La tête sous l’oreiller - JL Le Rebelle - E-Book

La tête sous l’oreiller E-Book

JL Le Rebelle

0,0

Beschreibung

La tête sous l’oreiller retrace des péripéties de la vie du personnage principal, « Il » ou « Lui » selon les cas, qui se déroulent sur moins d’une semaine. Cette période se caractérise par des sorties nocturnes arrosées et prolongées, des discussions drôles, voire absurdes, des essais répétés de vaincre certains doutes et troubles existentiels à travers la « fête » et des éléments métaphysiques qui constituent des énigmes, tant pour les autres personnages centraux que pour ses lecteurs.
Cet extrait de vie tourne notamment autour de l’épicurisme, l’humour parfois pesant, ou absurde, et la poésie, omniprésente, même si elle n’est pas toujours très « académique ».

À PROPOS DE L'AUTEUR

Enseignant-chercheur, linguiste et traducteur depuis bientôt 30 ans, JL Le Rebelle a publié plusieurs ouvrages et articles dans le domaine de la lexicographie bilingue en particulier. Il n’a jamais cessé d’écrire en français, surtout, et en espagnol. Il propose un style d’écriture peu conventionnel dont il fait sa marque de fabrique.

Sie lesen das E-Book in den Legimi-Apps auf:

Android
iOS
von Legimi
zertifizierten E-Readern

Seitenzahl: 287

Das E-Book (TTS) können Sie hören im Abo „Legimi Premium” in Legimi-Apps auf:

Android
iOS
Bewertungen
0,0
0
0
0
0
0
Mehr Informationen
Mehr Informationen
Legimi prüft nicht, ob Rezensionen von Nutzern stammen, die den betreffenden Titel tatsächlich gekauft oder gelesen/gehört haben. Wir entfernen aber gefälschte Rezensionen.



JL Le Rebelle

La tête sous l’oreiller

Roman

© Lys Bleu Éditions – JL Le Rebelle

ISBN : 979-10-377-1939-3

Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L.122-5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L.122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L.335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.

À mes parents qui ont su nous élever si intelligemment

et si gentiment.

À ma jeunesse qui a marqué de façon in-lé-dé-bi-le

mon imagination.

À mes enfants : Leni (19 ans), Nina (16 ans)

et Nali (8 ans ½), les plus beaux du monde.

Loin des modes et de tous ces clichés éphémères par nature, il reste un terrain de jeu extraordinaire : l’écriture.

Avant-propos

Ce premier roman, intitulé « La tête sous l’oreiller », est un récit à la fois personnel et fantastique. Cela pourra vous paraître étrange, mais ce « curieux mélange » s’est finalement imposé à moi comme inévitable, alors qu’au départ j’envisageais simplement d’écrire une sorte d’autobiographie partielle et humoristique, voire délirante.

À partir de bon nombre d’aventures de jeunesse qu’il me démangeait de faire (re)vivre pour mieux en partager la saveur (du moins à mon jeune goût qui s’amusait de presque tout), je me piquai le jour de Noël 1992, et ce, jusqu’au tout début d’avril 1993, d’écrire un roman que j’avais innocemment1, intitulé « Un roman inachevé ». On peut dire que j’avais bien avancé, mais bien vite mes études et mes sorties nocturnes me firent « oublier » ce bon petit début, même si j’y repensais souvent (et à regret). Ce n’est que fin 2019 (27 ans plus tard, si si…) que j’ai repris avec appréhension, puis avec un plaisir fou ce projet déjanté, pour en arriver à « boucler le tout » en moins deux mois, car je ne pouvais (ou ne savais) plus m’arrêter d’écrire et de revisiter tout cet univers… bizarre.

Chapitre 1

Le réveil

Il était une fois Tous les matins, c’est-à-dire plutôt en début d’après-midi, quand tout allait bien (voilà un bon début : gai, original, pour ne pas dire captivant), il faisait joujou avec la petite touche noire placée en haut à droite de son réveil électrique, à portée de main.

Ma chère petite Snooze

Elle s’appelait Snooze, la petite touche noire placée en haut à droite de son réveil électrique. Snooze, sa compagne, sa complice, dont le seul nom, à la prononciation si douce, si douce, suffisait à le replonger dans sa léthargie active. De « snooze », en anglais, ce petit sommeil de dix à vingt minutes qu’il pouvait prendre en caressant adroitement à tâtons la petite touche noire placée en haut à droite de son réveil électrique s’il n’avait pas envie de se lever tout de suite, s’il voulait aller jusqu’au bout de son rêve en cours pour ensuite tenter d’en installer quelques bribes sur le papier moelleux de son manuscrit inachevé : « La tête sous l’oreiller ». Il rêvait allongé des histoires à dormir debout qu’il couchait sur le papier, assis, à moitié endormi. C’était un esprit compliqué doublé d’un acrobate.

