Meurtre en Touraine - Gilles Martin - E-Book

Meurtre en Touraine E-Book

Gilles Martin

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Beschreibung

Les techniciens de la gendarmerie scientifique découvrent que c’est l’arme d’un des adjoints du lieutenant Josselin Maroni qui a servi à tuer le fils d’un industriel de la région tourangelle. Le lieutenant-colonel de gendarmerie de la section de recherches d’Orléans, chargé de l’enquête, formé à l’ancienne école et farouche partisan de la rivalité police-gendarmerie, vient procéder de façon spectaculaire à l’arrestation du suspect au commissariat de Tours. Alors que le « coronavirus » vient de faire son apparition en France et que le pays se prépare au confinement, Josselin Maroni qui entretient de bonnes relations avec les gendarmes de la brigade de recherches de Tours fera tout pour innocenter son adjoint.


À PROPOS DE L'AUTEUR


Gilles Martin est né à Paris en 1952, mais vit en Touraine depuis plus d’une quarantaine d’année. Parfait autodidacte, après dix ans passés dans un bureau d’étude spécialisé dans la protection incendie, il fait carrière dans l’industrie du bois. Il devient le responsable de l’approvisionnement en grumes de peuplier des usines d’un important groupe leader dans l’emballage fromager, avant de terminer sa vie professionnelle comme diagnostiqueur immobilier. À la retraite, il se lance dans l’écriture de romans policiers. En 2015, il est le lauréat du concours « Mon premier manuscrit » du Chapiteau du livre de Saint-Cyr-sur-Loire. En 2018 il crée le personnage de Joss Maroni. Il vit à L’île Bouchard (37).

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Ce roman est une œuvre de fiction. Les personnages et les événements sont le fruit de l’imagination de l’auteur. Toute ressemblance avec des personnes réelles serait pure coïncidence.

© – 2022 – 79260 La Crèche

Tous droits réservés pour tous pays

Gilles Martin

Meurtre en Touraine

L’assassin est un flic

Une nouvelle enquête

de Joss Maroni

IV

Du même auteur

Aux éditions Incunables :

Cataclysme (épuisé), prix du concours « Mon premier livre » du Chapiteau du livre en 2015.

Aux éditions La Geste, collection Le Geste noir :

Les enquêtes de Joss Maroni

Semaine de Canicule à Tours, 2018.

Drame conjugal à Tours, 2020.

Meurtres Parfaits à Tours, 2021.

Préambule

À la veille des élections municipales de 2020, la France entière allait subir une épidémie provoquée par un coronavirus inconnu. Ce virus allait être identifié sous la référence coronavirus SARS-CoV-2. Il était la cause d’une maladie que les scientifiques allaient baptiser COVID-19. Les premiers malades contaminés étaient apparus dans la ville de Wuhan au centre de la Chine. Le virus s’était ensuite propagé dans le monde entier. En Europe, le pays le premier infecté fut l’Italie. En France, le Grand-Est, la Corse et l’Île-de-France étaient les régions les plus contaminées en ce début de pandémie.

Au commissariat de Tours, comme partout en France, devant la machine à café, entre deux portes ou dans les couloirs, les spécificités de ce coronavirus, les informations sur l’évolution de la situation sanitaire ainsi que ses conséquences étaient les principaux sujets de conversations. Les hypothèses sur le développement du virus avaient remplacé les éternelles affabulations concernant la quête d’une mutation par le commissaire Albert Dumont, grand patron du commissariat de Tours. Mutation qu’il souhaitait obtenir depuis un moment et pour laquelle il œuvrait sans relâche, mais qui lui échappait toujours. Cette mutation ou plus exactement cette promotion lui aurait permis d’accéder à un poste où il aurait pu avoir les hautes responsabilités dont il se sentait digne. Ces affabulations n’avaient plus lieu d’exister selon la commandante Émilienne Bertaut, responsable de la brigade criminelle. Dans un moment de déprime, le commissaire se serait confié à la commandante et lui aurait avoué s’être résigné à passer encore quelque temps à Tours.

Exceptionnellement, ce début d’année était calme sur le front des crimes. Le groupe de Joss Maroni n’avait qu’un seul gros dossier en instance qui datait du 18 mars 2019, un meurtre toujours pas élucidé. Les premiers jours d’enquête n’avaient pas fait apparaître de pistes plausibles que les policiers auraient pu suivre. Ce dossier dormait sur le coin du bureau de Joss. Il l’ouvrait de temps en temps et en relisait les différents PV. Une intuition lui venait à l’esprit, il passait un coup de téléphone à un collègue ou à un proche de la victime, mais rien de concret n’en découlait, il refermait le dossier et le remettait à sa place. Bien que ce dossier leur prenne souvent la tête, il n’empêchait pas Joss et ses adjoints de consacrer leur énergie à d’autres enquêtes. Ils avaient résolu d’autres crimes, principalement des vols aggravés et quelques agressions sexuelles.

Le groupe de Joss Maroni n’était pas surchargé. La brigade des stups se trouvait en sous-effectif suite à des arrêts maladie, depuis trois semaines la brigadière-chef Antoinette Leblond était allée leur donner un coup de main.

