Prier 15 jours avec Christian Bobin - Christophe Henning - E-Book

Prier 15 jours avec Christian Bobin E-Book

Christophe Henning

0,0

Beschreibung

Ce que je sais de Christian Bobin (1951-2022), je le tiens de nos rencontres trop brèves, de nos échanges épistolaires, trop peu nombreux, par pudeur, par retenue, de part et d'autre, car l'homme de silence et de solitude ne cherche pas à emmagasiner. Journaliste, j'ai beaucoup reçu à rencontrer ce journalier des mots, cette vigie de l'invisible. Chaque échange était fait d'instants qui, tout à coup, prenaient l'éclat d'un diamant dur, ciselé de mots choisis.
Il faudrait plus de quinze jours pour moissonner les mots du poète qui se cache derrière la fenêtre et continue, c'est certain, de cueillir les petits riens qui font la vie même. Et la mort aussi. Plus que prier, les écrits de Christian Bobin nous invitent à méditer. La vie, la mort, l'amour, mais aussi la nature, Dieu, la maladie, l'Église… Tout ce qui vit et donne sens à l'existence est proposé avec sérieux et dans un grand éclat de rire.




À PROPOS DE L'AUTEUR

Christophe Henning est journaliste à La Croix et animateur sur RCF. Ancien président de l'Association des écrivains croyants d'expression française, il est l'auteur de nombreux ouvrages consacrés à des figures spirituelles et à la poésie.

Sie lesen das E-Book in den Legimi-Apps auf:

Android
iOS
von Legimi
zertifizierten E-Readern
Kindle™-E-Readern
(für ausgewählte Pakete)

Seitenzahl: 124

Das E-Book (TTS) können Sie hören im Abo „Legimi Premium” in Legimi-Apps auf:

Android
iOS
Bewertungen
0,0
0
0
0
0
0
Mehr Informationen
Mehr Informationen
Legimi prüft nicht, ob Rezensionen von Nutzern stammen, die den betreffenden Titel tatsächlich gekauft oder gelesen/gehört haben. Wir entfernen aber gefälschte Rezensionen.



Prier 15 jours avec

CHRISTIAN BOBIN

COLLECTION PRIER 15 JOURS

•Des livres sources

–pour passer quinze jours en compagnie d’un maître spirituel à la manière de ces temps de retraite qui ouvrent une brèche dans notre univers quotidien.

•Des livres pratiques

–un rappel biographique en début de volume ;

–un itinéraire balisé en introduction ;

–une entrée dans la prière répartie sur les quinze chapitres de l’ouvrage ;

–pour aller plus loin, une bibliographie expliquée.

•Des livres accessibles

–un ressourcement qui va à l’essentiel pour des chrétiens actifs ;

–une information donnée de l’intérieur ;

–pour un public plus large.

DU MÊME AUTEUR

J’ai décidé de vivre. Itinéraire d’un orphelin devenu présentateur télé, avec David Milliat, Salvator, 2018.

Luc, mon frère, avec Michaël Lonsdale, éd. Philippe Rey, 2018. Nos vies sont déjà données! 19 vies pour Dieu et l’Algérie, avec Thomas Georgeon, Bayard, 2018.

Saint Ignace de Loyola, Presses de la Renaissance/Le Figaro magazine, 2017.

Raymond Fau. Le mendiant de lumière, avec Jean Humenry, Bayard, 2016.

Tibhirine. L’héritage, ouvrage collectif, direction, Bayard, 2016.

Méditer avec les moines de Tibhirine, Salvator, 2015.

Frère Luc, la biographie. Moine, médecin et martyr à Tibhirine, avec Thomas Georgeon, Bayard, 2011.

Le jardinier de Tibhirine, avec Jean-Marie Lassausse, Bayard, 2010, Prix de littérature religieuse 2011.

Il fallait Osée, Desclée de Brouwer, coll. « Littérature ouverte », 2009.

Petite vie de Jean-Paul II, Desclée de Brouwer, 2005.

La liberté de l’amour, conversation avec Colette Nys-Mazure, Desclée de Brouwer, 2005.

Prier 15 jours avec

CHRISTIAN BOBIN

Poète de la joie

Christophe HENNING

Composition : Richard Garcia Couverture : Richard Garcia

Illustrations de couverture :

© AELF pour les textes liturgiques.

Tous droits de traduction,d’adaptation et de reproduction réservés pour tous pays.

