La performance d’une vie - Jean-Christophe Maisonneuve - E-Book

La performance d’une vie E-Book

Jean-Christophe Maisonneuve

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Beschreibung

Pour donner le meilleur de soi, réaliser ses rêves et se dépasser, il est nécessaire de reprendre le parcours de sa vie. Faire une relecture à 50 ans pour tenter de comprendre la source de ses choix, de ses orientations professionnelles et personnelles, à cela se résument les enjeux ayant conduit à l’écriture de La performance d’une vie. Avec le recul que seul peut offrir le temps, l’auteur y reprend individuellement les émotions générées par chacun des moments de sa vie pour les transformer en tableaux exposés dans une galerie de mots que vous êtes invités à apprécier.


À PROPOS DE L'AUTEUR


Préparateur mental et ancien rugbyman de haut niveau, le sport a toujours été un tremplin dans la vie de Jean-Christophe Maisonneuve. Dévalorisé dans ses études par un père brillant intellectuellement mais empreint par ses démons, il réussit néanmoins à dépasser ses limites et développer des compétences fortes qu’il emploie pour mener à bien ses différentes fonctions d’accompagnement vers la performance.

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Seitenzahl: 177

Veröffentlichungsjahr: 2023

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Jean-Christophe Maisonneuve

La performance d’une vie

© Lys Bleu Éditions – Jean-Christophe Maisonneuve

ISBN : 979-10-377-8718-7

Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L.122-5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L.122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L.335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.

Préface

Toujours croire que quelque chose de merveilleux va arriver…

Nous avons tous des parcours de vie aussi variés que peuvent l’être nos personnalités. L’enfant que nous étions s’est construit consciemment ou non avec les armes que l’on nous a données, les combats que nous avons menés. 

Le déclic qui fait tout basculer, c’est de croire et cultiver sa force mentale, celle qui sera toujours plus forte que n’importe quel biceps de culturiste.

Je crois sincèrement que les épreuves traversées nous font soit pousser les ailes de la combativité soit sombrer comme spectateur de sa propre vie.

Je n’aurais pas eu à cœur de prouver que j’en étais capable si je n’avais pas été humiliée, je n’aurais pas vécu mes succès comme des revanches si mon enfance m’avait construite sans fêlure.

Je crois sincèrement que ce socle commun m’a toujours unie instinctivement, inconsciemment, humainement à Jean-Christophe. Il est de ceux que vous reconnaissez dans le regard, de ces êtres qui continuent à se construire chaque jour pour devenir pleinement eux-mêmes sans jamais renier leur éthique. Plus encore, Jean-Christophe ne se bat pas seulement pour lui mais pour ses amours, ses enfants, ses amis et leurs emmerdes, pour briser le cercle vicieux de la transmission héréditaire, cette partie immergée de l’iceberg qu’il faut briser pour ne pas sombrer comme Jack dans Titanic. Ne garder que le meilleur de son héritage et façonner le sien. 

Le parcours est long, douloureux, jalonné d’échecs et d’erreurs de trajectoires… mais trouver enfin son chemin c’est trouver son graal.

On a beau être comparé physiquement à une « armoire à glace », être capable de porter seul une poêle en fonte de 115 kg, être lourd et imposer, le cœur peut être léger. Il ne faut se fier qu’au poids de l’âme. Son propre reflet est parfois flou, sa propre image tellement troublée par les réflexions qui l’ont façonnée.

La seule solution est de devenir son propre sculpteur, refaçonner l’image de soi, faire taire les acouphènes destructeurs et faire naître sa voix et sa voie.

Pour vous aider à la trouver, plongez dans ces pages, montez au filet, faites équipe avec Jean-Christophe, construisez un jeu et un mental de champion, faites face à l’adversaire au filet même si vous trouvez en face votre double à combattre. 

Merci Jean d’être mon ami et un ami précieux pour tous ceux qui vont te rencontrer.

Élodie Gossuin

(sportive et volleyeuse ratées

mais sauvée par son mental de sportive)

Introduction

Le grand « why »

Je suis dans le train pour Bordeaux. C’est le jour de Pâques. Après avoir pris un repas très simple avec ma femme et mes enfants, j’ai finalement décidé de partir fêter les 50 ans de mon copain Flo. Je sais que je vais y retrouver mes amis que je n’ai pas vus depuis longtemps.