Debout !

Tant qu’il ne s’était pas lavé les dents, il n’était pas capable de grand-chose ; aussi, envoyer les impulsions nerveuses au bon moment et vers le bon doigt, pour actionner telle ou telle touche du clavier de la « machine à coucher les rêves sur le papier », n’était pas pour lui une sinécure (d’ailleurs, il manipulait les touches de son ordinateur beaucoup moins allègrement que sa petite Snooze : elles devaient être trop nombreuses), une sinécure de sommeil, bien sûr. Il évitait de se brosser les dents dès le lever car cette opération, quoique vivifiante, lui ôtait tout souvenir du rêve dont il sortait, comme si la matière première de ses écrits résidait dans la substance blanche et pâteuse de sa bouche au réveil. Il faut dire qu’il avait un goût prononcé pour l’écriture profonde, pas pour les romans à l’eau de rose.

Tout en parcourant de la langue la « substantifique moelle »2 en question (sur ses gencives, entre ses dents), il s’appuya sur sa nouvelle imprimante Brother pour atteindre la poignée de la fenêtre et aérer un peu. Elle était chaude. La machine. Il avait dû oublier de la mettre en pause ou de l’éteindre. Il avait décidé d’abandonner sa prose pour un temps car le rêve qu’il venait d’achever, et qu’il était en train de déchiffrer, requérait une forme plus musicale. Il en cherchait encore la première rime lorsqu’on toqua à la porte.

De la visite

Franchement, qui pouvait bien se pointer un mercredi à cette heure-là3 ? Peu de gens savaient qu’il venait d’emménager là. Il n’en avait vraiment aucune idée…

La preuve

— Toc. Toc. Hou ! hou ! c’est moi !
— Quoi ? Qu’ois-je ? Qui ça, moi ?
— Ouvrez donc. Il fait froid.

Faire attendre un ami

et transi, de surcroît,

serait une infamie.

— Ah ! C’est vous. Mais entrez, entrez, je vous en prie.

Je devais rêvasser… J’ignore ce qui m’a pris.

— Allez. Oublions ça. Je venais pour vous voir,

et nous sommes réunis. C’est bien là l’essentiel.

Que notre amitié souffre des caprices du ciel,

Je ne saurais l’admettre, ni même le concevoir.

— C’est aussi mon avis, aussi, n’en parlons plus.

Mais, défaites-vous donc et venez près de l’âtre.

Je vous laisse un instant et reviens avec hâte

Vous servir ce cognac qui je crois vous a plu.

Il sourit gentiment et tourne les talons. L’Autre, seul, s’assied dans un fauteuil du salon.

— Toujours aussi rêveur,

mon vieil ami le loir,

mais il a un grand cœur,

qui fait plaisir à voir.

Il le garde fermé

aux esprits malveillants,

mais qui sait le charmer,

et de l’esprit ayant,

peut le faire s’entrouvrir

pour y lire par instants

des éclats de fous rires

et des bonheurs latents…

Mais je crois qu’il arrive,

et je ne voudrais pas

que mon discours dérive

jusqu’à lui sans trépas.

Trêve momentanée de dialogues rimés

Il se tait et regarde les flammes rayonner, son ami s’assied aussi et lui rit au nez.

— Ha ! ha ! ha ! Ouarf ! Ouarf ! Ouarf ! Putain, t’es pire que moi.

Tu fais des vers comme tu respires.

Je me demande où tu t’inspires.

— Déjà tout petit…
— Ha ! ha ! Bon, ben, y restait plus qu’de la bière. Laquelle tu veux ?
— Bah, euh… La Leffe.
— Merde ! j’ai oublié le dépuçleur.

Il se lève sur ces mots et sur ses jambes aussi, referme la fenêtre et repart vers la cuisine.

— Ramène aussi un eunuque !

Celle-là était plus difficile. Moins facile à comprendre que « dépuceleur » pour « décapsuleur ». Là, L’Autre avait dit « eunuque » au lieu de « cendar » parce que s’il est sans dard, c’est bien que c’est un eunuque. En fait, il voulait un cendrier. Quand ça partait comme ça entre eux, ça pouvait durer longtemps : c’étaient de vrais boucs-en-train. D’ailleurs, ils avaient même réussi à trouver le féminin : chèvre-en-micheline. Afin de préserver la clarté du récit et le lecteur de trop nombreuses explications techniques de ce type, nous vous présenterons chaque fois à partir d’ici un condensé des discussions entre nos protagonistes du moment4. Après le dépucelage des canettes, une longue discussion s’engagea. On parla de beaucoup de choses, sauf de tout et de rien.

Un problème ?

C’est quand L’Autre se leva de son fauteuil pour aller près de la petite table où dormait le PC, près de la fenêtre, que le plus intéressant commença. C’est du moins ce que pense celui qui écrit ces lignes. Si ça ne va toujours pas après ce qui suit, il sera encore temps pour vous de changer de livre.

