Le Sang Scellé - Manon Le Bras - E-Book

Le Sang Scellé E-Book

Manon Le Bras

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Beschreibung

Naomi et Alexander ne le savent que trop bien : tout peut basculer en moins d'une seconde. Le bonheur peut faire place au malheur ; un rêve peut rapidement se transformer en cauchemar ; et tout ce que deux êtres peuvent considérer comme acquis peut en réalité n'être qu'illusion. Le couple avait pourtant tout pour être heureux : l'amour, une passion dévorante l'un pour l'autre et une perspective d'avenir. Cependant, alors que nos héros pensaient enfin être à l'abri de tout danger, Alexander se fait tirer dessus par une créature mystérieuse sans visage, à l'allure fantomatique. En cherchant à connaître l'identité de l'agresseur, le couple apprend que le vampire n'est pas le seul à s'être fait agresser, et que la police de Nashville enquête sur plusieurs meurtres sanglants, dont le mode opératoire est de plusieurs balles en argent dans le corps et un pieu en bois enfoncé dans le coeur. Les forces de l'ordre, pensant avoir affaire à un fanatique du surnaturel, se retrouvent vite dépassées par la réactivité du tueur. En effet, en enquêtant, elles se rendent compte que des centaines de décès identiques sont répertoriés dans tous les États d'Amérique. Naomi et Alexander comprennent alors que des personnes connaissent l'existence des vampires, et encore plus inquiétant : qu'elles savent comment procéder pour les éliminer. Des alliances surprenantes vont devoir se former, et de nouveaux ennemis vont sortir tout droit des ténèbres : ils seront tous menacés, aucun ne sera épargné. Ou peut-être bien que si... Au vu de la dangerosité et l'urgence de la situation, le vampire et sa bien-aimée vont devoir à tout prix mettre la main sur cette organisation responsable de ces meurtres et y mettre un terme, car une chose est sûre : si le monde entier apprend l'existence des buveurs de sang, une guerre sanglante est à prévoir.

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Seitenzahl: 544

Veröffentlichungsjahr: 2022

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L’œuvre présente sur le support (fichier, livre...) que vous venez d’acquérir est protégée par le droit d'auteur. Toute copie ou utilisation autre que personnelle constituera une contrefaçon et sera susceptible d’entraîner des poursuites civiles et pénales.

Ce livre est une fiction. Toute référence à des événements historiques, des comportements de personnes ou des lieux réels serait utilisée de façon fictive. Les autres noms, personnages ou lieux et événements sont issus de l'imagination de l'autrice. Toute ressemblance avec des personnages vivants ou ayant existé serait totalement fortuite.

Ce livre n'est pas seulement une histoire d'amour banale ou de romance paranormale. Il évoque la séduction, le romantisme, l'amour bien sûr, mais également la souffrance, la haine, la violence et le meurtre. Vous y trouverez aussi des touches d'humour, ainsi qu'une multitude de rebondissements. Oh, et attention ! Certains passages sont... comment dire... passionnés.

Bonne lecture.

À partir de 14 ans.

Œuvres précédentes :

Fantasy Urbaine :

. Le Sang Soleil – Tome 1

. Le Sang Lunaire – Tome 2

Roman Sentimental/Suspense Romantique :

. BODYGUARD : Un Amour Interdit

« L'amour, c'est la seule force que l'on peut opposer à la mort. »

Edgar Morin

Sommaire

PARTIE I : Lumos

Chapitre 1

Chapitre 2

Chapitre 3

Chapitre 4

Chapitre 5

Chapitre 6

PARTIE II : Umbra

Chapitre 7

Chapitre 8

Chapitre 9

Chapitre 10

Chapitre 11

Chapitre 12

Chapitre 13

Chapitre 14

Chapitre 15

Chapitre 16

Chapitre 17

Chapitre 18

Chapitre 19

Chapitre 20

Chapitre 21

PARTIE I

Lumos

1

Jeudi 9 juillet 2020 ~ J-9 avant le mariage ~

Six mois. Six mois ont passé depuis... son départ.

Comment ai-je fait pour le supporter ?

Je ne sais pas.

Comment ai-je réussi à garder la tête hors de l'eau ?

Je l'ignore.

Il faut dire que la présence et le soutien d'Alexander m'auront été d'un immense secours. Sans lui, je n'aurais été qu'une ombre errante. Un corps vide. Vide de toute émotion. De toute humanité. De tout amour. Je ne peux dire si je redeviendrai celle que j'étais avant, mais ce dont je suis certaine, c'est que je suis sur le point de devenir une femme mariée. Je vais épouser l'amour de ma vie. Mon âme sœur. Mon sauveur. Celui qui m'a sortie de l'obscurité pour me guider vers la lumière. Vers le soleil.

Aujourd'hui, et comme tous les soirs, je termine ma journée de travail au Young Hopes aux environs de dix-neuf heures. Les concerts ont démarré depuis cinq mois, et l’accueil qu'a reçu notre établissement nous a tous agréablement surpris. Les clients sont fidèles, et l'ambiance bat son plein, du coup, le patron est ravi, et moi aussi.

Prête à affronter le vent chaud du soir, j'attrape mon sac à main et commence à marcher vers la sortie. Seulement, je suis coupée dans mon élan quand je surprends le barman du club sortir des toilettes en chantonnant Canyon Moon de Harry Styles.

— Vous êtes encore là, vous ? lancé-je à son intention. Vous savez que vous n'êtes pas obligé de partir en même temps que moi ?

— Je sais, mais j'aime être ici, me répond-il, guilleret.

Qu'est-ce que sa bonne humeur peut m'insupporter !

— Bon, c'est vous qui voyez. Dans ce cas, c'est vous qui fermerez.

Je lui jette les clés du Young Hopes sur le comptoir, et le bruit qu'elles produisent en s'écrasant vient outrer monsieur BCBG, qui recule en m’offrant une expression choquée. Je lui tourne le dos délibérément et entreprends de foncer vers la sortie pour éviter d'avoir à lui expliquer mon geste.

Après tout, c'est moi la patronne.

— J'ai l'impression que vous ne m'aimez pas beaucoup, lâchet-il sur un ton plus que déplaisant.

Oh, non. Pitié, tais-toi.

M’obligeant à afficher un visage neutre, je me pince longuement les narines avant de me tourner vers lui.

— Je vous demande pardon ?

— Je disais, j'ai l'impression que vous ne me portez pas vraiment dans votre cœur.

Agacée, je pousse un soupir, luttant de toutes mes forces pour ne pas lever les yeux au ciel.

— Écoutez, Carl...

— Charles, me corrige-t-il, le front plissé.

— Ouais, si vous voulez... C'est pas trop le moment : je suis débordée.

— Parce que vous allez vous marier ?

J'arrête un instant de respirer, puis inspire profondément, mes yeux impatients rivés aux siens.

— Et vous savez ça comment, vous ? demandé-je sur un ton amer.

— C'est Harry qui m'en a parlé.

De mieux en mieux...

— Vraiment ?

— Oui. Le barman qui était là avant moi... euh... Owen Matthews, c'est bien ça ? C'était votre ami ?

À la prononciation de son prénom, mon cœur se serre, réveillant une horrible douleur récemment atténuée en moi.

Les poings serrés, je suis obligée de me concentrer comme une folle pour ne pas me jeter sur lui.

— Qui vous a parlé d'O... de lui ?

— Harry. Il m'a dit que vous étiez proches l'un de l'autre.

Sérieux, Harry ?

— Proches ? Ouais... c'est le mot. C'était mon meilleur ami.

— Oh... toutes mes condoléances.

— Merci.

— Il a eu un accident de varappe, c'est bien ça ?

Mais tu vas la fermer, oui !

— Que voulez-vous savoir exactement ?

— Oh, euh... rien. Je... je voulais juste... enfin... ça explique pourquoi vous me détestez tant.

— Je ne vous déteste pas, Carl.

— Charles.

...

— Charles, ouais... Désolée. Est-ce qu'on... pourrait reparler de ça un peu plus tard ? J'aimerais rentrer chez moi, à présent.

— Bien sûr.

— Génial.

Maintenant que je l'ai en face de moi, je remarque qu'il profite de ses jours de repos pour bronzer, car il affiche une peau dorée et parfaitement saine. En plus de ça, il a laissé pousser ses cheveux bruns, puisque ces derniers lui arrivent à présent au niveau des épaules.

