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Ce petit journal d’un confiné s’est bâti jour après jour pendant le premier confinement printanier de mars à mai 2020 à Socoa au Pays basque. Il s’est construit comme un puzzle qui se dévoile et se fait l’écho d’observations, de réflexions et de souvenirs.
À PROPOS DE L'AUTEUR
Fred Hermine se consacre à la littérature dès sa retraite et libère une forme d’écriture libre et sans contrainte. Il propose ici une photographie quotidienne authentique de cinquante-six jours d’enfermement et de sorties dérogatoires.
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Seitenzahl: 43
Veröffentlichungsjahr: 2023
Fred Hermine
Petit journal d’un confiné
© Lys Bleu Éditions – Fred Hermine
ISBN : 979-10-377-9333-1
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Mercredi 18 mars
Après l’appel de Macron « au confinement » la semaine précédente et en dépit du bon sens, dimanche 15 mars, le premier tour des élections municipales s’est quand même déroulé. Nous n’avons pas voulu voter.
Depuis hier midi, nous sommes confinés. Sorties minimales. Impossible d’aller pêcher la truite dans les rivières du Pays basque. Dans les Pyrénées-Atlantiques, nous sommes encore un peu à l’abri du coronavirus : vingt-cinq cas seulement. Cela ne va pas durer. Les voyages en France sont interdits, mais pas pour tous. La bourgeoisie des grandes villes est en plein exode vers leurs résidences secondaires. Elle prend les avions, trains et voitures pour la province. Elle nous livre à domicile : le Covid-19.
Les masques manquent pour le personnel soignant. Il est au « front » sans armes et protections. Une vraie chair à canon. Pourtant, en 2011, la France en possédait un milliard. Les responsables politiques qui se sont succédé depuis ont organisé la pénurie et restreint les stocks d’État à 160 millions.
Dans les hôpitaux, des malades meurent dans la solitude. Le plus dur reste à venir. Le virus se répand à grande vitesse. Plus de test. Seul les très touchés peuvent en bénéficier. Cela n’a aucun sens. Depuis des décennies, les politiques de droite et de gauche ont abandonné les services publics et en particulier les hôpitaux. Jamais ils ne seront châtiés. Ils désigneront leurs juges. Après maints renvois pour vice de forme et au bout d’un temps infini, les tribunaux affirmeront au nom du peuple qu’ils ne sont pas coupables.
Dans mon quartier, tous les soirs à 20 h, des voisins applaudissent de leurs fenêtres le personnel soignant… Mais combien d’entre eux manifestaient pour les soutenir ? Après la pandémie, ces Ponce Pilate de salons oublieront vite. Ils continueront à se comporter comme si rien ne s’était passé.
Ce matin, de mon balcon, j’entendais chanter les oiseaux qui se cachent dans la petite forêt à côté du fronton. Leurs chants étaient plus joyeux que de coutume. J’ai compris. Aujourd’hui, le printemps est de retour et le temps est agréable. Comme j’aime. Un peu de nuages et le soleil qui cherche à se faufiler. Sensation agréable que je rencontre à cette époque en fin d’après-midi, dans les vallées du Pays basque, quand les éphémères virevoltent au raz de l’eau. Les truites en sont gourmandes. Si l’homme est confiné, son esprit vagabonde. Une liberté bien agréable. Si cette période n’est pas facile, elle invite au regard sur sa vie, son passé et son futur. De faire le point. Une folie passagère.
Ce matin, les piafs sont moins bruyants. Les chats des immeubles les ont repérés. Plus personne au fronton. Pas un seul joueur de pelote. Les petits du quartier ne font plus du vélo. Leurs rires d’hier ont disparu.
Le confinement serait-il mieux respecté ? L’angoisse s’installe ! Nous connaissons ? Cette petite boule coincée, là où vous savez. Mais passons.
Sur les monts d’Iraty, c’est l’heure des jonquilles. De loin, en voiture, dans les lacets sinueux accrochés à la montagne, on peut facilement, si on est bien attentif, repérer ces points jaunes proches des rus. Les pieds dans l’eau, baignant dans de hautes herbes bien vertes et grasses, cette variété de narcisses à pétales jaunes est ma fleur préférée. Cette renoncule, dont le parfum n’enivre pas, m’évoque le goût de mes belles journées de cueillettes en famille dans les monts du Forez. Quelle saveur ! Quel bonheur ! Au milieu des champs de hêtres, de peupliers et de bouleaux. J’aimais çà et j’en rêve encore, des bottes pleines de boue et de mains humides. J’étais heureux.
Depuis cette nuit, une brise d’Est a bien refroidi l’atmosphère. Le soleil n’est pas très généreux. Ses maigres apparitions me poussent à le rechercher. J’en fais un bon usage. J’ouvre la fenêtre de ma chambre et me laisse réchauffer. En ces temps de disette, tous les petits bonheurs sont bons à prendre. Rien de tel pour recharger ses accus.
De ce côté sud, les rouges-gorges y sont aussi. Un chat blanc, délavé et de gouttière, tapi dans les ronces, attend sereinement le passage d’un oiseau. Même les nombreux mulots sont en alerte. En fin de journée, le ventre du matou traîne par terre.