De l’écriture à l’ordinateur

— Tu t’es remis à écrire ?
— Bof.

Il n’aimait pas tellement parler de ces choses-là. L’Autre, partagé entre sa curiosité et le respect de cette pudeur, lut en silence la feuille sortie de l’imprimante on ne sait trop quand.

— C’est pas mal… Original…
— Ta gueule.
— Mais si !

Là, il ne comprenait plus. Cette insistance chez L’Autre était trop inhabituelle pour une moquerie, trop naturelle pour une blague. Bien qu’il eût la certitude de n’avoir rien écrit ce jour-là, il s’approcha de sa machine à coucher les rêves sur le papier de l’imprimante. La feuille blanche ne l’était plus tout-à-fait. Elle était entachée de noir, d’encre noire et qui faisait des lettres.

— C’est bien d’toi, ça.
— …
— Tu voulais pas que j’le lise ?
— Si… J’m’en fous. C’est pas ça…
— ?

L’Autre interrogeait parfois rien qu’avec les yeux.

— C’est pas d’toi ?
— …
— Hein ?
— C’est nul… Enfin… C’est pas fini…

Il saisit la feuille de papier en question, la glissa dans la chemise la plus proche, celle de son manuscrit inachevé, éteignit le PC et lança sans se retourner :

— Bon, on y va ?
— Vas-y, on y va.

Ils avaient prévu d’aller faire un billard. Pas un mot dans l’ascenseur. L’Autre avait le temps d’allumer une cigarette. En sortant de l’immeuble, Lui, comme toujours, jeta un œil dans la boîte-aux-lettres et le récupéra immédiatement car il n’y avait rien, comme souvent, d’ailleurs.

Un billard vite plié

L’ambiance calfeutrée des salles de billard a un côté fascinant, relaxant. Mais ce soir-là, c’était différent. Il était tendu et son adversaire le sentait. Ils s’amusèrent quand même, mais la partie fut vite expédiée. Deux sets à zéro pour L’Autre, alors que d’habitude un troisième s’imposait.

— On en refait un ?
— Bof. Non, c’est pas la peine. J’ai compris.

Façon de parler. En fait, il n’avait toujours rien compris et c’est ça qui le troublait à ce point. Après avoir rendu les trois boules au bar, ils reprirent une pression en regardant ceux qui jouaient au snooker, cet immense tapis avec des billes de toutes les couleurs. Ils se promirent d’essayer une prochaine fois et se donnèrent rendez-vous plus tard dans la soirée. L’Autre croyait qu’ils allaient manger ensemble quelque part, mais n’insista pas quand son copain prétendit qu’il ne se sentait pas très bien. Rentré chez lui, celui-ci se précipita vers la chemise au manuscrit et en sortit la feuille blanche aux taches noires.

Un premier poème mystérieux

C’était bien de l’écriture. Il lut :

Fable subnaturelle

Assis aux pieds d’un arbre aux branchies déployées,

De peur d’être étouffé sous les coussins suintants,

Ne sachant trop que faire, pour passer le sale temps,

Je semai quelques mots qui périrent noyés.

Voyant ma détresse, mon vieil hôte m’envoya,

De sa barbe fanée, quelques feuilles griffonnées :

« Allons, ressaisis-toi, trêve de paranoïa !

Tu n’es point en danger, tu es même bien tombé…

Pour te récompenser de ta visite osée,

Je vais te dire l’objet de mon déshabillé.

Si j’allège mon ramage, c’est pour me reposer,

Et, quand vient la gelée, pour réchauffer mes pieds.

Ceci, les humains l’ont bien vite deviné.

Sais-tu ce qu’il advient quand tout ceci s’effrite ?

Où s’en sont allées les paroles que tu as dites ?

Elles ont suivi mes miettes sur le sol raviné,

Leur suc s’est infiltré jusqu’à l’autre côté,

Pour y reconstituer un poème, une fleur,

Répandre une lumière pour réchauffer leur cœur.

Quand ici c’est l’hiver, chez les morts c’est l’été. »

Chaudement réveillé par une aiguille solaire,

Je ne comprenais plus, en regardant en l’air,

Des branches désaffectées, mais les racines alliées

D’un noble châtaignier faisant le poirier.

Sous la vive influence de cette révélation,

Je repris mon errance, enfonçant du talon

Les quelques mots d’amour restés en suspension

Dans la poche intérieure trouée de mon blouson.

Quand vous aurez fini de lire ma déraison,

Déchirez cette page, et mettez-la en terre.

Je suis assez puni, gardez vos oraisons,

Le tout prochain orage divertira mes vers.

