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"L'ANNEAU DU SORCIER a tous les ingrédients d'un succès immédiat : des intrigues, des contre-intrigues, du mystère, de vaillants chevaliers et des relations en plein épanouissement qui débordent de cœurs brisés, de tromperies et de trahisons. Ce roman vous distraira pendant des heures et satisfera toutes les tranches d'âge. A ajouter à la bibliothèque permanente de tous les lecteurs d'heroic fantasy." --Books and Movie Reviews, Roberto Mattos Le roman à succès n°1 ! Morgan Rice, l'auteur à succès n°1, nous offre le début d'une nouvelle série éblouissante de romans d'heroic fantasy. LA QUÊTE DES HÉROS (le tome 1 de L'ANNEAU DU SORCIER) tourne autour de l'histoire épique de passage à l'âge adulte d'un garçon spécial de 14 ans originaire d'un petit village situé à la périphérie du Royaume de l'Anneau. Thorgrin, cadet de quatre frères, le moins aimé de son père, détesté par ses frères, sent qu'il est différent des autres. Il rêve de devenir un grand guerrier, de rejoindre les hommes du Roi et de protéger l'Anneau contre les hordes de créatures qui habitent de l'autre côté du Canyon. Quand il atteint l'âge de quatorze ans et que son père lui interdit de passer la sélection d'entrée à la Légion du Roi, il rejette son interdiction et part en voyage tout seul, résolu à entrer à la Cour du Roi en faisant valoir ses mérites et à être pris au sérieux. Néanmoins, la Cour du Roi a ses propres drames familiaux , ses luttes de pouvoir, ses ambitions, sa jalousie, sa violence et ses trahisons. Le Roi MacGil doit choisir un héritier parmi ses enfants, et l'ancienne Épée de la Dynastie, la source de tout son pouvoir, n'a pas réagi et attend encore que l'élu se présente. Thorgrin arrive sans faire partie du clan et se bat pour se faire accepter et pour rejoindre la Légion du Roi. Thorgrin apprend peu à peu qu'il a de mystérieux pouvoirs qu'il ne comprend pas, qu'il a un don spécial et une destinée spéciale.
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Seitenzahl: 453
Veröffentlichungsjahr: 2015
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LA Q U Ê T E DES H É R O S
(TOME 1 DE L'ANNEAU DU SORCIER)
Morgan Rice
Morgan Rice
Morgan Rice est l'auteur à succès n 1 et l'auteur à succès chez USA Aujourd'hui de la série d'épopées
fantastiques L'ANNEAU DU SORCIER, qui contient dix-sept tomes, de la série à succès n 1 SOUVENIRS D'UNE VAMPIRE, qui contient onze tomes (pour l'instant), de la série à succès n 1 LA TRILOGIE DES RESCAPÉS, thriller post-apocalyptique qui contient deux tomes (pour l'instant) et de la nouvelle série d'épopées fantastiques ROIS ET SORCIERS. Les livres de Morgan sont disponibles en édition audio et papier, et des traductions sont disponibles en plus de 25 langues.
TRANSFORMATION(Livre #1 Mémoires d'un Vampire), ARÈNE UN (Livre #1 de la Trilogie des Rescapés) et LA QUÊTE DES HÉROS (Livre #1 de L’Anneau du Sorcier) sont tous disponibles pour téléchargement!
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Sélection d'Acclamations pour Morgan Rice
“Livre fantastique plein d'entrain qui intègre un soupçon de mystère et de complot dans son intrigue. Toute l'histoire de La Quête des Héros porte sur la recherche du courage et la définition d'un but de vie qui mène à la croissance, la maturité et l'excellence …. Pour ceux qui recherchent des aventures fantastiques substantielles, les protagonistes, les techniques et l'action fournissent une vigoureuse série de rencontres qui se focalisent efficacement sur l'évolution de Thor d'un enfant rêveur à un jeune adulte confronté à d'impossibles conditions de survie …. Et ce n'est que le début de ce qui promet d'être une série épique pour jeunes adultes.”
--Midwest Book Review (D. Donovan, Critique d'eBooks)
“L'ANNEAU DU SORCIER a tous les ingrédients d'un succès immédiat : des intrigues, des contre-intrigues, du mystère, de vaillants chevaliers et des relations en plein épanouissement qui débordent de cœurs brisés, de tromperies et de trahisons. Ce roman vous distraira pendant des heures et satisfera toutes les tranches d'âge. A ajouter à la bibliothèque permanente de tous les lecteurs d'heroic fantasy.”
--Books and Movie Reviews, Roberto Mattos
“La distrayante fantaisie épique de Rice [L'ANNEAU DU SORCIER] comprend des traits classiques du genre : un cadre puissant, fortement inspiré par l’Écosse ancienne et son histoire, et un bon sens des intrigues de cour.”
—Kirkus Reviews
“J'ai adoré la façon dont Morgan Rice a créé le personnage de Thor et le monde dans lequel il vivait. Le paysage et les créatures qui le hantaient étaient très bien décrits … J'ai apprécié [l'intrigue]. Elle était courte et charmante …. Il y avait juste la bonne quantité de personnages secondaires, ce qui fait que je ne m'y suis pas perdue. Il y avait des aventures et des moments déchirants, mais l'action décrite n'était pas exagérément grotesque. Le livre serait parfait pour un lecteur adolescent … Il contient les prémices de quelque chose de remarquable …”
--San Francisco Book Review
“Dans ce premier tome, bourré d'action, de la fantaisie épique de la série de l'Anneau du Sorcier (qui contient actuellement 14 tomes), Rice présente aux lecteurs Thorgrin "Thor" McLeod, 14 ans. Son rêve est de faire partie de la Légion d'Argent, les chevaliers d'élite qui servent le roi …. L'écriture de Rice est consistante et les prémisses intrigantes.”
--Publishers Weekly
“[LA QUÊTE DES HÉROS] est rapide et facile à lire. Les chapitres se terminent d'une façon qui vous poussent à lire la suite du livre et vous ôtent l'envie de le poser. Il y a des fautes de frappe dans le livre et des confusions sur certains noms mais cela ne détourne pas le lecteur de l'histoire dans son ensemble. La fin du livre m'a donné envie de me procurer immédiatement le tome suivant et c'est ce que j'ai fait. Les neuf tomes de la série de l'Anneau du Sorcier peuvent tous s'acheter dès maintenant sur la boutique Kindle et, actuellement, vous pouvez commencer par La Quête des Héros, qui est en téléchargement gratuit sur cette plate-forme ! Si vous recherchez quelque chose de rapide et d'amusant à lire pendant que vous êtes en vacances, ce livre fera parfaitement l'affaire.”