Dans l’immeuble de la rue de Clocheville, abritant le nid douillet de Josselin Maroni et de Julie Mederer, sa compagne, la place de parking attribuée à leur appartement n’était plus occupée par leurs deux Ducati, mais uniquement par celle de Joss. La machine italienne partageait maintenant l’espace avec une Renault Scénic. Julie avait été contrainte d’abandonner provisoirement la moto pour ses déplacements. Son médecin lui avait impérativement ordonné d’utiliser un véhicule à quatre roues, plus confortable et plus compatible avec son état de future maman, prévu pour le mois de septembre. Sa Ducati avait été remisée chez ses parents, garagistes à Loudun, tout heureux de lui offrir la Scénic.

Chapitre 1

Matinée du mercredi 11 mars 2020

Il était 9 heures 30, Joss, Cathe, Fred et Greg faisaient le point dans le bureau de Joss, quand la porte donnant sur le couloir s’ouvrit brutalement.

— Salut mes poulets préférés, je ne vous ai pas trop manqué ? Excusez le retard mais je devais passer aux stups signer quelques PV.

La brigadière-chef Antoinette Leblond venait de pénétrer dans la pièce. Elle avait été absente du groupe depuis trois semaines et était contente de rentrer au bercail. Elle revenait de deux jours de congé passés avec sa famille et son chéri à La Rochelle, chez son frère aîné.

La joie émanant de Toinette était sincère, elle était vraiment heureuse de retrouver ses collègues. Elle se précipita vers eux et donna une accolade à chacun, ce qui n’était pas dans les habitudes du groupe. Le plaisir étant partagé Joss, Cathe, Fred et Greg se plièrent volontiers à cet excès d’amitié, bien qu’ils aient entendu les recommandations d’Olivier Véran, le ministre de la Santé en exercice. Ce dernier recommandait aux personnes de ne plus avoir de contact et de se trouver à plus d’un mètre les unes des autres, afin d’éviter la propagation du coronavirus qui avait contaminé l’est de la France.

En chef de service, Joss fut le premier à réagir.

— J’espère qu’aucun de nous n’est porteur du coronavirus !

— C’est vrai ! Mais se tenir à plus d’un mètre les uns des autres, ça ne va pas être facile dans nos locaux, répondit Fred.

— Tu as raison, mais il va falloir faire attention ! Les mecs des stups ont été sympas avec toi ? demanda Joss à la nouvelle arrivée.

— Adorables ! J’ai pratiquement tout le temps fait équipe avec Marignon, il est super. Mais je préfère la crime, au moins chez nous, on bouge, on voit du monde, on interroge ! Aux stups, ils passent leur temps en planque ou à regarder des enregistrements de surveillance. Deux jours dans une bagnole avec Morel, j’ai cru que j’allais péter un plomb ! Le mec, il ne te dit pas un mot, quand tu lui parles, il te répond par un vague grognement. Tu comprends tout de suite que tu « l’emmerdes ». Heureusement Marignon m’a prise avec lui, au moins lui, il blague, il commente ce qui se passe ! Un mec normal !

Cathe, certainement plus sensible que ses trois collègues masculins se souvenait de la raison de l’absence de Toinette le lundi et le mardi précédents :

— Et l’anniversaire de ta mère, ça s’est bien passé ?

— Super ! Nous lui avons bien fêté ses 80 ans, elle était ravie. Quand je l’ai déposée chez elle hier au soir, elle était encore toute rayonnante. Faut dire que mon frangin a bien fait les choses, on a passé trois jours formidables.

Toinette se retourna et tout en demandant ce qu’elle avait manqué, elle se dirigea vers l’armoire blindée qui abritait les armes des membres du groupe. Elle ouvrit le meuble et retira son pistolet de l’étui qu’elle portait à la hanche. Elle s’assura qu’il n’y avait pas de balle dans la chambre, avant de faire tomber le magasin de l’arme dans sa main libre. D’un geste machinal elle posa le chargeur dans le casier marqué à son nom et plaça son P228 Sig-Sauer à côté. Elle referma l’armoire et ôta son blouson, qu’elle alla poser sur le dossier de sa chaise de bureau.

— Vous me briefez !

Joss prit la parole.

— On a un nouveau meurtre sur les bras ! Identique à celui du 18 mars de l’année dernière. Même procédé, même mise en scène. Un « papi » qui promenait son chien, a découvert mardi matin le corps d’un homme. Il se trouvait à la limite de La Ville-aux-Dames et de Montlouis, là où se croisent les lignes de TGV et de trains classiques. Le corps n’était pas caché, il se trouvait à trois mètres du chemin. L’homme était nu, il avait été émasculé et ses organes génitaux lui avaient été placés dans la bouche. Comme dans l’affaire Simon, le légiste a retrouvé un manche d’outil recouvert d’un préservatif dans l’anus de la victime. Comme dans l’affaire Simon, le préservatif était souillé de sperme. Enfin, comme dans l’affaire Simon, l’ADN du sperme est inconnu de tous les fichiers !