Mais qu’est-ce que c’est qu’ça ? Il essayait de comprendre… Comment quelque chose que l’on est censé avoir écrit quelques instants auparavant peut-il ne vous laisser aucun souvenir, surtout lorsqu’on ne cesse de le lire et de le relire comme lui en ce moment ? Et des alexandrins. Jamais il n’en avait fait, si ce n’est avec L’Autre et difficulté, juste pour rire !

Pour mieux réfléchir à cette question, il emporta la feuille au poème avec lui jusque dans sa chambre, s’allongea sur le lit en se calant bien la tête pour lire encore et encore… ce qui fait qu’il finit par s’endormir.

Chapitre 2

Les bars

Il se réveilla en sursaut : minuit passé ! Merde ! pas question malheureusement de faire un petit câlin à Snooze5. Il avait dit onze heures à L’Autre… Il se recoiffa rapidement et plongea dans l’ascenseur. Quand Il arriva au café, L’Autre était encore au bar avec des gens qui avaient plein de prénoms différents. On aurait dit qu’ils le faisaient tous exprès pour l’embrouiller encore plus. C’était vraiment trop injuste. La foule, les salutations ou les présentations, la fumée, le bruit et (parfois ou) la musique, beaucoup de choses à encaisser d’un seul coup, surtout quand on est obligé de rester debout faute de place.

Désinhibez-moi…

Après quelques verres, ça va mieux, on s’est mis dans l’ambiance, on fait partie du décor. Cinq ou six bières plus tard, on change de rade. On se retrouve immédiatement dans un autre qui ferme plus tard. Et ainsi de suite. Il suffit de savoir les prendre dans l’ordre.

L’alcool aidant, chacun se sent plus sûr de lui. Les conneries voltigent pour ne plus en faire qu’une, et une grosse. C’est ce paquet de fumée en l’air : les petits brouillards individuels qui se forment dans le cerveau bien irrigué des clients s’échappent par leurs yeux, s’élèvent, se regroupent et se collent à la voûte du plafond. On dirait un grand crâne vu de l’intérieur. D’ailleurs, c’est un peu le même système pour les âmes quand elles s’envolent, sauf que la voûte céleste est plus grande, plus belle, et que ses nuages pleurent, eux au moins.

— On reprend une Jeanlain ?
— Jeanlain… rien à foot !
— Ouais, bah, si on commande cake chose faut s’magner.
— Vas-y, on y va !
— Wasp.
— Bip.
— Allez, terrine ! Finis ton verre !
— Putain, euh ! Vas-y, j’y vais !

Et voilà. Sans commentaire. Un dernier verre, une dernière clope, un dernier mot (« salut », par exemple) et puis on se quitte, on se rentre. Tout le monde ? Que nenni.

Celle de trop

Lui, L’Autre et deux troisièmes ont décidé d’aller manger une soupe à l’oignon dans un restau de nuit. Alors ça continue.

— Y mont’ti avec moi, Lui ?
— Ah, bah oui, mon bon gars. Y veut bien. Allez.
— On s’retrouve là-bas ?
— Ouais. À tout’ !

C’est déjà tout à l’heure. Quatre soupes à l’oignon pour quatre bières (l’apéro) et une bouteille de rouge, ça fait léger. Par contre à vomir…

— Eh ! Lui ! Ça va pas ?
— Blurp.

Il se lève en catastrophe, court vers la sortie. Fermé. Il sait que ça s’ouvre électriquement. Il appelle S’il-vous-plaît. Le serveur tarde. Évidemment. Encore un gros con. Heureusement, il voit le bouton derrière le montant droit du cadre de la porte. C’est une sonnette mais pour une fois ça sert à sortir. Il appuie. Ça s’ouvre. Un pas en avant, un à droite pour ne pas salir l’entrée et :

— Beueueueueuhhh…

Sur le trottoir. Debout, penché en avant. Puis assis. Il respirait mieux. Mieux qu’à l’intérieur en tout cas. Il réussit à se relever, marcha péniblement jusqu’au parc voisin et s’assit sur un banc. Il cracha encore un peu et fouilla la poche, gauche, de son pantalon taché. Il n’en sortit pas le mouchoir nécessaire mais une feuille de papier. Toujours la même. Il la regarda quelques instants, sans la déplier, et se mit à la déchirer en tout petits morceaux qu’il garda dans la main encore un peu avant de les déposer dans un trou, sous une des grosses racines de l’arbre qui voulait desceller le banc. Comme il commençait à pleuvoir, il s’en retourna. L’Autre l’attendait dans la voiture, les troisièmes étaient partis. Ils rentrèrent aussi.

Causeries antialcooliques

Comme il n’y avait plus rien à boire chez Lui, ils allèrent chez L’Autre. Il y faisait froid mais ça leur fut bien égal, d’autant plus qu’ils ne s’en aperçurent pas. Avant d’aller fouiller dans le placard de la cuisine, L’Autre mit une cassette dans l’appareil prévu à cet effet.