Je ne pouvais pas louper cette occasion pour faire la fête, mais surtout pour le plaisir de nous retrouver. Flo, je le connais depuis mes 11 ans. Il a été témoin à de nombreuses reprises de ce que je partage dans ce livre. Ainsi que Nico et Guillaume que je vais retrouver, sans oublier ma chère Lulu dont j’ai partagé les secrets intimes depuis sa relation avec Thomas, mon meilleur ami, lorsque nous avions 15 ans.

J’ai intitulé ce livre « La performance d’une vie », ordinaire, aurais-je pu ajouter. Mais j’aurais également pu dire « la performance ordinaire » d’une vie (du latin « ordo » : rangé). En effet, ce que je vais essayer de vous démontrer c’est que le bonheur est dans toutes les petites choses de notre quotidien, quel qu’il soit. La performance est de transformer tout ce qui nous arrive de façon optimale pour nous aider à avancer. La vie est faite de haut et de bas, que nous subissons ou dont nous sommes l’auteur… comment ne pas se laisser embarquer par les émotions sombres ou des pensées dites limitantes…

Quelle que soit sa noirceur, ce livre est un hymne à la vie…

Voilà déjà bien longtemps que j’ai envie d’écrire mon histoire. Pas pour faire mousser mon ego, ni parce que j’estime avoir un passé tel qu’il mérite d’être connu de tous, non, ce n’est pas pour ces raisons.

Avec une enfance sous le signe de la dévalorisation et le manque d’estime, dont je parlerai dans les prochains chapitres, je me suis rendu compte que le fil rouge de ma vie est lié aux autres et à leur développement.

Le rugby, le volley sont des sports où l’importance du collectif est plus fort que tout. On ne peut rien réussir seul, et seul l’autre peut vous faire réussir.

Puis dans ma vie professionnelle, l’équipe sera encore présente. J’intègre Décathlon, où je deviens responsable de rayon et donc responsable de faire grandir mes coéquipiers… et mon chiffre d’affaires ! Puis je suis resté dans le retail, a manager des équipes, toujours dans le but de leur apprendre ce que je savais.

Une de mes plus belles aventures ayant été de participer à la création d’une nouvelle enseigne avec Celio Sport. En trois ans, j’ai retrouvé des personnes que j’avais recrutées en tant que vendeurs débutants pour les voir devenir responsables de magasin. Quelle fierté, pour eux et pour moi, de les avoir accompagnés. Aujourd’hui encore, je suis en relation avec la personne qui m’a recruté il y 24 ans… (petite dédicace pour toi Gilles !)

Et puis il y a eu cet événement déclencheur, qui m’a fait prendre conscience de l’importance de la vie, mais surtout de la façon dont on peut la vivre.

Cet événement, c’est la leucémie de mon fils lorsqu’il avait 15 ans. Cette période a bien sûr bouleversé ma vie et celle de la famille. J’ai complètement revu mes priorités. Seules les choses importantes comptaient : l’amour, l’espoir, et l’attention pour l’autre.

J’ai quitté mon job pour me rendre entièrement disponible pour lui, et pour ma femme et ma fille qui demandaient autant d’attention et d’amour. Pendant un an et demi, ma vie s’est orientée au service de mon prochain sans que cela me coûte. D’ailleurs en parallèle, et comme un symbole, le jour où le diagnostic est tombé, j’ai été élu président de l’association de parents d’élèves de l’établissement de mes enfants pour 3 ans. C’était mon double projet à moi, celui qui m’a permis de me décharger mentalement de la pression émotionnelle que je vivais. Je parlerai de cette notion de double projet dans les prochains chapitres.

Puis j’ai retrouvé un job, un poste de Directeur Retail dans lequel je pensais pouvoir faire passer cette bienveillance qui m’anime auprès de l’ensemble de mes équipes. Mais ce n’est pas si simple.

La pression du résultat toujours plus forte fait que l’on en oublie le réel bien être et développement de ses équipes. Je ne parle pas de toutes les formations qui donnent bonne conscience aux entreprises, je parle de cette réelle écoute, de ces moments privilégiés où le salarié est au cœur de la préoccupation. C’est l’un des points forts que j’ai découvert chez Apple Retail, lorsque j’étais Senior Manager, responsable d’une centaine de personnes dans les stores dans lesquels je suis passé avant de me consacrer pleinement à mon fils.

« Feed-back is a gift1 » comme on dit chez les Américains… et on vous le rappel ! Il y a deux temps bien distincts dans le management à la pomme : le premier, c’est l’observation sur le terrain, à scruter l’attitude, le comportement face au client, la technicité de l’approche, comment s’assurer d’avoir un effet « waou » à chaque interaction avec son client. Cela implique que l’on développe la personne dans son savoir-faire et savoir-être en toute bienveillance.