— Vos cheveux, c'est nouveau ?

Surpris, il écarquille les yeux dans un sourire timide.

— Ah... euh... oui. J'avais besoin de changement.

— Mmmh.

— Vous aimez ?

Non.

— Bof, dis-je en haussant les épaules. Je vous préférais avant.

— Oh... c'est vrai ?

Non.

— Mmmmh-mmmh. Bon, sur ce... au revoir.

Désireuse de retrouver mon cher et tendre, je pivote sur le côté pour tenter de m'éloigner du barman. Cependant, avant de pouvoir faire ne serait-ce qu'un pas, sa voix résonne à nouveau derrière moi :

— Votre futur mari a de la chance !

— De la chance ?

— Oui. Vous êtes une très jolie femme, une sacrée patronne et vous n'avez pas peur de vous affirmer.

Alors lui, il essaie de gagner des points.

— Je ne dirais pas ça. Je ne suis pas facile à vivre, surtout en ce moment.

— Votre fiancé, c'est bien le patron du Tasty Palace ?

— C'est aussi Harry qui vous l'a dit ?

— Nan, je l'ai deviné tout seul. La façon avec laquelle il m'a parlé il y a quelques mois de cela, ici même, au bar, jamais je ne l'oublierai. Seul un homme amoureux parle comme cela de la femme qu'il aime.

À cet instant, son regard transperce le mien, et pour la première fois en sa compagnie, un malaise m'envahit. Quelque chose chez lui me pousse à prendre mes distances, et avant qu'il ne puisse s'en rendre compte, je baisse le regard et me racle bruyamment la gorge.

— À plus tard... Charles.

J’ordonne à mes jambes de filer d'ici en vitesse et quitte le Young Hopes dans un état d'alerte maximale.

Je ne sais pas quel est son problème, mais ce barman pose beaucoup trop de questions.

Je ferais bien de l'avoir à l’œil.

Arrivée à Melrose, je reste dans la Camaro de longues minutes, les mains sur le volant, à me torturer mentalement pour la énième fois. Chaque jour, c'est encore plus difficile. Quand je me prends à être heureuse, je culpabilise ; quand je me prends à sourire, je culpabilise ; et quand je me prends à faire des projets pour l'avenir, je culpabilise encore plus.

Je sais que ça ne peut plus durer. J'en suis parfaitement consciente. Seulement, je ne peux faire taire cette partie de moi, constamment présente, qui ne cesse de me rappeler que si je suis toujours vivante, c'est parce que mon meilleur ami a renoncé à sa vie pour que je puisse vivre la mienne.

Vannée de mon propre état d'esprit, je m'oblige à me reprendre et souffle un bon coup.

Lorsque je pousse la porte de la maison, une légère anxiété m'emplit, et je ne saurais dire pourquoi. Toutefois, je tente de me ressaisir, car Alexander n'a pas à subir mes changements d'humeur constants. Il est d'une telle gentillesse et il a été d'une telle patience avec moi, ces derniers temps, que je n'ai pas le droit de me laisser sombrer.

Éreintée de ma journée, je pose mon sac à main sur le buffet, dans l'entrée, et me débarrasse de ma veste que j'accroche au portemanteau. Je traîne ensuite des pieds jusqu’au salon, m'allonge sur le fauteuil et retire mes chaussures en poussant un long et puissant soupir.

Enfin le week-end. Je vais donc en profiter pour ne rien faire du tout !

Un instant plus tard, une ombre apaisante se positionne audessus de moi, et le merveilleux visage de mon fiancé apparaît à quelques centimètres du mien. Ses iris azur se figent dans mes prunelles, pendant que ses lèvres viennent s’abattre sur les miennes avec douceur. Je profite alors de cette occasion pour respirer son odeur, sentant curieusement tous mes muscles se détendre, les uns à la suite des autres.

— Salut, murmure-t-il de sa voix enchanteresse.

— Salut.

— Tout va bien ?

— Mmmh-mmmh.

— C'est vrai, ce mensonge ?

Je me mords aussitôt la lèvre inférieure, en résistant ardemment pour ne pas sourire.

C'est dingue : il lit en moi comme dans un livre ouvert !

— Bon, d'accord. Tu as raison : je ne suis pas au mieux de ma forme, ce soir, avoué-je. Sans parler de l'autre qui n'a pas arrêté de me prendre la tête avec toutes ses questions. Je me demandais quand il allait s'arrêter de parler.

— Qui ça ? me questionne Alex.

— Le barman !

— Oh.

— Je suis sûre qu'il n'est pas net. Je vais l'avoir à l’œil, moi j'te l'dis !

— Je vois. Seulement... tu ne penses pas que ton... animosité envers lui aurait plutôt un lien avec le fait qu'il... travaille au bar ?

— Comment ça ?

— Eh bien... je me demande si... tu ne le prends pas en grippe à cause... d'Owen. Tu te dis peut-être que ce Charles lui vole sa place derrière le comptoir. J'ai pas raison ?

Quelque peu offusquée, je m'apprête à lui répondre violemment. Mais lorsque je croise son regard si tendre et si pur, j'abaisse les épaules, vaincue.

— Si, c'est possible, murmuré-je entre mes dents.

— Écoute, dit-il en posant ses mains froides sur mes épaules, je sais que ces derniers mois ont été difficiles et qu'il t'a fallu du temps, mais t'en prendre à ton barman n'est pas la solution.

— Je sais, mais ça me fait du bien.

Il sourit.

— D'accord, mais tu dois prendre sur toi, même si c'est compliqué, et je sais que tu y arriveras. Tu veux que je te dise pourquoi ?

— Vas-y.

— Parce que tu es quelqu'un de bien, Naomi Dubois. Tu es gentille et tu te soucies du bien-être des gens.

Je ne réussis pas à garder mon sérieux et attrape un oreiller que je m'empresse de plaquer sur mon visage.

— Mmmh.

— Mais si vraiment tu te sens mieux en t'en prenant à lui, poursuit Alex, alors, ne te gêne pas. Cela dit, ne va quand même pas jusqu’au meurtre. Mais si malgré tout tu en arrives là, je t'aiderai à cacher le corps. Je te fournirai même un alibi.

— Très drôle. Mais... en même temps, si ce Carl venait à disparaître, ce ne serait pas vraiment une grande perte pour l'humanité.

— Il s’appelle Charles. Tu fais exprès de ne pas retenir son prénom ou quoi ? me questionne mon vampire.

— Peut-être. Et alors quoi ? On va m'arrêter pour ça ?

— Ça fait six mois, Naomi. Qu'est-ce que tu sais sur lui exactement ? Tu as déjà essayé de lui faire la conversation ?

— Je n'en ai pas envie. Ça fait six mois que je fais tout pour ne pas avoir à lui parler. Je fais même mon maximum pour ne pas me retrouver seule avec lui dans une pièce.

— Ça ne peut pas durer ainsi, Naomi. Vous travaillez ensemble.

— Mais je le sais, ça ! Je sais que tu as raison. Seulement... je n'y arrive pas !

L'esprit tourmenté, Alexander s'assoit à côté de moi, allongeant mes jambes sur ses cuisses avec ses mains fermes et puissantes.

— Écoute, reprend-il, tu es une femme extraordinaire, aimée de tous, et ça ne doit pas être marrant pour ton barman d'être snobé par toi, surtout en voyant comment tu te comportes avec les autres personnes. Il doit se demander ce qu'il a fait de mal pour que tu le détestes à ce point.

— C'est exactement ce qu'il m'a dit ! m'exclamé-je. Il m'a reproché de ne pas l'apprécier ! Mais qu'est-ce que j'y peux, moi ? Je ne l'aime pas, un point c'est tout !

Je vois alors mon futur mari secouer la tête de droite à gauche, les yeux mi-clos.

— Naomi, tu es plus intelligente que ça. Tu dois te montrer professionnelle.

— Pourquoi est-ce que tu le défends ?! Je suis ta fiancée, ce qui veut dire que tu dois être de mon côté ! Pas du sien !

Les mains devant lui, comme pour me montrer qu'il s'avoue vaincu, mon vampire se lève, avant de prendre curieusement mes mains dans les siennes.

— Très bien, comme tu voudras, me dit-il. Inutile de tergiverser là-dessus ce soir. J'ai une bien meilleure idée.

— De quel genre ?

— Lève-toi et tu verras.

— Argh... c'est obligé ?

