Naître pour l'éternité - Sarah Betton - E-Book

Naître pour l'éternité E-Book

Sarah Betton

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Beschreibung

« Abby, née sans un cri, le 14 avril 2020 à 2h51.

3.020 kilogrammes et 52 centimètres. »

Maman de trois enfants, j’ai eu besoin d’écrire et partager l’histoire de cette petite fille absente de nos photos de famille. Ce lien invisible entre ses deux frères.

Elle s’appelle Abby.

Elle est morte avant de naître. Elle existe.

Notre amour pour elle transcendera le temps, et son prénom résonnera pour toujours dans nos cœurs.




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Seitenzahl: 222

Veröffentlichungsjahr: 2024

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BETTONSARAH

Naître pour l’éternité

L’histoire d’Abby, née sansvie

ÀAbby,

« Je suis les mille vents qui soufflent, je suis le scintillement des cristaux de neige, je suis la lumière qui traverse les champs de blé, je suis la douce pluie d’automne, je suis l’éveil des oiseaux dans le calme du matin, je suis l’étoile qui brille dans la nuit. »

–Poème amérindien

À ceux que j’aime et qui m’aiment.

Le mot de l’autrice

L’association Le Point Rose, créée en 2015 par les parents de Carla-Marie emportée à l’âge de neuf ans par une tumeur du tronc cérébral, s’est imposée à moi comme une évidence.

En plein deuil et en plein confinement, je recherchais désespérément des parents qui, comme moi, survivaient chaque jour au décès de leur enfant.

Depuis 2020, Le Point Rose et ses membres m’ont apporté bien plus que je ne pourrais l’écrire. Écoute, empathie, soutien, échanges, créativité et amour ont été et sont encore une véritable aide au quotidien.

Avec le temps, j’ai ressenti le besoin de donner, moi aussi, à d’autres parents. Mon cheminement dans l’association évolue chaque jour en tant que famille et maman, mais aussi en tant qu’aidante.

Accompagner des familles comme la nôtre sur le chemin du deuil est devenu la suite de mon projet de résilience.

C’est pour cela que ce livre voit lejour.

Au début, il était la trace de l’existence de notre fille. Il est aussi rapidement devenu mon exutoire, le lieu sécure où mes torrents émotionnels ne seraient pas jugés.

L’écriture a commencé quelques semaines après le décès de ma fille et a continué pendant plus de trois ans. J’ai pu constater mon avancement, le cheminement de mes émotions et pensées. Et puis, une question est venue s’imposer à moi. Et si, cela pouvait être utile, même un peu, à d’autres.

Est-ce que me lire pourrait « soulager », « normaliser » ou « rassurer » des parents orphelins ? Je me suis imaginée dans leur tête. « Ces mots auraient pu être les miens, je ressens ça aussi ! Ça fait du bien de savoir que l’on n’est pas seuls, que nous ne sommes pas fous ! »

J’ai donc continué, structuré. Parfois, c’était trop difficile. J’ai bien souvent pris de la distance avec mes écrits, puis j’ai repris, doucement, j’ai relu et j’ai beaucoup pleuré.

Et puis, la vie a continué. Il me semblait essentiel que mes mots continuent eux aussi, pour montrer que le temps fait son œuvre, que nous changeons, que la vie peut aussi nous offrir de belles choses. Je voulais aussi que l’ESPOIR transparaisse. Entendre que tout n’est pas fini est aussi important.

J’ai donc décidé de publier ce récit avec l’association Le Point Rose et de reverser l’intégralité des bénéfices pour continuer à soutenir des familles qui perdent leur enfant, pour continuer à parler d’eux.

Ce livre est pour vous, parents orphelins, pour l’entourage, pour les frères et sœurs, pour les accompagnants, pour ceux et celles qui ont envie de s’immerger dans ce monde étrange, douloureux et parfois doux dans l’amour éternel et inconditionnel de nos enfants décédés.

Je vous laisse découvrir notre histoire, avec cette citation d’un film, qui m’a souvent portée dans cette idée de douce éternité.

Sarah

« Seul l’amour transcende le temps et l’espace. »

–Interstellar

Préface

« Il y a des rencontres qui transforment unevie.