© 2024, Groupe ElidiaÉditions Nouvelle Cité10 rue Mercœur – 75011 Paris

www.nouvellecite.fr

ISBN : 978-2-37582-605-8ISSN : 1150-3521

BIOGRAPHIE

Il n’y a rien à dire sur Bobin. Ses livres parlent pour lui. Ils racontent son enfance au Creusot, son enfermement et sa découverte de la lecture. Né après la Seconde Guerre mondiale, dernier d’une famille de trois enfants, il a vu le jour le 24 avril 1951, au Creusot, terre natale et nourricière. C’est la date de sa première naissance. À de multiples reprises, dans ses livres et entretiens, il fait référence à « une seconde naissance », dont la date varie, faite d’un éclat de lumière, d’une rencontre ou d’un vol d’oiseau. Comme si nous n’en finissions pas de naître.

Les parents travaillent tous deux pour les aciéries Schneider, où ils se sont rencontrés. Germaine Pelletier est calqueuse et René Bobin, dessinateur industriel. Gérard, l’aîné, a huit ans de plus que Christian, sa sœur Danielle le précède de quatre années. Après la destruction de la maison familiale lors du bombardement du Creusot les 19 et 20 juin 1943, la famille est relogée avenue du 4-Septembre, dans un quartier calme. De l’autre côté de la rue, un petit parc entoure l’église SaintCharles. Pour autant, l’enfant n’a pas le droit d’y retrouver les enfants alentour, ni même de sortir, sauf pour se rendre à l’école toute proche. Telle une barricade invisible, l’angoisse maternelle circonscrit l’univers connu de l’enfant. Il en reste des traces chez celui qui ne vécut véritablement qu’au Creusot : Quand je veux voir le bout du monde, je regarde le bout de mes chaussures (PAB 53).

Que faut-il faire pour aviver l’amour parental ? À l’âge de 5 ans, il tente de percer le mur de sa chambre avec un marteau. Un autre jour, il enlève sa chaussure pour la déposer tranquillement dans la soupière. À 7 ans, c’est la grande aventure : il fugue avec une fillette de l’école, jusqu’à parcourir six kilomètres avant d’être tous deux récupérés par les gendarmes. Faut-il fuir le monde ou s’échapper dans les livres ? Il n’y en a guère dans la maison, mais la grande sœur en emprunte à la bibliothèque. L’histoire de Hans Brinker, le petit héros de Harlem le bouleverse : en plaçant son doigt sur la fissure d’un barrage, le jeune héros sauve son village menacé d’inondation. Même émotion enfantine avec Le Joueur de flûte de Hamelin qui entraîne les rats hors de la ville.

À partir de 12 ans, l’adolescent découvre Balzac, Ronsard, Edgar Poe… Les livres s’imposent comme une fenêtre ouverte sur le monde : J’étais le plus jeune prisonnier de France. J’allais de ma chambre à la cour et de la cour à la chambre. Je passais chaque été enfermé dans la maison, à arpenter le cloître des lectures, goûtant à la miraculeuse fraîcheur de telle ou telle phrase. Quand je voulais sortir, un ange me barrait la porte. Je renonçais à mon projet et retournais dans ma chambre. L’ange me fermait la vie. Je la retrouvais dans les livres (PAB 13).

Alors que Christian Bobin a 18 ans, son père va relier ses premiers poèmes réunis sous le titre Premiers secours, aujourd’hui disparus et perdus à jamais. Le bac en poche, ce sera la fac de philosophie à Dijon : « J’ai eu cinq mille élèves, mais je n’ai eu qu’un Bobin », dira de lui le professeur Pierre Magnard, spécialiste de Pascal. Spinoza et Kierkegaard n’empêchent pas la découverte d’Henri Michaux, Franz Kafka et Philippe Jaccottet. Écartant toute carrière enseignante, Bobin s’essaie à une poésie bientôt publiée par Laurent Debut, l’ami qui, justement, crée les éditions Brandes. Lettre pourpre et Le Feu des chambres sont édités à cent vingt exemplaires, sur une presse antique installée dans l’hôpital psychiatrique où est internée la grand-mère maternelle.

Faute de débouchés philosophiques, Christian Bobin présente avec succès l’examen d’aideinfirmier et travaille à l’hôpital psychiatrique de Novillars, à deux heures de route du Creusot. Pas pour longtemps : au bout de quinze jours, il démissionne alors qu’il lui est reproché d’être « trop chaleureux avec les malades » (CH 281).

1978 : à une demi-heure de la maison familiale, il travaille pendant une année à la bibliothèque d’Autun, avant d’être embauché à mi-temps à l’écomusée du Creusot installé au château de la Verrerie, la cristallerie royale de Marie-Antoinette étant plus ancienne encore que la sidérurgie de la famille Schneider.