— Cela fait pratiquement un an jour pour jour ! répondit Toinette.

— Exact ! Et nous n’avons pas plus d’indices…

La porte du bureau donnant sur le couloir s’ouvrit et le commissaire Dumont pénétra précipitamment dans la pièce. Un homme en civil que personne ne connaissait se trouvait derrière le boss. Visiblement ce dernier piaffait d’impatience et aurait bien voulu passer devant le commissaire, mais la stature du directeur du commissariat de police de Tours ne lui permettait pas de se faufiler. Une troisième personne se trouvait dans le couloir, c’était une femme. Bien qu’elle soit cachée par les deux hommes corpulents qui se trouvaient devant elle, Joss l’avait tout de suite reconnue.

— Vous êtes là ! Brigadière-chef Leblond veuillez me suivre !

— Heu, oui ! Monsieur le commissaire, c’est…

Toinette n’eut pas le temps de finir sa phrase. L’inconnu avait réussi à se faufiler et à passer devant le commissaire. Sans explication et avec une grande énergie, il attrapa Toinette par le bras afin de l’entraîner à l’extérieur de la pièce. Le commissaire dut s’effacer pour les laisser passer. Il avait la mine déconfite et semblait impuissant. L’inconnu, tenant toujours Toinette par le bras, se dirigea vers le fond du couloir, là où se trouvait le bureau de la commandante Émilienne Bertaut, responsable de la brigade criminelle du commissariat de Tours. La jeune femme que Joss avait reconnue et qui s’était reculée pour laisser passer l’inconnu et Toinette, leur emboîta le pas. Son regard croisa celui de Joss, elle ne se déroba pas. Elle resta muette quelques secondes, secoua la tête, elle semblait désappointée. Elle émit même un soupir que Joss prit pour une marque de désapprobation.

Le trio avait disparu du regard des membres du groupe, mais le commissaire était toujours présent. Il semblait anéanti, c’est Joss qui le sortit de sa torpeur.

— Qu’est-ce qui se passe ? C’est quoi ce cirque ?

— Je n’y comprends rien, Leblond n’est pas une imbécile ! J’y retourne, je vous tiens au courant plus tard ! Restez là, ne bougez pas de ce bureau.

Le commissaire était déjà dans le couloir quand il termina sa phrase.

— C’était bien Élise Roubin qui accompagnait ce type ? demanda Fred.

— Oui, c’est-elle ! Elle ne semble pas apprécier ce qui se passe, confirma Joss.

La présence de cette femme et l’attitude de l’homme n’annonçaient rien de bon à Joss et à Fred. Le brigadier-major fut le premier à exprimer son inquiétude :

— Dans quel pétrin Toinette est-elle allée se fourrer ?

Cathe et Greg ne comprenaient rien. Ils échangèrent un regard et affichèrent tous les deux leur ignorance par la même mimique du visage.

— Vous pouvez nous dire qui est cette Élise Roubin ? implora Cathe.

Cathe et Greg n’avaient pas une grande ancienneté dans le service et étaient débarqués depuis peu à Tours. Cathe avait fait un court séjour au commissariat de Joué-les-Tours, après être arrivée de sa Bretagne natale et Greg avait directement émigré du Nord, terre de ses ancêtres, à la PJ de Tours.

— La lieutenante Élise Roubin est gendarme. C’est l’adjointe du capitaine Gérard Gamelon, le chef de la brigade de recherches de Tours, répondit Joss.

— Je ne l’ai pas repérée lors de l’arrestation du receleur d’Athée-sur-Cher l’année dernière1, annonça Greg.

— Elle était en congé maternité, précisa Joss. J’appelle Gérard !

Le capitaine Gérard Gamelon et Joss entretenaient de bons rapports. Ils s’échangeaient des informations et se donnaient éventuellement un coup de main.

Joss saisit son portable, rechercha le numéro de téléphone du gendarme et lança l’appel. À la troisième sonnerie le capitaine de gendarmerie décrocha. Le nom de Joss devait s’être inscrit sur l’écran de son appareil car ce dernier n’eut pas le temps de se présenter. Le gendarme l’apostropha immédiatement :

— Joss, je viens d’apprendre pour Toinette ! Ce n’est pas possible, elle n’a pas pu faire ça ?

— Qu’est-ce qui n’est pas possible ? cria Joss.

— Je suis sous le choc ! Je ne sais pas quoi dire ?

Joss comprit que le gendarme était traumatisé, qu’il devait décompresser. Il mit son portable en mode conférence et le posa sur bureau, afin que ses collègues puissent entendre les explications de son correspondant. Jugeant que Gérard Gamelon avait eu le temps de décompresser, il reprit la parole :

— Arrête tes jérémiades et explique-nous ce qui se passe, Gérard, je suis avec le reste de mon équipe, nous sommes tous des amis de Toinette, nous voulons savoir ! Tu peux parler en toute confiance, nous sommes seuls, la porte du bureau est fermée.

