Prier 15 jours avec Silouane - Michel Maxime Egger - E-Book

Prier 15 jours avec Silouane E-Book

Michel Maxime Egger

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Beschreibung

Révélés par son disciple Sophrony, la vie et les écrits de Silouane (1866-1938), moine russe du mont Athos, ont touché le coeur et changé l'existence d'innombrables personnes, bien au-delà des frontières de l'Église orthodoxe et même du christianisme. C'est que le starets, canonisé en 1987 par le patriarcat oecuménique de Constantinople, qui a affronté l'athéisme militant et traversé le désespoir, est un témoin lumineux de la miséricorde de Dieu et de sa solidarité avec les souffrances des êtres humains, un apôtre de la compassion pour toute la création et de la communion.

À sa suite, sur la voie qu'il nous propose dans l'Esprit Saint – chemin d'humilité, de kénose et de repentir orienté vers l'amour des ennemis –, nous sommes amenés à dépasser les divisions de tous ordres : confessionnelles, culturelles, individuelles. Un dépassement intérieur, par la transformation du coeur.




À PROPOS DE L'AUTEUR



Michel Maxime Egger est sociologue et écothéologien d'enracinement orthodoxe, auteur de plusieurs essais sur l'écospiritualité et l'écopsychologie. Il anime le site trilogies.org, au carrefour de la spiritualité et des enjeux contemporains.

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Prier 15 jours avec

SILOUANE

COLLECTION PRIER 15 JOURS

•Des livres sources pour

-passer quinze jours en compagnie d’un maître spirituel à la manière de ces temps de retraite qui ouvrent une brèche dans notre univers quotidien.

•Des livres pratiques

-un rappel biographique en début de volume

-un itinéraire balisé en introduction

-une entrée dans la prière répartie sur les quinze chapitres de l’ouvrage

-pour aller plus loin, une bibliographie expliquée.

•Des livres accessibles

-un ressourcement qui va à l’essentiel pour des chrétiens actifs

-une information donnée de l’intérieur pour un public plus large.

Prier 15 jours avec

SILOUANE

Michel Maxime Egger

nouvelle cité

Les citations du starets Silouane sont tirées du livre de l’Archimandrite Sophrony, Starets Silouane, moine du Mont Athos (1866-1938). Vie-Doctrine-Écrits, publié par les éditions Présence en 1996. Nous remercions M. Martin Lehberger et les éditions Présence de nous avoir autorisés à reproduire ces extraits.

Composition : Jean-Marie WalletCouverture : Richard Garcia

Illustrations de couverture :p. 1, portrait de saint Silouanep.4, portrait de l’auteur, D.R.

Tous droits de traduction,d’adaptation et de reproductionreservés pour tous pays.

(c) 2024, Groupe ElidiaEditions Nouvelle Cité10 rue Mercœur75011 PARIS

www.nouvellecite.fr

ISBN 978-2-37582-615-7ISSN 1150-3521

INTRODUCTION

« Saint sans frontière », « mystique de l’Église universelle », « spirituel d’une modernité bouleversante », « saint écologique »… Que n’a-t-on pas dit du starets1 Silouane, ce moine russe mort au Mont Athos juste avant la Seconde Guerre mondiale ? Dans son acte de canonisation en 1987, le Patriarcat de Constantinople a sinon promu, du moins reconnu l’universalité de Silouane, sa dimension œcuménique. Il le célèbre en effet comme un « maître apostolique et prophétique » non seulement pour l’Église orthodoxe, mais pour tous les « fidèles qui portent le nom de Christ ». Une intuition largement confirmée depuis lors. Comme en écho à Thomas Merton qui écrivait dans La Paix monastique (1958) : « Peut-être découvrira-t-on que le moine le plus authentique du XXe siècle aura été le père Silouane, ce remarquable starets du Mont Athos », de nombreux catholiques, en particulier des moines, se sont placés sous sa paternité en adoptant son nom. Fondée en 1993, l’Association Saint-Silouane l’Athonite2 compte aujourd’hui plus de 420 membres dans une vingtaine de pays, dont certainement une bonne moitié de non-orthodoxes.