— Oui. Allez, lève-toi. Ce que j'ai à te montrer va te remonter le moral. J'en suis persuadé.

— Qu'est-ce que c'est ?

— Lève-toi, répète-t-il. Tu vas voir : tu vas adorer.

— Grrr...

Je me libère du fauteuil en pestant et me retrouve face à mon homme d'un mètre quatre-vingt-quatorze, ma tête levée vers lui. Alexander me pivote ensuite de manière que je lui fasse dos, et sans me prévenir, me place un bandeau sur mes yeux, qu'il prend soin de nouer correctement à l'arrière de ma tête.

— Heu... qu'est-ce que tu fais ?

— Fais-moi confiance, souffle-t-il à mon oreille. Tu ne vas pas être déçue.

— Je ne sais pas pourquoi, mais... j'ai peur, tout à coup.

— Tu n'as aucune raison d'avoir peur, fais-moi confiance.

Ses mains sur mes épaules, il me guide à travers l'obscurité avec, j'en mettrais ma main à couper, un air plus qu'enjoué sur le visage.

— Avoue que tu aimes ça, lancé-je.

— Quoi donc ?

— Avoir le contrôle.

— Sur toi ? Oh, oui. T'as pas idée.

Je lui adresse immédiatement une tape sur le torse et l'entends s'esclaffer dans mon dos.

— Accepte d'être dominée, pour une fois, rajoute-t-il.

— Arrête. On n'est pas dans Fifty Shades, et tu n'es pas Christian Grey, alors, retire-moi ça.

— Non. Accorde-moi juste quelques minutes de ton temps.

— Mais où est-ce que tu me conduis ?

— Tu vas le savoir très vite. C'est une surprise.

— Je n'aime pas les surprises.

— Celle-là, tu vas l’adorer.

Subitement, la porte du garage s'ouvre, et la froideur de la pièce ne tarde pas à venir m'envahir de toute part.

— Avance encore un peu, me susurre-t-il.

J'obéis et sens, avec étonnement, une odeur d’essence venir me chatouiller les narines.

— Tu es prête ? me torture-t-il de sa voix charmeuse.

— Non, mais retire-moi ce truc.

Il s’exécute, et lorsque je peux à nouveau percevoir les choses qui m'entourent, mes yeux sont automatiquement attirés par une Dodge noire flamboyante, ornée de bandes centrales noires satinées aux fins contours rouge sang qui découpent toute la voiture en son centre, garée entre les étagères et le congélo.

— Tu t'es acheté une nouvelle voiture ?!

— Correction : je t'ai acheté une nouvelle voiture.

— Quoi ?!

— Ça fait six mois que tu empruntes la Camaro pour le boulot, alors, je pense qu'il est temps que tu aies ton propre véhicule.

Les battements de mon cœur entreprennent une course folle, et mes pupilles se dilatent de désir et d’impatience pour cette beauté qui se trouve devant moi, et qui ne demande qu'à être possédée par... moi.

— Alex...

— Considère ça comme un cadeau de mariage, me chuchotet-il, ses bras autour de mon cou.

— T'es taré.

— Non. Pas du tout.

— Mais qu'est-ce que c'est, comme engin ? lui demandé-je, toujours en état de choc.

— Une Charger SRT Hellcat Octane.

— Une quoi ?

— Une Charger SRT Hellcat Octane, répète fièrement mon vampire. Elle se présente avec des roues en aluminium forgé de 20 pouces, des freins Brembo avec étriers rouges, ainsi que des sièges de performance SRT noirs satinés.

— Waouh... J'adore quand tu joues les vendeurs automobiles, susurré-je docilement à mon fiancé.

— Les voitures n'ont aucun secret pour moi, ma douce. Je connais leur mécanique comme personne.

— Tout comme celle des femmes.

— En effet, confirme-t-il dans un regard inconvenant. Alors, où en étais-je ? Ah, oui ! Des coutures rouges également présentes sur les sièges ainsi que sur les ceintures, un écusson SRT Hellcat noir au tableau de bord ultra design, et bien sûr, le GPS intégré. Vu que tu te perds tout le temps, j'ai pensé que ça pourrait t'être utile.

— Merci, c'est gentil !

— Bah quoi ? C'est la vérité, non ?

— Mmmh.

— Sans oublier toutes les autres options, qui sont : la commande vocale, le radar de recul, l'aide au stationnement et l'alarme de voiture sans fil. Et voilà !

— Mon Dieu... Tu es fou.

— Oui, de toi.

Je me tourne précipitamment vers mon bienfaiteur, agrippe son t-shirt d'une main et l'attire vers moi pour pouvoir l'embrasser. Chaque fois, le goût de ses lèvres me fait penser à un mélange de framboise et de sucre, attirant les miennes comme des aimants. Ces mêmes lèvres qui ne demandent qu'à se faire posséder et torturer. Ces lèvres que mes dents aiment tant titiller avec tourment.

Sa bouche vient ensuite se perdre dans mon cou, et j'en profite pour déposer un doux baiser derrière son oreille.

— Je t'aime, soufflé-je avec sincérité. Je t'aime tellement.

— Je t'aime aussi.

Enthousiaste, je me détache de mon fiancé, toujours mes mains posées sur son torse.

— Tu veux faire un tour ? m'interroge-t-il, tout sourire.

— Et comment !

— Alors, en route !

Il me présente joyeusement les clés, que je me dépêche de saisir avant de foncer m'asseoir au volant. Alexander, lui, prend place sur le siège passager en m'analysant, le visage émerveillé.

— Attache ta ceinture, trésor,

— Naomi, je suis un vampire.

— Et alors ?

— Et alors rien. Toi, attache ta ceinture.

— Ça va, on se détend.

Je le vois qui secoue la tête d'amusement, pendant que j'insère les clés dans le contact. Le moteur se met en route sans un bruit, et tout énervée, je démarre, le pied au plancher.

— Heu... vas-y mollo, quand même, me souffle Alex.

— Chut.

— Chut ?

— Parfaitement. Encore un commentaire et j'te jette dehors, j'te préviens.

— D'accord...

Mon fiancé se cale alors au fond de son siège, passablement dérouté.

Je sens que je vais m'amuser comme une petite folle, au volant de cet engin !

Après plusieurs allers-retours sans grand intérêt dans notre quartier, je m'engage avec enthousiasme sur la I-65.

— Naomi, ralentis, lâche soudainement Alexander.

— Pourquoi ?

— Pourquoi ? Peut-être parce que tu es quarante kilomètres au-dessus de la vitesse autorisée.

— Nan, c'est vrai ?

— Oui.

— Bah... ce n'est pas si grave. Après tout, je ne dois pas être la seule à le faire.

— Quoi ?! Je rêve ?! Naomi, ce n'est pas parce que tu as une nouvelle voiture que tu dois te croire au-dessus des lois !

— Pourquoi ? Toi, tu le fais bien.

— Je... euh... Oh, c'est pas vrai...

— Hi, hi, hi.

Prise dans l'euphorie de la situation, je décide d’allumer la radio et tombe sur la chanson Misery Business du groupe Paramore. Extatique, j'augmente sans perdre une seconde le volume au maximum et commence à me déhancher au rythme du tempo.

— Naomi !

— Quoi ?!

Mon vampire coupe subitement la radio, pour me fixer avec un mécontentement flagrant.

— Tu rigoles ?! Concentre-toi sur la route ! Tu vas causer un accident si tu continues comme ça.

— Oh, ça va.

Je pousse un soupir.

— Bonjour l'ambiance.

Il choisit de ne rien répondre, même si je peux tout de même l'entendre grogner quelque chose entre ses dents.

— Ça va, détends-toi un peu.

— Je me détendrai quand tu rouleras à la bonne vitesse, me gronde-t-il.

— Bon, d'accord. Pas la peine de t’énerver.

Je ralentis donc avec renfrognement pour me concentrer plus attentivement sur le trafic.

— Naomi, le feu ! hurle à nouveau Alex.

— Quoi encore ?!

— Le feu !

— Bah quoi ?

— Il était rouge !

Oh merde.

— C'est vrai ?

— Oui !

— Oups. J'espère qu'il n'y avait pas de radar.

— Je rêve ?! Tu viens réellement de dire « Oups » ?

Embarrassée, je me tourne vers lui et hausse les épaules, lui offrant, par la même occasion, mon air le plus angélique.

— Oups.

Je me focalise une fois de plus sur la route et entreprends un virage plutôt houleux au moment de remonter Vaulx Lane.

