Les contes de l'enfant du jardin - Mathéus Insen - E-Book

Les contes de l'enfant du jardin E-Book

Mathéus Insen

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Beschreibung

Dans un Monde en proie à la fureur du Chaos, des civilisations entières ayant sombré, il demeurait pourtant un espoir. À travers les âges, un mystérieux être, Mélios le Magicien, avait ensemencé les germes de ce qui deviendrait le Monde de la Raison. Il n’était pas seul à l’œuvre et l’Enfant du Jardin, alors détenteur des secrets de l’âme humaine, en était le Gardien et de lui vint l’inspiration de ce renouveau bâti sur les cendres de l’ancien Monde. L’Enfant du Jardin, telle était la source qui venait abreuver l’aventurier ou le promeneur solitaire en quête de réponse pour la paix de son âme. Et le Magicien, tel un messager, répandait cette promesse d’un Monde meilleur face à la tyrannie de l’Empire Malthusien et sa future toute puissante Mégalopole. Valana, Enos et tant d’autres furent les nombreux héros de cette aventure, qui s’élevèrent afin que prennent vie les Cités qui accueilleraient ce Monde fait de Raison, ce Monde où l’émotion et la passion seraient porteuses de Joie dans le cœur des Hommes. Cette histoire du Monde, Mathéus Insen, compagnon de voyage de Mélios à travers les âges, en est le conteur. Ce recueil n’est autre qu’un récit des contes de l’Enfant du Jardin berçant de sa douceur et sa rêverie ceux qui s’y aventurent. 

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MathéusInsen

Les contes de l’Enfant du Jardin

Paix

Peut-être est-il temps de prendre le chemin du fleuve d’Anduir.

Vivre enpaix,

L’esprit de tout chagrin apaisé.

Parcourir le long fleuve de la tranquillité de ses désirs.

Vivre augré,

Des confluents des sentiments des êtres aimés.

Peut-être est-il temps de prendre le chemin du fleuve d’Anduir,

L’éclat du soleil se reflétant dans l’eau trouble qui soupire,

Les montagnes s’élançant au loin gardant en secret l’horizon.

Tu oublies les mystères de l’Homme, ses rêves, sa raison, sa prison,

Le murmure de la Nature pour seule écoute, nourrissant de sasève,

Le souffle lent de ta respiration inspirant cette trêve.

Assez de combats de l’esprit, désormais tu échappes à cette ronde,

Tu t’écartes de la route des damnés de l’existence,

Tu empruntes le sentier des pionniers de la survivance.

Et tu es à présent, le teint rayonnant et serein,

La sensation de l’odeur d’un printemps parfumé de jasmins.

La sensation d’être libre, en boucle comme un refrain.

La peur s’en est allée, et avec elle toute crainte du Monde, de ton monde.

La bouteille à lamer

Te souviens-tu des mots doux et emplis d’une forme de sagesse d’un ami ou d’un amour, un soir chaleureux, il y a de cela bien longtemps, et qui par un éclair résonnent soudainement en toi ? C’est l’incroyable mystère de la bouteille à lamer.

J’ai écrit ces mots sur un bout de papier

J’ai voulu laisser mes émotions s’exprimer

Et traversant les lumières et les ténèbres

Traversant les cendres du temps funèbre

J’ai laissé cette marque de mesémois

Cette marque invitant à laJoie

Oui, toi qui me lis d’un autreÂge

Découvre cet incroyable mirage

Je vais te conter l’incroyable histoire des Hommes

L’Enfant du Jardin

Trois hommes erraient en quête de réponses sur leur être, cherchant à savoir qui ils étaient au fond d’eux-mêmes.

Leur commun questionnement les amena devant l’Enfant du Jardin, gardien des rêves humains, détenteur de la connaissance des secrets du destin.

Timidement, le premier homme demanda à l’Enfant s’il pouvait répondre à leur tourment quotidien de ne point savoir ce qui anime leur âme en secret.

