Lumières - Richard de Swarte - E-Book

Lumières E-Book

Richard de Swarte

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Beschreibung

Victime d’un malaise alors qu’il est dans sa voiture, Yvonick tombe dans un coma. Pendant qu’il est dans cet état léthargique, son esprit vagabonde et lui fait revivre des réminiscences de son enfance à travers des flashs. Entre voyage dans le temps et exploration de ses souvenirs lointains, jusqu’où la mémoire de notre héros pourra-t-elle le pousser ?


À PROPOS DE L'AUTEUR


Richard de Swarte, pour écrire, s'inspire des bribes de souvenirs de ses nombreux voyages ou de son quotidien. Avec sa plume, il traduit sensibilité et ressent.

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Seitenzahl: 121

Veröffentlichungsjahr: 2022

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Richard de Swarte

Lumières

Roman

© Lys Bleu Éditions – Richard de Swarte

ISBN : 979-10-377-7512-2

Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L.122-5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L.122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L.335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.

Du même auteur

- Folie Passagère, Éditions Le Lys Bleu, 2021 ;
- La rivière des parfums, Éditions Le Lys Bleu, 2022.

À Françou et Vincent

Yvonick roulait tranquillement sur la N 933 en direction de Duras, il prendrait la route départementale 27 lors de l’intersection située à hauteur de l’ancienne gare SNCF. Il pensait à son prochain rendez-vous qui sera le dernier de sa journée et il éprouvait une vive satisfaction pour le résultat de ses recherches. Le moteur de sa Mercedes équipée de 6 cylindres ronronnait avec douceur, il aime les voitures puissantes sans pour autant être irrespectueux de la vitesse, il se sentait en sécurité dans ce 4X4 qu’il venait d’acquérir.

Son attention fut d’abord attirée par quelques éclairs provenant, pensa-t-il, d’un orage éloigné. Le ciel changea du bleu au gris clair puis il aperçut une drôle de luminosité, celle-ci se précisa et forma deux lumières tout d’abord pâles, puis l’intensité augmenta progressivement, formant alors des faisceaux droits trouant le ciel gris duquel on ne distinguait pas la forme des nuages. La couleur était uniforme comme si une main de géant avait balayé en un instant le bleu éclatant du mois d’août. Deux larges cercles se formèrent, très rapprochés, desquels sortirent deux lumières vives éclairant le sol fixement au-dessus d’un champ de tournesols, comme une torche électrique ou un immense projecteur de plusieurs milliers de volts.

En quelques secondes, tout se figea dans la campagne, Yvonick n’était qu’à quelques dizaines de mètres des éclats éblouissants sortis du ciel fraîchement repeint, il lui sembla voir une brusque volte-face des fleurs jaunes qui se contorsionnaient pour fixer les deux torches de soleil. Dans ce mouvement soudain, il crut apercevoir certaines tiges se briser, laissant choir les grandes fleurs sur la terre.

De plus en plus intrigué par ce phénomène inhabituel, il stoppa son véhicule sur le bas-côté et actionna la poignée de la portière pour sortir. Il ressentit une brûlure dans l’abdomen, ses gestes devenaient de plus en plus lents. Il eut l’impression que le système électronique de la voiture avait mis en sécurité l’ensemble des éléments de commande. Après plusieurs tentatives, la portière restait obstinément fermée, il lui était impossible de s’extraire du véhicule. Il essaya avec les trois autres portières tout en commençant à paniquer, mais il se rendit à l’évidence et comprit qu’il était prisonnier de sa Mercedes.

Après avoir appuyé sur la touche appel d’urgence, dont la voiture est équipée, il reçut presque instantanément un message du centre de secours lui demandant le motif de son appel. Une douleur aiguë lui tarauda la poitrine, son souffle devenu court, il ne put articuler aucun mot. Yvonick venait de perdre connaissance.

Il se réveilla dans une chambre d’hôpital, l’esprit flou, sa vie était rythmée par un respirateur qui l’alimentait en oxygène. Ses yeux parcoururent la pièce et il vit tous les tuyaux reliés à des perfusions, il voulut tenter un mouvement mais son corps refusa de se redresser, il poussa un cri de douleur. Sa poitrine était ouverte, il eut la sensation d’être partagé en deux parties béantes.

Ses plaintes ont été perçues par une équipe soignante, composée de médecins et d’infirmières, lesquels sont très vite intervenus. Il fut plongé dans un coma artificiel pour le soulager de la douleur extrême qu’il ressentait.

Il eut le sentiment que la mort l’emportait et ce fut le trou noir.

Son esprit vivait à cent à l’heure, il survola la pièce, il vit son corps branché et inerte puis remonta le cours de sa vie dans un invraisemblable vacarme psychologique.

Le service d’assistance auquel était relié le véhicule n’obtenant pas de réponse claire de la part du conducteur avait alerté les services de secours d’urgence en donnant la position d’Yvonick. Une équipe de pompiers de Duras s’est rapidement rendue sur les lieux. Le diagnostic révéla une grave attaque cardiaque. L’ambulance conduisit le malade dans le service de cardiologie de l’hôpital le plus proche, situé à une vingtaine de kilomètres.