— Ouh ! Alors là, c'était moins une, dis-je en évitant de justesse un conteneur poubelle.

— Je crois que je vais être malade, bafouille mon fiancé à mes côtés.

— Oh... arrête de faire ta mauviette.

— J'te demande pardon ?!

Ouh là.

Je préfère ne rien répondre, et consciente de l'humeur de mon bien-aimé, je ralentis avant de prendre la prochaine à droite.

Une fois garée devant la maison, je coupe le moteur et détache ma ceinture avec une grande vivacité.

— Waouh ! Une chose est sûre : je ne regrette pas la vieille Cadillac de Kate.

— Je crois que je vais vomir, balbutie Alexander, sa tête posée contre la vitre.

— T'es sérieux, là ? Je pensais que c'était impossible pour vous, êtres immortels.

— C'est ce que je croyais aussi. Maintenant, je n'en suis plus aussi certain.

La mine rechignée, je le regarde sortir de la voiture et avancer malhabilement jusqu'au garage.

Mince, on dirait bien que je l'ai fait bugger.

Même si je me suis bien amusée au volant de ma nouvelle voiture, je choisis de la rentrer dans le garage et de fermer la porte derrière moi. Je pars ensuite à la recherche de mon vampire et le retrouve affalé sur le canapé, le regard dans le vide. Je me glisse donc jusqu'à lui, légèrement anxieuse.

— T'es toujours en vie ? lui demandé-je prudemment.

— Non.

Un petit rire m'échappe alors.

— D'accord, je vais donc reformuler : est-ce que tu regrettes de m'avoir acheté cette voiture ?

— Non, tu avais besoin d'une voiture à toi. Je n'imaginais simplement pas que tu étais inconsciente à ce point. C'est une chance qu'on n'ait pas croisé les flics.

Aussitôt, la honte m'envahit, et plus que consciente de mon comportement récent, je m'assieds au sol, les yeux rivés sur mes pieds.

— Désolée.

Dans la seconde qui suit, j'entends Alexander se redresser et venir se positionner derrière moi.

— Qu'est-ce qui t'arrive, Naomi ? Je ne te reconnais plus.

— J'en sais rien. J'avais juste...

— Besoin de te défouler un peu ?

— Ouais.

— C'est à cause de Charles ? Qu'est-ce qu'il a bien pu te dire pour te mettre dans un état pareil, au point que tu aies soudainement besoin d'adrénaline ?

— C'est pas... c'est pas que j'aie besoin d’adrénaline. J'avais... juste envie de... lâcher prise.

— Au point de risquer de finir au tas ?

— Oui, je sais. Tu es déçu, j'ai compris.

— Arrête, je ne suis pas déçu, rétorque-t-il en venant titiller ma nuque de ses doigts figés, je veux juste m'assurer que tu vas bien, c'est tout.

Désabusée, je me tourne vers lui et me laisse perdre dans son fabuleux océan de bleu. Mes mains se baladant sur son torse, je le pousse en arrière pour me positionner au-dessus de lui, plaçant mes lèvres assez proches des siennes pour les frôler avec convoitise.

— Ça ira bien. Je te le promets.

Une esquisse de sourire apparaît sur son joli visage, et mes paumes sur ses joues, je pose sensuellement ma bouche sur la sienne. Ses mains se resserrent dans mes cheveux, et attentive à ses réactions, je me retire de lui avant qu'il ne puisse répliquer.

— Au fait, tu es rentré tôt, ce soir, constaté-je. Ana n'a pas besoin de toi à la boîte ?

— Ana a toujours besoin de moi, répond-il en levant les yeux au ciel.

— Alors, pourquoi rentres-tu si tôt, ces temps-ci ? Ne me dis pas que c'est à cause de moi ?

— Naomi...

— Tu sais, je peux survivre quelques heures seule, le soir, hein.

— Je sais.

— Je ne veux pas qu'Ana s'imagine que c'est moi qui t'éloigne d'elle. Elle commence seulement à m'apprécier. Je n'ai pas envie qu'elle recommence à me détester.

— Arrête, elle ne t'a jamais détestée.

— Mais ça pourrait arriver. Avant, tu passais tes nuits au Tasty Palace.

— Ça, c'était avant.

— C'est bien ce que je dis ! Tu es patron de boîte de nuit, Alex.

— Oui, je suis au courant, merci beaucoup, me dit-il avec son air charmeur.

— Arrête de te moquer, je suis sérieuse. Tu n'as pas à chambouler toute ta vie pour moi.

— Bien sûr que si.

— Non, Alex. Je ne veux pas que, plus tard, tu me reproches des choses.

— Quoi ?! Naomi, jamais je ne te reprocherai quoi que ce soit.

— Tu dis ça maintenant, mais les années vont passer et...

— Non, arrête. Ne va pas sur ce terrain. Je te l'interdis. Jamais je ne regretterai mon choix. Jamais je ne regretterai de t'avoir choisie, toi.

— Tu en es sûr ?

— Sûr à cent pour cent.

Il m'ouvre ses bras, et rassurée, je m'y réfugie avec soulagement.

Même si Alexander m'affirme que je n'ai aucune crainte à avoir, j'ai tout de même peur qu'un jour, sa vie auprès de moi ne lui suffise plus. Que se passera-t-il quand il réalisera qu'en fait, j'avais vu juste depuis le début et que cette vie banale ne lui convient définitivement plus ? Comment réagirai-je quand il m'avouera que le mariage ne fait que l’enfoncer un peu plus profondément dans une routine qu'il ne supporte plus ?

Mon Dieu, pour l'instant, je préfère ne pas y penser.

2

Vendredi 10 juillet 2020 ~ J-8 avant le mariage ~

Le lendemain, ma journée au Young Hopes ne se passe pas aussi bien que je l'avais espéré. Charles marche visiblement sur des œufs avec moi et il ne cesse d'accumuler les maladresses, ce qui, pour être honnête, me donne encore moins envie de lui adresser la parole. Cependant, pour faire plaisir à Alex et lui prouver ma bonne volonté, j'essaie de me forcer à converser avec lui, mais je ne sais pourquoi, aucun son n'est en mesure de sortir de ma bouche.

Tant pis, je réessayerai demain.

Ou pas.

Le soir, aux alentours de dix-neuf heures, je quitte le club la première, encore une fois, et roule en direction de Edgehill, l'esprit tourmenté.

Lorsque je me gare devant la boîte de mon fiancé, mes yeux sont automatiquement attirés par une flamboyante Lamborghini Miura rouge, stationnée effrontément contre la façade du Tasty Palace.

Non mais elle est à qui, cette bagnole ?

Intriguée par ce visiteur surprise, je sors de ma Dodge avec empressement et accélère le pas jusqu'au bureau d'Alexander. Une fois devant, je frappe trois coups, avant d'entendre la voix chaleureuse de mon vampire retentir à travers la porte :

— Oui, entre.

Quand je pénètre dans la pièce, je surprends, avec stupéfaction, mon fiancé en compagnie d'une magnifique brune, vêtue d'une robe noire de créateur et chaussée de bottes Fiore de Luca, collée à quelques centimètres de lui.

Malheureusement, je crois avoir trouvé la propriétaire de la Lamborghini.

— Salut, Naomi.

— Salut. J'te dérange ?

— Non. Pas du tout, s'empresse de répondre mon mari. Carla Marchesi, laissez-moi vous présenter Naomi Dubois, ma...

— Je suis la dirigeante du Young Hopes. Le club sur Hackworth Street, dis-je en m'avançant vers elle.

Je lui présente aussitôt ma main, qu'elle serre avec une antipathie flagrante.

— Désolée. Je ne vois pas de quel club vous voulez parler.

Pourquoi est-ce que ça ne m'étonne pas ?

— Ah oui, il est vrai que ce n'est pas un club qui correspond à tout le monde.

Alex choisit cet instant pour se racler la gorge, cherchant définitivement à mettre fin à cette situation de malaise manifeste entre cette Carla et moi.

— Le Young Hopes est un club de concerts, précise-t-il. Naomi le dirige à la perfection.

— Vraiment ? s'étonne Carla. Tu as l'air de savoir de quoi tu parles.

— Parce que je suis...

— Monsieur Wilkerson est l'un de mes investisseurs, répliqué-je pour empêcher mon fiancé d'aller plus loin.

— Vraiment ?

— Oui.