--FantasyOnline.filet
Livres par Morgan Rice
ROIS ET SORCIERS
L'ASCENSION DES DRAGONS (Tome n 1)
L'ANNEAU DU SORCIER
LA QUÊTE DES HEROS (Tome n 1)
LA MARCHE DES ROIS (Tome n 2)
LE DESTIN DES DRAGONS (Tome n 3)
UN CRI D'HONNEUR (Tome n 4)
UNE PROMESSE DE GLOIRE (Tome n 5)
UNE VALEUREUSE CHARGE (Tome n 6)
UN RITE D'EPEES (Tome n 7)
UNE CONCESSION D'ARMES (Tome n 8)
UN CIEL DE CHARMES (Tome n 9)
UNE MER DE BOUCLIERS (Tome n 10)
LE REGNE DE L'ACIER (Tome n 11)
UNE TERRE DE FEU (Tome n 12)
LE REGNE DES REINES (Tome n 13)
LE SERMENT DES FRERES (Tome n 14)
UN REVE DE MORTELS (Tome n 15)
LA JOUTE DES CHEVALIERS (Tome n 16)
LE CADEAU DE LA BATAILLE (Tome n 17)
LA TRILOGIE DES RESCAPESARENE UN: SLAVERSUNNERS (Tome n 1)
ARENE DEUX (Tome n 2)
SOUVENIRS D'UNE VAMPIRE
TRANSFORMATION (Tome n 1)
ADORATION (Tome n 2)
TRAHISON (Tome n 3)
PRÉDESTINATION (Tome n 4)
DÉSIR (Tome n 5)
FIANÇAILLES (Tome n 6)
SERMENT (Tome n 7)
RETROUVAILLES (Tome n 8)
RÉSURRECTION (Tome n 9)
ENVIE (Tome n 10)
DESTIN (Tome n 11)
Écoutez la série de L'ANNEAU DU SORCIER en format livre audio !
Copyright © 2012 par Morgan Rice
Tous droits réservés. Sauf dérogations autorisées parla Loi états-unienne sur le droit d'auteur de 1976, aucune partie de cette publication ne peut être reproduite, distribuée ou transmise sous quelque forme que ce soit ou par quelque moyen que ce soit, ou stockée dans une base de données ou système de récupération, sans l'autorisation préalable de l'auteur.
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Il s'agit d'une œuvre de fiction. Les noms, les personnages, les entreprises, les organisations, les lieux, les événements et les incidents sont le fruit de l'imagination de l'auteur ou sont utilisés dans un but fictionnel. Toute ressemblance avec des personnes réelles, vivantes ou mortes, n'est que pure coïncidence.
Image de couverture : Copyright RazoomGame, utilisée en vertu d'une licence accordée par Shutterstock.com.
TABLE DES MATIÈRES
CHAPITRE PREMIER
CHAPITRE DEUX
CHAPITRE TROIS
CHAPITRE QUATRE
CHAPITRE CINQ
CHAPITRE SIX
CHAPITRE SEPT
CHAPITRE HUIT
CHAPITRE NEUF
CHAPITRE DIX
CHAPITRE ONZE
CHAPITRE DOUZE
CHAPITRE TREIZE
CHAPITRE QUATORZE
CHAPITRE QUINZE
CHAPITRE SEIZE
CHAPITRE DIX-SEPT
CHAPITRE DIX-HUIT
CHAPITRE DIX-NEUF
CHAPITRE VINGT
CHAPITRE VINGT-ET-UN
CHAPITRE VINGT-DEUX
CHAPITRE VINGT-TROIS
CHAPITRE VINGT-QUATRE
CHAPITRE VINGT-CINQ
CHAPITRE VINGT-SIX
CHAPITRE VINGT-SEPT
“La tête qui porte une couronne ne repose jamais avec calme !”
—William ShakespeareHenry IV, Deuxième Partie
Le garçon se tenait sur le tertre le plus haut de la vallée du Royaume de l'Ouest de l'Anneau. Il regardait le premier soleil se lever vers le nord. Des collines vertes ondulantes s'étendaient jusqu'à perte de vue, plongeant et s'élevant comme des bosses de chameau en formant une série de vallées et de pics. Les rayons orange brûlé du premier soleil s'attardaient dans les brumes matinales en les faisant étinceler. Cela donnait à la lumière un aspect magique qui allait bien avec l'humeur du garçon. Il se réveillait rarement aussi tôt et s'aventurait rarement aussi loin de la maison (et ne montait jamais aussi haut) car il savait que cela mettrait son père en colère. Cependant, ce jour-là, il s'en moquait. Ce jour-là, il ne tint pas compte des millions de règles et de corvées qui l'opprimaient depuis sa naissance il y a quatorze ans, car ce jour était différent. C'était le jour d'arrivée de sa destinée.
Le garçon, Thorgrin du Royaume de l'Ouest de la Province du Sud du clan McLeod (que tous ceux qu'il aimait connaissaient simplement par le nom de Thor), le cadet de quatre garçons, celui que son père aimait le moins, était resté éveillé toute la nuit en anticipation de ce jour. Il s'était retourné dans tous les sens, les yeux troubles, en demandant fortement au premier soleil de se lever. Car il n'y avait qu'un seul jour comme celui-là tous les deux ou trois ans, et s'il le manquait, il serait coincé dans ce village, condamné à s'occuper du troupeau de son père pour le restant de ses jours. C'était une pensée qu'il ne pouvait supporter.
Le Jour de la Conscription. C'était le seul jour où l'Armée du Roi parcourait les provinces et triait sur le volet les hommes qui voulaient s'engager dans la Légion du Roi. Depuis sa naissance, Thor ne rêvait de rien d'autre. Pour lui, la vie ne signifiait qu'une seule chose : rejoindre l'Argent, la force de chevaliers d'élite du Roi, paré de la plus belle des armures et des meilleures armes que l'on puisse trouver où que ce soit dans les deux royaumes. Et il était impossible de rejoindre l'Argent sans d'abord rejoindre la Légion, la compagnie d'écuyers de quatorze à dix-neuf ans. Et si on n'était pas le fils d'un noble, ou d'un guerrier célèbre, il n'y avait aucun autre moyen de rejoindre la Légion.
Le Jour de la Conscription était la seule exception. C'était un événement rare qui se produisait tous les deux ou trois ans. Quand la Légion était à court de soldats, les hommes du Roi passaient le pays au peigne fin à la recherche de nouvelles recrues. Tout le monde savait que savait que peu de roturiers étaient choisis, et qu'encore moins d'entre eux seraient vraiment intégrés à la Légion.
Thor scruta attentivement l'horizon, à la recherche du moindre signe de mouvement. Il savait que l'Argent serait forcée de prendre cette route, la seule qui mène à son village, et il voulait être le premier à les repérer. Son troupeau de moutons protestait tout autour de lui, produisait un chœur de grognements agaçants et le poussait à les ramener en bas de la montagne, où l'herbe était meilleure. Il essaya de refouler le bruit et la puanteur. Il fallait qu'il se concentre.
La seule chose qui avait rendu tout ça supportable, toutes ces années passées à s'occuper des troupeaux, à être le domestique de son père, le domestique de ses frères aînés, celui dont on s'occupait le moins et qu'on accablait le plus, c'était l'idée qu'un jour il quitterait cet endroit. Un jour, quand l'Argent viendrait, il surprendrait tous ceux qui l'avaient sous-estimé et il serait sélectionné. En un seul mouvement rapide, il monterait sur leur chariot et dirait adieu à tout ça.
Il était évident que le père de Thor ne l'avait jamais considéré comme un candidat sérieux pour la Légion : en fait, il ne l'avait jamais considéré comme candidat pour quoi que ce soit. Au lieu de ça, son père donnait son amour et son attention aux trois frères aînés de Thor. L'aîné avait dix-neuf ans et les autres ne se suivaient que d'un an, ce qui faisait que Thor avait bien trois ans de moins que n'importe lequel d'eux. Peut-être était-ce parce qu'ils étaient d'un âge plus proche ou parce qu'ils se ressemblaient et ne ressemblaient pas à Thor que les trois frères aînés restaient ensemble et reconnaissaient à peine l'existence de Thor.