Dans cette immensité noire sans vie réelle, l’esprit du malade s’aventura dans les tréfonds de sa vie passée. Il remonta à sa plus petite enfance de laquelle des souvenirs s’étaient imprégnés dès l’âge de 3 ans.

Dans un vaste appartement situé au premier étage au-dessus d’un commerce d’alimentation tenu par ses parents, au centre, séparant les pièces de jour et les chambres, une verrière éclairait sur deux niveaux, privé et professionnel, une pièce désignée comme entrée et au-dessous un long magasin. Des garde-corps en fonte ouvragée bordaient le puits de lumière du logement, laissant en périmètre un passage qui permettait de parcourir la partie dominante du commerce.

Une nuit agitée, Yvonick, plein d’énergie, s’était levé, il avait sauté sur son tricycle et pédalait aussi vite qu’il le pouvait autour de la verrière. Il devait être 3 heures du matin. Ses parents, réveillés par le vacarme, l’avaient reconduit manu militari dans sa chambre.

Des bribes de vie que son esprit visitait l’amenèrent devant ce grand magasin où son grand-père chargeait un camion de produits alimentaires destinés à une tournée dans la campagne environnante. Le petit garçon âgé de 3 ans et demi voulait jouer, il s’agrippait à Jean son papi, ce dernier lui octroya un léger coup de pied aux fesses, c’était plus un geste affectueux que méchant, l’enfant en gardera un souvenir amusé car il était espiègle et admiratif de cet homme grand, fort, beau garçon et aventurier.

Il revit des milliers de scénettes de sa vie d’enfant, d’adolescent et de sa vie d’adulte. Les week-ends à la mer sur le bassin d’Arcachon à L’herbe où ses parents s’étaient liés d’amitié avec un pêcheur ostréiculteur. Le voyage se déroulait chaque fois en camion utilisé la semaine pour les tournées de vente d’alimentation en campagne. Le départ avait lieu très tôt le dimanche matin et retour le lundi soir très tard. Yvonick 8 ans était assis sur un siège pliant aux côtés de sa sœur Gaëlle, son aînée de 22 mois. À l’arrière, un grand matelas posé au sol permettait à la famille de dormir une nuit dans le véhicule. Certains week-ends, son arrière-grand-père Adonis était du voyage. Les enfants demandaient à l’ancêtre de chanter des chansons en patois local. L’une d’elles s’égrena soudainement dans l’esprit qui continuait à virevolter dans le puits sans fond des souvenirs. Les paroles qui s’étaient immortalisées chez le petit garçon disaient ceci sans en comprendre la signification « de la digue dégondouilla de la manstanguine tanga youska, la youska, la youska, c’était le fils de la meunière, la youska, la youska… »

Après la séance chanson, les enfants jouaient à qui verrait la mer le premier.

À l’arrivée dans ce joli petit village de pêcheurs, tout le monde mettait pied à terre, se dégourdissait les jambes après les 2 heures de voyage, un petit déjeuner casse-croûte réconfortant était avalé sur la plage, bercé par le rythme des vagues qui venaient s’échouer sur le sable.

Son père, homme du nord, buvait un potage brûlant conservé dans une bouteille Thermos et versé dans un bol où il trempait des tronçons de baguette fraîche largement tartinés de beurre salé. La mère et quelquefois l’aïeul dégustaient des croissants avec un café au lait bien sucré, les enfants étaient plutôt attirés par le chocolat, Yvonick avec du lait concentré en tube, Gaëlle un chocolat à l’eau, le lait la faisait vomir.

La baignade, le tour du bassin en bateau que pilotait François le père avec son ami pécheur, les balades sur le sable, la nuit dans le camion seulement quand Adonis n’était pas du voyage.

La fête des fleurs, la fête des abeilles, la félibrée. La confection en papier crépon multicolore de fleurs nouées à l’aide d’un fil de fer très fin servant aussi de tige pour les suspendre au-dessus des rues et autour de la place centrale du village. C’était le début de l’été et la fin de l’année scolaire.

La traditionnelle kermesse organisée par les écoles. Les rues habillées de jonchées de feuilles qui sentaient bon sous les premières chaleurs.

Les colonies de vacances, le départ en bus vers l’inconnu, mer ou montagne, le cœur serré de quitter pour trois semaines ses parents et très vite la joie de retrouver les copains. Les jeux dans les allées d’une forêt de pins, la course au trésor avec des indices que tout le monde ne comprenait pas toujours, la confection de barques miniatures avec l’écorce des pins, qui se prêtaient bien à la sculpture au canif.

Dans le courant de l’été, l’usine de conserve proposait aux habitants du village des sacs de 25 ou 50 kg de haricots verts juste cueillis, moyennant une faible rétribution au kg. Les volontaires devaient les équeuter, la première heure, les enfants aidaient les parents qui comptaient sur ce petit complément de revenus. Puis les jeux reprenaient leur cours, vélo, ballon, anneaux fixés sous les linteaux en bois des arcades bordant la place centrale.