De sacrés numéros

C’était du Bourvil :

— Mes… Mesdames, mes demoiselles, messieurs. En tant que dégueulé euh… En ta… En tant que délégué de le… de la ligue antialcoolique, je vous parlerai de euh… de l’eau minérale. (Sic/Hic !)
— Ah ! T’as bien choisi. Merci.
— Ouais hein ? J’ai pensé à toi, dégueulis.

Il revint une bouteille à la main.

— Tiens, j’t’ai rapporté de l’eau ferrugineuse.
— Oh, ben vous alors…
— Attrape deux verres derrière. Les moins sales.
— Ça va être dur.
— Pourquoi ?
— Ben parce qu’y sont tous dans le même état. Sales. Les verres. Ça y est ?

L’eau ferrugineuse de L’Autre, c’était de la vodka. Il répliqua en dévissant le bouchon :

— Y sont p’t-être sales mais eux y gerbent pas sur l’trottoir.
— Eh ouais, qu’est-ce tu veux, on m’a pas appris le caniveau.
— Ne dit-on pas un cani-vau… de ville ? Hum ?
— T’as pas d’autres verres ?
— Des verres à pied ? À cheval ? Hum ?
— À bicyclette.
— Ah baa… J’ai bien des verres de terre. D’habitude, j’m’en sers pour boire l’café m’enfin bon. Y’a plus d’café. Alors…
— C’est vrai ça. Y sont tous fermés. Y’a plus d’justice, non plus.
— Tiens.
— Merci, mon gars. Allez, à la tienne.
— Chting ! (Ils trinquent.)
— Y sont bien él’vés, tes verres. C’est des verres polis.
— Ouais pi c’est des verres de contact. En plus, j’les ai eus à l’œil !
— Pfff ! (Rire la bouche pleine.)
— Fais gaffe, tu vas encore faire des salop’ries.
— … (Regard qui en dit long, mais pas longtemps.)
— 

On ne change pas une équipe qui gagne

Ils échangèrent de tels propos philosophiques jusqu’à la pointe du jour, c’est-à-dire le moment où se terminent les bouteilles. Voyant que L’Autre commençait à s’endormir…

— Eh ! Bouc-en-train ! Tu m’raccompagnes ?
— Hein ? Euh… Ouais ouais. On y va.

Les sens interdits ont le don particulier de fleurir dans les nuits de fête sans qu’on s’en aperçoive. Heureusement, très tôt le matin, les rues sont souvent désertes. On aurait pu croire qu’ils prenaient ainsi un raccourci. Non point. Au contraire. Ils arrivèrent tout de même, mais il était temps. Les cafés allaient ouvrir leurs portes. Du moins, quelques-uns.

— Tu montes un moment en attendant que l’troquet ouvre ? On pourra déjeuner un peu.
— Allez.

Une fois en haut, L’Autre sortit la bouteille de Malibu du réfrigérateur, celle qu’il avait amenée la semaine précédente. Lui n’en voulait pas. Il n’aimait pas la noix de coco… et puis il avait déjà donné, et même rendu. Un verre d’eau. Il s’affala dans un fauteuil et L’Autre s’assit une chaise, celle de devant l’ordi. Il servit son verre, en but une gorgée, puis commença à tripoter les touches du clavier noir.

Intellectuelle matinée

— Ça marche pas. Il dort ?
— Oui. Faut l’réveiller. Mets-y donc un coup d’jus, bordel ! L’interrupteur en haut à droite de la tour.
— Ah !

L’ordinateur redémarra assez vite et dès qu’il vit le curseur clignoter dans la page vide, il se précipita sur un traitement de texte pour écrire des conneries, comme tout le monde.

« Prose hit »

« PROSE HIT. Matériau mystérieux aux formes arrondies, pourquoi supportes-tu les caresses et les étreintes de mes mains ? Pourquoi ne te dérobes-tu point au contact incessant de mes lèvres assoiffées ? Je te vide de tout ton suc, je te bois jusqu’à la dernière goutte… Et toi tu te laisses remplir de ce liquide blanc et épais qu’un cylindre irrégulier, fait de la même chair que la tienne, projette par à-coups au plus profond de toi, encore et encore. Faut-il que tu sois un être pervers pour m’éreinter ainsi ! Car je suis fatigué, oui, vraiment las… non point de boire ta sève, car j’y prends grand plaisir, non… mais de t’emplir, de t’approvisionner, car cette manœuvre demande une activité physique trop importante. Quoiqu’il en soit, je m’efforce toujours de l’accomplir au mieux car c’est à travers toi en un tel instant que je goutte, ainsi que toi, l’ivresse d’un moment intense. »

Après avoir écrit tout ça, il méritait bien un deuxième coup. Il se resservit donc. Lui était toujours dans son fauteuil, bien calé, regardant dans le vide en direction de l’écrivain de ce matin-là. Celui-ci recommença à s’adresser à son verre sur le papier :