Le deuxième temps, ce sont les entretiens individuels, plus formels, qui donnent lieu à des comptes rendus pour les ressources humaines. Il s’agit d’évoquer l’ensemble des préoccupations du salarié, de ses souhaits d’évolution, de changement… ils peuvent être source de primes ou d’augmentation, de félicitation, de reconnaissance…

Au bout du compte, pas de pression sur le résultat (on ne parle pas de chiffre avec les équipes, à cette époque en tout cas). Le rêve dans le retail…

Mais ce n’était pas le cas partout. Et dans cette dernière expérience de Direction Retail pour un grand groupe, on était même loin du compte.

Au final, je ne pouvais pas concilier les deux : faire du résultat pour cette grosse entreprise et m’assurer que chaque personne se sente bien à sa place pour être performante.

J’ai quitté l’entreprise à 47 ans pour repartir de zéro.

J’ai repris les bancs de l’école, me suis formé au coaching et à la préparation mentale.

Voilà déjà trois ans que j’accompagne des sportifs, des entrepreneurs, avec les outils de la préparation mentale. Je les aide à maîtriser leurs émotions, à gérer leur stress, leurs peurs, leurs doutes pour être toujours plus performants.

Au cours de ces différentes expériences, je me suis rendu compte que, non seulement mon vécu ressemble dans les apprentissages émotionnels à ceux de mes clients, mais aussi que je peux plus aisément les aider à débloquer leurs croyances pour révéler leur plein potentiel.

En effet, même si mon histoire n’est pas celle d’un héros de guerre ou d’un grand champion olympique, j’aime à croire qu’en lisant ces lignes, certaines personnes se reconnaîtront dans quelques situations que je vous partage, en prenant soin à chaque fois de vous apporter une prise de hauteur, un regard différent que celui vécu à l’époque.

Je n’ai pas été un enfant violenté, mais un peu quand même,

Je n’ai pas été un fils maltraité, mais quand même un peu aussi,

Je n’ai pas été un jeune en difficulté scolaire, mais c’était tout juste à chaque fois,

Je n’ai pas été un adolescent dépressif et suicidaire, mais peu s’en est fallu…

Il y a des parcours de vie bien plus dramatique que le mien, je vous l’accorde, mais cette histoire, je vous la partage avec ses leçons, avec ce que je peux aujourd’hui en tirer comme apprentissages. Il m’aura fallu presque 40 ans pour réussir à exprimer cela de la sorte.

Et aujourd’hui encore, en écrivant ces lignes, j’en tire des leçons.

Toutes ces années à réfléchir, à passer chez le psy, l’hypnotiseur, à me plonger dans la spiritualité, à changer de job pour courir après des chimères…

Toutes ces années ne sont pas perdues, mais ont ralenti mon cheminement, mon évolution interne, toutes ces années qu’il m’a fallu pour découvrir mon potentiel, toutes ces années peut-être à faire souffrir mon entourage, mes proches, ma famille…

Je vous propose une relecture des éléments marquant de ma vie, décrivant les ingrédients traumatisants, mais apportant ma vision actuelle de préparateur mental orientée performance.

Je suis persuadé de pouvoir aider un grand nombre de personnes, vivant ou ayant vécu ces situations, je vais vous donner des clés de compréhension sur vous-même, sur vos émotions, sur vos capacités à réagir à telle ou telle situation. Je vais vous aider à comprendre vos croyances et ce qu’elles engendrent comme blocages et modifications de la réalité. Je vais vous aider à mieux vous connaître, à mieux réagir pour gérer votre stress, ou vos doutes.

Je vais vous livrer les « passages » les plus parlants, pour évoquer le plus simplement les situations qui ont généré les traumatismes. Pour ceux qui me connaissent, il y a certainement des passages manquants, des personnes absentes, mais encore une fois ce livre autobiographique n’a pas pour but de faire le récit exhaustif de ma vie, mais d’en tirer les grands chapitres qui m’ont permis d’être qui je suis aujourd’hui.

J’espère du fond du cœur pouvoir aider un maximum de personnes à révéler leur potentiel pour trouver leur alignement et le bonheur de connaître leur identité.

De plus, je souhaiterais également dédier ce livre à ma femme Angélique et à mes enfants, Baptiste et Mathilde. Par ce livre, je souhaite leur partager mon expérience, mais aussi leur permettre de mieux comprendre certains de mes schémas comportementaux et émotionnels. Qu’ils puissent un jour me pardonner les différents moments qui auraient pu leur rester et générer ce dont justement je parle dans ce livre… des traumatismes émotionnels ou des croyances limitantes.