Abby et sa maman sont une de ces rencontres.

Je me souviens vaguement de nos premiers échanges sur Instagram. Je découvrais chaque jour de nouveaux comptes de témoignages, principalement des femmes, qui écrivent pour soulager leur cœur du plus grand drame de leur vie : la perte de leur bébé. Le lien s’est tissé de façon naturelle avec Sarah. Parce qu’elle est de ces personnes rares qui sont réellement bienveillantes. Nos histoires sont si différentes. Moi et mon petit arrêt vécu en début de grossesse. Elle et la mort d’Abby à terme. Pourtant, elle n’a jamais manqué d’être là pour moi quand j’en ai eu besoin.

Ma petite étoile figure aux endroits où je n’ai jamais osé lui demander de la faire exister.

Parce que Sarah est comme ça : elle sait, elle est passée par là elle aussi. Et elle sait ma douleur.

Elle ne compare pas.

Elle se contente d’être là, douce et utile, une veilleuse dans lanuit.

Alors que sa nuit à elle est immense. Son témoignage est d’une rare authenticité. La force brute de toutes les émotions qui l’ont traversée, elle l’a couchée sur le papier. L’horreur la plus indicible, elle n’a pas cherché à la cacher ni à la tronquer. Je suis tellement admirative de l’énergie qu’elle met à aider les autres quand je touche du doigt, à chaque ligne, sa souffrance incommensurable.

Je suis sûre que beaucoup de parents endeuillés se retrouveront dans ses mots. Son récit est d’une importance capitale dans l’univers du deuil périnatal. Je n’ai jamais autant été immergée dans le vécu d’une femme qui perd son tout-petit.

J’en ressors bouleversée, mais aussi pleine de gratitude et d’amour. Souvent, lire les récits des parents me permet de connaître leur enfant. Mais Abby, je la connaissais déjà.

Je découvre sa maman, mais cette petite, elle fait comme partie de ma vie. Peut-être parce que Sarah est devenue mon amie. Peut-être parce qu’elle faisait déjà rayonner son étoile à travers ses partages sur les réseaux sociaux.

Abby est devenue un personnage dans un roman que j’écris. Une enfant qui traverse le deuil d’un petit frère, aux côtés de ses parents. À la lecture du récit de Sarah, je la vois, ce petit ange qui pétille d’amour et d’espièglerie, cette même image que j’ai lorsque j’imagine mon personnage.

Il y a un avant et aprèsAbby.

Je ne remercierai jamais assez Sarah d’être qui elle est et de m’avoir fait connaître sa merveilleuse fille. »

Aurélie Bianchi, autrice

« Je te connaissais avant même de connaître tonnom

Je t’aimais avant même de voir ton visage

Je t’ai désiré pendant tout cetemps

Et j’ai tenu ton cœur dans lemien

Je t’ai embrassé cent millions defois

J’ai goûté les larmes que j’ai pleurées

Je t’ai tenu mon bel enfant

Et je garderai ton cœur dans lemien

Je sais que tu sais ô combien parce que tu étais déjàlà

Je n’ai jamais su qu’un amour comme celui-ci pourrait exister

Je t’aimerai jusqu’à la lune et en retour aussi longtemps que je vivrai

Je te vois dans toutes les étoiles, brille de mille feux jusque dans noscœurs

Je regarde le ciel nocturne au-dessus et je me demande si tu peux sentir monamour

Je t’aime jusqu’à la lune et en retour mon petit ours d’hiver ».

« Winter bear », chanson de CobyGRANT

Lettre à Matthieu

Petit bébé, petit Matthieu.

J’ai rencontré ta maman aux urgences, dans le cadre de mon travail d’infirmière.

C’était pour une tout autre raison que ton existence.

Pourtant, tu es rapidement arrivé dans notre discussion.

C’était il y a vingt-deuxans.

Il y a vingt-deux ans, tu t’es envolé alors que tu étais encore dans le ventre de ta maman.

C’est une des premières fois où ta maman parle de toi à quelqu’un d’inconnu.