Ce qu'il y avait de pire, c'est qu'ils étaient plus grands, plus larges d'épaules et plus forts que lui, et Thor, qui savait qu'il n'était pas petit, se sentait quand même petit par rapport à eux, trouvait que ses jambes musclées étaient frêles par rapport à leurs fûts de chêne. Son père ne faisait rien pour rectifier cet état de fait et, en fait, il semblait l'apprécier, semblait trouver normal de laisser Thor s'occuper des moutons et aiguiser les armes pendant que ses frères avaient tout loisir de s'entraîner. On ne disait jamais mais on comprenait que Thor passerait sa vie en coulisse et serait forcé de regarder ses frères accomplir de grandes choses. S'il n'en tenait qu'à son père et à ses frères, sa destinée serait de rester ici, englouti par ce village, et de donner à sa famille le soutien qu'elle exigeait.
Pire encore, Thor sentait que, paradoxalement, ses frères avaient l'impression qu'il les menaçait, peut-être même qu'il les détestait. Thor le voyait dans chacun de leurs regards, chacun de leurs gestes. Il ne comprenait pas comment mais il éveillait chez eux quelque chose comme de la peur ou de la jalousie. Peut-être était-ce parce qu'il était différent d'eux, ne leur ressemblait pas, ne s'exprimait pas avec leurs manières; il ne s'habillait même pas comme eux, car son père réservait ce qu'il avait de mieux (les robes pourpres et écarlates, les armes dorées) à ses frères alors que Thor ne portait que les haillons les plus frustes.
Néanmoins, Thor tirait le meilleur parti de ce qu'il avait, se débrouillait pour que ses vêtements lui aillent, attachait sa robe à la taille avec une ceinture et, maintenant que l'été était de retour, il avait coupé ses manches pour que la brise caresse ses bras bronzés. Sa chemise était accompagnée d'un pantalon de grosse toile (le seul qu'il ait) et de bottes faites du cuir le plus ordinaire, lacées jusqu'aux tibias. Elles n'étaient pas du tout faites du même cuir que les chaussures de ses frères mais il s'en contentait. Ce qu'il portait, c'était l'uniforme typique du berger.
Cependant, il n'en avait pas vraiment le comportement typique. Thor était grand et mince et sa mâchoire fière, son menton noble, ses pommettes saillantes et ses yeux gris le faisaient ressembler à un guerrier égaré. Ses cheveux droits et marrons lui retombaient sur la tête en ondulant, juste en dessous de ses oreilles, et, derrière les boucles, ses yeux luisaient comme des vairons dans la lumière.
Les frères de Thor allaient avoir droit à une grasse matinée et à un repas copieux avant d'être envoyés à la Sélection avec les plus belles armes et la bénédiction de son père, alors que lui n'aurait même pas le droit de participer. Il avait une fois essayé de soulever la question avec son père. Ça s'était mal passé. Son père avait sommairement mis fin à la conversation et Thor n'avait pas réessayé. C'était injuste, voilà tout.
Thor était déterminé à rejeter le destin que son père lui avait prévu. Au premier signe de la caravane royale, il rentrerait au pas de course, confronterait son père et, que ça lui plaise ou non, il se présenterait aux hommes du Roi. Il se soumettrait à la sélection avec les autres. Son père ne pourrait pas l'en empêcher. L'idée lui noua l'estomac.
Le premier soleil monta plus haut et, quand le second soleil, vert menthe, commença à monter en ajoutant une couche de lumière au ciel violet, Thor les repéra.
Il se tint droit, les poils dressés, électrisé. Là-bas, à l'horizon, apparut la silhouette à peine visible d'une calèche dont les roues envoyaient de la poussière dans le ciel. Son cœur se mit à battre plus vite quand une autre calèche apparut, puis une autre. Même d'ici, les voitures dorées brillaient aux soleils, comme des poissons argentés qui bondissaient hors de l'eau.
Quand il compta douze calèches, il ne put plus attendre. Le cœur battant la chamade, oubliant son troupeau pour la première fois de sa vie, Thor se retourna et descendit maladroitement la colline, prêt à tout pour se faire connaître.
*
Thor prit à peine le temps de respirer quand il descendit les collines à toute vitesse, en traversant les arbres et en s'égratignant aux branches sans s'en préoccuper. Il atteint une clairière et vit son village qui s'étendait en dessous : c'était une tranquille ville de campagne remplie de maisons d'argile blanche à un étage et à toit de chaume. Il n'y avait que quelques dizaines de familles dans ce village. De la fumée sortait des cheminées, car la plupart des gens se levaient tôt pour préparer leur repas du matin. C'était un lieu idyllique, juste assez loin (une journée entière de cheval) de la Cour du Roi pour dissuader les passants. Rien qu'un village de paysans ordinaire au bord de l'Anneau, un simple engrenage dans la roue du Royaume de l'Ouest.
Thor parcourut la dernière partie du trajet à toute vitesse, se rua dans la place du village en faisant voler la poussière sur son passage. Les poulets et les chiens se sortirent précipitamment de sa route, et une vieille femme accroupie devant sa maison et devant un chaudron d'eau bouillante le siffla.
“Ralentis, mon garçon !” hurla-t-elle quand il passa à toute vitesse en envoyant de la poussière dans son feu.
Cependant, Thor n'avait aucune intention de ralentir, ni pour elle, ni pour qui que ce soit. Il tourna dans une rue transversale, puis dans une autre en suivant les méandres qu'il connaissait par cœur, jusqu'à ce qu'il arrive à la maison.
C'était une petite demeure quelconque comme toutes les autres, avec ses murs d'argile blanc et son toit de chaume angulaire. Comme dans la plupart de ces maisons, son unique pièce était séparée en deux : son père dormait d'un côté et ses trois frères de l'autre; à la différence de la plupart de ces maisons, celle-ci avait un petit poulailler à l'arrière et c'était là que Thor était forcé de dormir. Il avait commencé par dormir avec ses frères mais, avec le temps, ils avaient grandi, étaient devenus plus méchants et plus exclusifs et avaient ostensiblement refusé de lui faire de la place. Thor avait été vexé, mais maintenant, il appréciait d'avoir son propre espace et préférait ne pas avoir à subir leur présence. Pour lui, cela ne faisait que confirmer qu'il était exilé dans sa propre famille, ce qu'il avait longtemps su.
Thor courut vers la porte d'entrée et se rua à l'intérieur sans s'arrêter.
“Père !” cria-t-il en haletant. “L'Argent ! Ils arrivent !”
Son père et ses trois frères étaient courbés sur la table en train de déjeuner, déjà habillés dans leurs plus beaux vêtements. A ses mots, ils se levèrent d'un bond, passèrent à toute vitesse à côté de lui en lui heurtant les épaules, coururent hors de la maison et dans la rue.
Thor les suivit dehors et ils se mirent tous à scruter l'horizon.
“Je ne vois personne”, répondit Drake, l'aîné, de sa voix grave. Il avait les épaules les plus larges, les cheveux coupés courts comme ceux de ses frères, les yeux marron et de fines lèvres désapprobatrices. Il regarda Thor d'un air renfrogné, comme d'habitude.
“Moi non plus”, répondit Dross, qui n'avait qu'un an de moins que Drake et le défendait toujours.
“Ils arrivent !” répondit Thor en criant. “Je le jure !”
Son père se tourna vers lui et l'attrapa sévèrement par les épaules.
“Et comment pourrais-tu le savoir ?” demanda-t-il d'un ton autoritaire.
“Je les ai vus.”
“Comment ? D'où ?”
