Les Caprices de Marianne - Alfred de Musset - E-Book

Les Caprices de Marianne E-Book

Alfred De Musset

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Beschreibung

Extrait : "CIUTA : Ma belle dame, puis-je vous dire un mot ? MARIANNE : Que me voulez-vous ? CIUTA : Un jeune homme de cette ville est éperdument amoureux de vous ; depuis un mois entier, il cherche vainement l'occasion de vous l'apprendre ; son nom est Coelio ; il est d'une noble famille et d'une figure distinguée."

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EAN : 9782335005486

©Ligaran 2014

Personnages

CLAUDIO : podestat.

OCTAVE.

CÉLIO.

TIBIA : valet de Claudio.

PIPPO : valet de Célio.

MALVOLIO : intendant d’Hermia.

UN GARÇON D’AUBERGE.

DOMESTIQUE DE MARIANNE.

DOMESTIQUES D’HERMIA.

DEUX SPADASSINS.

MARIANNE : femme de Claudio.

HERMIA : mère de Célio.

 

La scène est à Naples.

 

(Costumes italiens du temps de François Ier.)

 

Les indications sont prises du public. Le premier personnage inscrit occupe le n° 1, à la gauche du spectateur, et ainsi des autres. Ces indications sont données pour éviter la confusion dans les entrées et les sorties, dans le cas où la pièce serait jouée ailleurs qu’à la Comédie Française.

Acte premier

Le théâtre représente une place publique. À droite, au premier plan, une grille de jardin, attenant à une maison dont la porte d’entrée est près de la grille. Un balcon en saillie est au premier étage, entre la porte et le tournant de la maison ; une jalousie et un rideau masquent la fenêtre. À gauche, au premier plan, une auberge avec une tonnelle au-devant, sous laquelle se trouvent une table et un banc.

Scène première

Célio, Pippo.

(Ils entrent par la droite, du plan au-dessus de la maison.)

CÉLIO

Eh bien, Pippo, tu viens de voir Marianne ?

PIPPO

Oui, monsieur.

CÉLIO

Que t’a-t-elle dit ?

PIPPO

Plus dévote et plus orgueilleuse que jamais. Elle instruira son mari, dit-elle, si on la poursuit plus longtemps.

CÉLIO

Ah ! malheureux que je suis ! je n’ai plus qu’à mourir ! Ah ! la plus cruelle de toutes les femmes !… Et que me conseilles-tu, Pippo ? quelle ressource puis-je encore trouver ?

PIPPO

Je vous conseille d’abord de ne pas rester là, car voici son mari qui vient de ce côté.

(Ils retirent dans le fond, du côté de la maison.)

Scène II

Claudio et Tibia entrent par la grille ; Claudio est en longue robe rouge ; Tibia le suit en portant la queue de sa robe.

CLAUDIO

Es-tu mon fidèle serviteur, mon valet de chambre dévoué ? Apprends que j’ai à me venger d’un outrage.

TIBIA

Vous, monsieur ?

CLAUDIO

Moi-même, puisque ces impudentes guitares ne cessent de murmurer sous les fenêtres de ma femme. Mais patience ! tout n’est pas fini.

(Il aperçoit Célio et Pippo dans le fond et va à l’extrême gauche.)

Écoute un peu de ce côté-ci ; voilà du monde qui pourrait nous entendre. Tu m’iras chercher ce soir le spadassin que je t’ai dit.

TIBIA

Pourquoi faire ?

CLAUDIO

Je crois que Marianne a des amants.

TIBIA

Vous croyez, monsieur ?

CLAUDIO

Oui, il y a autour de ma maison une odeur d’amants. Personne ne passe naturellement devant ma porte ; il y pleut des guitares et des messages secrets.

TIBIA

Est-ce que vous pouvez empêcher qu’on ne donne des sérénades à votre femme ?

CLAUDIO

Non ; mais je puis poster un homme derrière la grille et me débarrasser du premier qui entrera.

TIBIA

Fi ! votre femme n’a pas d’amants… C’est comme si vous disiez que j’ai des maîtresses.

CLAUDIO

Pourquoi n’en aurais-tu pas, Tibia ? Tu es fort laid, mais tu as beaucoup d’esprit.

TIBIA

J’en conviens, j’en conviens.

CLAUDIO

Regarde, Tibia, tu en conviens toi-même ; il n’en faut plus douter et mon déshonneur est public.

TIBIA

Pourquoi public ?

CLAUDIO

Je te dis qu’il est public.

TIBIA

Mais, monsieur, votre femme passe pour un dragon de vertu dans toute la ville. Elle ne voit personne, elle ne sort de chez elle une pour aller à la messe.

CLAUDIO

Laisse-moi faire ; je ne me sens pas de colère. Après tous les cadeaux qu’elle a reçus de moi !… Oui, Tibia, je machine en ce moment une épouvantable trame, et me sens prêt à mourir de douleur.

TIBIA

Oh ! que non !

CLAUDIO

Quand je te dis quelque chose, tu me ferais plaisir de le croire.

(Ils sortent par le fond, à gauche.)

Scène III

Célio, seul, rentrant par le fond, à droite.

Malheur à celui qui, au milieu de la jeunesse, s’abandonne à un amour sans espoir !… Malheur à celui qui se livre à une douce rêverie avant de savoir où sa chimère le mène et s’il peut être payé de retour ! Mollement couché dans une barque, il s’éloigne peu à peu de la rive ; il aperçoit au loin des plaines enchantées, de vertes prairies, et le mirage léger de son Eldorado ; les flots l’entraînent en silence, et quand la réalité le réveille, il est aussi loin du but où il aspire que du rivage qu’il a quitté : il ne peut plus ni poursuivre sa route, ni revenir sur ses pas.

(On entend un bruit d’instrument.)

Quelle cette mascarade ? N’est-ce pas Octave que j’aperçois ?

Scène IV

Célio, Octave.

(Octave entre du fond à droite ; il a par-dessus son habit un long domino tout ouvert, un loup sur le visage et une batte d’Arlequin à la main.)

OCTAVE, s’adressant aux gens de la mascarade, qu’on ne voit pas.

Assez, mes amis, retournez au logis ; assez raclé pour aujourd’hui.

(Descendant la scène et ôtant son loup ; à CÉLIO)

Comment se porte, mon bon monsieur, cette gracieuse mélancolie ?

CÉLIO

Octave, ô fou que tu es ! tu as un pied de rouge sur les joues ! D’où te vient cet accoutrement ? N’as-tu pas de honte, en plein jour ?

OCTAVE

Ô Célio ! fou que tu es ! tu as un pied de blanc sur les joues ! D’où te vient ce large habit noir ? N’as-tu pas de honte, en plein carnaval ?

CÉLIO

J’allais chez toi.

OCTAVE

Et moi aussi j’allais chez moi. Comment se porte ma maison ? Il y a huit jours que je ne l’ai vue.

CÉLIO

J’ai un service à te demander.

OCTAVE

Parle, Célio, mon cher enfant. Veux-tu de l’argent ? je n’en ai plus. Veux-tu mon épée ? voilà batte d’Arlequin. Parle, parle, dispose de moi.

CÉLIO

Combien de temps cela durera-t-il ?… Huit jours hors de chez toi !… Tu te tueras OCTAVE

OCTAVE

Jamais de ma propre main, mon ami, jamais j’aimerais mieux mourir que d’attenter à mes jours.

CÉLIO

Et n’est-ce pas un suicide comme un autre, cette vie que tu mènes ?

OCTAVE