Elle m’explique avoir pris un coup sur son ventre en travaillant. Après plusieurs contrôles, tu allais bien selon les médecins.

Pourtant, un décollement de ton placenta ne t’a laissé aucune chance de survie.

Ton papa et ta grande sœur connaissent ton existence.

Mais c’était il y a vingt-deux ans.

Un gros tabou tourne autour de ta naissance en silence.

J’ai demandé à ta maman ton prénom. Elle m’a dit que tu n’en avais pas, mais que pour elle, tu as toujours été Matthieu.

Alors, sache, petit Matthieu, que j’ai entendu ton histoire et ton prénom.

Ta famille ne t’a jamais oublié ; mais ce fut trop difficile pour en parler.

Ne t’en fais pas, tu as la meilleure place qu’il soit. Au creux de leurcœur.

Et aujourd’hui, un peu au creux dumien.

Je te connais, petit Matthieu, et je pense àtoi.

Juin2021

Ta naissance spirituelle

Cela donne une impression de complexité, pourtant c’est plutôt simple. Il y a la naissance avant la naissance physique. Ce moment où l’on devient quelqu’un d’autre.

Certaines personnes deviennent parents lorsqu’elles tiennent leur bébé dans leurs bras, d’autres quand la grossesse débute, ou encore après troismois.

De mon côté, cela est bien différent.

Je me suis sentie mère lorsque nous avons pris la décision de fonder une famille.

À ce qu’il me semble, cela remonte à l’année 2015. Nous étions en vacances à Minorque. Détente, soleil, plage.

C’est pendant ces vacances que mon conjoint m’a dit : « Je suis prêt à avoir des enfants avec toi. »

J’ai cet amour profond et indescriptible inscrit dans toutes les cellules de mon corps et de monâme.

Je pourrais dire que cela va même plusloin.

Fonder une famille est une parcelle importante de ma résilience. Une sorte de guérison, même si ce n’est pas le terme exact.

Évidemment, je ne savais pas quand j’aurais mon ou mes bébé(s) dans les bras ; mais je les ai toujours tellement aimés !

Trois longues années… c’est le temps qu’il nous a fallu attendre pour tenir dans nos bras notre premier petit garçon, Jessy.

Trois années marquées par deux « fausses couches » en 2016 et 2017 à dix semaines de grossesse.

Oui, j’ai mis des guillemets, parce que sérieusement, « fausse couche », ça veut dire quoi ?

Il n’y a rien de faux dans un début de grossesse.

Et il n’y a rien de normal dans une grossesse qui s’arrête.

Je l’ai entendu aussi, ce fameux « ça arrive à toutes les femmes », « vaut mieux ça qu’il soit handicapé », « c’est normal pour la première grossesse ».

BALIVERNES.

Pourquoi toujours tout banaliser ?

C’est une perte, la perte d’une vie, la perte d’un espoir, la perte d’un enfant à venir. Ne faudrait-il pas penser pour mieux panser, plutôt que d’éviter ?

Bref. Ces trois longues années d’attente et le diagnostic d’endométriose qui est tombé en janvier 2018 ont lourdement pesé dans la balance pour commencer une autre grossesse. D’autant plus que la grossesse de Jessy a été angoissante !

L’idée d’avoir des bébés rapprochés aussi.

Mais la vie l’a emporté sur la peur.

Il me semble que c’est en mars 2019 que nous avons pris la décision de « remettre ça », comme on dit.

Notre petit garçon Jessy avait presque sixmois.

Mon Dieu que notre décision nous a fichu la trouille ! Mais ce fut un choix, notre choix.

Allez ! On jette la plaquette contraceptive ! Sans regret ?? Sans regret ! Advienne que pourra.

C’est le grand début de notre aventure.

Tu n’es pas encore là, petit bébé, mais mon amour pour toi est déjà grand. La joie et la peur nous envahissent, quelle étrange cohabitation…

Des millions de questions se bousculent dans nos têtes. Comment faire pour gérer deux enfants si rapprochés ? La voiture sera-t-elle assez grande ?

Et les nuits, comment va-t-on faire ? Et pour les repas ? S’ils ont faim en même temps ? Et si je me retrouve seule ?