L’emploi à mi-temps laisse le temps d’écrire secrètement. Le premier récit, Les différentes régions du ciel, sera même perdu. Et le suivant, L’eau des miroirs, jamais édité avant 2022, a bien failli disparaître lui aussi : Les deux manuscrits, sans doute étaient-ils nécessaires. Sans doute. Mais l’impatience et la volonté naïve qui présidaient à leur écriture les discréditaient à l’avance. Trop riches, trop encombrés pour accéder à la souveraineté du jour (DRC 79).

1979, c’est aussi la rencontre avec Ghislaine Marion, événement capital pour Christian Bobin. À Ghislaine Marion délivrant par son rire tous les chemins de l’encre, écrit Christian Bobin en dédicace du Très-Bas, publié en 1993, et qui le fera connaître d’un très large public. Avec cette jeune femme se tisse un lien unique « un vendredi de la fin septembre 1979, vers dix heures du soir », raconte Dominique Pagnier (AP 137). Une rencontre furtive et éclatante, au point que, quelques jours plus tard, Bobin dépose dans la boîte aux lettres de cette jeune femme une carte à jouer, la reine de carreau, avec, au dos, quelques lignes : Ne rien attendre, ne rien penser. Comprendre que dans ce jeu, où l’on se trouve et où pourtant l’on ne joue pas, on se tient à la place du mort. Espérer que quelque chose, un jour, arrive.

La jeune femme a 28 ans, elle est mariée, mère de famille, institutrice. De cette amitié littéraire indéchiffrable, naît une complicité joyeuse avec l’âme sœur… Ma deuxième naissance a commencé en la voyant entrer dans une pièce, écrit Christian Bobin (PV 15).

D’un livre à l’autre, l’écrivain commence peu à peu à être connu et reconnu. Délaissant l’appartement familial, il s’installe dans le même quartier, au septième étage HLM avec vue sur le ciel. Plusieurs textes sont publiés dans la Nouvelle revue française (NRF). Gallimard devient son principal éditeur : Les livres de la Blanche sont comme des pierres tombées du muret du paradis, aurait confié Bobin (AP 165).

Le Très-Bas, publié dans la collection L’un et l’autre, marque un tournant : la critique est unanime, trois prix distinguent le livre consacré à François d’Assise (Les Deux-Magots, le Grand Prix catholique de littérature, et le prix JosephDelteil). Les lecteurs, surtout, sont au rendez-vous. Bobin entretient une vive correspondance, donne des conférences, répond aux invitations sans jamais se départir de cette vie simple qui est le creuset de sa quête.

Alors que le succès marque les années 1990, la mort va surgir, frappant Ghislaine le soir du 12 août 1995, au Creusot. Tu crois te plaindre d’une migraine, tu crois dire quelque chose d’anodin et tu tombes, une pluie d’étoiles rouges partout dans ton cerveau, rupture d’anévrisme, c’est ce que disent les médecins, c’est leur nom pour dire l’indicible, cette soudaine hémorragie de force dans le corps de ceux qui t’aiment, écrit Christian Bobin (PV 12).

Ce drame, cette déchirure, Bobin en parlera dans La plus que vive, publiée l’année suivante. Un texte qui suscite l’interrogation de certains n’y trouvant pas cette trace du deuil : On a cru que j’étais trop léger : j’étais un bloc de douleur (AP 185). Dès lors, la mort et le deuil de Ghislaine seront présents plus ou moins explicitement dans les textes de Christian Bobin, qui va jusqu’à reprendre l’appartement de la jeune femme, rue Traversière.

L’incompréhension s’installe avec les médias, prompts à dénoncer le succès. Les textes très personnels ne suscitent pas la même émotion que les fidèles voudraient retrouver à chaque titre. Une thèse sera même écrite par Stéphanie Tralongo sous le titre Les réceptions de l’œuvre littéraire de Christian Bobin : des injonctions des textes aux appropriations des lecteurs (Université Lumière – Lyon 2, 2001).

Si l’écrivain poursuit plus discrètement son œuvre, toujours attendu par un large cercle de fans, il doit aussi faire face aux épreuves. À la fin des années 1990, René Bobin est frappé par la maladie d’Alzheimer et doit être hospitalisé. Le fils consacre un livre – La présence pure (1999) – à ce naufrage de la mémoire. C’est dans ces mêmes années que Bobin découvre Le livre des anges de Lydie Dattas. Ce sera le début d’une amitié poétique et littéraire. Des longues conversations téléphoniques, Lydie Dattas tire un livre d’entretiens duquel elle s’efface pour laisser la place à son interlocuteur : « J’ai vu alors que la maison tenait debout, brillante dans la lumière » (La lumière du monde, 2001, p. 11). Divorcée du gitan Alexandre Romanès, elle rejoint Bobin au Creusot. Ils finiront par se marier.