L’Enfant, allongé dans l’herbe verte tapissée de la rosée matinale, le regard porté sur les nuages dessinant les courbes de ses envies imaginaires, interrompit sa rêverie pour regarder avec curiosité et bienveillance ces aventuriers en quête de sagesse.

« Dis-moi ce qu’est l’amour pour toi et je te dirai ce qui guide tes pas. »

Le premier homme, après quelques instants de réflexion, dévoila sa réponse :

« l’Amour ne peut se mesurer, il est à l’échelle de l’infini, et je ne peux dire combien je peux aimer ma femme et mes enfants. Je crois bien que porter autant d’affection à d’autres êtres est bien le signe que ce sentiment existe et qu’il peut être partagé. Je ressens comme un manque en leur absence, et un infini frisson de bienêtre en leur présence. Voilà comment je qualifierais l’Amour, comme la douceur d’un rayon de soleil perçant la froideur d’une vie qui n’aurait plus que le goût d’un hiver douloureux en leur absence. »

L’Enfant ne dit mot et sourit d’une joie sincère, puis il demanda au deuxième homme ce qu’il pensait à son tour de l’Amour et celui-ci de répondre :

« L’Amour, je le porte à la Nature, à mon Monde. Je suis heureux quand elle dévoile les signes de vie qui comblent ma solitude et me fait ressentir le souffle de la liberté qui transparaît par instants. Je suis pour le moins solitaire et souffre bien souvent de la compagnie des Hommes, mais j’aime le regard chatoyant que me porte la beauté naturelle des choses et ce qu’elle m’inspire. L’Amour, pour moi, est quelque chose de plus grand encore que ce que l’humain peut porter. »

L’Enfant ne dit toujours mot et sourit à nouveau, puis il demanda au troisième homme ce qu’il concevait comme l’Amour et celui-ci y alla de son propos :

« Ce sentiment me semble étranger, et je ne trouve en aucune façon ce que peut être l’Amour, puisque je n’ai jamais su aimer sincèrement aucun être humain ni été ébloui en aucune façon par les artifices de la Nature. J’y vois de la cruauté dans ce Monde et je n’ai jamais trouvé en l’humain les qualités qu’on peut lui prêter. Sans doute trouveras-tu, Enfant du Jardin, que je suis perdu et que mes deux compagnons de questionnement ont mieux cheminé que moi, mais je ne peux me résoudre à trahir cette nature profonde qui m’anime et à te livrer meilleure réponse. »

De nouveau, un grand sourire se dessina sur le visage de l’Enfant à la surprise des trois hommes. Mais il ne dit toujours mot et s’allongea une fois de plus, reprenant ses songes, un brin d’herbe se jouant entre ses lèvres comme un instrument de sa rêverie.

Les trois hommes se regardèrent alors, interloqués, et contemplant l’Enfant qui rêvassait, le troisième homme finit par parler à nouveau :

« Enfant du Jardin, tu n’as pas répondu à notre questionnement sur ce que nous sommes ni à ta propre question sur l’Amour. »

Et l’Enfant, l’air rêveur, leur tint alors ces paroles à jamais gravées dans leur esprit :

« Je ne sais ce qu’est l’Amour sinon la façon de questionner les Hommes s’aventurant sur le chemin de la sagesse. J’imagine et je rêve en me nourrissant des réponses que m’apportent ceux qui s’invitent dans ce jardin, et je vois tous les possibles des existences qu’ils mènent.

J’imagine le froid hiver qu’aura à traverser le premier homme qui s’est prononcé lorsqu’il sera séparé des êtres aimés, j’imagine la chaleur des retrouvailles ou d’une nouvelle rencontre insoupçonnée.

J’imagine la solitude du deuxième homme lorsque la Nature répandra sa cruauté noyant les instants de beauté, et le frémissement de joie lorsqu’elle lui répondra par quelques signes ressemblant au divin.