J’ai rapidement laissé tomber toutes ces questions angoissantes, et j’ai enfin lâché prise.

On verra bien quand on ysera…

Une question un peu plus précise vient se promener dans mon esprit… Et si c’était ma dernière grossesse ? La deuxième. La dernière ? Deux enfants, ou plus ?

Pour mon conjoint, c’est plutôt clair, deux, c’est parfait ; plus, cela deviendrait compliqué. Parce que la vie, la société, le monde qui nous entoure…

Cette grossesse serait donc particulière.

La dernière.

Une dernière fois un gros bidon sans pouvoir regarder mes pieds. Une dernière fois sentir un petit être bouger au creux de moi. La dernière fois… créer et aimer.

Un baptême téméraire

Ah… le fameux prénom.

Parfois, il apparaît comme une évidence. Mais bon, pour nous, c’est encore autre chose.

Fille ou garçon ? Nous avons fait le choix de ne pas savoir. Ton grand frère et toi, vous avez gardé votre petit secret, bien caché, jusqu’à la fin.

Ton prénom à toi est une évidence, et depuis bien longtemps.

Il est dans nos têtes depuis aussi longtemps que l’on t’imagine.

Abby. Au tout début, c’était Abbygail. Je ne sais pas, c’était une évidence, comme une vérité acquise. Pas besoin de longues discussions ou concertations avec mon conjoint.

« Si nous avons une fille, elle s’appellera Abbygail. »

Bon, c’est ton frère qui est arrivé en premier !

Du coup, on a repensé à ce joli prénom, pour que tout soit harmonieux. Le nom de famille de papa est assez long, alors c’était toutvu.

ABBY !

Un prénom léger, court et peu commun.

Ce fut plus long pour te trouver un prénom de garçon. Et au final, cela aurait été Jamie !

Ce prénom aussi partira avec toi, car il t’est lié pour toujours même si tu ne le portespas.

Ton prénom est si spécial, comme si cela était écrit depuis si longtemps.

Une évidence.

Abby.

C’était sûrement écrit.

Notre fille s’appelleraAbby.

Si la vie m’offre cette chance, ce bonheur de donner une petite sœur à Jessy et une petite fille à papa, son prénom sera ainsi.

« Souffle et respiration. »

Voici la signification de ce doux prénom.

Sans souffle, il n’y a pas devie.

Dans ton prénom ; il y a l’initiale de l’Amour.

Depuis que l’on t’a pensée, on t’a aimée. Notre Bébé pour toujours.

Ta présente absence est difficile, mais tu montres la Beauté du monde.

Aujourd’hui, je vois l’arc-en-ciel de la vie, à travers tesYeux.

Abby.

Une graine à éclore

Les jours passent, les mois passent. Je ne me rends pas vraiment compte.

J’espère au plus profond de mon cœur que tu vas arriver rapidement, mais peut-être pas trop nonplus.

Ton frère est si petit encore ; mais je suis prête à toute éventualité.

Le 4 août 2019, j’attends mon cycle.

Bon. Je suis loin d’être réglée comme une pendule depuis toutes ces années.

Premier test, « au cas où ». 

Négatif. Je suis déçue, mais pour l’instant ma tête est ailleurs.

C’est l’heure du départ en vacances en famille. Nous allons tous les trois au bord de la mer au Grau du Roi. La première plage pour ton frère. De magnifiques vacances !

Deux semaines passent. Toujours rien pour mon cycle.

Je refais un test le 18 août au retour de nos vacances, sans grande conviction.

Dès le premier jet, une seule barre s’affiche. Je ne comprends pas. J’ai des douleurs de règles, sans règles, et le test est négatif !

Je le laisse de côté quelques secondes, puis je le regarde encore.

Et là, à ma grande surprise, un magnifique plus se profile !

Je suis envahie d’une profonde joie, une chaleur se propage dans toutes les cellules de mon corps. Je n’attends pas très longtemps pour l’annoncer à ton papa !

Heureux et surpris. On ne t’attendait pas aussi rapidement. Tant de questions nous traversent l’esprit, des craintes, la peur de ne pas être à la hauteur. Mais cette nouvelle fait mine d’un nouveau soleil dans notrevie.