C’est à cette époque qu’il s’apprête à quitter le Creusot, pour s’installer non loin, à Saint-Firmin, lieu-dit du Champ-Vieux. L’ancienne bergerie est construite au bout d’un chemin de terre, au cœur de la forêt. L’écriture est plus que jamais nourrie de cette nature omniprésente. Dans la chambre d’écriture, la table de travail est installée au bord de la fenêtre. Le papier à disposition, avec ce gros feutre qui calligraphie de grandes lettres penchées. Le poète rature à l’occasion, reprend, insère un mot. Je vivais dans un monastère dont personne n’aurait pu abattre les murs de papier, souligne-t-il (AP 249). Il écrit sur d’autres, Emily Dickinson, Pierre Soulages… En 2013, sa mère s’éteint : Ma mère est morte dans la nuit qui reprend tout et qui n’est pas la nuit. Je ne l’ai jamais rencontrée, confesse-t-il (AP 254).

En apparence paisible, sollicité par les médias, Bobin trempe sa plume lumineuse avec une sorte de gravité. « L’homme-joie », pour reprendre le titre d’un de ses livres, est attendu sur les plateaux de télévision. L’Académie française lui décerne un prix en 2016 pour l’ensemble de son œuvre. Ses lecteurs se précipitent en librairie, et l’écrivain ne se départ pas de son calme, de son sourire et de cette pénétrante attention à la rencontre. La maladie aura raison de lui. Christian Bobin s’est éteint, le 23 novembre 2022, il avait 71 ans. Il laisse une œuvre profonde, sensible, précieuse, qui peut nourrir, pour les uns la prière, pour d’autres la méditation du monde.

SIGLES UTILISÉS

ABN

Un assassin blanc comme neige

, Gallimard, 2011.

AP

L’arrière-pays de Christian Bobin

, Dominique Pagnier, L’Iconoclaste, 2018.

AR

Autoportrait au radiateur

, Gallimard, 1997.

BB

Un bruit de balançoire

, L’Iconoclaste, 2017.

BN

Une bibliothèque de nuages

, Lettres Vives, 2006.

CC

Le Christ aux coquelicots

, Lettres Vives, 2002.

CH

Bobin

, Cahiers de l’Herne, 2019.

DRC

Les différentes régions du ciel. Œuvres choisies

, Quarto Gallimard, 2022.

EM

L’éloignement du monde

, Lettres Vives, 1993.

G

Geai

, Gallimard, 1998.

HJ

L’Homme-joie

, L’Iconoclaste, 2012.

HJS

Le huitième jour de la semaine

, Lettres Vives, 1986.

HM

L’homme qui marche

, Le temps qu’il fait, 1995.

LGV

La grande vie

, Gallimard, 2014.

LM

La lumière du monde

, Gallimard, 2001. LMR

Le muguet rouge

, Gallimard, 2022.

LPM

La part manquante

, Gallimard, 1989. LTB

Le Très-Bas

, Gallimard, 1992.

LE

L’équilibriste

, Le temps qu’il fait, 1998. N

Noireclaire

, Gallimard, 2015.

NDC

La nuit du cœur

, Gallimard, 2018. P

Pierre

, Gallimard, 2019.

PAB

Prisonnier au berceau

, Mercure de France, 2005.

PM

Les poètes sont des monstres

, Lettres Vives, 2022.

PP

La présence pure

, Le temps qu’il fait, 1999. PRF

Une petite robe de fête

, Gallimard, 1991. PV

La plus que vive

, Gallimard, 1996.

R

Ressusciter

, Gallimard, 2001.

RC

Les ruines du ciel

, Gallimard, 2009.

VD

« Vivre le deuil », entretien avec Christian Bobin, numéro spécial,

La Vie

, 2012.

INTRODUCTION

Le livre a traîné une quinzaine de jours sur mon bureau. Les poètes sont des montres, c’est l’ultime texte de Christian Bobin publié de son vivant, sorti des presses en septembre 2022, alors même que le poète allait être cueilli par la mort. Disponible en librairie quelques jours seulement après son départ, il me brûlait les mains. Par un dimanche de gel et de froidure, ma table de travail dégagée, je saisissais l’ouvrage avec une pointe de religiosité inappropriée. Tout y conduisait pourtant, le papier épais des éditions Lettres Vives qui chante sous les doigts, les pages encore scellées. Tandis que les Suites pour violoncelle de Bach résonnaient en fond, je me suis emparé d’un couteau de cuisine, on n’a plus guère de coupe-papier à portée de main en cette époque de correspondance numérisée.

Dès les premières pages, tout Bobin est là.