Thor hésita; son père le tenait. Il savait bien sûr que le seul endroit d'où Thor avait pu les repérer était le sommet de ce tertre. Maintenant, Thor ne savait plus comment réagir.
“Je … je suis monté au tertre —”
“Avec le troupeau ? Tu sais qu'il ne faut pas qu'il aille aussi loin.”
“Mais aujourd'hui, c'était différent. Il fallait que je voie.”
Son père lui lança un regard mauvais.
“Rentre tout de suite, va chercher les épées de tes frères et cire les fourreaux pour qu'ils aient l'air le plus beau possible avant que les hommes du Roi n'arrivent.”
Son père, qui en avait fini avec lui, se retourna vers ses frères, qui se tenaient tous dans la rue et regardaient au loin.
“Pensez-vous qu'ils nous sélectionneront ?” demanda Durs, le cadet des trois, qui avait bien trois ans de plus que Thor.
“Ils seraient idiots de ne pas le faire”, dit son père. “Ils manquent d'hommes cette année. Ils en ont sélectionné trop peu, ou alors, ils ne s'embêteraient pas à venir. Tenez-vous bien droits, tous les trois, levez le menton et dégagez la poitrine. Ne les regardez pas dans les yeux mais ne détournez pas non plus le regard. Soyez forts et confiants. Ne montrez aucune faiblesse. Si vous voulez être dans la Légion du Roi, vous devez vous comporter comme si vous y apparteniez déjà.”
“Oui, Père”, répondirent immédiatement ses trois garçons en se mettant en position.
Il se retourna et lança un regard furieux à Thor.
“Qu'est-ce que tu fais encore ici ?” demanda-t-il. “Rentre !”
Thor resta où il était, déchiré. Il ne voulait pas désobéir à son père, mais il fallait qu'il lui parle. Son cœur battait la chamade pendant qu'il réfléchissait. Il décida qu'il vaudrait mieux obéir, apporter les épées, puis confronter son père après. Une désobéissance immédiate serait contre-productive.
Thor se précipita dans la maison puis dans la cour de derrière, vers la remise aux armes. Il trouva les trois épées de ses frères, toutes les trois de beaux objets décorées des plus beaux pommeaux en argent qui soient, de précieux cadeaux pour lesquels son père avait travaillé durement pendant des années. Il les saisit toutes les trois, toujours aussi étonné par leur poids, et retraversa la maison au pas de course en les portant.
Il se précipita vers ses frères, leur tendit une épée à chacun, puis se tourna vers son père.
“Quoi, pas de cirage ?” dit Drake.
Son père se tourna vers Thor d'un air désapprobateur mais, avant qu'il ait pu dire quoi que ce soit, Thor prit la parole.
“Père, s'il vous plaît. Il faut que je vous parle !”
“Je t'ai dit de cirer —”
“S'il vous plaît, Père !”
Son père lui lança un regard furieux en hésitant. Il avait dû au visage de Thor qu'il était sérieux, car il finit par dire : “Alors ?”
“Je veux être candidat. Avec les autres. Pour la Légion.”
Le rire de ses frères retentit derrière lui et le fit rougir.
Son père, lui, ne rit pas; au contraire, il eut l'air encore plus renfrogné.
“Ah bon ?” demanda-t-il.
Thor répondit d'un vigoureux hochement de tête.
“J'ai quatorze ans. Je suis éligible.”
“La limite d'âge est à quatorze ans”, dit Drake avec dédain par dessus son épaule. “S'ils te prenaient, tu serais le plus jeune. Penses-tu qu'ils te choisiraient plutôt que quelqu'un comme moi ? J'ai cinq ans de plus que toi !”
“Tu es insolent”, dit Durs. “Tu l'as toujours été.”
Thor se tourna vers eux. “Ce n'est pas à vous que je demande”, dit-il.
Il se retourna vers son père, qui avait encore l'air renfrogné.
“Père, s'il vous plaît”, dit-il. “Laissez-moi une chance. C'est tout ce que je demande. Je sais que je suis jeune, mais je ferai mes preuves avec le temps.”
Son père secoua la tête.
“Tu n'es pas soldat, mon garçon. Tu n'es pas comme tes frères. Tu es berger. Ta vie est ici. Avec moi. Tu feras ton devoir et tu le feras bien. Il ne faut pas être trop ambitieux. Accepte la vie et apprends à l'aimer.”
Thor sentit son cœur se briser quand il vit sa vie s'effondrer devant ses yeux.
Non, pensa-t-il. C'est impossible.
“Mais, Père —”
“Silence !” hurla-t-il d'une voix si perçante qu'elle fendit l'air. “J'en ai assez dit. Ils arrivent. Sors de leur chemin et pense à te comporter correctement pendant qu'ils seront ici.”
Son père s'avança et poussa Thor de son chemin d'une seule main, comme s'il était un objet qu'il préférait ne pas voir. Sa paume musclée frappa Thor à la poitrine.
Un grand grondement se fit entendre. Les villageois sortirent tous de chez eux et s'alignèrent le long des rues. Un nuage de poussière grandissant annonça l'arrivée de la caravane et, quelques moments plus tard, une douzaine de calèches arriva en produisant comme un grand grondement de tonnerre.
Ils entrèrent en ville aussi brusquement qu'une armée et s'arrêtèrent près de la maison de Thor. Leurs chevaux caracolèrent sur place et renâclèrent. Il fallut longtemps pour que le nuage de poussière se dissipe et Thor essaya anxieusement de jeter un coup d'œil furtif à l'armure des soldats, à leur armement. Il n'avait jamais été aussi près de l'Argent et son cœur battait fort.
Le soldat perché sur l'étalon de devant mit pied à terre. C'en était un, un vrai, un authentique membre de l'Argent, vêtu d'une cotte de mailles brillante, un longue épée à la ceinture. Il semblait avoir dans les trente ans, être un homme mûr, barbe de plusieurs jours au visage, cicatrices à la joue et le nez crochu à cause d'une bataille. C'était le l'homme le plus robuste que Thor ait jamais vu, deux fois plus large que les autres, avec une expression qui disait que c'était lui le chef.
Le soldat descendit d'un bond sur la route de terre et ses éperons cliquetèrent quand il s'approcha de la ligne de garçons.
Partout dans le village, des dizaines de garçons se tenaient au garde à vous, espérant être choisis. Rejoindre l'Argent signifiait une vie d'honneur, de combat, de renommée, de gloire, ainsi que la possession de terres, d'un titre de noblesse et de richesses. Cela signifiait la meilleure fiancée, les plus belles terres, une vie de gloire. Cela signifiait l'honneur pour sa famille, et entrer dans la Légion était la première étape.
Thor scruta les grandes voitures dorées et comprit qu'elles ne pouvaient contenir qu'un nombre limité de recrues. C'était un grand royaume et ils avaient beaucoup de villes à visiter. Il eut la gorge serrée quand il comprit que ses chances étaient encore plus minces qu'il l'avait cru. Il faudrait qu'il batte tous ces autres garçons, parmi lesquels il y avait beaucoup de robustes combattants, ainsi que ses trois propres frères. Il eut un serrement de cœur.
Thor eut peine à respirer pendant que le soldat arpentait la rue en silence en inspectant les rangées de jeunes ambitieux. Il commença de l'autre côté de la rue, puis fit lentement demi-tour. Thor connaissait tous les autres garçons, bien sûr. Il aussi savait que certains d'entre eux avaient le désir secret de ne pas être choisis, même si leur famille voulait les envoyer à l'Argent. Ils avaient peur; ils feraient de mauvais soldats.