— Ce n’est pas à vous que je vais apprendre que je n’ai pas le droit de parler d’une affaire en cours ! Oui, bon ! C’est de Toinette dont il s’agit !

Le portable de Joss resta silencieux un court instant. Instant qui permit au gendarme de réfléchir à la conduite qu’il devait tenir. Son amitié pour Toinette et ses collègues policiers lui dicta son attitude.

— Après tout je ne suis pas directement concerné dans cette affaire ! Vous avez certainement lu dans la NR de lundi que Fabien Dolmont, le fils de Georges Dolmont PDG de C. 2. I. ou Centre Inox Industrie si vous préférez, avait été retrouvé mort par son père dans le bungalow familial situé sur les bords de l’Indre, entre Artannes et Monts. Élise était d’astreinte ce week-end, c’est elle qui est allée sur les lieux. Le procureur adjoint s’est également rendu sur place. Dolmont avait pris une balle en plein cœur. Chez nous, ce n’est pas comme chez vous, quand nous sommes face à un homicide c’est la SR (Section de Recherches) d’Orléans qui est mandatée. Généralement le patron de la SR nous envoie un ou deux enquêteurs. Moi, je dois leur fournir toute l’aide humaine et logistique nécessaire pour leur enquête ; point barre, ce sont eux les patrons ! Sur ce coup, Orléans nous a envoyé un seul enquêteur, le lieutenant-colonel César de Marsonpierre.

— C’est un nouveau ? Je ne le connais pas, annonça Fred qui était le plus ancien tourangeau du groupe.

— Il est arrivé avec ses nouvelles barrettes, en début d’année à la SR et doit partir à la retraite le 30 juin. C’est un gendarme de la vieille école qui n’est pas un fervent défenseur de la collaboration police-gendarmerie.

— Qu’est-ce qu’il est venu faire chez nous ce matin et pourquoi a-t-il interpellé Toinette ?

Joss venait juste de finir sa question qu’une frappe résonna sur la porte. Un laps de temps assez court permit à Joss de fermer son téléphone et de le laisser choir sur son bureau. La porte s’ouvrit et la commandante Émilienne Bertaut, la chef de la brigade criminelle de la PJ de Tours, passa la tête dans l’entrebâillement. D’un seul coup d’œil elle s’assura qu’elle pouvait entrer. Elle était suivie par la lieutenante de gendarmerie Élise Roubin. Les deux femmes pénétrèrent dans la pièce et se dirigèrent directement vers l’armoire abritant les armes du groupe. Émilienne en avait la clef, elle l’ouvrit et désigna à la lieutenante le casier occupé par le Sig de Toinette. La gendarme qui portait des gants en latex saisit l’arme et la glissa dans un sachet à scellés. Elle en fit de même avec le chargeur, mais avant de l’ensacher, elle en ôta les balles et les montra à Émilienne qui avait suivi avec attention ce qu’elle faisait.

— « Merde »… ! lâcha Émilienne dont le visage se décomposa à vue d’œil.

Quand elle eut fini de sceller le sachet la gendarme regarda vers le bureau de Toinette.

— C’est son blouson ?

Émilienne fit un signe affirmatif de la tête. La lieutenante alla prendre le blouson qui enveloppait le dossier du siège réservé à Toinette. Les deux femmes quittèrent la pièce mais avant de sortir, Élise Roubin se tourna vers les policiers médusés et leur lança :

— Je suis désolée, je suis obligée de suivre les ordres de mon supérieur, je n’aurais jamais agi de la sorte si j’avais été responsable de cette affaire.

La gendarme paraissait sincère.

— Attendez ici, je vais revenir, lâcha Émilienne avant de refermer la porte.

Joss et ses adjoints étaient dans un tel état de stupéfaction qu’ils restèrent apathiques et muets plusieurs secondes.

Ce fut Greg, le premier à rompre le silence devenu pesant. Il se trouvait le plus prêt de l’armoire. Il avait vu ce qu’Élise Roubin avait fait et il avait compris ce qui avait chagriné Émilienne.

— Il manquait une balle dans le chargeur de Toinette ! Il n’y en avait que douze.

Cette révélation plomba encore plus l’atmosphère désagréable qui régnait dans la pièce.

— Tu es certain ? demanda Cathe qui, comme ses collègues, ne pouvait imaginer une telle chose.

— Certain, c’est ce que la lieutenante a montré à Émilienne.

Joss reprit son téléphone et rappela le capitaine Gérard Gamelon.

— Désolé de t’avoir coupé si brutalement, mais on a frappé à la porte. C’étaient Émilienne et Élise. Elles venaient saisir l’arme de Toinette.

— C’est normal ! C’est son arme qui a tiré la balle fatale à Dolmont. La balistique est formelle !

— Ce n’est pas possible, votre technicien doit se tromper !

Joss venait d’exprimer, sans grande conviction, le sentiment de ses collègues. Les policiers n’étaient pas dupes, ils ne voulaient simplement pas croire une telle chose. Ils connaissaient Toinette, c’était leur collègue et leur amie ; mais ils savaient également, que le technicien de la gendarmerie qui était arrivé à cette conclusion avait dû la vérifier une seconde fois avant de la révéler.