Une seule hâte maintenant, te rencontrer.

Dès les premiers jours, nous nous mettons d’accord avec papa. Comme pour ton frère, nous voulons garder ton secret jusqu’à lafin.

Garçon ou fille, tu nous combleras de bonheur à tous les coups.

Les premiers contrôles commencent. Les premières prises de sang et analyses. Chaque examen est un stress à dépasser. Je tremble à chaque ouverture de résultat.

Puis arrive la première fois où je tevois.

Le 22 août 2019 ; tu n’es pas gros, mon petit bébé.

Tu mesures à peine 4,9 mm ! Tu es bel et bien là, au creux de moi. Tu es encore si petit, on ne voit pas grand-chose. Mais tu eslà.

On continue, un pied devant l’autre, jour après jour.

Les arrêts de grossesse et la grossesse compliquée de ton frère sont toujours dans nos pensées.

Nous sommes bercés entre la joie et lapeur.

Très tôt, on me décèle un diabète gestationnel.

Je sais bien ce que cela peut impliquer ; cela augmente le risque d’accouchement prématuré, une rupture prématurée de la poche des eaux, malformation cardiaque, excès de poids…

J’étais donc certaine d’être plus suivie que pour une grossesse normale.

J’ai déjà été suivie pour un retard de croissance in utero (RCIU) pour ton frère, car c’était un petit poids. Bon, annoncé à 2,5 kg à terme, il est né à 3,010 kg un mois avant le terme. Je n’étais pas plus inquiète queça.

Malgré les contraintes qui ont l’air de se planifier pour cette grossesse, je savais que j’allais pouvoir te voir souvent et cela me remplissait de joie !

Le 5 septembre 2019, tu fais 18 mm, je suis à neuf semaines d’aménorrhées(SA).

Le 10 octobre, nous allons rencontrer Aurore.

Aurore est sage-femme, et c’est avec elle que nous ferons les échographies de suivi pour la grossesse.

C’est une jeune femme qui inspire confiance ; elle est bienveillante et rassurante. C’est tout ce que nous voulions !

Ce jour-là, nous faisons la première échographie ; la T1. Cette échographie reste une épreuve stressante.

On te mesure dans tous les sens pour pouvoir déterminer s’il y a une anomalie génétique comme la trisomie.

Tu mesures 56 mm, et tout va pour le mieux.

Après un peu d’attente, les résultats reviennent négatifs.

Nous sommes alors soulagés.

C’est donc au mois de novembre 2019 que nous décidons d’annoncer à nos proches, ton existence.

Jessy vient tout juste d’avoir un an.

Beaucoup sont surpris par la nouvelle.

Le stress peu à peu s’éloigne pour laisser place à l’amour.

Le 12 novembre, j’ai droit au petit rituel de tonpapa.

Il m’offre un joli bola qui t’accompagnera toujours.

Il est sublime.

C’est Julie, de la si jolie boutique Bola Pleine Lune, qui a pris soin de le confectionner. Il est en argent avec un superbe lotus gravé et une petite perle. Sa douce mélodie va te bercer tendrement.

À la naissance, il peut être cousu dans le doudou pour continuer à bercer et calmer bébé. J’ai gardé celui de Jessy ; je l’accrochais près de lui dans le lit quand il jouait. Il adorait taper dedans.

Maintenant, il est dans sa boite à souvenirs.

Je suis tellement contente d’arborer ce joli ventre avec ce bola. Tout comme celui de ton frère l’a bercé, le tien continuera à l’infini de t’accompagner.

Il repose avec toi. Cela me tenait à cœur que tu sois près de lui, près de ce son rassurant, apaisant. Une douce mélodie qui continue d’être avectoi.

Julie m’a très gentiment offert le double de ce joli bola que j’ai reçu dans ma boite aux lettres un14.

Je peux, parfois, me refaire bercer par ce même son sidoux.

Il est délicatement rangé dans ta boite à souvenirs, comme pour ton grand frère.

Je suis reconnaissante de l’avoir avec nous, et je ne remercierai jamais assez Julie pour ce geste si merveilleux.