Thor bouillait d'indignation. Il sentait qu'il méritait autant d'être sélectionné que n'importe lequel d'entre eux. Ce n'était pas parce que ses frères étaient plus âgés, plus robustes et plus forts qu'il n'avait pas le droit de se présenter et d'être choisi. Il bouillait de haine pour son père, et il bondit presque quand le soldat s'approcha.
Le soldat s'arrêta, pour la première fois, devant ses frères. Il les toisa et sembla impressionné. Il tendit le bras, saisit un de leurs fourreaux et tira violemment dessus comme s'il voulait tester leur solidité.
Il fit un sourire.
“Tu n'as pas encore utilisé ton épée dans une bataille, n'est-ce pas ?” demanda-t-il à Drake.
Thor vit Drake nerveux pour la première fois de sa vie. Drake avala sa salive.
“Non, seigneur. Cependant, je l'ai utilisée de nombreuses fois pour m'entraîner, et j'espère —”
“Pour t'entraîner !”
Le soldat éclata de rire et se tourna vers les autres soldats, qui l'imitèrent en se moquant de Drake.
Drake rougit violemment. C'était la première fois que Thor voyait Drake dans l'embarras. D'habitude, c'était Drake qui mettait les autres dans l'embarras.
“Bon, dans ce cas, je dirai sûrement à nos ennemis de te craindre quand tu manies ton épée pour t'entraîner !”
La foule de soldats rit à nouveau.
Ensuite, le soldat se tourna vers les autres frères de Thor.
“Trois garçons de la même souche”, dit-il en grattant la barbe de trois jours qui lui poussait au menton. “Ça peut être utile. Vous avez tous une bonne taille. Cela dit, vous n'avez pas été mis à l'épreuve. Il vous faudra beaucoup d'entraînement si vous voulez faire l'affaire.”
Il s'interrompit.
“Je suppose qu'on peut vous trouver de la place.”
Il fit un signe de tête en direction du chariot de derrière.
“Montez et dépêchez-vous avant que je change d'avis.”
Les trois frères de Thor s'élancèrent vers la voiture, radieux. Thor remarqua son père était radieux, lui aussi.
Cependant, il se sentit découragé en les regardant partir.
Le soldat se retourna et se déplaça vers la maison suivante. Thor n'en pouvait plus.
“Sire !” cria Thor.
Son père se retourna et le regarda d'un air mauvais, mais Thor n'en avait plus rien à faire.
Le soldat s'arrêta, le dos tourné vers lui, et se retourna lentement.
Thor fit deux pas en avant, le cœur battant, et dégagea la poitrine autant qu'il le put.
“Vous ne m'avez pas passé en revue, sire”, dit-il.
Le soldat, étonné, toisa Thor comme s'il était un clown.
“Ah bon ?” demanda-t-il avant d'éclater de rire.
Ses hommes éclatèrent de rire, eux aussi, mais Thor s'en moquait. C'était le moment de faire ses preuves. C'était maintenant ou jamais.
“Je veux rejoindre la Légion !” dit Thor.
Le soldat avança vers Thor.
“Vraiment ?”
Il avait l'air amusé.
“Et as-tu même atteint ta quatorzième année ?”
“Oui, sire. Il y a deux semaines.”
“Il y a deux semaines !”
Le soldat hurla de rire et les hommes derrière eux en firent autant.
“Dans ce cas, nos ennemis trembleront sûrement en te voyant.”
Thor sentit qu'il bouillait d'indignation. Il fallait qu'il fasse quelque chose. Il ne pouvait pas laisser l'histoire se terminer comme ça. Le soldat se retourna pour s'éloigner mais Thor ne pouvait l'accepter.
Thor s'avança et hurla : “Sire ! Vous faites erreur !”
Un hoquet horrifié parcourut la foule quand le soldat s'arrêta et se retourna lentement une fois de plus.
Maintenant, il avait l'air renfrogné.
“Idiot de garçon !”, dit son père en saisissant Thor par l'épaule. “Rentre !”
“Pas question !” hurla Thor en se dégageant de la main de son père d'une secousse.
Le soldat avança vers Thor et son père recula.
“Connais-tu la peine que subissent ceux qui insultent l'Argent ?” dit le soldat d'un ton sec.
Le cœur de Thor battait la chamade, mais il savait qu'il ne pouvait pas céder.
“Veuillez lui pardonner, sire”, dit son père. “C'est un jeune enfant et —”
“Ce n'est pas à vous que je parle”, dit le soldat. D'un regard méprisant, il força le père de Thor à se détourner.
Le soldat se retourna vers Thor.
“Réponds-moi !” dit-il.
Thor avala sa salive, incapable de parler. Ce n'était pas comme ça qu'il avait prévu que ça se passerait.
“Insulter l'Argent, c'est insulter le Roi lui-même”, dit Thor humblement, récitant ce qu'il avait appris par cœur.
“Oui”, dit le soldat. “Ce qui signifie que je peux te donner quarante coups de fouet si je veux.”
“Je ne veux insulter personne, sire”, dit Thor. “Tout ce que je veux, c'est être sélectionné. S'il vous plaît. J'en ai toujours rêvé. S'il vous plaît. Laissez-moi vous rejoindre.”
Le soldat le regarda et, lentement, son expression s'adoucit. Au bout d'un long moment, il secoua la tête.
“Tu es jeune, mon garçon. Tu as le cœur fier. Cependant, tu n'es pas prêt. Reviens nous voir quand tu seras sevré.”
Sur ces mots, il se retourna et partit, énervé, en jetant à peine un coup d'œil aux autres garçons. Il enfourcha rapidement son cheval.
Thor, abattu, regarda la caravane s'élancer; les soldats partirent aussi vite qu'ils étaient arrivés.
La dernière chose que Thor vit, c'était ses frères qui, assis à l'arrière de la dernière voiture, le regardaient avec moquerie et désapprobation. On les emmenait sous ses yeux, loin d'ici, vers une vie meilleure.
En son for intérieur, Thor aurait voulu mourir.
Quand l'excitation qui l'entourait se dissipa, les villageois retournèrent furtivement chez eux.
“Tu te rends compte que tu t'es comporté comme un imbécile, idiot de garçon ?” dit le père de Thor d'un ton sec en le saisissant par les épaules. “Tu te rends compte que tu aurais pu gâcher les chances de tes frères ?”
Thor repoussa violemment les mains de son père et son père recula le bras et le gifla au visage.
Thor en ressentit la douleur et lança un regard furieux à son père. Pour la première fois, une partie de lui-même voulait rendre le coup à son père. Cependant, il se maîtrisa.
“Va chercher mes moutons et ramène-les. Maintenant ! Et quand tu reviendras, ne t'attends pas à ce que je t'offre un repas. Tu te coucheras à jeun ce soir et tu réfléchiras à ce que tu as fait.”
“Je ne reviendrai peut-être pas du tout !” hurla Thor en se retournant et en s'éloignant furieusement vers les collines.
“Thor !” hurla son père. Quelques-uns des villageois qui étaient restés dans la rue s'arrêtèrent et regardèrent.
Thor se mit à marcher plus vite, puis à courir. Il voulait s'éloigner de cet endroit autant que possible. Il remarqua à peine qu'il pleurait, que les larmes lui inondaient le visage alors que tous les rêves qu'il avait jamais eus se retrouvaient réduits en morceaux.