Mon vampire m'offre instantanément un regard interrogateur, que je préfère tout bonnement ignorer.

— Eh bien, je ne savais pas que tu trouvais de l'intérêt dans ce genre de passe-temps, Alexander, ricane-t-elle.

Non mais elle est sérieuse, elle ?

— Le Young Hopes n'est pas un passe-temps, riposté-je, mais un lieu de divertissement pour les jeunes.

— Mais je n'en doute pas, me répond-elle, toujours aussi condescendante.

Alex se racle une nouvelle fois la gorge, visiblement très embarrassé.

— Bon, euh... je te remercie pour ta visite, Carla, mais je ne suis pas intéressé.

Éhontée, cette Carla pose alors sa main droite sur le torse de mon futur époux, en faisant glisser ses doigts excentriquement manucurés le long de son buste, et ce, sensuellement. Sa bouche laquée d'un rouge vif à seulement quelques millimètres du visage de mon vampire, je lutte de toutes mes forces pour ne pas exploser lorsqu'elle lui murmure tendrement ces mots à l'oreille :

— Quel dommage. J'espère sincèrement que tu reviendras sur ta décision.

Non mais je rêve ?!

Alexander, lui, ne bouge pas, comme hypnotisé par cette bimbo, toutefois, et pour mon plus grand soulagement, il finit par répondre à sa demande par la négation :

— Je ne crois pas, non. Mais tu es une femme tenace. Tu trouveras quelqu'un d'autre.

— Je ne trouverai jamais quelqu'un comme toi, décrète-t-elle, mielleuse.

— Non, ça, c'est sûr, lui confirme Alex, mais ma réponse restera non, je suis désolé.

Carla, manifestement déçue, recule d'un pas en faisant la moue.

— Bon, comme tu voudras. J'ai tout de même été très heureuse de te revoir, Alexander.

— Moi de même, Carla.

Cette dernière se détache enfin de mon vampire, pour s'avancer vers la sortie en faisant volontairement claquer ses talons sur le sol.

— Naomi, dit-elle en me faisant un misérable signe de tête.

— Mademoiselle Dubois, la reprends-je.

Elle se met à pouffer de façon sardonique, avant de refermer la porte du bureau derrière elle.

Non mais quelle conne !

Enfin seule avec mon fiancé, je me tourne vers lui, la mine renfrognée, en attente d'une explication de sa part.

— Quoi ? m'interroge-t-il, les yeux vitreux.

— Tu aimes les brunes aux yeux verts, d'après ce que je vois.

— Pourquoi dis-tu cela ?

— Tu te fous de moi ?! Cette femme te tripote sans vergogne, et toi, tu la laisses faire !

— Quoi ? Oh, Naomi, c'était purement innocent.

— Bien sûr. Tu sais quoi ? Je vais laisser des inconnus me toucher entre les seins, et on verra bien si tu trouves ça toujours aussi « innocent ».

— OK, Naomi. Tu as eu une sale journée ? Laisse-moi deviner : c'est Charles ?

— Ne change pas de sujet. C'est qui, cette femme ?

La bouche entrouverte, un sourire se dessine progressivement sur le visage de mon vampire.

Oh, non.

— Naomi Dubois, seriez-vous jalouse ? demande-t-il en s'approchant allégrement de moi.

— Ça n'a rien à voir. Après ma journée de boulot, tout ce que je désire, c'est embrasser mon amoureux, et la première chose que je vois en entrant dans ton bureau, c’est madame Sangsue collée à toi.

Alexander se plante subitement devant moi, toujours aussi amusé.

— J'le crois pas : tu es jalouse, chuchote-t-il.

Je suis jalouse, moi ?

Oh, merde.

Tout doucement, Alex vient poser ses lèvres glacées au creux de mon épaule gauche, et comme d'habitude, je dois résister comme une folle pour ne pas céder à ses avances.

Mes mains posées sur son torse, je le repousse d'un vif geste.

— Bon, OK. Tu as raison : je suis jalouse. Et alors ? J'ai des raisons de l'être !

— Vraiment ?

— Nan mais tu t'es regardé ?!

— Ah... Naomi... J'aime quand tu es jalouse. Ça te va si bien.

— Et moi, je n'aime pas trouver mon homme en compagnie d'autres femmes. Surtout quand elles sont aussi peu farouches.

— Tu n'as aucune raison de t'inquiéter. Je me fiche de cette Carla. C'est toi qui as toute mon attention.

— Qu'est-ce qu'elle voulait ?

— Parler business. Rien d'important, crois-moi.

Au moment où je m'apprête à lui demander à quel genre de business il fait référence, la porte du bureau s'ouvre à la volée, et aussitôt, Anastasia fait son entrée :

— Alex ! C'est bien Carla Marchesi que je viens de voir sortir de ton bureau ?! Oh... salut, Naomi.

— Salut, Ana.

La vampire est habillée d'une robe noire Finley courte à volant, asymétrique, de la marque Solace London, dévoilant son dos d'une blancheur et d'une beauté renversantes, et chaussée d’escarpins Giambattista Valli d'une hauteur impressionnante.

Une chose est sûre : madame Lamborghini peut aller se rhabiller !

— Oui, c'était elle, lui confirme mon futur époux en soufflant.

— Et elle a encore essayé de te chauffer ?

— Ana.

Alexander lui lance immédiatement un regard noir, et Ana grimace, confuse.

— Désolée.

— Donc, d'après ce que j'entends, madame Pétasse est une habituée des lieux ? lâché-je avec une contrariété évidente dans la voix.

— Naomi, arrête. Cette fille, c'est personne.

— Tu rigoles ou quoi ?! riposte sa collègue. Carla Marchesi est une avocate millionnaire qui essaie depuis toujours de te passer la bague au doigt.

Quoi ?!

— Merci beaucoup, Ana.

— OK. Je m'en vais, déclaré-je.

— Non, Naomi, attends, réplique Alex en me retenant par le bras.

— Oh, tiens : y a Jane qui m'appelle, je crois, nous lance subitement la vampire.

Elle se précipite alors gauchement vers la porte et disparaît de notre vue.

Pas très subtil comme pirouette, si vous voulez mon avis...

— Alors ? dis-je en me tournant vers mon fiancé. Tu comptes me dire la vérité ou pas ? Sinon, je m'en vais, j'te préviens.

— Très bien, lâche-t-il dans un soupir. Carla Marchesi est une femme redoutable en affaires. Dans le milieu, on l'appelle « le Barracuda ». C'est une conne qui ne sait rien faire d'autre que regarder les gens de haut et les faire passer pour des moins que rien, comme elle a essayé de faire avec toi. Je m’apprêtais à lui dire qui tu étais, mais c'est toi qui as préféré jouer la carte professionnelle. J'ai rien compris, d'ailleurs. Pourquoi est-ce que tu ne m'as pas laissé lui dire que tu étais ma fiancée ?

— Parce qu'à chaque fois que les gens apprennent que je suis ta petite amie, ils changent radicalement de comportement envers moi.

— Fiancée, me corrige Alex. Tu as un problème avec ce mot ?

— Arrête, je n'ai aucun problème avec ce mot. Je n'ai pas honte d'être ta fiancée, si c'est ce que tu insinues. Je refuse simplement que l'on me dénigre parce que je suis une femme et qu'en plus de ça, je suis blonde.

— Crois-moi, ce n'est pas le cas. Au contraire, les gens se sentent impressionnés par toi. Tu es jeune et tu sais parfaitement où tu vas. Tu te bats pour tes idées, et c'est ça qui dérange.

— Tu essaies de m'amadouer, là.

— Non, je te dis uniquement la vérité. Je t'aime, Naomi Dubois. Cette Carla Marchesi ne t'arrive même pas à la cheville.

— Pourquoi te sens-tu obligé d'impliquer cette Carla dans notre conversation ?!

— Naomi ! C'est toi qui as amené le sujet sur la table !

— Ah... oui. C'est vrai.

Alexander se met à rire, puis, le plus discrètement possible, passe ses bras autour de mes hanches pour m'attirer à lui.

— J'adore quand tu joues la femme possessive, souffle-t-il. C'est très rassurant.

— Rassurant ?

— Hein hein. Ça prouve que tu tiens à moi.

— T'en doutais ?

— Pas une seconde.

D'un geste précipité, il m'agrippe par la taille et me soulève comme une plume. Avec sa vitesse surnaturelle, il me fait tomber sur le canapé en cuir noir plutôt brutalement, protégeant tout de même ma tête avec ses paumes gelées.