« Soit, je te devais bien cet hommage pour les services que tu m’as rendus. Mais sache que dorénavant je ne te comblerai ni ne te boirai plus. Sache aussi que tu ne sentiras plus jamais le contact de mes mains, de mes lèvres. Que veux-tu… tu te laisses étreindre par n’importe qui, tu t’abandonnes aux lèvres du premier venu… Je ne puis souffrir telle infidélité plus longtemps. Ne crois pas que je te fasse ici quelque sermon quant à ton dévouement à la collectivité ou quoi que ce soit ce soit dans le genre, mais le fait est que je ne pourrai supporter d’être victime d’une infection microbienne quelconque. »

Comme L’Autre riait tout seul :

— Tu t’amuses bien ?
— Ah ouais. Ça va fort.
— Et qu’est-ce que t’écris ?
— N’importe quoi.
— Ah bon. Ça va alors. Continue. T’iras loin.
— Ouais. Mais j’m’arrête en bas d’la page.

Et il se remit à tapoter…

« Aussi ai-je décidé de me débarrasser de toi. Oh ! n’aie pas peur, tu ne souffriras point. Comment pourrait-on blesser une créature sans cœur, sans âme… ? Sais-tu que chaque jour nombre de tes semblables sont décimés à cause d’une vieille coutume russe ? Tu n’es plus rien pour moi… C’en est trop, je dois mettre fin à ton existence, te détruire, je vais te mettre en pièces… Que dis-je, te mettre en pièces, te pulvériser, oui ! »

Faisant le geste, il s’arrête soudain, se ravisant. Le regard de Lui se fit plus précis et intrigué car L’Autre, qui se prenait au jeu, mimait ce qu’il était en train d’écrire.

« Oh ! oooh ! mais… tu pourrais bien me servir encore, tu n’as rien perdu de ton éclat. Mis à part ce que je sais, tu parais n’avoir jamais servi… Bien, soit ! Je crois que je vais finalement t’épargner… Oui, c’est cela, je te garde. Quant à ton corps souillé, un bon coup d’éponge et il n’y paraîtra plus. »

(Un moment passe…)

« Te voilà débarrassé de ces impuretés et séché, parfait ! J’ai une telle soif, après ce long discours, que je vais te prendre… cul-sec ! FIN. »

Voilà le genre d’histoire que pondait L’Autre, surtout après une nuit blanche, quand les nerfs commencent à prendre le pas sur le reste.

— T’as fini ?
— Ouais…
— Fais voir.

Chacun a ses pudeurs

L’Autre attrapa son chef-d’œuvre imprimé, le tendit à son copain et se retourna pour allumer une clope et ne pas croiser son regard moqueur. Il trouva que c’était un peu débile, et ne se gêna pas de s’en moquer, mais que tout de même il y avait quelque chose, une idée à exploiter. De toute façon, pour une histoire écrite en un quart d’heure et sous au moins deux grammes d’alcool, c’était une belle performance. L’Autre parut content quand Il lui fit le compliment. Par contre, il n’apprécia guère l’idée de vouloir apporter des retouches à son texte : pour lui, c’était une affaire terminée, un produit fini, on (lui y compris) ne pouvait pas y retoucher sans le dénaturer, l’annuler. N’écrivant que peu, et uniquement pour le plaisir, comme il venait de le faire, il gardait de la création littéraire une conception très pure : l’écriture spontanée, vivante, profitant d’un éphémère instant de meilleure disposition de l’esprit6 pour se réaliser complètement et sans retour possible.

— Évidemment, ce s’rait l’idéal, mais… justement, c’est trop idéal… c’est pas réaliste.
— Et pourquoi ça ? Qu’est-ce que j’viens d’faire ?
— De faire à cheval su… sur le principe une conférence contre… hic ! contre l’eau ferrugineuse euh… contre l’alcool !
— Oh, vous, Bourvil, ta gueule. C’est pas ç’que j’ai fait ?
— Mais si… M’enfin ç’que tu viens d’faire ça tient sur une page, c’est une histoire courte, un sketch… Tu t’vois en train d’écrire un roman d’un seul coup ?
— Pas d’un seul, mais pleins de petits… coups.
— Et tu crois qu’ça aurait un sens s’ils sont écrits l’un après l’autre sans aucune relation… aucun rapport ?
— Pourquoi pas… Au prix où est l’beurre.
— Ouais, c’est ça.

La discussion était terminée. Match nul. On ferait la revanche plus tard, sans doute, car la fatigue commençait cette fois à l’emporter sur les nerfs.