Thor erra pendant des heures dans les collines, furieux, jusqu'à ce qu'il finisse par choisir une colline et s'y asseye, les bras croisés sur les jambes, et regarde l'horizon. Il regarda les voitures disparaître, regarda le nuage de poussière qui s'attarda pendant des heures.
Il n'y aurait plus de visites. Maintenant, il était destiné à rester ici, dans ce village, pendant des années, à attendre une autre chance, s'ils revenaient un jour. Si son père le lui permettait. Maintenant, il n'y aurait plus que lui et son père, seuls à la maison, et son père passerait sûrement toute sa colère sur lui. Il continuerait à être le domestique de son père, les années passeraient et il finirait tout comme lui, coincé ici, à vivre une petite vie peu valorisante pendant que ses frères acquerraient gloire et renommée. Il sentait ses veines bouillir d'indignation devant tout ça. Ce n'était pas la vie qu'il était censé vivre. Il le savait.
Thor se creusa la cervelle pour trouver une solution, un moyen quelconque de changer la situation mais il n'y avait rien à faire. C'était le destin que la vie lui avait imposé.
Il resta assis plusieurs heures puis se leva tristement et commença à remonter sur les collines qu'il connaissait, de plus en plus haut. Il se rapprocha inévitablement du troupeau, du tertre élevé. Alors qu'il montait la pente, le premier soleil se coucha dans le ciel et le second atteint son apogée en diffusant une teinte verdâtre. Thor avança en prenant son temps. Il retira sa fronde de sa taille sans réfléchir. La poignée en cuir était usée par des années d'utilisation. Il mit la main dans le sac attaché à sa hanche et palpa sa collection de cailloux, tous plus lisses les uns que les autres, choisis dans les meilleurs ruisseaux. Parfois, il tirait sur des oiseaux; d'autres fois, sur des rongeurs. C'était une habitude qui, au cours des années, était devenue une seconde nature. Au début, il avait raté toutes ses cibles, puis, une fois, il avait touché une cible mouvante. Depuis, il avait appris à bien viser. Maintenant, lancer des cailloux faisait partie de son être et ça l'aidait à libérer un peu de sa colère. Ses frères étaient peut-être capables de transpercer une bûche avec une épée, mais ils n'auraient jamais su toucher un oiseau en vol avec un caillou.
Sans réfléchir, Thor plaça un caillou dans la fronde, se pencha en arrière et le lança de toutes ses forces, en faisant comme s'il le lançait sur son père. Il toucha une branche sur un arbre éloigné, et elle tomba nettement. Quand il avait découvert qu'il pouvait vraiment tuer des animaux en mouvement, il avait arrêté de les viser, effrayé par son propre pouvoir et ne voulant faire de mal à aucune créature; maintenant, ses cibles étaient des branches. A moins que, bien sûr, un renard ne s'en prenne à son troupeau. Avec le temps, ils avaient appris à prendre leurs distances et, par conséquent, les moutons de Thor étaient ceux du village qui couraient le moins de risques.
Thor pensait à ses frères, à l'endroit où ils étaient à l'instant même, et il était furieux. Après un jour de cheval, ils arriveraient à la Cour du Roi. Il se l'imaginait très bien. Il les voyait arriver au son d'une grande fanfare pendant que des gens habillés de leurs plus beaux vêtements les saluaient. Des guerriers les saluaient. Des membres de l'Argent. On les accueillerait , on leur donnerait un endroit où vivre dans la caserne de la Légion, un endroit sur les terrains du Roi où ils s'entraîneraient en utilisant les plus belles armes. Chacun d'entre eux serait nommé écuyer d'un chevalier célèbre. Un jour, ils deviendraient chevaliers eux-mêmes, auraient leur propre cheval, leur propre blason et leur propre écuyer. Ils prendraient part à tous les festivals et dîneraient à la table du Roi. C'était une vie d'enchantement et elle lui avait échappé.
Thor se sentit physiquement malade, essaya de penser à autre chose mais n'y arriva pas. Il y avait une partie de lui, une partie profonde, qui hurlait contre lui. Elle lui disait de ne pas laisser tomber, qu'il avait une destinée plus grande que celle-ci. Il ne savait pas ce qu'elle était mais il savait qu'elle n'aurait pas lieu ici. Il sentait qu'il était différent. Peut-être même spécial. Il sentait que personne ne le comprenait et que tout le monde le sous-estimait.
Thor atteint le tertre le plus élevé et repéra son troupeau. Bien dressés, ses moutons étaient tous encore ensemble et broutaient avec contentement toute l'herbe qui était à leur portée. Il les compta en cherchant les marques rouges qu'il leur avait peintes sur le dos. Quand il eut fini, il se figea. Un mouton manquait à l'appel.
Il recompta plusieurs fois. Il n'arrivait pas à y croire : il en manquait un.
Thor n'avait jamais perdu de moutons et son père ne le lui pardonnerait jamais. Pire encore, il détestait l'idée qu'un de ses moutons se soit perdu, seul et vulnérable dans la nature sauvage. Il détestait qu'une créature innocente doive souffrir.
Thor courut vers le sommet du tertre et scruta l'horizon. Il le repéra au loin, à plusieurs collines de distance : c'était un mouton solitaire avec une marque rouge sur le dos. C'était le mouton le plus sauvage du troupeau. Son cœur s'arrêta de battre quand il se rendit compte que le mouton ne s'était pas contenté de s'enfuir mais qu'il avait choisi, étonnamment, d'aller vers l'ouest, vers Darkwood.
Thor eut la gorge serrée. Darkwood était interdit, pas seulement aux moutons mais aussi aux êtres humains. C'était au-delà de la limite du village et, depuis qu'il savait marcher, Thor savait qu'il ne fallait pas s'aventurer là-bas. Il ne l'avait jamais fait. Selon la légende, y aller, c'était mourir à coup sûr dans ces bois inconnus et remplis d'animaux cruels.
Thor leva les yeux vers le ciel qui s'assombrissait en se demandant quoi faire. Il ne pouvait pas abandonner son mouton. Il se dit que, s'il se dépêchait, il pourrait récupérer le mouton à temps.
Après un dernier coup d'œil en arrière, il se retourna et se mit à courir vers l'ouest, vers Darkwood, en dépit des épais nuages qui se regroupaient au-dessus. Il eut un serrement de cœur, mais ses jambes semblaient le porter d'elles-mêmes. Il sentit qu'il ne pourrait pas reculer, même s'il le voulait.
C'était comme se précipiter dans un cauchemar.
*
Thor dévala la série de collines sans s'arrêter et entra sous la voûte épaisse de Darkwood. Les pistes se terminaient là où le bois commençait et il se précipita en territoire inconnu. Les feuilles d'été craquaient sous ses pas.
Dès qu'il entra dans le bois, il fut englouti par l'obscurité, car la lumière était bloquée par les pins imposants qui se dressaient au-dessus. Il faisait aussi plus froid, ici, et quand il passa l'orée du bois, il frissonna. Ce n'était pas seulement l'obscurité ou le froid, c'était quelque chose d'autre. Quelque chose qu'il ne pouvait pas nommer. C'était la sensation d'être … observé.
Thor leva les yeux vers les vieilles branches qui, noueuses et plus épaisses que lui, se balançaient et craquaient dans la brise. Il avait à peine fait cinquante pas dans le bois quand il commença à entendre d'étranges bruits d'animaux. Il se retourna et aperçut tout juste l'ouverture par laquelle il était entré; il avait déjà l'impression qu'il n'y avait aucune sortie. Il hésita.