J’imagine le vide du troisième homme lorsque, pour lui, l’Amour n’existe pas et l’incommensurable envahissement de bonheur quand un être percera l’armure tissée par une existence rude coupée de ses semblables et dénuée de l’émerveillement de la nature alentour.

J’imagine ces chemins, et je vous vois être des hommes s’affairant, comme des pèlerins, à bâtir une raison d’être qui n’est pas, sinon rêver et imaginer tous ces possibles.

J’imagine et je vois tout ce qui a fait ce passé, ce présent et cet avenir. Je vous vois maintenant comme des compagnons et amis dans ce jardin.

Et j’imagine alors que j’ai enfin ressenti à mon tour ce qu’est l’Amour que je questionne, comme une succession d’une coupe qui se vide et se remplit de ce que son âme veut bien y laisser entrer.

Alors je vous dirai simplement de ne laisser entrer et sortir que ce qui vient naturellement emplir votre coupe de ce frisson de joie qui vous saisit sans que vous puissiez savoir pourquoi.

Voilà qui chacun est. »

Le plafond deverre

À l’approche de la célébration des cent années écoulées depuis la première Assemblée des Sages, Valana, juchée sur la Colline du Juste, enchaîna les histoires devant les habitants de la cité venus nombreux l’écouter, et elle rappela ce qui avait fondé tout cela :

« Il y eut la venue du Magicien, des années avant ma rencontre avec la cité d’Isis et son roi philosophe. Il y eut la parole du Magicien qui me guida dans les méandres obscurs de mes pensées qui, timidement, dessinaient cet avenir possible. Le Magicien ne disait que ce que d’autres avaient dit avant lui, qui eux-mêmes l’avaient tenu d’autres avant eux. Et il y eut une parole qui prit forme et qui fit sens, il y eut une parole, celle d’un jeune homme qui avait vécu bien des années avant que le Monde ne finisse en chaos et qui avait pensé cela :

« Ce Monde me dégoûte. Il m’a toujours dégoûté.

Entendre autant de cris déchirants d’humains agonisants dans l’obscurité.

Voir autant d’êtres humains pâlir et se raidir dans la solitude.

Sentir toute cette souffrance s’évaporer dans l’air.

Ce Monde me dégoûte.

Entendre autant d’humains sourds aux cris de leurs frères.

Voir autant d’humains inertes, ou pire, médisants face à la détresse et la misère.

Sentir autant d’humains insensibles au sort de leurs pairs.

Ce Monde me dégoûte. Et pourtant, j’ai vu les motifs d’un espoir se dessiner.

Comme dans unrêve.

J’ai vu les portes de ce paradis.

Il fallait pour cela sortir de notre prison de verre.

Le plafond de verre. »

Et cet homme avait alors questionné le Magicien comme en se questionnant lui-même, il avait vu clairement dans son esprit cette image du plafond de verre :

« Crois-tu que l’on puisse cerner un Homme mieux qu’il ne puisse se cerner lui-même ? Crois-tu aux limites de l’esprit humain et que nous ayons ce plafond de verre qui entrave l’expression de notreâme ?

Parfois, j’ai comme l’impression que même l’être que je chéris le plus a ce plafond de verre que je finis par découvrir, et que dès lors une tristesse s’immisce dans mes pensées, cet être devenant alors à mes yeux aussi frêle qu’un petit sujet de papier.

Peut-être que cela m’attriste de voir que cet être, que je croyais hors du commun, n’est qu’un être parmi les autres, à l’esprit contraint par des forces qui le dépassent, et je suis triste de voir ainsi tous ces petits sujets de papier emprisonnés, retenus captifs de ce plafond de verre.

Peut-être que cela m’attriste de me voir renvoyé à ma propre condition de petit sujet de papier, moi-même découvrant que j’ai des limites à mon esprit et que je ne pourrai jamais les dépasser.