— Malheureusement non ! Je ne peux pas t’en dire plus au téléphone, retrouve-moi vers 12 heures 30 sur le parking du Mc Do du centre commercial La Riche Soleil, on pourra parler tranquillement.

Des pas résonnèrent dans le couloir, visiblement un groupe de personnes passait devant la porte du bureau, leurs pas semblaient cadencés. Les pas s’éloignant, Joss se précipita vers la porte et l’ouvrit. Il put apercevoir le dos de Toinette, elle suivait le lieutenant-colonel. Il parut à Joss que le gradé était plus massif qu’il ne l’avait apprécié, il marchait fièrement à la tête du groupe et semblait donner la cadence. Un autre homme, que ne connaissait pas Joss, suivait Toinette de près Il avait une main posée sur l’épaule gauche de la policière et l’autre sur son bras droit, il paraissait la guider. La lieutenante et le commissaire suivaient deux mètres derrière. Quand Toinette tourna au bout du couloir, ce qu’aperçut Joss lui provoqua une montée d’adrénaline. Il fit un bond en arrière et repoussa la porte sans conviction, il était anéanti.

— Ils l’ont menottée !

Les paroles de leur chef finirent d’anéantir les membres du groupe. Joss alla s’asseoir derrière son bureau. Fred saisit la chaise proche de lui et se laissa tomber dessus, tout comme Cathe. Comme il n’y avait que deux chaises dans la pièce, Greg s’adossa mollement sur le mur derrière lui. Il fallait, tous les quatre, qu’ils digèrent ce qui venait de se passer.

Une minute à peine venait de s’écouler, la porte qui était restée entrebâillée s’ouvrit largement.

— Qu’est-ce qui se passe ? Les « Schtroumpfs » emmènent Toinette ! Ce « connard » de Marsonpierre pavane comme un paon en chaleur.

— Tu le connais ? demanda Joss.

— Très bien ! Il était responsable des stups à la brigade de gendarmerie de Vendôme. Il y a six mois, il a bien failli faire capoter une série d’arrestations que l’on avait coordonnées avec ses collègues de Blois. C’est un « con » et le jour où ils vont voler, de Marsonpierre sera chef d’escadrille !

C’était le capitaine Marignon de la brigade des stups qui venait d’entrer dans le bureau. En remontant du parking, il avait croisé Toinette et son escorte.

Joss s’était ressaisi, son cerveau recommençait à fonctionner.

— Quand est-ce qu’elle a quitté les stups, vendredi soir ?

— Tu veux dire samedi matin ! Il était 4 heures 30 quand je l’ai déposée devant chez elle. On était crevé, nous avions eu une dure journée. Je l’avais prise le matin à 5 heures à son domicile. À 6 heures, nous avions rendez-vous avec le reste de l’équipe pour procéder à une triple arrestation. Nos lascars nous ont donné du fil à retordre, leur interpellation a été plutôt musclée. Nous avons terminé les « perquises » à midi. Ensuite nous avons transféré nos « zozos » à Orléans, nous en sommes repartis qu’à 3 heures bien sonnées samedi matin. En revenant j’ai allumé deux radars sur l’autoroute ! Tu peux me dire ce qui se passe ?

— Son arme est impliquée dans un meurtre.

— Tu plaisantes ?

— La balistique des bleus est formelle d’après Gérard Gamelon.

— C’était quand ?

— Le corps a été découvert dimanche matin.

Fred s’était aussi ressaisi, il commençait à gamberger. Il s’était levé et était allé pianoter sur son ordinateur, dans l’autre bureau. Il lut à haute voix ce qu’il avait trouvé, ses collègues se turent pour l’écouter.

— Fabien Dolmont, 45 ans, a été retrouvé mort par son père dans le bungalow que la famille Dolmont possède sur les bords de l’Indre, entre Monts et Artannes. Madame Françoise Dolmont, inquiète de ne pas voir son mari dimanche matin, appela son beau-père. Georges Dolmont, PDG de Centre Inox Industrie, se rendit au bungalow familial où son fils a l’habitude de se ressourcer, c’est à cet endroit qu’il trouva son corps. Les pompiers et les gendarmes, appelés par monsieur Georges Dolmont, ne purent que constater le décès de monsieur Fabien Dolmont. La mort ayant été provoquée par le tir d’une arme à feu, l’adjoint du procureur de la République, présent sur place, a confié l’enquête à la section de recherches de gendarmerie d’Orléans. Monsieur Fabien Dolmont occupait le poste de directeur technique dans l’entreprise familiale qui compte une centaine de salariés. Centre Inox Industrie est une entreprise spécialisée dans le travail de l’inox pour l’industrie, dans les domaines aussi variés que le nucléaire, l’agroalimentaire, l’industrie pharmaceutique ou l’aéronautique ! C’était dans la Nouvelle République de lundi.

Un moment de silence suivit les paroles de Fred, ce fut Marignon qui le rompit :

— Elle avait son arme avec elle quand je l’ai déposée chez elle samedi matin. Ce week-end, elle devait aller à La Rochelle chez son frère, celui qui est douanier. Ils fêtaient les 80 ans de madame Leblond.