L’expérience le montre: Silouane, par sa prière et son témoignage, est un ferment de rencontre et de communion. À sa suite, sur la voie qu’il nous propose dans l’Esprit Saint – chemin d’humilité, de kénose et de repentir orienté vers l’amour des ennemis –, nous sommes amenés à un dépassement des divisions de tous ordres, confessionnelles, culturelles, individuelles. Un dépassement intérieur, par la transformation du cœur. Avec le starets comme phare, il nous est donné d’expérimenter une autre voie vers l’unité des chrétiens : un œcuménisme de la sainteté sans lequel l’œcuménisme institutionnel, actuellement en crise, est certainement condamné à s’enliser.

Le rayonnement de Silouane est d’autant plus extraordinaire que, contrairement à d’autres grands saints orthodoxes comme Séraphin de Sarov (1759-1832) ou Jean de Cronstadt (1829-1908), il n’a pas attiré les foules de son vivant. Au Mont Athos, l’archimandrite Sophrony (1896-1993) était son unique disciple ; seule une poignée de pèlerins cherchaient à le voir, essuyant d’ailleurs les quolibets de certains moines et théologiens qui se demandaient ce qu’on pouvait bien lui trouver. « Chose étrange, la vie absolument exceptionnelle du starets demeura pour ainsi dire inconnue du plus grand nombre, et ce n’est qu’après sa mort que l’on se rendit compte de sa sainteté », écrit le père Sophrony. Qui précise : « Jusqu’à la fin, la simplicité et l’humilité du starets Silouane ont voilé sa sainteté. »

Silouane, par sa vie même, nous invite à une autre vision de la sainteté que celle, héroïque et glorieuse, de la tradition hagiographique médiévale et byzantine, avec ses légendes dorées et son lot de manifestations surnaturelles. La sainteté qu’il nous révèle, en nous la rendant accessible, est celle, cachée et discrète, de l’humilité : Le croyant peut être pitoyable dans son apparence physique, habillé comme un miséreux, sans défense en face du Prince de ce monde ; mais, selon l’Esprit qui est en lui, il est vraiment grand, écrit-il. Le royaume auquel il appartient grâce à un don d’En haut n’est pas de ce monde. Ailleurs, le starets ajoute que les vrais spirituels vivent le plus souvent dans le secret, soustraits aux regards des hommes car ils ne font pas de miracles visibles. Mais dans leur âme, chaque jour, s’accomplissent de vrais miracles. Seulement les gens ne peuvent pas les voir.

Comment donc ce simple moine athonite est-il devenu ce « contemporain capital » évoqué par d’illustres théologiens ? La première raison tient à l’œuvre remarquable de l’archimandrite Sophrony, canonisé en novembre 2019 par le Patriarcat œcuménique de Constantinople. Venu en Occident en 1947, après vingt-deux ans passés au Mont Athos, il a consacré l’essentiel de sa vie à témoigner de la sainteté de son maître. Il a notamment publié en 1948 les écrits de Silouane, qu’il a introduit par un véritable traité de spiritualité ascétique : Starets Silouane, moine du Mont Athos3. Réédité déjà quatre fois en français, traduit intégralement ou partiellement en une quinzaine de langues, cet ouvrage est devenu un classique de la littérature orthodoxe. À cela s’ajoutent d’autres facteurs comme le caractère très existentiel du message de Silouane, l’accent qu’il met sur l’expérience vécue de Dieu, la fraîcheur évangélique de son style qui va droit au cœur, la résonance contemporaine, pour ne pas dire l’actualité de certains thèmes clés de son enseignement spirituel : la place centrale donnée à l’Esprit Saint, la miséricorde divine, l’amour des ennemis et, bien sûr, la parole frappante qu’il a reçue du Christ : « Tiens ton esprit en enfer, et ne désespère pas. »

Le starets Silouane, de son vrai nom Syméon Ivanovitch Antonov, naît à Chovsk en 1866, dans une famille typique de la paysannerie russe. Aux côtés de ses quatre frères et deux sœurs, il va mener la vie habituelle d’un jeune campagnard de son temps. Il reçoit une éducation très rudimentaire – à peine deux hivers de scolarité. Il fait comme le Christ un apprentissage de charpentier. Spirituellement, il subit surtout l’influence de son père. Un homme illettré, mais plein de douceur, de sagesse et de patience, dont il dira après des années de vie monastique : Je ne suis pas parvenu à la mesure de mon père. Voilà un starets comme j’aimerais en avoir un.