Je vous livre tous ces moments avec la plus grande authenticité, car je sais qui je suis aujourd’hui. Je sais que la crédibilité ne se déguise pas, que pour aller chercher le meilleur chez les autres, il faut donner le meilleur de soi.

C’est donc avec la plus grande humilité et bienveillance que j’aimerais vous donner ce que j’ai de plus cher… les leçons de mon expérience.

Au commencement était le verbe…

Jean 1

Leçon N° 1

10 ans en forêt

Le poids d’une vie de croyances

Nous sommes le 28 janvier 1982, un vendredi soir d’un hiver froid et pluvieux.

Ce soir-là, mon père rentre de l’un de ses nombreux déplacements professionnels. Ce soir-là, à la maison, nous allons fêter ses 40 ans…

Tandis que nous nous préparons mes frères et sœurs à une soirée festive, je m’attelle à préparer mon cadeau avec soin. Je suis un enfant plutôt créatif, j’aime le dessin et l’idée de pouvoir devenir un jour architecte me plaît. J’ai donc réalisé un de ces dessins bourrés de perspectives avec un point d’horizon tout tracé, ceux que l’on est si fier de faire et refaire après avoir appris une nouvelle technique…

J’ai donc tracé le « couloir du temps » : un long couloir sans fin, avec des portes qui défilent tout au long de ce tunnel. Sur chaque porte, un numéro, comme dans les grands hôtels aux couloirs interminables. Le premier numéro visible est 38 côté droit, puis 39 à gauche, puis 40 à droite… et ainsi de suite. J’ai ajouté des traces de pas, entrant dans la pièce 38 puis sortant, se dirigeant vers la porte 39… et là encore les pas ressortent et vont en direction de la porte N° 40. Puis plus rien… Plus de pas, mais beaucoup d’autres portes…

Je vous avoue être encore assez fier de ce dessin, au design graphique en noir et blanc, avec jeu d’ombres et de lumières… C’est mon premier dessin qui symbolise un concept… celui du temps qui passe et qui ne s’arrête pas. Et des traces qu’on laisse derrière nous.

Il est plus de 20h quand mon père franchit la porte.

Il n’a pas le temps de poser sa veste et sa mallette de travail. Quatre jeunes enfants entre huit et treize ans lui sautent au cou pour lui souhaiter un bon anniversaire et lui exprimer toute leur affection, leur joie de le retrouver.

Du haut de son mètre quatre-vingt-dix, il esquisse un léger bisou d’amoureux à ma mère par-dessus nos têtes de mioches.

Pour être honnête, je n’ai que peu de souvenirs de ce repas, de la remise des cadeaux, posés dans son assiette et pitoyablement cachés sous sa serviette de table.

Comme d’habitude, nous sommes tous les six à table, et les emplacements de chacun sont toujours les mêmes, laissant l’espace suffisant à mon père pour regarder la télévision pendant les repas, afin de commenter, seul, les émissions politiques, informations et autres débats. Mon père trône à l’extrémité. À sa gauche ma mère, plus proche de la cuisine, et à sa droite ma grande sœur, mon frère et ma petite sœur. Quant à moi, je lui fais face, la télévision à ma droite, bruyante et dans son axe de vue.

De sa place, il peut observer tous mes faits et gestes pendant le repas : la façon dont je mâche, la vitesse à laquelle je mange, ce que je mets dans mon assiette… Tout est soumis à une inspection rigoureuse et sujet à remarques « tu manges trop vite, mâche avant d’avaler, tu as mis trop de sauce, trop de beurre, trop… trop… trop » Oui, tout est trop… insupportable. Rien ne va jamais bien… Même pendant les repas, surtout pendant les repas. Cette inquisition permanente de la façon de me nourrir a marqué mon esprit au fer rouge. Nous aurons l’occasion d’y revenir.

Le moment de découverte des cadeaux est bref, sans effusion de joie, ou de quelconque émotion positive. Peut-être une bise furtive si nous avons le droit de nous lever pour l’embrasser… car mon père reste toujours assis, il trône au bout de la table. Je le regarde du haut de mes presque dix ans, plein d’admiration. Il est Directeur du personnel chez L’Oréal, en charge de la filière Kerastase dont la cave était remplie de cartons de produits destinés aux futures ouvertures de salons de coiffure (supports publicitaires, équipements de séchage, colorations…).

