ne changea rien pour les textes sacrés : comme la Bible des Juifs ignorait complètement les chats (sauf indirectement, on l'a vu, le culte de Bastet à Pi-Béseth), le Nouveau Testament continua de les ignorer. Seuls les chiens y sont mentionnés, mais avec un certain mépris : ils n'étaient pas encore des animaux de compagnie. L'islam a, lui, une image positive du chat, au contraire du chien, même si le Coran l'ignore. La tradition rapporte que Mahomet avait une chatte nommée Muezza qui l'aurait sauvé de la morsure d'un serpent. Un jour, alors que Muezza dormait contre lui, Mahomet aurait découpé un morceau de son vêtement pour ne pas la réveiller.