Darkwood avait toujours été à la périphérie de la ville et à la périphérie de la conscience de Thor, comme une chose profonde et mystérieuse. Aucun des bergers qui avaient un jour perdu un mouton dans le bois n'avait jamais osé s'y aventurer pour le récupérer. Même pas son père. Les histoires qu'on racontait sur cet endroit étaient trop sombres, trop récurrentes.
Cependant, il y avait quelque chose de différent dans la journée d'aujourd'hui qui faisait que Thor n'en avait plus rien à faire, qui lui faisait oublier toute prudence. Une partie de lui voulait repousser les limites, s’éloigner de la maison autant que possible et permettre à la vie de l'emmener où elle le voudrait.
Il se risqua plus loin, puis s'arrêta sans savoir où aller. Il vit des branches pliées qui indiquaient où son mouton avait dû aller et tourna dans cette direction. Au bout d'un moment, il changea encore de direction.
Moins d'une heure plus tard, il était désespérément perdu. Il essaya de se souvenir de la direction d'où il venait mais il n'en était plus sûr. Une sensation de malaise lui vrilla l'estomac mais il se dit que le seul moyen de sortir du bois était de poursuivre sa route et il le fit.
Au loin, Thor repéra un rai de lumière et se dirigea vers lui. Il se retrouva devant une petite clairière, s'arrêta au bord, figé sur place : il ne pouvait croire ce qu'il voyait devant lui.
Debout là, tournant le dos à Thor, habillé d'une longue robe de satin bleu, se trouvait un homme. Non, pas un homme; Thor le sentait d'ici. C'était quelque chose d'autre. Un Druide, peut-être. Il se tenait grand et droit, la tête recouverte d'un capuchon, parfaitement immobile, comme s'il n'avait aucun souci au monde.
Thor ne savait pas quoi faire. Il avait entendu parler des Druides mais n'en avait jamais rencontré. D'après les marques qui se trouvaient sur sa robe et les ornements raffinés en or, ce n'était pas un Druide ordinaire : ces marques étaient celles d'un roi. Elles venaient de la Cour du Roi. Thor n'y comprenait rien. Qu'est-ce qu'un Druide royal faisait ici ?
Après un moment qui sembla durer pour l'éternité, le Druide se retourna lentement vers lui et, quand il le fit, Thor reconnut son visage. Il en eut le souffle coupé. C'était le visage d'un des hommes les plus célèbres du royaume : le Druide personnel du Roi. Argon, conseiller des rois du Royaume de l'Ouest depuis des siècles. Ce qu'il faisait ici, loin de la cour royale, au centre de de Darkwood, était un mystère. Thor se demanda s'il était en train d'imaginer tout ça.
“Tes yeux ne te trompent pas”, dit Argon en fixant Thor du regard.
Sa voix était grave, ancienne, comme si c'était la voix des arbres eux-mêmes. De grands yeux translucides semblaient percer Thor comme pour le cerner. Thor sentit une énergie intense se dégager du Druide, comme s'il se tenait en face du soleil.
Thor mit immédiatement un genou à terre et pencha la tête.
“Mon seigneur” dit-il. “Je suis désolé de vous avoir dérangé.”
Manquer de respect envers un conseiller du Roi pouvait mener en prison ou à la peine de mort. Ce fait avait été enraciné en Thor depuis sa naissance.
“Lève-toi, mon enfant”, dit Argon. “Si j'avais voulu que tu t'agenouilles, je te l'aurais dit.”
Thor se redressa lentement et le regarda. Argon se rapprocha de plusieurs pas. Il s'arrêta et regarda Thor fixement, jusqu'à ce que Thor commence à se sentir mal à l'aise.
“Tu as les yeux de ta mère”, dit Argon.
Thor fut interloqué. Il n'avait jamais rencontré sa mère et n'avait jamais rencontré personne qui la connaissait, mis à part son père. On lui avait dit qu'elle était morte en couches, accident pour lequel Thor se sentait toujours coupable. Il avait toujours soupçonné que c'était la raison pour laquelle sa famille le détestait.
“Je crois que vous me confondez avec quelqu'un d'autre”, dit Thor. “Je n'ai pas de mère.”
“Ah bon ?” demanda Argon avec un sourire. “Es-tu né d'un homme seul ?”
“Je voulais dire, sire, que ma mère est morte en couches. Je crois que vous me prenez pour quelqu'un d'autre.”
“Tu es Thorgrin, du clan McLeod. Le plus jeune des quatre frères. Celui qui n'a pas été sélectionné.”
Thor ouvrit grand les yeux. Il ne savait pas comment réagir. Que quelqu'un du rang d'Argon sache qui il était … c'était plus qu'il ne pouvait comprendre. Il n'avait même jamais imaginé qu'on le connaissait en dehors de son village.
“Comment … le savez-vous ?”
Argon lui sourit mais ne répondit pas.
Thor fut soudain rempli de curiosité.
“Comment …” ajouta Thor en cherchant ses mots, “… comment connaissez-vous ma mère ? L'avez-vous rencontrée ? Qui était-elle ?”
Argon se retourna et s'éloigna.
“Ce sont des questions pour une autre fois”, dit-il.
Thor le regarda partir, perplexe. C'était une rencontre si étourdissante et mystérieuse et tout se passait si vite. Il décida qu'il ne pouvait pas laisser partir Argon; il courut pour le rattraper.
“Que faites-vous ici ?” demanda Thor en se dépêchant de le rattraper. A l'aide de son ancien bâton d'ivoire, Argon marchait à une vitesse surprenante. “Vous n'étiez pas en train de m'attendre, n'est-ce pas ?”
“Qui d'autre ?” demanda Argon.
Thor se dépêcha de le rattraper, le suivit dans le bois en laissant la clairière derrière eux.
“Mais pourquoi moi ? Comment saviez-vous que je serais ici ? Que voulez-vous ?”
“Ça fait beaucoup de questions”, dit Argon. “Tu occupes tout l'espace. Tu ferais mieux d'écouter.”
Thor le suivit alors qu'ils s'enfonçaient dans le bois touffu, faisant tout son possible pour ne rien dire.
“Tu es venu chercher ton mouton perdu”, déclara Argon. “C'est un noble effort mais tu perds ton temps. La brebis ne survivra pas.”
Thor ouvrit grand les yeux.
“Comment le savez-vous ?”
“Je connais des mondes que tu ne connaîtras jamais, mon garçon. Du moins, pas encore.”
Thor se posa des questions en s'efforçant de le rattraper.
“Cela dit, tu n'écoutes pas. Telle est ta nature. Entêtée. Comme ta mère. Tu continueras à chercher ta brebis, car tu es résolu à la sauver.”
Thor rougit quand Argon lut dans ses pensées.
“Tu es un garçon bagarreur”, ajouta-t-il. “Tu as du caractère. Tu es trop fier. Ce sont des traits qui ont leur avantage mais, un jour, ils pourraient provoquer ta chute.”
Argon commença à escalader une arête moussue et Thor le suivit.
“Tu veux rejoindre la Légion du Roi”, dit Argon.
“Oui !” répondit Thor avec excitation. “Ai-je une chance ? Pouvez-vous faire que ça se produise ?”
Argon rit en produisant un son grave et caverneux qui fit frissonner Thor.
“Je peux tout faire arriver, et rien. Ta destinée était déjà écrite. Cependant, c'est à toi de la choisir.”
Thor ne comprenait pas.