Mon père est un mélange de Jacques Chirac et de Roger Moore, séducteur, fière allure, issu de l’enseignement jésuite, cultivé, à en perdre son auditoire par l’usage d’expressions uniquement compréhensibles par l’élite des intellectuels de gauche. Cette silhouette d’acteur américain séduisant le rend brillant à mes yeux d’enfant plein d’admiration.

Je suis donc assis en face de lui, rêvant d’un avenir aussi rempli que pouvait l’être sa vie, naïf et innocent de tout ce qui se cache derrière toutes ses apparences.

D’un seul coup, la question tombe « À quoi penses-tu ? » aussi brutale qu’inopinée. D’un seul coup, j’ai la parole, devant l’assemblée familiale, je dois sortir quelques mots, un son, une phrase… 

« Je m’imagine quand j’aurai 40 ans, comme toi »… Je n’avais aucune idée des conséquences que cette simple réponse allait engendrer… et de l’impact douloureux et destructeur sur ma vie.

« Tu veux vraiment savoir ce que c’est d’être indépendant ? » rétorque-t-il. Il se lève, demande à ma mère d’aller chercher un duvet et mon manteau. Elle, interloquée, s’exécute sous l’autorité dictatoriale des quelques mots prononcés et répétés avec insistance. Malgré ses contestations insignifiantes, elle me donne mon manteau et mon duvet, et je peux lire dans ses yeux l’inquiétude d’une mère qui voit sa progéniture partir dans les griffes du chef de clan pour vivre une ultime initiation. Dans l’incompréhension la plus totale, mon père me donne un billet de 200 francs, et ajoute « Tu veux être indépendant, tu vas l’être ».

Mais que se passe-t-il ? Qu’est-il en train d’arriver ? Aurais-je fait une bêtise, encore ? Qu’est-ce que j’ai dit ou fait pour gâcher cet anniversaire ? Je savais bien qu’en prenant la parole, j’allais encore provoquer une colère et des réprimandes… J’aurais mieux fait de me taire ! Encore une croyance qui me marquera longtemps. Je suis la cause de tous les maux.

Tel un rite initiatique tiré du film « Un homme nommé cheval » ou autre film du genre, me voilà monté en voiture, un 28 janvier, sous une pluie constante et des températures d’un hiver qui nous paraîtraient glaciales aujourd’hui. Le silence résonne, lourd, pesant. Pas un mot ne sort de sa bouche, ni de la mienne, trop effrayé à l’idée de laisser sortir le mot qui fâche et d’envenimer encore plus la situation, si c’est possible !

Montmorency est une ville de banlieue, très agréable par sa proximité avec la capitale et également par l’accès rapide aux grands domaines forestiers de sa vallée, alliant ainsi une vie paisible de campagne avec celle du citadin.

Ce soir-là, ma perception du temps est faussée, perturbée par la volonté d’en finir avec cette situation et par le souhait de rester à l’abri dans la voiture, ne sachant à quel destin cette phrase « Je m’imagine à 40 ans » allait me conduire.

Nous roulons, mes repères d’enfants sont perdus, je ne sais plus où nous sommes. Il fait noir, les routes sont très mal éclairées, les arbres dénudés sont comme les ombres mouvantes de mes cauchemars, avec de longues griffes effrayantes.

La voiture s’arrête.

Il me dit de descendre.

J’obéis.

Je ferme la porte.

La voiture repart et s’éloigne jusqu’à disparaître au détour d’un virage.

Il pleut, j’ai froid, j’ai dix ans et je ne sais pas où je suis.

Je ne comprends rien à ce qui est en train de m’arriver. Une multitude de pensées s’agitent, se bousculent et défilent dans ma tête. C’est trop bruyant, je décide de couper mon mental, de m’en remettre à mon intuition.

Je ne croise aucune voiture, personne… je suis bien en forêt, celle qui m’est encore inconnue. Cette route, je la connais aujourd’hui, c’est à 15 minutes de la maison. J’y passe régulièrement pendant mes footings. À chaque fois, il y a comme un léger pincement émotionnel, une petite voix qui cherche l’endroit précis du délit…

Comme un instinct de survie, je me mets en marche pour rentrer à la maison… oui, mais dans quelle direction ?

Peu importe, je marche, pendant d’interminables minutes. En chaussons, pyjama, manteau et duvet à la main, je marche…

Il pleut, j’ai froid, j’ai dix ans et je marche seul en forêt.