— Maintenant, je compte bien te retirer tous tes vêtements, m'annonce-t-il.

— Quoi ? Ici ?

— Mmmh-mmmh.

Mon fiancé se retire de moi pour aller fermer la porte à clé et revient se placer au-dessus de moi, sans que je le voie se déplacer. Tout doucement, il commence par faire glisser les manches de ma robe sur mes bras, jouant avec les bretelles de mon soutien-gorge avec taquinerie.

— Attends, je... je ne suis pas très à l'aise de faire ça ici, lui confié-je.

— Pourquoi ?

— Parce que... on est... dans ton bureau. Et qu'en plus de ça, tout le monde peut nous entendre.

— Ils sont bien plus occupés à danser qu'à nous écouter, crois-moi.

Ses baisers deviennent de plus en plus passionnés, pendant que ses doigts, eux, commencent à progresser finement vers mon entrejambe.

— Mmmh... non, Alex. Attends.

— Argh, quoi encore ?

— Tu as déjà fait l'amour avec d'autres femmes sur ce canapé ?

Il se redresse alors dans la seconde, pour me dévisager avec un embarras plus qu'évident.

— Euh...

Ça veut dire oui.

— OK. Tu sais quoi ? Ça n'va pas le faire.

— Quoi ? Oh, Naomi...

Je m'ôte de mon vampire adoré avec regret et me lève rapidement du fauteuil, le cœur serré.

— Grâce à toi, j'ai des images plus qu'atroces dans la tête, ajouté-je. Merci bien.

— T'es pas sérieuse quand même ?

— Si !

— Tu t'en vas réellement ?

— Oui !

— Mais... pourquoi ? lance-t-il, offusqué.

— Tu sais parfaitement pourquoi !

— C'est ridicule, enfin. Naomi, reviens !

— Tu ne peux t'en prendre qu'à toi !

— Naomi, reviens, je t'en prie.

— Non ! On se retrouve à la maison.

Je déverrouille la porte, chagrineuse, et disparais de son bureau. Je force ensuite le pas jusqu'à la sortie et croise Ana, plantée devant la porte, ses mains posées élégamment sur ses hanches élancées.

— C'était rapide, dis donc, lâche-t-elle, victorieuse.

— Vraiment, Ana ?

— Désolée. C'était trop tentant.

— Mouais...

— Tu lui en veux de ne pas s'affirmer devant cette Carla, c'est ça ? devine-t-elle.

— Mais c'est quoi son problème ?! On aurait dit un toutou devant un nonos bien juteux ! Rien à voir avec l’Alexander que j'ai l'habitude de voir !

— Cherche pas à comprendre, Naomi. Ici, chaque fois qu'elle débarque, on rigole de son attitude, mais c'est vrai que, vis-à-vis de toi, ce n'était pas très cool. J'aurais dû être plus délicate, je m'en excuse.

— Bah, laisse tomber.

— Si ça peut te réconforter, Alex n'a jamais succombé à ses charmes.

— C'est vrai ?

— Oui. Est-ce que ça t'aide ? Tu te sens mieux maintenant ?

— Oui. Merci, Ana.

— De rien. Mais j'espère que tu as au moins pensé à marquer ton territoire ?

Sans réussir à retenir un sourire, je secoue la tête de gauche à droite, avant de finalement me détacher d'elle.

— Bonne soirée, Ana.

Morne, je me dirige vers mon véhicule et rejoins la maison, quelque peu contrariée.

Quand je stationne ma voiture dans le garage, la température extérieure est toujours aussi douce et agréable. Le ciel est d'un doux rosé, et mon humeur quelque peu améliorée.

Une fois dans ma cuisine, je me prépare un Tian de légumes à la Méditerranéenne et me sers un verre de Chambertin, que je pars déguster sur le canapé, devant plusieurs épisodes de la série American Horror Story.

Ces derniers mois, je me suis grandement améliorée niveau cuisine, et si ma mère pouvait voir ça, elle serait certainement fière de moi.

À vingt-deux heures trente, je file sous la douche, avant de me mettre au lit, dans un excellent état d’esprit, et ce, malgré les questions qui ne cessent de me tarauder au sujet d'une certaine Italienne aux mains baladeuses et au penchant suffisant pour les voitures de luxe.

Bien des heures plus tard, des lèvres glacées viennent m'embrasser délicatement dans le cou, et aussitôt, je sens tous mes poils se hérisser à leur contact.

— Tu dors ? me chuchote mon vampire.

— Oui.

Je l'entends immédiatement pouffer silencieusement.

Nan mais c'est quoi, cette question ?

Dans les secondes qui suivent, il s'allonge à mes côtés, avant de passer un bras par-dessus mon ventre avec sa tendresse habituelle.

— Quelle heure est-il ? marmonné-je.

— Presque minuit.

— Carla est revenue te voir après mon départ ?

— Naomi... arrête avec Carla.

— Mmmh.

— Hé, regarde-moi.

Face à son insistance, je pivote vers lui, légèrement maussade. Seulement, à l'instant où il isole mon visage entre ses mains et qu'il effleure mes lèvres avec les siennes, je prends instantanément conscience de l’absurdité de mon comportement récent.

— Tu es la seule femme qui compte à mes yeux, tu entends ?

La mine rechignée, je me pince les lèvres en reculant la tête.

— D'accord.

Alexander sourit, me dévoilant ses splendides canines et entortillant énergiquement une mèche de mes cheveux entre ses doigts.

— N'empêche, dis-je, cette Carla machin-chose est magnifique.

— Tu es magnifique.

— Tu le penses vraiment ?

— Évidemment. Il faudrait être aveugle pour ne pas te trouver sublime, me répond-il.

Une chaleur imminente prend alors possession de tout mon corps, passant par ma colonne vertébrale, pour finir par titiller délicieusement tous mes membres, qui étaient jusqu’à présent endoloris.

— Je t'aime, murmuré-je à ses lèvres.

— Je t'aime encore plus.

Ses mains posées sur mes joues, il me fait retomber en arrière avec douceur. Sa bouche finit par trouver la mienne, et tout mon monde me percute à nouveau en pleine face.

Pourrai-je un jour réaliser la chance que j'ai de l'avoir auprès de moi ?

Je ne le sais toujours pas.

***

À mon réveil, je suis assénée par un mal de crâne insoutenable et me dirige à la salle de bain dans l'espoir de trouver quelque chose à prendre contre la douleur. J'ouvre sans attendre l'armoire à pharmacie et reste plusieurs secondes consternée devant la quantité de médicaments présente sous mes yeux.

— Qu'est-ce que tu cherches ?

Surprise par l'apparition fulgurante de mon fiancé, je fais un bond en arrière et viens buter violemment dans mon vampire.

— Alex ! Ça ne va pas ou quoi ?! Ne te faufile pas derrière moi comme ça ! Tu as failli me faire mourir de peur !

— Désolé, réplique-t-il en souriant. Je t'ai entendue te lever.

— Mon cœur a failli lâcher, là.

— Dans ce cas, je t'aurais fait du bouche-à-bouche.

— Pff... Tu sais toujours quoi dire, hein ?

— Mmmh-mmmh. Au fait, tu ne m'as pas répondu. Qu'est-ce que tu cherches ?

— Hum... du paracétamol : j'ai mal à la tête.

— Oh.

— Mais c'est quoi, tous ces trucs ? dis-je en désignant l'armoire remplie de médicaments. Tu as cambriolé une pharmacie ou quoi ?

Tout penaud, il reste me dévisager, sans oser ouvrir la bouche.

— Alors ?

— Je suis juste... prévoyant, finit-il par me répondre.

— Parce que tu vis avec une humaine, tu penses avoir besoin de tout ça ? Tu as peur que je tombe malade ?

— Si c'était vrai... ce serait une mauvaise chose ?

Une douceur immense se dessine sur son visage, et profondément touchée, je ne peux empêcher un sourire de s'étirer sur mes lèvres.

— Nan. Ce serait adorable.

Mon futur époux s'approche tendrement de moi, abattant sa bouche sur la mienne avec une ardeur folle. Malheureusement, mon mal de crâne m'oblige à mettre fin à ce petit moment d’évasion matinal, qui était pourtant très agréable.

Je me retire donc de lui dans une grimace et attrape rapidement une boîte de Paracétamol.

— Ça va aller ? me demande Alexander, visiblement inquiet.