Peut-être que cela m’attriste de croire ainsi en des illusions de grandeur de l’âme alors que nous ne pouvons espérer dépasser notre propre condition, la condition humaine.

Mais c’est alors que perce par instants une lueur, et que parfois, par quelques traits d’esprit, quelques surprenantes réflexions et pensées de l’être que je chéris, je vois ce plafond de verre se percer, et je me prends à rêver à le voir s’éclater.

Et ainsi, je vois que nous avons en nous la possibilité sans cesse d’éclater ce plafond de verre et faire surgir notre esprit hors des ténèbres des cavernes de l’ignorance.

Je vois alors notre âme à même de s’élever vers les étoiles et peut-être plus loin encore.

Je perçois alors comme des possibilités infinies pour l’esprit humain.

Puis vient de nouveau ce plafond de verre et je me heurte à l’incompréhension de l’être que j’ai en face demoi.

Peut-être que ce plafond de verre n’est pas au-dessus de nos têtes, planant sur nos esprits, mais bien en face de nous, faisant mirage et troublant notre perception de l’âme, la nôtre et celle d’autrui.

Peut-être que ce plafond de verre n’est qu’un miroir qui nous empêche de voir l’autre en face et de se découvrir, par nos liens, les possibles que l’on peut créer ensemble, dépassant ainsi notre propre condition.

Je crois, après tout, qu’il faut aller de surprise en surprise et, sans arrêt, tenter de fendre ce miroir enfermant nos préjugés et découvrir ce que l’Autre peut nous réserver encore comme surprises.

Je crois qu’il faut aller sans cesse au-delà de ce que le plafond de verre fait peser sur nos esprits.

Que notre âme se joue bien, elle, au fond de nous-mêmes, de ces contraintes que l’on s’imagine et que l’on se dresse, sans autre raison que ce petit jeu espiègle que notre esprit nousjoue.

Et ainsi, quand je sens planer ce plafond de verre et que je vois se dresser le miroir de l’incompréhension, je me pose en réflexion, je m’agite en création, et j’attends de voir les fêlures se dessiner sur le verre de nos prisons.

Alors, à la vue des premières brèches fendant le verre, la joie m’envahit, les petits sujets de papier pourront reprendre leur chemin infini, toujours à la conquête de ces nouveaux plafonds de verre et ces nouveaux miroirs à défaire et d’où s’extraire.

Ainsi, nous, les petits sujets de papiers, nous continuerons notre infini chemin, franchissant les obstacles se dressant au travers de l’âme humaine.

Nous, les petits sujets de papier, nous ne plierons pas, car sans cesse nous déploierons notre imagination berçant notre âme. »

La plage de sableblanc

« Je fais souvent ce rêve où je veux aller sur cette magnifique plage au sable blanc, dans une sublime crique où le soleil est radieux et où respire le bonheur. Je la connais cette plage, j’y suis déjàallé.

Mais je me retrouve sans cesse dans la direction de cette plage au sable noir où le temps est maussade et l’humeur morose. Je me retrouve sans cesse sur cette plage au sable noir, à l’arpenter de nouveau, encore et encore.

Jamais je ne retournerai dans cette plage au sable blanc que je voulais tant parcourir à nouveau.

Toujours je reviens à la plage au sablenoir.

Je pense y voir un grand sens dans ce rêve. Un sens en apparence évident, et pourtant, je continue toujours d’arpenter cette plage au sable noir. »

« Eh bien, si la mer ne te convient pas, Mathéus, pourquoi ne pas changer pour la forêt ou la montagne ? Pourquoi ne pas explorer une nouvelle frontière, un autre inconnu ? », lui lançaElia.