— Bon, qu’est-ce qu’on fout ? Moi chuis crevé.
— Moi non plus… On déjeunera un autre jour.
— Tsss-Tsss. (Rire teinté d’épuisement)
— Bon, ben gars euh… J’va y aller !
— Hein ? Ah ouais ? J’t’accompagne.
— On va où ?
— Ha ! Allez tchao.
— À demain. Oh pi non. À une main, ça suffira. Allez, salux !

Chapitre 3

Une autre visite

On était encore jeudi, férié, mais plus tout à fait le même. Par ailleurs, il y a des moments dans la vie où il faut savoir insister pour se faire entendre, quitte à engendrer des dialogues et des semblants de bruits pas très gracieux.

À travers la porte

— Dring.
— …
— Dring !
— …
— DRRRRING !!!!
— …

Deux heures plus tard…

— Ding dong.
— …
— Ding dong !
— …
— DING DONG DING DONG DING DONG DING DONG !!!!
— …
— TOC TOC TOC !!!
— …
— BAM BAM BAM ! HOHOOOO !
— Hmmmm… ?
— BAM BAM BAM BAM !
— OUUAAIIIS ! J’ARRIIIVE !

Ça y est. Il était réveillé, ou presque. Il enfila son pantalon de pyjama et alla près de la porte d’entrée. « Clac clac », aurait fait la petite clé dans la gentille serrure qui ne demandait qu’à s’ouvrir si celle-ci ne l’avait déjà été.

Trop tard pour le rencard

— Ah, quand même ! Tya mis l’temps. Salut.
— Salut. Ça va ?
— Ba, moi ouais. Toi, par contre… J’t’ai même téléphoné plusieurs fois avant d’venir.
— Oh, ça va. J’me lève…
— Je sais.
— Assieds-toi… j’arrive.

Un peu d’eau sur la tronche, et à l’intérieur, ne lui fit pas de mal. Un moment de répit sur la cuvette non plus. Il réapparut en peignoir. Elle était toujours debout.

— Tu t’es douché ?
— Nan… tais aux chiottes. J’ai l’temps.
— Tu rigoles ? T’as vu l’heure qu’il est ?
— Bah non… pas vraiment.
— Sept heures… presque.
— Ah.
— C’est ça. C’est aussi l’heure où on d’vait aller au cinéma…
— Ah… merde !
— Tu fais chier !
— On ira d’main…
— Demain ça passe plus.
— Ah. S’cuse-moi.
— Ouai ben j’me casse. J’y vais toute seule. Passe me chercher vers neuf heures.
— Ouai… bon… À tout à l’heu…
— Vlan !

La porte se referma avec rage sur sa dernière syllabe. De toute façon, Elle avait compris.

Un problème ? II – Le retour

Il retourna dans la salle de bains en se grattant la tête. Son parfum frais et enveloppant fait de la douche ou du bain un doux moment de bien-être. Il en ressortit une demi-heure plus tard, tout revigoré. Comme il faisait nuit dehors, c’était le cas aussi à l’intérieur. Encore plus. Il alluma la lampe de son bureau de travail (la petite table… près de la fenêtre) : c’est que ce jour-là, il avait de sacrés réflexes. En lâchant l’interrupteur, il aperçut de l’écriture sur la feuille dépassant de l’imprimante. Il crut d’abord, ou voulut croire, qu’il s’agissait du chef-d’œuvre de L’Autre, mais non.

Un deuxième poème

Otorragie

Au beau milieu d’un fol et gai troupeau

De jeunots hirsutes et assoiffés,

Coi (!) de la voir si joliment coiffée,

J’émis quelques cris de coquelicot.

Deux ou trois ondes miennes rescapées

Du vil piratage des décibels

Émurent les pétales sensuels

De la pensée à corolle scalpée.

En corollaire d’une osée pensée,

Elle s’approcha de mon abreuvoir.

À peine l’eus-je regardée s’asseoir

Qu’elle se mit sur sa chaise à tanguer.

Au rythme de son tango-panaché,

Elle décortique des cacahouètes,

Aussi calme qu’une singesse que fouette

Le rythme des airs aux paroles gâchées.

Coincées entre l’index et le majeur,

Mille nerveuses cigarettes brèves

Rebondissent sur le double de lèvres :

Autant de vils va-et-vient ravageurs,

De petits baisers à distance, sans cible.

Leur buée, qui ne colle pas aux vitres,

Pique néanmoins celles de nos pitres,

Les affuble d’un regard combustible.

Le brouillard est tombé, comme un mégot.

Déjà la rosée emperle ma fleur.

Il doit se faire tard, ou bien c’est qu’elle pleure,

Éperdue dans le noir d’un triste ego.

Elle pleure, oui, de n’avoir pas ouï

Un mot, un nom, que je n’ai pas dit, non.

D’ailleurs, je ne cause pas aux guenons

Dans l’inouï bruit d’un pareil boui-boui.