Le 21 novembre, je trouve ta tenue de naissance.

Fille ou garçon, tu seras à croquer !

C’est un petit pyjama gris, avec un koala endormi sur un nuage avec une jolie petite girafe dans les mains.

Il y a quatre étoiles au-dessus delui.

Sur ton body blanc, il y a des étoiles, des lunes et des cœurs.

« Juste adorable. »

C’est ce qu’il y a écrit.

Ton petit bonnet est une tête de koala, avec des oreilles grises et un petit nez tout mignon.

Je regarde ce pyjama et je me demande comment tu pourras être si minuscule ! Mais bientôt, tu seras dedans et je serais comblée.

Ce pyjama t’a accueillie dans ce monde, même si tu l’avais déjà quitté.

Je suis rassurée de savoir qu’il t’a accompagnée.

Je l’ai serré tellement souvent dans mes bras ; c’est un peu comme si tu avais fait ton dernier voyage dans les bras de ta maman.

J’ai eu besoin d’avoir son double dans ta boite à souvenirs. Parfois, je le prends, je le serre contre mon cœur, je lesens.

Comme s’il portait ton odeur.

Cette odeur que je ne connais pas, mais que j’aime imaginer.

En serrant fort ce pyjama, je te serre fort contre moncœur.

Quelques jours plus tard, je trouve ton doudou. C’est une panthère des neiges. Je ne sais pas vraiment pourquoi, c’est lui qui s’est imposé à moi. Je dors avec chaque jour ; pour que mon odeur s’infiltre dans chaque petite parcelle de tissu.

Ce petit doudou restera avecmoi.

Ta présente absence trop forte, c’est moi qui allais avoir besoin d’un objet detoi.

Cette panthère deviendra ton « animal totem » ; une panthère sera sur mon avant-bras, en souvenir detoi.

Ma panthère des étoiles.

La fatigue me ralentit énormément. Mon réveil, à 4 h 30, pour travailler devient de plus en plus difficile. Ma gynécologue décide alors de me mettre en arrêt. Il est tôt, je ne suis qu’à cinq mois, mais je le prends comme une opportunité de profiter encore plus devous.

Le 20 décembre, nous faisons la deuxième échographie avec Aurore. Je te vois, je t’entends.

Je m’use aussi à répéter que nous ne voulons pas savoir ton secret !

Tu es en pleine forme, tu pèses 423 g.

Tu as une petite « dilatation des cavités pyélocalicielles » au rein gauche.

Rien de bien inquiétant, mais cela pourrait entraîner des infections urinaires à répétition plustard.

Il va donc falloir surveiller d’un peu plus près. C’est un médecin échographe qui va se charger des surveillances.

Je la verrai deux fois durant de longues échographies (une heure trente).

Le 13 janvier, tu fais déjà 724 g.

Le 14 février, cette dilatation disparaîtra seule ! Quel soulagement ! Tu pèses 1,3 kg !

Durant ces longs clichés de toi, j’ai la chance de te voir sous toutes tes belles coutures. Le médecin vérifie ton cœur, en long, en large et en travers ainsi que toutes les autres parcelles de ton petit corps.

J’adore entendre ton cœur battre la chamade !

Tout va bien, tout est parfait.

Nous sommes tellement rassurés !

Je revois assez rapidement Aurore, notre sage-femme.

Le 17 février, nous apprenons que tu as enfin la tête en bas ! Oui, dans le fond, cela m’angoissait un peu de te savoir en « hamac ».

Je te parlais doucement en te demandant de te positionner comme il faut au fur et à mesure que la date approchait. L’accouchement de ton grand frère était un si magnifique souvenir !

Je souhaite la même chose avec toi, mon amour !

Le 22 février, nous rencontrons Mélodie.

Mélodie va immortaliser nos moments à quatre.

Nous avons passé quelques heures avec elle, sous l’œil de son appareil photo.

Je me souviens encore de cette jolie séance. Jessy avait tout juste seize mois et il a adoré !

Ce sont des moments inoubliables, fixés dans le temps et l’espace.

Mélodie est aussi rentrée dans nos vies aujourd’hui, c’est une belle personne.