— Oui. Ce n'est qu'une migraine. Ça va passer.

— Tu en es sûre ?

— Mais oui. C'est rien, c'est le stress. Maintenant que Harry me laisse la gérance totale du Young Hopes, je me fais tout doucement aux responsabilités que ça implique. Je me mets trop la pression.

— Ouais. Ça, c'est sûr.

Avec un froncement de sourcils, je reste le scruter d'un air charmeur.

— Tu ne connaîtrais pas un moyen efficace contre l'anxiété, par hasard ? lui demandé-je de ma voix la plus séductrice.

— Hum... si, j'ai bien une idée ou deux...

Sans précipitation, il enroule ses bras autour de ma taille, avant de venir tourmenter agréablement mon lobe gauche de ses dents. Seulement, lorsque sa main progresse vers ma joue, et que je peux apercevoir clairement l'écran de sa montre à son poignet droit, mon cœur s'emballe.

— Mince ! Déjà huit heures ?! Je vais être en retard !

Je m'ôte de mon fiancé avec empressement et cours m'habiller dans la chambre. Je m'empare ensuite de ma bouteille d'eau posée sur la table de nuit et avale mon comprimé en moins d'une seconde.

— Tu n'es pas censée manger quelque chose avec ça ? intervient mon vampire de sa voix réprobatrice.

— Euh... non.

— Mmmh. Moi, je suis persuadé du contraire.

— Je n'ai pas le temps, Alex.

— Tu n'as pas le temps de manger ?

Je finis de boutonner ma robe blanche à fleurs roses sans lui répondre, puis chausse mes Converses avant de descendre les escaliers.

— Tu comptes déjeuner avant de partir ?

Planté devant moi, mon fiancé me dévisage avec méfiance, barrant la route entre moi et la porte d'entrée, délibérément.

— Oui, réponds-je dans un soupir. Je vais déjeuner avant de partir.

— Bien.

— Et arrête de faire ça.

— De faire quoi ?

— D’apparaître devant moi à la vitesse de la lumière.

— Pourquoi ? Je sais que tu aimes ça.

Je ne le contredis pas, et amusée, je le contourne pour accéder à la cuisine, où je commence par me servir une gigantesque dose de café crème.

— Et sinon..., lance Alexander depuis le living-room, est-ce que tu as... parlé à Charles ?

Le nez levé de ma tasse de café, je me tourne pour le défier du regard.

— J'te demande pardon ?

— Je te demande si tu as pu dialoguer avec lui, comme une employeuse est censée le faire avec ses salariés.

Grrr...

— Ce n'est pas moi qui l'ai engagé. Je ne suis pas son employeuse.

— Certes. Mais vous travaillez ensemble.

— Et alors ?

— Alors, je te demande si tu as pu avoir une conversation avec lui. Une conversation sérieuse, j'entends.

— Euh... non.

— As-tu au moins essayé ?

— Mais qu'est-ce que ça peut te faire que je lui parle ou non ? lancé-je, renfrognée.

— Naomi, ce serait beaucoup plus simple pour toi si tu réussissais à t'entendre avec ton barman.

— Mais dans quel camp es-tu ?!

— Quoi ? Je ne suis dans aucun camp ! lâche-t-il, les yeux plissés.

— Eh bah, tu devrais être dans le mien !

Fâchée, j'attrape une nectarine dans la corbeille à fruits, enfile ma veste en jean, m'empare de mon sac à main et sors de la maison avec empressement.

— Naomi, ne fais pas ça.

— Bonne journée !

Je claque volontairement la porte derrière moi et rejoins mon véhicule, grandement contrariée.

Maintenant, monsieur se met à jouer les thérapeutes.

Il ne manquait plus que ça !

Durant cette journée, je suis dans un tel état d'anxiété que je passe mon temps à me ronger les ongles jusqu'au sang, et ce, sans ressentir la moindre douleur. Heureusement pour moi, mon moral s'améliore lorsque, quelques heures plus tard, je reçois sur mon portable un message de mon vampire adoré : « Je te demande pardon pour tout à l'heure. Tu avais raison : j'aurais dû te soutenir. Je ne voulais en aucun cas te blesser. Si tu ne souhaites pas devenir amie avec ton barman, tu en as parfaitement le droit. Je n'avais pas à t'imposer ça. Pardonnemoi. Je t'aime. »

— Je t'aime aussi, soufflé-je.

— Vous avez dit quelque chose ?

Charles, qui vient de revenir de la réserve avec une caisse remplie d'eau-de-vie dans les bras, reprend place derrière le bar en m'interrogeant du regard.

— Oh, euh... non. Je me parlais à moi-même.

— Oh.

Il m'offre un sourire timide, puis retourne à ses cocktails.

Oh, c'est pas vrai.

— Charles ?

Il se redresse alors, visiblement surpris.

Waouh. Le fait qu'il trouve curieux que je veuille lui faire la discussion serait-ce la preuve qu'Alex ait raison à mon sujet ?

Mince. Je suis décidément une horrible gérante.

— Hum... je voulais juste vous dire que je ne serai pas là du treize juillet au dix-sept août.

— Oh. D'accord. Votre mariage ? devine-t-il.

— Ouais.

— Votre mari vous emmène en lune de miel ?

— Je ne sais pas trop ce qu'il a prévu, mais oui, c'est l'idée.

— Eh bien, je saurai gérer le bar.

— Je sais.

Abasourdi, il continue à me regarder avec incompréhension.

— Vraiment ? Vous me faites confiance pour rester ici tout seul ?

— Bien sûr. Je suis désolée si je vous ai fait croire que ce n'était pas le cas. Ce n'est pas contre vous.

— Waouh. Je pensais que vous me détestiez, me confie-t-il.

C'est pas vrai, Naomi.

Ma mère serait certainement furieuse contre moi.

— Nan. Je ne vous déteste pas. C'est juste que... je déteste le changement.

— Oui. Je peux le comprendre. Et maintenant que j'y repense, ça a dû être très douloureux pour vous de me voir derrière le bar, la première fois.

— Ouais. L’ironie, c'est que... c'est vous qui avez le droit de me détester, vu comment je me suis comportée avec vous.

— Nan, je ne vous déteste pas.

— Tant mieux alors, et pour continuer sur de bonnes bases, on pourrait peut-être arrêter les vouvoiements, qu'en pensestu ?

— Je n'y vois aucune objection, me répond-il, enchanté.

— Génial.

Dans un sourire, je m'éloigne du comptoir et retourne à mes occupations, le cœur bien plus léger.

Bon, voilà une bonne chose de faite.

Le reste de la journée se passe assez rapidement, et dans la soirée, le club se remplit tranquillement.

— C'est ici le deuxième club le plus branché du coin ?! résonne une sensuelle voix féminine.

Intriguée, je me retourne avec précipitation et aperçois Anastasia s'avancer jusqu’à moi dans une somptueuse robe Gucci blanche aux contours dorés, fendue sur les côtés.

— Ana ? Mais qu'est-ce que tu viens faire ici ?

— Waouh. C'est à peu près la même phrase que je t'ai balancée le premier jour où tu t'es pointée au Tasty Palace, me fait-elle remarquer. Et tu m'en as voulu longtemps après ça.

— C'est vrai. Pardonne-moi. Je suis contente de te voir.

— C'est Alex qui m'envoie. Tu n'as pas répondu à son texto. Il se fait du souci.

— Ah oui, j'ai complètement oublié, avoué-je.

— Tu étais trop occupée à martyriser ton barman ? plaisantet-elle.

— C'est pas vrai... Alors, il t'en a parlé ?

— Évidemment. Il me dit tout. Enfin... presque tout.

— De mieux en mieux...

— Alors ? Les réconciliations ont été chaud bouillantes hier soir ? me lance-t-elle, hilare.

Déconcertée, je lui jette un regard en coin, sans pour autant réussir à garder mon sérieux.

— Non : j'étais bien trop fatiguée pour ça.

— Mmmh... Tu me déçois, là.

— Attends... on est réellement en train de parler de sexe, là ?

— On dirait bien.

— Waouh. On en a fait du chemin depuis l'année dernière, remarqué-je.

— C'est clair.

Devrais-je lui demander si Carla est revenue voir Alex aujourd'hui ?

Non, ce serait vraiment pitoyable de ma part.

Mais en même temps, j'ai envie de savoir !

— Et sinon... Carla est revenue à la boîte, aujourd’hui ?