— Oui ! Elle avait posé deux jours de « récupe » pour lundi et mardi, précisa Joss.

— Elle n’est pas allée à La Rochelle avec son arme, quelqu’un a pu l’emprunter et la remettre à sa place, émit Greg.

— Il faut que la personne ait la clef de chez elle, sache où elle range son arme et connaisse son emploi du temps ! C’est possible, mais il n’y a qu’elle qui puisse identifier cette personne, formula Fred qui était de retour dans la pièce.

— Tu as raison. Toinette va leur expliquer, reprit Cathe afin de se rassurer et de rassurer ses collègues.

— J’espère que tu as raison ! Mais elle va devoir faire preuve de beaucoup de persuasion pour convaincre de Marsonpierre, il est buté ce « mec » et je pense que vu la façon dont il paradait, il est content d’avoir passé les pinces à un flic. On se tient au courant de la suite des événements et n’hésitez pas, si je peux aider ! Je file j’ai du boulot.

Marignon était à peine reparti vers ses quartiers qu’Émilienne entrait dans le bureau.

— Quel « con » ce type ! Il a « engueulé » ce pauvre jeune gendarme parce qu’il n’était pas assez rapide pour passer les pinces à Toinette. Heureusement qu’Élise Roubin était là et qu’elle modérait les propos de ce « connard » !

Il était rare qu’Émilienne soit aussi grossière, mais ce gendarme l’avait très énervée et avait réussi à la faire sortir de ses gonds. Personne n’osa prononcer un mot, préférant laisser la patronne décompresser. Quand elle retrouva un certain calme, Émilienne ajouta :

— J’ai bien cru que le commissaire allait lui « voler dans les plumes ». Je n’ai jamais vu le boss dans cet état, j’étais loin de penser qu’il nous estimait autant et que l’honneur d’un policier et le respect de la police lui tenaient tant à cœur.

Aux yeux d’Émilienne comme à ceux de ses collègues, le commissaire Albert Dumont passait pour un carriériste plus préoccupé par son propre avenir, que par l’honneur de ses subordonnés et la réputation de la police.

— Tu parles de Marsonpierre ! On est au courant, Marignon le connaît, il vient de nous en parler, informa Joss.

— Quelle arrogance ! Pour lui nous sommes qu’une bande de pieds-plats irresponsables. Nous ne devrions même pas avoir le droit de porter une arme.

Les gendarmes sont des militaires. Aux yeux de certains bellicistes issus de familles nobles, l’armée, le clergé et la diplomatie sont les seules carrières dignes de leur rang. Les policiers ne sont que de vulgaires civils, ce sont donc des pieds-plats incapables de rejoindre les rangs de l’armée. Les pieds-plats étaient une cause de réforme, du temps du service obligatoire. Ils empêchaient, soi-disant, le quidam de marcher au pas et de courir correctement. L’armée ne s’encombrait pas de ce genre d’individu qu’elle considérait comme pas bon à grand-chose.

— Il n’a qu’à aller dire ça aux gars des stups, de la BAC ou de l’antiterrorisme.

— Je te dis qu’il est fou ce type ! Il a signifié à Toinette qu’il la plaçait en garde à vue et il a eu le culot de faire ça dans mon bureau ! Ce n’était pas Toinette qu’il regardait quand il lui a stipulé ses droits, c’était le boss et moi et je peux vous dire qu’il jubilait, ça se voyait dans ses yeux.

Émilienne se tut quelques secondes, il fallait qu’elle évacue cette image de son esprit. Ses subordonnés la regardaient et attendaient avec impatience qu’elle leur donne des explications. Elle s’en aperçut et leur annonça :

— Ce « connard » soupçonne Toinette de l’assassinat d’un certain Fabien Dolmont. Il a bien précisé assassinat, car pour lui il y a préméditation. Toinette aurait eu des mots pas très doux envers ce monsieur dans une discothèque il y a quelques jours. J’ai appelé maître Richardi, il va rejoindre Toinette à la caserne Raby, et va l’assister. Elle est vraiment mal, la balle qui a provoqué la mort de ce Dolmont provient de son arme de service. Elle a reconnu qu’elle l’avait conservée chez elle ce week-end. De Marsonpierre a également un témoin qui a vu une Clio rouge, comme celle de Toinette, conduite par une femme, sortir du terrain où se trouve la scène de crime.

L’apparition du commissaire dans l’embrasure de la porte coupa Émilienne.

— Quelle histoire, je n’en reviens pas et le procureur, que je viens d’avoir au téléphone, non plus ! Imaginez les titres de tous les journaux demain matin : MEURTRE EN TOURAINE L’ASSASSIN EST UN FLIC ! Je suppose que la commandante Bertaut vous a mis au courant des faits. Vous continuez votre boulot comme s’il ne s’était rien passé, je sais que Leblond est votre collègue et que vous l’appréciez, mais ce n’est pas à vous d’enquêter sur ce qui lui arrive !