Je suis heureuse qu’elle ait pu te connaître !

Le 26 février, c’est le jour de la troisième échographie.

Si mes souvenirs sont corrects, ta grand-mère et ton frère Jessy sont présents avecnous.

Je suis si fière et heureuse qu’il puisse te voir, même si pour lui cela reste très abstrait. Je lui parle beaucoup de toi, je lui montre mon ventre.

Il ne parle pas encore, mais il sait dire « bébé ». Il a bien compris qu’il y a quelque chose qui se prépare ! Aurore nous fait écouter ton cœur. Jessy se met à danser dans sa poussette au rythme de tes battements.

Nous rions tellement ! Lui aussi d’ailleurs, il a un magnifique sourire !

Je suis si émue, je verse ma petite larme…

Tout va bien, tu es en forme.

Je peux voir ton pied. « Il a l’air bien grand ! »

Aurore me dit que, oui, tu vas être un grand bébé à la naissance.

Pendant cette échographie, on voit bien ta ressemblance avec ton grand frère, c’estfou !

À partir du 5 mars, ma gynécologue prévoit un suivi à la maison.

Tous les deux jours, une sage-femme vient me faire un monitoring et surveiller ma tension et mon diabète.

Comme pour ton frère.

Cela me fait du bien et me rassure.

Le 7 mars, mes amies préparent une baby shower. Normalement, c’est une fête pendant laquelle on découvre le sexe dubébé.

Pour nous, c’est juste une journée à rire, à mettre des couches à des poupées, à manger des bonbons et à faire des paris sur le jour de ta naissance.

C’est la dernière fois que nos proches ont pu nous voir ensemble.

Dix jours plus tard, le président de la République met en place le premier confinement en France ; nous sommes confinés à la maison, Jessy et moi. Mon conjoint continue malgré tout de travailler dans son entreprise.

Je vais revoir Aurore le 24 mars.

Cette fois-ci, je suis seule et ça sera la dernière fois où je verrai notre bébé derrière un écran.

Nous vivons une pandémie mondiale. COVID19.

Couvre-feu, confinement, arrêt des commerces, arrêt des écoles et garderies, port du masque en ville… Ce virus met notre vie en suspens, isolés de tous. Il n’y a plus que ça à la télévision, aux informations… Le nombre de contaminés, le nombre de morts, toutes ces questions sans réponse… La peur s’installe au fond de nous. Les semaines continuent de passer malgrétout.

Les sages-femmes viennent toujours deux fois par semaine à la maison. Elles surveillent ma tension et me font un monitoring pour surveiller le cœur dubébé.

Je passe mes journées à la maison avec mon fils de dix-huit mois pendant que mon conjoint continue de travailler. Nous sommes souvent dehors ; il marche comme un aventurier dans les champs. Les journées sont parfois difficiles avec la fatigue et les maux de la grossesse.

Le vendredi 10 avril, c’est le dernier monitoring que la sage-femme fera à la maison.

« Ce bébé est calme, son cœur bat bien. »

« Mettez-vous sur le côté. Il faut le réveiller un peu ce bébé. »

Cette phrase me hante encore. Je ne supporterais pas de l’entendre à nouveau.

Je suppose que la sage-femme s’est inquiétée de quelque chose à ce moment-là.

Mais souvent, durant un monitoring, on nous demande de nous mettre sur le côté pour que le bébé soit sollicité et qu’il bouge, pour voir les variations de son rythme cardiaque. Même si le cœur bat, un bébé peu actif peut être un signe annonciateur de quelque chose.

Moi, je ne me doute de rien.

Oui, il dort. Il a le droit, non ?

La sage-femme n’a pas l’air inquiète aprèstout.

Le week-end qui arrive est celui de Pâques. Première chasse aux œufs pour ton frère, confinés à la maison évidemment.

Dimanche soir, soirée classique à la maison. Jessy dort. Papa et moi nous nous couchons comme d’habitude.

Je suis allongée sur le côté droit, les yeux fermés.

D’un coup, je te sens bouger.

Un énorme coup de pied ! Comme si tu avais fait un saut périlleux dans mon ventre.