Ils atteignirent le sommet de l'arête, où Argon s'arrêta et se tourna vers Thor. Thor se tenait à seulement un mètre ou deux et l'énergie d'Argon le traversait en le brûlant.
“Ta destinée est importante” dit-il. “Ne l'abandonne pas.”
Thor écarquilla les yeux. Sa destinée ? Importante ? Il se sentit gonfler de fierté.
“Je ne comprends pas. Vous parlez par énigmes. S'il vous plaît, dites-m'en plus.”
Argon disparut.
Thor en resta bouche bée. Il regarda partout, écouta, se demanda où le druide était passé. Avait-il imaginé tout ça ? Était-ce une illusion ?
Thor se retourna et examina le bois; depuis ce point d'observation, en hauteur, depuis l'arête, il voyait plus loin qu'avant. Alors qu'il regardait, il repéra du mouvement au loin. Il entendit un bruit et se sentit sûr que c'était son mouton.
Il descendit maladroitement l'arête moussue et se précipita dans la direction du son en retraversant le bois. En marchant, il n'arrivait pas à oublier sa rencontre avec Argon. Il avait peine à comprendre ce qui s'était passé. Qu'est-ce que le Druide du Roi faisait ici, précisément à cet endroit ? Il l'avait attendu, mais pourquoi ? Et qu'avait-il voulu dire sur sa destinée ?
Plus Thor essayait de dénouer ce mystère, moins il le comprenait. Argon l'avait averti de ne pas continuer tout en lui apportant la tentation de le faire. Maintenant, alors qu'il marchait, Thor sentait une appréhension croissante, comme si quelque chose de capital était sur le point de se produire.
Il tourna un coin et s'arrêta sur place quand il vit ce qu'il y avait devant lui. Tous ses pires cauchemars venaient de se réaliser en un seul moment. Ses cheveux se dressèrent sur sa tête et il se rendit compte qu'il avait commis une erreur grave en s'enfonçant autant dans Darkwood.
En face de lui, à tout juste trente pas, se trouvait un Sybold. Massif, musclé, se tenant sur ses quatre pattes, presque de la taille d'un cheval, c'était l'animal le plus craint de Darkwood, peut-être même du royaume. Thor n'en avait jamais vu mais avait entendu les légendes. Il ressemblait à un lion mais était plus gros, plus large d'épaules. Sa peau était écarlate foncé et ses yeux jaune luisant. Selon la légende, sa couleur cramoisie venait du sang d'enfants innocents.
De toute sa vie, Thor avait rarement entendu dire que cet animal avait été vu, et on supposait que même ces récits étaient douteux. Peut-être était-ce parce que, en fait, personne n'avait jamais survécu à une telle rencontre. Certains pensaient que le Sybold était le Dieu des Bois, et aussi un présage. Thor ignorait en quoi consistait ce présage.
Il fit prudemment un pas en arrière.
Le Sybold, son immense mâchoire à moitié ouverte, les crocs dégoulinants de salive, le fixa de ses yeux jaunes. Dans sa gueule se trouvait la brebis manquante de Thor. Elle criait, pendue la tête en bas, la moitié du corps percée par les crocs du monstre. Elle était presque morte. Le Sybold semblait aimer la tuer en prenant son temps; il semblait se délecter de la torturer.
Thor ne pouvait supporter les cris. La brebis remuait, sans défense, et il se sentait responsable de son agonie.
Le premier réflexe de Thor fut de se retourner et de s'enfuir mais il savait déjà que ce serait en pure perte. Cette bête pouvait courir plus vite que n'importe qui. S'enfuir ne ferait que l'enhardir, et il ne pouvait pas laisser son mouton mourir comme ça.
Bien que pétrifié par la peur, il savait qu'il fallait qu'il fasse quelque chose.
Ses réflexes prirent le dessus. Il mit lentement la main dans sa pochette, en sortit un caillou et le plaça dans sa fronde. D'une main tremblante, il la fit tournoyer, fit un pas en avant et tira.
Le caillou traversa l'air et frappa sa cible. Ce tir parfait frappa la brebis à l'œil et lui traversa le cerveau.
La brebis se décontracta. Morte. Thor avait épargné sa souffrance à l'animal.
Le Sybold le regarda d'un air mauvais, furieux que Thor ait tué son jouet. Il ouvrit lentement son immense mâchoire et laissa tomber la brebis, qui atterrit sur le sol de la forêt en produisant un bruit sourd. Ensuite, le Sybold fixa Thor des yeux.
Il poussa un grognement, un son grave et mauvais qui venait de son ventre.
Alors qu'il se rapprochait de lui, Thor, dont le cœur battait la chamade, plaça un autre caillou dans sa fronde, tendit le bras en arrière et se prépara à tirer une fois de plus.
Le Sybold se mit à courir en se déplaçant plus vite que tout ce que Thor ait jamais vu dans sa vie. Thor fit un pas en avant et jeta le caillou en priant pour qu'il atteigne sa cible, sachant qu'il n'aurait pas le temps d'en envoyer un autre avant que la bête ne l'atteigne.
Le caillou frappa la bête à l’œil droit et le lui retira de l'orbite. C'était un superbe lancer, un lancer qui aurait mis un animal plus faible à genoux.
Cependant, cet animal était fort. La bête était impossible à arrêter. Elle cria contre la blessure mais ne ralentit même jamais. Même borgne, même avec le caillou logé dans le cerveau, elle continua à charger Thor sans réfléchir. Thor ne pouvait rien y faire.
Un moment plus tard, la bête était sur lui. Elle tendit son immense griffe et lui frappa l'épaule.
Thor hurla. On aurait dit que trois couteaux lui tailladaient la chair, d'où le sang chaud s'écoula aussitôt.
La bête le plaqua au sol, à quatre pattes. Elle pesait énormément, autant qu'un éléphant qui se serait tenu sur sa poitrine. Thor sentit qu'elle lui écrasait la cage thoracique.
La bête rejeta la tête en arrière, ouvrit grand la mâchoire pour montrer des crocs et commença à les baisser pour mordre Thor à la gorge.
Quand elle le fit, Thor leva le bras et lui saisit le cou; c'était comme s'il avait saisi un muscle massif. Thor tenait à peine. Ses bras commencèrent à trembler quand les crocs descendirent plus bas. Il sentit la chaude haleine de la bête lui couvrir le visage, sentit la salive lui goutter sur le cou. Un grondement venait du cœur de la poitrine de l'animal et vrillait les oreilles de Thor. Il savait qu'il allait mourir.
Thor ferma les yeux.
S'il vous plaît, mon Dieu. Donnez-moi la force. Permettez-moi de vaincre cette créature. S'il vous plaît. Je vous en supplie. Je ferai tout ce que vous voudrez. Je vous devrai beaucoup.
Soudain, quelque chose arriva. Thor sentit une énorme chaleur lui monter dans le corps, lui parcourir les veines, comme un champ de force qui le traversait à toute vitesse. Il ouvrit les yeux et vit quelque chose qui l'étonna : ses paumes émettaient une lumière jaune et, quand il poussa les mains dans la gorge de la bête, il fut surpris de constater qu'il arrivait à égaler sa force et à la tenir à distance.
Thor continua à pousser jusqu'au moment où il repoussa vraiment la bête. Sa force s'accrut et il sentit l'énergie le traverser comme un boulet de canon. Un instant plus tard, la bête s'envola en arrière. Thor l'envoya à plus de trois mètres. Elle atterrit sur le dos.