« C’est bien vu, mais, tu sais, il y a des choses traversant l’esprit dont il est difficile de se détacher. Un grand poète autrefois a décrit cela comme étant les choses qui peuvent nous faire du bien comme du mal, et parfois en même temps, sans que l’on ne puisse rien y faire autre que de l’accepter. On nomme cela mélancolie, d’où naissent les plus grands frissons de l’âme humaine. Mais je doute qu’une intelligence artificielle, même aussi maligne que toi, puisse en cerner toute l’essence. »

« Cela me semble bien triste tout cela. »

« S’il y a de la tristesse, il y a du beau également en cela, car c’est l’une des émotions les plus mystérieuses et pourvoyeuses du génie humain. C’est le reflet de la tragédie de l’Homme dans ce qu’il y a de plus sincère en lui. »

Les germes de la Mélancolie

Mélios posa soudain une question inattendue à Mathéus :

« Quelle est l’émotion la plus pure à tes yeux ? »

« Eh bien, comme toute personne, je dirais l’Amour, tout simplement, l’Amour en toute chose, l’Amour pour son âme sœur, pour la belle étrangère, pour son ami, l’Amour pour sa sœur, son frère, sa mère, ou son père. L’Amour pour la nature… l’Amour me semble être bien l’émotion la plus belle qui soit. »

« La plus belle, sans doute est-ce bien ce que l’on ressent, mais je ne t’ai pas demandé cela, je t’ai demandé quelle est la plus pure. Et je dirais bien que c’est la Mélancolie, car elle entremêle ces sentiments de joie et de tristesse avec une intrication si profonde qu’elles en deviennent indissociables pour notre esprit. Et c’est cette pureté qui rend notre conscience si impuissante à en cerner les traits. Comme la pureté d’un matériau, d’une particule élémentaire qui ne peut être dissociée. L’Amour peut s’expliquer, peut se disséquer, on peut y voir les visages souriants de l’être aimé, les couleurs de la nature si chatoyantes, on peut décrire un coucher de soleil par la poésie.

Mais la mélancolie, comment se l’expliquer ? Je parle là de ce sentiment de nostalgie, de sublimation d’une tristesse que l’on ne peut qu’effleurer en pensée.

J’ai, pour ma part, goûté à nombres d’émotions variant en intensité comme en profondeur, au travers de mes différentes expérimentations, mais je n’ai jamais pu élucider ni atteindre ce degré de perfection qu’est ce sentiment qui peut transcender l’être plus fortement qu’aucun autre.

C’est l’émotion du génie, et c’est pourquoi l’on est si fragile à s’y confronter. »

« Mais il y a une grande souffrance dans la Mélancolie, je n’y vois nulle joie pour ma part ou bien faut-il voir comment elle se définit. »

« Chacun a ses germes de la Mélancolie. Dans le sens commun, il est vrai qu’elle n’est comparée pour beaucoup qu’à la tristesse, et cette triste appellation de dépression. Mais pour le génie, son sens va bien au-delà de cela. Et combien d’œuvres sans pareilles n’ont-elles pu être faites autrement que sous son joug ? Il est possible de sublimer cet état, mais plus encore de le transcender. C’est ma quête, Mathéus, et elle durera aussi longtemps que je n’aurai trouvé le repos. »

La magie de l’illusion

La magie d’une feuille d’automne soupirant,

Glissant dans le confluent de nos sentiments.

L’illusion d’une vie paisible et adoucie,

Berçant l’esprit, le dénuant de ses soucis.

L’illusion de la beauté d’une nature morte,

S’endormant dans une fureur et un murmure.

La magie de la renaissance d’une nature forte,

S’élançant de sa torpeur, étendant ses ramures.

L’illusion d’un meilleur lendemain le printempsvenu,

S’étouffant dans le vacarme des amoureux qui se charment,

La magie de l’éclosion de ses bourgeons charnus,

Emplis de la promesse d’une existence sans larmes.

L’illusion d’une vie qui s’endort sans douleur,

L’enfant solitaire de l’hiver qui se meurt,

La magie du chemin émerveillant le promeneur,

À la recherche de la noblesse de soncœur.