Physiquement, Silouane est conforme à l’image traditionnelle du moujik. C’est un solide gaillard, plutôt doux et paisible de tempérament, ce qui ne l’empêche pas de se bagarrer à ses heures, d’aimer bien boire et manger, jouer de l’accordéon, faire la fête. Il est une telle force de la nature qu’il peut, dit-on, boire trois litres de vodka sans rouler sous la table, ingurgiter sans problème, un jour de Pâques, une omelette faite de cinquante œufs !

Sous cette existence en apparence conventionnelle se cache cependant une vie intérieure d’un tout autre ordre. À l’âge de quatre ans, Silouane est frappé par la visite d’un marchand de livres ambulant qui prétend dur comme fer que Dieu n’existe pas. Son père a beau lui dire que ce colporteur est un idiot, Silouane est troublé. Le doute s’est insinué dans son esprit. Il se dit : Quand je serai grand, j’irai chercher Dieu par toute la terre. La réponse, de fait, viendra quinze ans plus tard. Alors qu’il travaille sur un chantier, il est touché par le témoignage d’une femme qui revient d’un pèlerinage sur la tombe d’un saint, où elle a vu s’accomplir des miracles. Silouane reçoit comme une inspiration : S’il est saint, c’est que Dieu est avec nous. Je n’ai pas besoin de parcourir la terre pour le trouver. À cette pensée, véritable grâce de l’Esprit Saint, son cœur s’enflamme d’amour pour Dieu. Il se convertit, change, prie beaucoup en versant des larmes. Il éprouve pour la première fois le désir de devenir moine. Mais son père freine ses ardeurs, lui ordonne d’accomplir d’abord son service militaire.

Tout plein de cette expérience de l’Esprit Saint, Silouane vit comme sur un nuage. Mais cet état de grâce ne dure pas. Au bout de trois mois, il a repris une vie ordinaire. Il va même jusqu’à commettre ce qu’il considère comme deux grands péchés : il couche avec une fille et, pendant la fête paroissiale du village, il se bat avec un jeune cordonnier et le frappe si fort qu’il manque de peu de le tuer.

Mais Dieu ne l’abandonne pas. Quelque temps plus tard, alors qu’il est assoupi, Silouane rêve qu’un serpent se glisse dans sa bouche et pénètre dans son cœur. Il se réveille, dégoûté, et il entend une voix, belle et très douce, qu’il reconnaît comme celle de la Mère de Dieu : « Tu as avalé un serpent, et cela te répugne. Moi non plus je n’aime pas voir ce que tu fais. » C’est une nouvelle expérience de la grâce, cette fois-ci déterminante. À nouveau, Silouane se repent, mais plus profondément. Un sens aigu du péché naît en lui. Sa vision du monde, sa vie quotidienne, ses rapports avec les autres, tout se transforme. Il fait son armée dans le bataillon de génie de la garde impériale, en pensant tout le temps aux moines du Mont Athos qui prient jour et nuit. Qui, au Jugement dernier, donnera une meilleure réponse : eux ou nous ?, se demande-t-il.

À peine rentré chez lui, Silouane se met en route pour le Mont Athos, haut lieu du monachisme orthodoxe. Il a vingt-six ans. Il devient moine au monastère Saint-Panteléimon, véritable cité qui compte à l’époque près de 2000 moines et ouvriers. C’est l’âge d’or du monachisme russe sur la Sainte Montagne.

Dès son arrivée, Silouane se confesse et, plein de zèle, commence sa nouvelle vie. Il entre dans le rythme athonite, très exigeant, des longs offices liturgiques, de la prière personnelle et du travail communautaire. Les premiers jours, tout lui paraît facile. Mais très vite, il est assailli par toutes sortes de mauvaises pensées qui le distraient ; des tentations charnelles lui suggèrent même de retourner dans le monde pour s’y marier. La sensation de la grâce le quitte. Tout devient lourd, dificile. Il prend conscience que le Mont Athos, coupé du monde et entièrement consacré à la prière, n’est pas le havre de paix et de stabilité qu’il croyait. Il découvre que l’enfer qui, d’une certaine manière, était à l’extérieur de lui quand il était dans le monde, se trouve en réalité à l’intérieur de son cœur.