Le commissaire regarda dans les yeux tour à tour Cathe, Fred et Greg.

— Il y a un tueur pervers dans la nature, vous devez le trouver rapidement ! Allez au boulot ! Émilienne et Joss, vous venez avec moi.

Le commissaire se dirigea vers le bureau d’Émilienne, il y pénétra et attendit que les deux officiers soient entrés pour refermer la porte derrière eux.

— Comme je vous l’ai dit, j’ai eu le « proc » au téléphone. Il connaît de Marsonpierre et ne l’apprécie pas beaucoup. Il m’a bien précisé qu’il ne voulait pas d’enquête parallèle. En revanche, il m’a confié qu’il allait mandater la juge Deschaumes pour instruire cette affaire et m’a glissé juste avant de raccrocher : Bertaut et Maroni s’entendent très bien avec Deschaumes ! Je ne sais pas pourquoi il m’a dit ça et je ne veux pas le savoir.

Le commissaire se dirigea vers la porte, mais avant de l’ouvrir pour sortie de la pièce, il se retourna et déclara sur un ton complice.

— Ayez du doigté, je ne veux pas d’embrouille avec la gendarmerie.

Quand ils furent seuls, Joss annonça à Émilienne qu’il avait rendez-vous avec Gérard Gamelon.

— Tu y vas seul, tu ne mouilles pas ton équipe pour l’instant dans cette affaire, tu te contentes de les tenir au courant. Je vais leur expliquer la situation. Nous aviserons à ton retour. On attend la réaction de Roxanne.

Émilienne et Joss avaient déjà travaillé avec la juge d’instruction Roxanne Deschaumes, une certaine complicité s’était créée entre les deux flics et la magistrate.

Joss repassa par son bureau, il annonça qu’il devait s’absenter. Vu l’heure ses collègues n’étaient pas dupes, il était midi passé de cinq minutes.

1 Cf : Meurtres parfaits à Tours.

Chapitre 2

Après-midi du mercredi 11 mars 2020

Joss quitta le commissariat et se précipita chez lui. Il grimpa les escaliers quatre à quatre jusqu’à l’étage où se trouvait son appartement. Il récupéra son casque et son blouson de cuir, puis redescendit vers le parking de l’immeuble. Il trouva sa moto à sa place habituelle. Elle reposait sur sa béquille à côté de sa nouvelle compagne la Renault Scénic de Julie. Bien qu’il n’ait pas tourné depuis quelques semaines le moteur de la Ducati démarra au quart de tour. À la sortie du parking de l’immeuble de la rue de Clocheville, il prit la direction du centre commercial de La Riche Soleil.

Le centre commercial ouvert en 2002 avait de nos jours du mal à survivre, son parking n’était pas surchargé, Joss n’eut aucune difficulté pour repérer Gérard Gamelon. Il était assis derrière le volant de sa Renault Mégane bleu méthyle de fonction. Bien qu’appartenant à la gendarmerie, aucun signe distinctif n’indiquait l’appartenance de la Renault aux forces armées françaises. La Mégane semblait bien isolée, au fond du parking, seule au milieu de quatre espaces de stationnement vides. Joss stoppa sa moto sur la place libre côté conducteur et ôta son casque. Le gendarme fut surpris, il ne s’attendait pas à voir arriver son ami policier chevauchant un tel engin.

— Jolie bécane !

— N’étant pas officiellement en service, j’ai préféré prendre mon véhicule personnel.

Les deux hommes se serrèrent la main.

— Je ne suis pas en service non plus, je suis en pause ! Tu as faim, je te propose de manger « djeun’s », je dois être à Chinon à 14 heures.

Les deux complices se dirigèrent donc vers le McDonald’s, situé à quelques dizaines de mètres d’eux. Ce fut le gendarme qui aborda le premier le sujet brûlant qui était le but de leur rencontre.

— Je ne te cache pas que Toinette est dans la « merde » jusqu’au cou. De Marsonpierre a de bons arguments contre elle. Le premier est le plus important : c’est bien avec son arme qu’a été tirée la balle qui a tué Fabien Dolmont ; deuzio : ses empreintes et uniquement les siennes se trouvent sur la douille retrouvée sur place ; tertio : à l’heure approximative de la mort de Dolmont, estimée entre 7 et 8 heures dimanche matin, son téléphone bornait sur l’antenne, couvrant la scène de crime. L’antenne est située au Haut-Village sur la commune d’Artannes. Son téléphone a borné pendant vingt-deux minutes sur le relais d’Artannes de 7 heures 04 à 7 heures 26 ; quarto : il y a le témoignage d’un voisin qui a vu, vers 7 heures 30, sortir une Renault Clio rouge du terrain où se trouve la scène de crime. D’après ce même témoin, c’était une femme qui était au volant et elle était seule. Toinette possède bien une Clio rouge ?

— « Ouais » ! Ça fait effectivement beaucoup ! approuva Joss

— Tu peux ajouter à tout ça le fait qu’elle se serait boucanée violemment avec la victime au Lynx, le club du Domaine de la Boulaie, il y a trois semaines environ.