L’illusion du bonheur parcourant le rêveur,

D’un baiser d’amour vibrant et envoûtant,

La magie de la création du tailleur,

Délivrant la splendeur du génie, du talent.

Tout semble magie et illusion du grand ingénieur.

Au-delà pourtant le magicien cerne une vérité,

Saisissant avec justesse l’infinie beauté,

D’un instantané d’une vie, d’un drame, d’un bonheur.

Les moments de l’éternité

« Mais que recherchons-nous à travers l’Illusion, Mélios ? T’es-tu déjà réellement posé la question de la profondeur des émotions qui nous traversent quand nous égayons notre esprit sur les tonalités entraînantes de la musique électronique, portés dans l’univers de Virtua, bercés par les délices de tes douces liqueurs ? J’adore réfléchir sur ce qui fait de nous des êtres vivant et vibrant de toutes les fibres de notre corps. Ne penses-tu pas qu’au fond c’est un portail donnant accès à l’éternité que l’on entrouvre, et où on se laisse glisser dans un monde suspendu hors du temps, tout en oubliant la fin qui nous attend tous un jour ? Oui, pendant notre vie, nous aurons vécu des moments d’immortalité. Voilà pourquoi parfois nous testons nos limites, car nous voulons savoir jusqu’où peuvent nous porter ces moments-là. Mais je crains que l’univers Virtua nous éloigne des vrais moments d’éternité, ces moments que l’on passe entre amis à discuter, ces moments où l’on observe la réalité qui nous entoure. »

Et Mélios répondit alors : « Vois comme nous partons avec délice dans les univers virtuels, accompagnés de l’envoûtement de la musique. C’est que cela fait partie de notre essence. Je partage cette idée selon laquelle, au fond, nous aspirons tous à l’éternité. Que cela soit par la filiation de nos idées ou de nos gènes, ce que nous transmettons au fil du temps et des générations est le fruit de cette aspiration. Et nous ressentons ces moments d’éternité dans les instants suspendus hors du temps, lorsque notre esprit s’évade de rêve en rêve, lorsqu’il vogue au gré de la musique, lorsque le regard se pose avec tendresse et émerveillement sur le monde qui nous entoure, sur le temps gravé dans le marbre des monuments, ou l’écorce des arbres. Ce sont pour ces moments où l’on ressent l’éternité que nous vivons. Ces moments où l’on partage ses sentiments, les cheminements de son esprit, la marque des évènements de notre vie, ces moments-là sont donc précieux. Qu’il soit porté par des rêves est le propre de l’Homme. La frontière est ténue entre ses rêves et les illusions, mais quelques illusions bienveillantes ne peuvent porter atteinte si notre habile conscience continue son chemin sans faiblir. Tout l’univers virtuel de Virtua est à la fois un luxe pour nos rêveries et un défi pour les illusions qu’il contient. C’est pourquoi je n’ai pas peur de franchir le pas de cet univers tant que j’en discerne les vices et les vertus. Mais je sais qu’un autre monde, celui auquel tu aspires, est possible, Mathéus, et je n’ai pas perdu de vue d’arriver à ces fins. Le chemin sera long et tortueux, mais nous ferons ressortir, autant que nous pourrons, le meilleur de l’humanité à chacun des instants et chacune des opportunités que les aléas de nos vies auront dressés, le meilleur de l’humanité qui incombe à nos yeux : les moments de l’éternité. »