Il reprend donc la lutte, prie sans relâche, plus intensément encore. Avec cette résolution : Je mourrai ici pour mes péchés. C’est alors qu’il est affecté au moulin du monastère. Un travail très dur, car à l’époque on produisait près d’une tonne de pain par jour. Là, quelques semaines plus tard, alors qu’il prie devant l’icône de la Mère de Dieu, il reçoit le don de la prière incessante. La prière de Jésus – « Seigneur Jésus Christ, Fils de Dieu, aie pitié de moi, pécheur » – entre dans son cœur, se met à jaillir d’elle-même, sans effort, jour et nuit, accompagnée de larmes.

Silouane vient donc, par une grâce exceptionnelle de l’Esprit Saint, d’accomplir un pas décisif sur l’échelle de la sainteté. Mais le risque de chuter n’en est que plus grand. Ce don ainsi que les compliments de ses frères – qui apprécient sa compagnie et la qualité de son travail – font naître en lui des pensées de vanité, d’autosatisfaction. Il pense qu’il est un bon moine, qu’il vit une vie exemplaire. Il observe les autres, se compare à eux, les juge. De nouveau, sous l’effet de ces pensées, il se ferme à la grâce, la perd. Et la tourmente des passions recommence de plus belle, encore plus fort qu’avant. Pire, comme à saint Antoine dans le désert d’Égypte, les démons lui apparaissent avec leur cortège d’illusions spirituelles, de suggestions qui le tirent vers l’abîme du désespoir. Silouane pratique un jeûne sévère, redouble ses prières, mais il a le sentiment qu’elles se perdent dans le vide. Il se sent seul, abandonné, l’âme envahie de ténèbres. Il perd courage. Angoissé, à bout de force, il finit par s’effondrer avec ces paroles : Dieu est inexorable, on a beau le prier, Il ne nous écoute pas.

C’est alors, comme en réponse à sa détresse – ou plutôt à son abandon total dans les mains de Dieu face à l’inanité de ses propres efforts – qu’il reçoit une nouvelle grâce, plus grande encore que les précédentes. Six mois après son arrivée sur la Sainte Montagne, pendant les vêpres, alors qu’il prie devant l’icône du Christ dans la chapelle du prophète Élie, le Seigneur lui apparaît. Le temps d’un éclair, dans la lumière fulgurante de l’Esprit Saint, Silouane voit le Christ vivant, rayonnant de beauté, de douceur, de miséricorde et d’humilité. Instantanément, tout son être – corps, âme et esprit – se trouve rempli du feu de la grâce. Il connaît que Jésus-Christ est Dieu, il fait l’expérience de l’infinie miséricorde et de l’indescriptible amour de la Trinité. Le Seigneur sera dès lors sa seule joie, sa béatitude, sa force, sa sagesse, sa richesse.

Cette révélation va être l’épicentre de toute son existence, la référence constante de sa vie spirituelle, le foyer de son amour brûlant pour le Père, le Fils et l’Esprit Saint, puis pour toute l’humanité et la création. Elle sera aussi – paradoxe de la vie en Christ – la source de sa souffrance et de sa nostalgie sans fin de Dieu, qu’il a si bien exprimée dans Les Lamentations d’Adam. Car pour celui qui a connu la gloire du Seigneur, avec toute la joie et la paix qui l’accompagnent, la perte de la grâce et l’éloignement de Dieu sont le plus grand des malheurs. L’homme se sent alors comme Adam chassé du Paradis, incapable de trouver le repos sur terre, en pleine déréliction.

Manquant de la maturité spirituelle nécessaire, mal conseillé par un confesseur qui attise en lui des pensées de vanité, Silouane n’arrive pas à garder la grâce inouïe qu’il vient de recevoir. Il replonge dans un terrible combat contre les passions. Une guerre intérieure et solitaire – car personne ne peut l’aider – qu’il livre dans une cabane où il s’est retiré, dans une ascèse extrême, passant l’essentiel de ses nuits en prière, en proie aux attaques des démons. Si le Seigneur ne m’avait fait connaître au commencement de quel amour il aime les hommes, je n’aurais jamais supporté une seule de ces nuits, et j’en ai eu une multitude.