L’esprit libéré du corps continua son exploration de mémoire, il fit un détour et arriva en piqué dans la librairie de la grand-mère d’Yvonick. Ce que l’on appelait la librairie était en réalité une maison de la presse, papeterie et quelques rayonnages de livres bien choisis par Clotilde qui avait dissocié le commerce d’alimentation et avait installé le rayon presse dans le local mitoyen. Ancienne institutrice, elle avait dû se résoudre après la guerre en 1948 à garder pour elle cette activité qu’elle maîtrisait parfaitement et surtout qui était promise à l’époque à un bel avenir contrairement au petit commerce d’épicerie, criblé de dettes et fortement concurrencé, qu’elle avait en toute connaissance de cause refilé à sa fille aînée Lucette, épouse de François et petite fille d’Adonis.

Yvonick passait beaucoup de temps dans cette librairie, il aimait lire les livres d’aventures en bandes dessinées, imprimées à l’époque sur un mauvais papier qui sentait l’encre et l’Indien. Pourquoi l’Indien ? parce que les petites revues comme Buffalo Bill ou Buck Jonh avaient une odeur forte indéfinissable que l’enfant avait associé aux Indiens acteurs des bandes dessinées. Et puis il y avait aussi Tintin, Spirou qui le faisait rire, surtout les jurons du capitaine Haddock. L’un de ses petits camarades de classe, Michel, fils du vétérinaire du village, était féru de Tintin, il deviendra un véritable Tintinophile. Ce gamin connaissait par cœur tous les jurons du capitaine Haddock. C’est ainsi qu’il les énumérait, en cours au collège, pendant les séances de math ou autres disciplines. L’effet était immédiat, ses voisins de classe éclataient de rire et bien souvent se faisaient rappeler à l’ordre par les professeurs.

Il y avait aussi chez mamie Clotilde, toutes les fournitures scolaires, crayons et stylos, papiers, cahiers de toutes sortes, protège-cahiers, règles, double décimètre, équerre, rapporteur, etc. Yvonick adorait remplir son cartable la veille de la rentrée des classes de toutes les nouvelles innovations sans avoir à débourser un centime. Quelques années plus tard, son fils Quentin, âgé de 6 ans, lui dira : « Mais papa, tu ne payes pas mamie Clotilde ? On peut venir autant qu’on veut ? J’aime trop le magasin de mamie. »

À l’adolescence, son intérêt pour Buck John diminuera au profit des revues naturistes de l’époque, loin d’être des sujets pornographiques, on pouvait y découvrir le corps dénudé des femmes et, comme les premiers émois sexuels venaient de faire leur entrée dans la vie du très jeune homme, il résistait difficilement à l’attraction de ces photos qu’il regardait avidement.

Puis l’esprit s’envola juste à côté de la librairie pour revenir dans le grand magasin du petit commerce d’épicerie que Lucette et François, ses parents, géraient tant bien que mal après s’être fait duper par la filoute Clotilde.

Yvonick a dix ans, il voit, avec angoisse, des hommes qui effectuent des va-et-vient entre le local et un énorme camion garé sur la place. À chaque passage, les bras de ces manutentionnaires sont chargés de marchandises provenant de la réserve et des rayonnages du grand magasin de la petite épicerie, puis elles sont déposées dans le gros camion.

Comble de l’horreur, ces gens sans vergogne discutent et rient tout en effectuant leur sale besogne. Ce sont des employés du grossiste qui approvisionnait François et Lucette. Ces derniers, pour éviter le déshonneur de la faillite, avaient privilégié la résolution de la dette en cours, en accord avec leur fournisseur, en restituant les marchandises en stock.

Un enfant de dix ans peut-il comprendre cette situation ? Certainement pas ! Il ne peut qu’être profondément blessé de voir ses parents tristes et inquiets dépossédés de leurs biens, de leur outil de travail. Cette journée fut vécue par le pré-ado comme un traumatisme violent qu’il gardera en mémoire, tout au long de sa vie, en relativisant les faits avec l’âge et la maturité acquise au cours de sa propre existence.

Le grand magasin fit place pendant environ 2 ans à une immense salle de jeux ouverte au public. C’était un nouveau départ, tout en douceur et gaieté. L’esprit vagabond et transmetteur de souvenirs va revivre ces instants fantastiques.

Un juke-box, des flippers, des baby-foot et la création d’un club de tennis de table avec trois tables de ping-pong. Yvonick deviendra imbattable au baby-foot et participera aux rencontres pongistes et championnats de la Dordogne. Ce fut une belle période ludique, où les parents et les enfants étaient heureux, loin de la faillite évitée de justesse. La petite épicerie du grand magasin était devenue le rendez-vous d’une jeunesse qui aimait venir profiter des plaisirs de tous les jeux électroniques et de l’immuable sport qu’est le ping-pong.

L’esprit voyage et se remémore le grand saut