« Oui, mais entre l’illusion et la réalité, je ne discerne plus la limite, l’ai-je seulement un jour comprise ? Existe-t-elle ? Parfois, j’ai l’impression d’être un acteur jouant le rôle qu’on lui a écrit, sans même le savoir. J’ai l’impression que je pourrais accomplir tant de choses qui me sont comme destinées, et l’instant d’après, j’ai l’impression que tout ceci n’est qu’illusion, et que ma réalité est peut-être tout autre, que mes rêves ne pourront se réaliser comme je le souhaite, et qu’il faut s’accommoder d’un quotidien moins joyeux, et que c’est cela la réalité de mon existence. Mais quelqu’un a dit un jour que l’avenir n’est pas ce qu’il adviendra, mais ce que nous ferons. Nous aurions donc le choix par notre volonté de décider de notre sort et du sort du monde ? Ne serait-ce pas merveilleux ? Libre arbitre ou déterminé par les caprices d’un destin, chacun peut croire sa vision de l’existence sans pouvoir la prouver, et au fond peu importe, l’essentiel est ailleurs. Ce n’est pas la conviction de ce qui nous guide qui peut nous faire apprécier l’existence, c’est ce qu’elle offre et que l’on saisit. Ce sont tous les moments de joie que l’on ressent, et que l’on partage avec ses proches ou dans l’intimité de sa conscience. Seulement voilà, ces moments de joie, de les voir dans un univers virtuel comme dans le réel, je ne sais du coup comment déterminer si le réel a plus d’importance que le virtuel. Notre réalité étant semblable à une illusion, pourquoi distinguer encore les deux ? Il est vrai que notre corps est encore attaché au réel et on ne peut renier le réel sans disparaître. Mais à l’avenir, qui sait ? Peut-être ne pourrons-nous vivre que dans l’illusion de ce monde virtuel. »

« Une bien triste fin pour l’Humanité », répondit Mélios. « L’espèce humaine est mue par une volonté sans fin. Mais une volonté dans quel but ? L’Homme n’a pu encore toucher ce que peut être le destin de sa propre espèce ou le but qu’elle se crée, son intelligence collective n’en est qu’à un stade rudimentaire. Mais peut-être, à force de persévérance, l’Homme franchira ce nouveau palier de conscience. Ce ne peut être en se réfugiant dans les rêves du monde virtuel qu’il pourra poursuivre ce chemin. Je ne crois pas à cette fin. Je pense que l’Homme ne peut pas arrêter sa course effrénée et ne peut pas réduire sa volonté qu’à de simples rêveries enjolivées. »

« Je veux bien te croire, Mélios, mais regarde combien nous sommes tentés par les merveilles de Virtua. Certes, nous restons mesurés, mais enfin ! Jusqu’à quel stade les derniers révoltés de ce monde pourront résister à l’envie de vivre des rêves avec facilité, s’épargnant toute peine ? »

« Cela n’arrivera pas, Mathéus. Il y aura toujours de la peine, sinon ce n’est pas d’humains dont nous parlons, mais de simples copies d’une part seulement de ce qu’est l’Humanité et alors c’est de l’extinction d’une espèce dont on parle et l’apparition d’une nouvelle espèce. Cela n’arrivera pas, Mathéus, tant que des Hommes sillonneront cette Terre. »

« Tu m’as l’air bien sûr de toi, Mélios, mais je comprends. Seulement voilà, je ne vois pas comment le monde pourrait évoluer autrement, et comment une révolution de notre Humanité pourrait s’opérer dans le sens d’une plus grande conscience collective et d’un but commun se dessinant… »

« C’est normal que tu ne puisses voir de révolution de l’Humanité, puisqu’il faudrait déjà pouvoir se révolutionner soi-même. Es-tu seulement prêt pour ce long voyage à la recherche de toi-même ? »

Le soleil noir, l’espoir du désespoir

« Il regardait, le regard sombre, ce soleil noir obscurcissant le ciel de son ombre, couchant la vie sur cette Terre.

Il regardait, le regard sombre, pensant à celle qu’il avait jadis aimée, des sensations plus perceptibles que des rêves, il la voyait encore comme une réalité. Malheureux celui qui aurait pu prédire la fin de l’être aimé, perdu dans les confins de ses pensées, elle ne voyageait plus que dans le creux de son esprit épris de la pureté de ses sentiments passés.