Dans un mouvement presque imperceptible, les sourcils de la vampire se haussent.

— Naomi, serais-tu inquiète ?

— Bah... un peu, oui.

— Pourquoi ? Elle ne l'intéresse pas du tout.

— Tu en es sûre ?

— Oui. Ce n'est pas du tout son genre. J'en sais quelque chose.

J'ose un regard vers elle et la vois me sourire : un sourire discret, mais franc.

— Merci, Ana.

— Pas de quoi, dit-elle.

L’instant d'après, Anastasia consulte sa montre, avant de reculer de deux pas.

— Il faut que j'y aille, m'annonce-t-elle.

— Quoi, déjà ?

— Ouais. J'ai un patron très à cheval sur le respect des temps de pause.

— Oh, je vois.

Elle commence à se diriger gracieusement vers la sortie, mais se retourne à mi-chemin vers moi, en faisant virevolter ses beaux cheveux soyeux dans les airs, avec une élégance remarquable.

— Au fait, Alex voudrait savoir à quelle heure tu comptes rentrer.

— Hum... je vais rester jusqu’à vingt-trois heures, ce soir. J'ai laissé Charles fermer beaucoup trop souvent.

— Oh. Alors... vous deux, vous êtes... amis, maintenant ?

— Peut-être pas aussi proches, mais tu peux dire à Alex que Charles et moi avons crevé l’abcès.

— Je lui dirai. Il en sera ravi. Sur ce, j'te souhaite une bonne soirée, Naomi.

— À toi aussi.

Je la regarde avec enjouement s'avancer vers la porte du Young Hopes, en constatant, par la même occasion, que beaucoup d'hommes présents sont en train de baver littéralement sur son corps de déesse.

Un rire m'échappe alors.

Ce n'est pas étonnant : Ana est une très belle femme qui attise énormément les regards.

D'où ma question : pourquoi est-elle encore célibataire ?

Une fois la collègue de mon futur mari hors de ma vue, je me tourne vers Charles et le surprends à me scruter d'un regard étrange.

— C'était Anastasia Petrović, l'informé-je. J'ignore si tu la connais.

— J'en ai entendu parler.

— Ouais. J'en doute pas.

— Elle travaille avec ton fiancé, c'est ça ?

— C'est ça.

— Elle a l'air d'être une femme... très classe.

— Elle l'est, confirmé-je. C'est une bonne amie à moi. Même si, au début, c'était loin d'être gagné.

Charles se met à rire, et je lui réponds par un sourire modeste.

— Bon, on se remet au boulot, barman ?

— À tes ordres, patronne !

— Génial.

Bon, il n'est pas si détestable que ça, ce Charles, même si j'ai mis six mois à m'en rendre compte. Mais bon, comme on dit : « mieux vaut tard que jamais. »

Le soir, en rentrant, je me fais couler un bain chaud pour éliminer la pression de cette longue journée et abuse légèrement de mes cubes effervescents senteur mûre sauvage.

Quand j'en sors, bien une heure plus tard, je me vêts de mon kimono en soie et descends au salon regarder un film d'horreur. Cependant, les heures défilent, et je cesse de lutter contre la fatigue, si bien que lorsque j'ouvre à nouveau les paupières, je surprends mon fiancé à m'observer avec un air angélique.

Je me redresse alors dans un mouvement brusque et me claque plusieurs fois les joues avec mes mains.

— Je suis réveillée.

Alex, amusé, se met à rire, avant de venir s'asseoir à mes côtés.

— Ah, Naomi... Si tu savais à quel point je t'aime.

Sans prévenir, il vient poser sa bouche sur la mienne, déclenchant des millions d'électrochocs dans tout mon être.

— Tu sens délicieusement bon, chuchote-t-il en s'allongeant sur moi.

— Je crois que le nom exact, c'est Mûre Sauvage.

— Hum...

Sa langue, titillant ma chair exposée, progresse lentement jusqu'à ma poitrine, amplifiant le désir intense que j'ai pour lui.

— Tu n'as pas répondu à mon message, susurre-t-il à mon oreille.

— Je sais, excuse-moi. Je n'ai pas eu une minute à moi, aujourd'hui.

— Ana m'a dit qu'entre ton barman et toi, ça évoluait plutôt bien.

— Elle t'a dit ça ?

— Mmmh-mmmh.

— Et... qu'est-ce qu'elle t'a dit d'autre ?

— Que tu t'inquiétais encore au sujet de Carla Marchesi.

— Oh.

De ses dents, il mordille mon sein droit à travers ma nuisette, et incapable de me contrôler, je sursaute de plaisir, réveillant grandement la virilité de mon homme.

— Naomi ?

— Mmmh ?

— Ce n'est pas Carla que je vais épouser.

— Je sais.

— Donc, tu vas arrêter de te torturer à ce sujet ?

— Oui, promis.

— Bien. Alors, maintenant que ce sujet est définitivement clos, laisse-moi prendre soin de toi comme tu le mérites.

— Comment ça ?

— Tu l'as dit toi-même, tu es très surmenée, ces temps-ci, alors, laisse-moi te déstresser. Après une longue journée de travail, il faut que tu apprennes à te détendre.

— Oh. C'est un programme qui me tente bien.

— Mmmh... je savais que ça te plairait.

Ses yeux dans les miens, je succombe une fois de plus à son pouvoir de séduction.

Est-ce qu'il réalise seulement qu'à chaque fois qu'il est dans les parages, je suis sur le point de me consumer sur place ?

Oui, il doit certainement le savoir. Aucun doute à avoir là-dessus.

***

Samedi 11 juillet 2020 ~ J-7 avant le mariage ~

Le lendemain, dans l'après-midi, je m'installe au salon pour finaliser les dernières petites étapes du mariage, en essayant de ne pas succomber au stress qui menace de s'abattre sur moi.

Vers quinze heures, Alexander s'installe près de moi, avec sa tête penchée et cet air interrogateur que je connais trop bien.

— Qu'est-ce que tu fais ? me demande-t-il, visiblement intrigué.

— Je me noie une nouvelle fois dans le stress.

— Je croyais que tu étais de repos.

— C'est le cas.

— Je rêve. Naomi, quand on est de repos, on n'est pas supposé travailler.

— Tu me connais si mal que ça ? le questionné-je sans lever les yeux de ma paperasse.

Mon fiancé pouffe silencieusement, avant de venir caresser tendrement mon dos de sa main glacée.

— Je croyais qu'Ana s'était déjà occupée de toutes les formalités ? reprend-il.

— Oui, elle l'a fait. D'ailleurs, elle vient de m'envoyer le visuel des faire-part. Tu veux voir ?

— Et comment !

Sans attendre, j'affiche la page concernée et pivote vers mon vampire pour observer sa réaction :

ALEXANDERWILKERSON &NAOMIDUBOIS

ONT LA JOIE DE VOUS CONVIER À LEUR MARIAGE LE :

18 JUILLET 2020

AU CEDARWOOD WEDDINGS

3831 WHITES CREEK PIKE, NASHVILLE, TN 37207, ÉTATS-UNIS

À 21H

— Waouh ! s'exclame-t-il. Ils sont super. Ils nous représentent bien : simples et efficaces.

— Ouais, mais il reste encore quelques petits détails à régler, lâché-je dans un soupir.

— Quel genre de détails ?

— La chanson de notre première danse, par exemple. Sans oublier celle de mon entrée.

— Alors ça, c'est facile.

Interloquée, je me tourne vers mon fiancé pour l'interroger du regard.

— Ah oui ?

— La musique de ton entrée, c'est With Love.

— Christina Grimmie ?

Il acquiesce.

— Même si cette soirée ne s'est pas très bien terminée, enchaîne-t-il, on aura quand même passé un excellent moment.

Alexander et moi avons dansé un slow sur cette chanson le soir où il m'a emmenée au bal de Midtown, la nuit où Eddy est apparu dans ma vie pour la première fois, et il est vrai que même si l’arrivée du vampire fut le début des ennuis, ce moment intime partagé avec Alex s'est avéré être très plaisant, pour ne pas dire... magique.

— Mouais... t'as pas tort, avoué-je. Et qu'en est-il de notre première danse ?

— Notre premier slow à Memphis. C'est cette musique-là, notre chanson.

— When I Look At You.

— Miley Cyrus.

— Tu as raison : cette danse a tout changé.

— Et la nuit qui a suivi aussi.