(Cadeau)

Tempête sous un crâne

Aïe. Et Lui qui avait mal à la tête… Le faire réfléchir dans cet état-là, ce n’était pas vraiment un cadeau. Et de qui d’abord ? Pourquoi ? Quand ? Comment ? Où, Il le savait, c’était déjà ça. Mais il en était néanmoins réduit aux autres questions essentielles.

Dix pieds, deux de moins que la dernière fois. Ça le changeait un peu des alexandrins, mais il n’était pour autant guère avancé, au contraire. Cette histoire de bruit, de boissons et d’endroit enfumé lui rappelait par contre sa soirée de la veille, bien qu’il eût quelques trous. De mémoire. La guenon, c’était du cinéma : il était resté avec ses copains. Et ce « Cadeau » entre parenthèses, ça s’adressait bien à Lui ! Qui pouvait bien… ? Quand ? Sans doute pendant qu’il dormait. Comment ? Il songea que la porte était restée ouverte toute la « nuit », comme souvent. Mais le poème de la veille ? L’issue était fermée quand L’Autre était arrivé puisqu’il avait pris la peine de frapper. Elle aussi avait attendu dehors, mais elle, toujours. On ne sait jamais. Alors ?

Alors ça devait être quelqu’un qui avait une clé. Impossible… Pour s’en assurer, il téléphona même à son proprio. Non. Il l’avait sous les yeux, ne l’avait pas perdue, il n’en existait pas d’autres que ces deux-là et au revoir merci excusez-moi de vous avoir dérangé. Personne n’était entré par la porte… Quant à la fenêtre du côté de la ruelle, pas de trace d’effraction non plus, et puis à l’étage… Aussi absurde que cela puisse paraître, ça devait venir de l’intérieur. Il écrivit n’importe quoi :

« Merde ! Fait chier ! »

Après avoir imprimé ces quelques caractères (dignes de La Bruyère) pour mieux les observer sur le papier et les comparer à ceux du poème-surprise, le commissaire Bourel se rendit vite compte qu’ils étaient apparemment identiques. Il voulut alors examiner ceux de la première feuille-mystère, celle qu’il avait « reçue » la veille, mais ne la trouva point. Il réfléchit encore plus fort. On devinait ses neurones qui lançaient des éclairs zébrant rageusement le ciel de tempête sous son crâne. Et :

— Bon sang ! Mais c’est bien sûr ! s’exclama-t-il en frappant de joie la paume de sa main droite du dos de la gauche.

Nous qui avons vu et entendu les mêmes choses que lui savons qu’il vient de se rappeler qu’il l’avait déchirée, puis déposée dans un trou, sous une racine, dans le parc. Il alla s’habiller, se coiffa rapidement et plongea dans l’escalier (l’ascenseur était en panne). La voiture, les rues, le parc. Il était toujours là, mais fermé. Et pas de lumière à l’intérieur.

— Eh merde…

Il partit. Sur le chemin du retour, comme il n’avait plus une cigarette et que la soirée risquait d’être longue, il s’arrêta dans un tabac. Il fit ses provisions puis passa du côté bar.

— Un café, siou plaît.
— Ah ! bah, on a éteint la machine à ç’t’heure-là.
— Bon… bah… tant pis alors.

Il aurait bien pris autre chose, une bière par exemple, mais Il n’aimait pas être obligé, et encore moins par une tronche de cake comme celle du patron de ce bar merdique. Et puis Il n’aimait pas les cafés qui ferment à huit heures. Et puis c’est tout. Il rentra se préparer pour aller La chercher, sinon…

Sacrée soirée

— Dong ding doïng.
— Clic clic.
— Coucou !
— Déjà ? T’as fait fort. 21 h 15. T’as qu’un quart d’heure de r’tard.
— Oh… D’toute manière on s’ra pas les derniers.
— Ouais, ça, c’est bien possible. Bon, que j’trouve mes chaussures et on y va.

Elle trouva ses chaussures et ils y allèrent. Un peu plus tard, ils y étaient.

À la « sacrée soirée »

Ils n’étaient pas les premiers ni les derniers arrivés. Bien joué. On les laissa entrer (c’était bien parti) puis on leur dit bonsoir ou salut, et ils répondirent salut ou bonsoir, selon l’inspiration. Il y eut aussi d’autres grands moments :

— Voilà, je vous présente…
— Bonsoir.
— Salut.
— Bienvenue au club.
— …
— Salut.
— Tiens, ça va ?
— Ça va et toi ? C’est ta copine ?
— Oui… Enfin… Ch’crois.
— Ha ! Ha !

Et ça continua comme ça un petit moment car il y avait pas mal de monde :

— On d’vrait être une cinquantaine… ’fin, si l’autre moitié arrive.
— Waouh ! bravo ! C’est du propre. Et t’as fait à bouffer pour tout ça ?
— Ouais enfin c’est pas compliqué… et puis t’inquiète pas, y a surtout à boire.
—