Le Domaine de la Boulaie était un relais-château 4 étoiles de la banlieue sud de Tours2. Son club : le Lynx, aménagé dans les dépendances du château, était fréquenté par l’aristocratie tourangelle qui venait s’y encanailler en compagnie des touristes de passage.

— C’est quoi cette « connerie » ?

— C’est un de mes gars qui me l’a rapporté. Il a entendu de Marsonpierre en parler, mais je ne sais pas comment il a appris ça.

Ils pénétrèrent dans l’établissement et se dirigèrent vers les bornes pour passer leur commande. Tout en mangeant, ils évoquèrent les enquêtes au cours desquelles la SR et la PJ avaient collaboré ensemble. Leur repas expédié, ils se dirigèrent vers leurs véhicules.

— Si je peux t’aider tu n’hésites pas ! Je suis persuadé que Toinette est victime d’une machination. Elle est flic, si elle avait tué ce type, elle aurait su comment brouiller les pistes et n’aurait pas fait autant d’erreurs. Je sais que je ne connais pas bien Toinette, mais je ne la pense pas capable de tuer un type de sang-froid.

— Je suis bien d’accord avec toi !

— Le problème c’est que de Marsonpierre ne pense pas comme nous. Il s’est fait un flic, pour lui c’est l’apogée de sa carrière, une façon de la terminer en apothéose. J’ai croisé Élise avant de venir. Elle a eu le temps de me dire qu’ils auraient pu interpeller Toinette hier soir chez elle, mais qu’il a voulu attendre ce matin pour le faire au commissariat. Il voulait même, pour l’occasion, aller chercher son uniforme à Orléans, c’est notre patron qui a réussi à l’en dissuader.

Le temps que Joss enfile son casque et ses gants, la Renault bleue était en route vers la sortie du parking. Joss hésitait : devait-il aller ou ne pas aller au Domaine de la Boulaie ? Il connaissait le patron, c’était Toinette qui lui avait présenté lors d’une enquête, visiblement elle le connaissait bien. Elle lui avait expliqué que son père et le père du directeur de l’établissement étaient de vieux copains. Il démarra et se dirigea vers la sortie, ce ne fut qu’en arrivant au rond point du boulevard Louis XI qu’il prit sa décision. Il tourna à droite en direction de La Riche et emprunta le périphérique en direction du sud. Il traversa le Cher et sortit pour rejoindre la D7 en direction de Villandry. Il retrouva assez facilement le chemin du sélect établissement, dont le club servait de lieu de débauche à une certaine classe de la société tourangelle.

Joss se présenta à l’accueil et demanda à voir monsieur Durvant. Le nom du patron lui était revenu lors du trajet. Quelques minutes plus tard, Paul Durvant se présenta devant le policier, il semblait surpris par cette visite.

— Lieutenant Maroni, que me vaut l’honneur de votre présence ?

— C’est une visite informelle.

Paul Durvant parut encore plus surpris de cette réponse. Son attitude incita Joss à continuer.

— Avez-vous eu dernièrement la visite de la gendarmerie à propos d’une altercation entre ma collègue Toinette Leblond et un certain Fabien Dolmont ?

— Non ! Je n’ai vu personne, répondit le directeur du Domaine, ne comprenant visiblement pas où voulait en venir le policier.

— Cette altercation aurait eu lieu au Lynx, peut-être qu’un membre de votre personnel…

— Non plus, je serais au courant, c’est mon frère qui gère le Lynx. Il m’en aurait parlé ! Pourquoi me demandez-vous ça ?

— Disons que Toinette a des ennuis….

— Parce qu’elle a remis Dolmont à sa place ?

— Vous êtes donc au courant.

— C’est une vieille histoire. Fabien Dolmont n’a pas porté plainte contre elle tout de même ?

— Disons qu’elle a des ennuis.

— Vous rigolez ? Toinette était venue ce soir-là avec des amis. Elle a sorti Dolmont du club parce qu’il importunait une de ses amies. Elle a eu parfaitement raison de le faire et personne ne vous dira le contraire. Elle a simplement été plus prompte que notre personnel. Mon frère était ici avec moi, au restaurant, nous avions un anniversaire à une table, quand le responsable de la sono nous a appelé pour nous demander de descendre.

— Vous connaissez son amie ?

— Non ! Je ne l’avais jamais vue avant et je ne l’ai jamais revue depuis. Quel genre d’ennuis elle peut avoir, Dolmont a vraiment déposé plainte contre elle ? Je peux vous dire qu’il a perdu d’avance, je suis certain de trouver une dizaine de personnes qui témoigneront en faveur de Toinette.

— C’est plus grave que ça ! Vous n’avez pas lu la Nouvelle République de lundi ?

— Non, j’étais à Paris et je ne suis rentré que ce matin.

— Fabien Dolmont a été assassiné.

— « Merde » ! Ne me dites pas que vous pensez que c’est Toinette qui a fait le coup ?

— Moi non, mais les gendarmes eux, oui !

— Ce n’est pas possible.

— Dolmont était avec qui ce soir-là ?