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« Courir est une passion que je veux emporter le plus loin possible dans l’âge. Je serai plus heureux de pouvoir encore prendre le départ de trail de plusieurs dizaines de kilomètres dans cinq ou dix ans, que de regarder mes chaussures s’ennuyer sur une étagère, pour en avoir terminé un hors norme. Trouver la bonne mesure, c’est bien se connaître, s’accepter. Courir après des performances qui ne me sont pas accessibles aurait transformé le plaisir en corvée de l’effort. J’ai depuis longtemps compris que la hauteur de la marche pour faire partie des meilleurs était trop haute pour moi. J’ai toujours visé le plus haut de ce que je pensais pouvoir faire. Chaque réussite m’apprenait sur mes possibilités, poussant le curseur plus en avant, tout en restant humble vis-à-vis des véritables champions. »
À PROPOS DE L'AUTEUR
Rien ne sert de courir… et pourtant est une invitation de
Bruno Guillot dans son univers. Il y partage ses expériences de vie, persuadé que certains pourront y puiser quelques réponses.
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Seitenzahl: 139
Veröffentlichungsjahr: 2022
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Bruno Guillot
Rien ne sert de courir… et pourtant
Roman
© Lys Bleu Éditions – Bruno Guillot
ISBN : 979-10-377-4982-6
Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L.122-5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L.122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L.335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.
À mes enfants
Et à ma femme, pour son indéfectible soutien.
Préface
Nous sommes dans une société où il suffit d’un post avec un visage et quelques mots pour obtenir un grand nombre de « like »… Et peu de personnes s’aventurent au-delà de la troisième ligne d’un commentaire trop long sous un visuel accrocheur.
J’en fais l’expérience sur mes propres réseaux où mon visage en gros plan, associé à une phrase banale, engrange dix fois plus d’adhésion qu’un texte de 30 lignes sur le sens de la vie, pesé au trébuchet de ma plume et au feu de ma pensée !
Nous sommes entrés de plain-pied dans un temps où quand on fait peu, on dit beaucoup !
Un monde où l’on n’existe que par « l’ego-miroir » déformant du web, qui façonne un personnage virtuel dont on est bien le seul à savoir au fond de nous-mêmes qu’il n’existe pas.
Et puis il y a ceux qui font vraiment ! Ceux qui défrichent, ceux qui explorent, ceux qui se donnent sans compter.
Bruno Guillot est de ceux-là.
Il a choisi de raconter, dans son style, avec ses mots, l’aventure que fut son existence.
Une aventure en cours, une vie en chemin, que je vous invite à découvrir, en lisant pas à pas, chapitre après chapitre, le livre de sa vie.
Écrire est un effort. Se dire est parfois une blessure, mais aussi une guérison. Vous trouverez l’un et l’autre dans cet ouvrage qui ressemble à l’homme : sincère, direct !
Ultreïa !
Serge Moro
Rédacteur en chef du magazine Esprit Trail
Introduction
Je cours d’un pas léger, puis d’une impulsion mon enjambée se fait plus grande et mes pas commencent à ressembler au décollage d’un oiseau de grande envergure, jusqu’à passer par-dessus une voiture sans mal, quelque pas de plus et je franchis le toit d’une maison, chaque fois que je m’élève, j’ai l’impression très vive que je vais m’écraser au sol, mais la foulée suivante me propulse vers des hauteurs vertigineuses, bientôt je cours de toit en toit. Rien ne semble pouvoir m’arrêter, si ce n’est lorsque je ne distingue plus l’endroit de ma descente… c’est à ce moment que je me réveille en sursaut. Combien de fois ai-je fait ce rêve enivrant, pouvoir ainsi courir et maîtriser le vide. La chute n’en était pas une puisque je retombais sur mes pieds à chaque fois. Pourtant dans mon sommeil, je ressentais cette boule au ventre lorsque l’on saute dans le vide, accompagné en plus de la poussée d’adrénaline qui va avec les sensations fortes. Une vraie drogue. Beaucoup d’entre nous font ce genre de rêve où le sol se dérobe sous nos pieds. Plutôt un cauchemar pour la majorité. Le soir au coucher, j’espérais faire ce rêve que je trouvais extraordinaire. Plus tard, jeune adulte, j’ai aimé croire que dans ces rêves se retrouvaient mes leitmotivs sportifs. Le plaisir, le mouvement, l’effort, et toutes les sensations qui les accompagnent. Aujourd’hui encore ce sont mes maîtres-mots dans tout ce que j’entreprends. J’ai essayé au maximum de prendre du plaisir dans la vie, d’emmener les miens dans ce sens, malgré les épreuves j’ai toujours cru dans mon choix. À soixante-deux printemps, je sais que j’ai fait le bon.
Je n’ai jamais été champion de rien, mais l’effort physique a beaucoup contribué à mon épanouissement personnel. Encore aujourd’hui, je ne conçois pas la vie sans lui. Explorant de façon empirique les limites de mon corps, de mon mental dans les différents sports que j’ai pratiqués ou pratique encore. Je ne me suis spécialisé dans aucun domaine, ne me suis fixé aucune limite. De la course à pied au cyclotourisme, du motocross à la plongée, du VTT au saut à l’élastique, du ski au canyoning, cherchant les sensations du plaisir dans l’essence de l’action, du mouvement. Que serait ma vie sans sport, sans mouvement ? Je ne me suis jamais posé vraiment la question, car il m’est impossible de concevoir ma vie sans, cela fait partie de moi, de mon équilibre. Il est une constante dans cette recherche effrénée du dépassement de moi, la course à pied. Véritable fil rouge dans ma vie depuis ma plus jeune enfance. Le plaisir que m’apporte la course n’a jamais faibli.
Dire que la course est un mode de vie n’est pas une expression usurpée en ce qui me concerne. Je ne courais pas seulement lors des quelques cross de mon adolescence, je courais dans ma vie de tous les jours. J’allais au collège en trottinant, sac sur le dos sans aucune autre raison que celle d’aller le plus vite possible d’un point à un autre. Idem pour aller à toutes mes activités sportives ou culturelles. Habitant au troisième étage, je montais et descendais les escaliers deux à deux, parfois trois par trois. Cela ne servait à rien d’autre que de procurer le plaisir d’en être capable, cherchant sûrement de manière inconsciente à ressentir les sensations de mon rêve.
Qui que l’on soit, quoique l’on fasse nous courons tous un jour. Les amateurs de spectacle courent voir tel film, pièce de théâtre ou exposition. D’autres courent après l’argent, la réussite quand d’autres courent à leur perte. Les hommes et les femmes se courent après pour se séduire. Les musiciens laissent courir leurs doigts sur leurs claviers, ou manches de guitares. D’autres laissent courir leur imagination pour que naissent des livres, des dessins. Je vous le disais, nous courons tous un jour dans notre vie. Pour ce qui concerne la course à pied, la définition du Larousse est la suivante « Se déplacer rapidement, en s’appuyant alternativement sur une jambe » geste instinctif que tout être humain connaît. Il faut reconnaître que rapidement n’est pas précis. J’ajouterais que c’est le moment où la marche n’est plus possible car trop rapide, alors le corps bascule dans la course. Chaque humain a couru un jour. Tous les enfants courent. Ils courent à perdre haleine sans s’économiser. Ils courent ventre à terre ou à fond de train, quand ils ont peur de se faire attraper. Les plus rapides courent comme des lièvres.
L’enfance est la période où courir est universel, cela fait partie du quotidien. Courir est encore ludique, sans besoin ni raison. Nous grandissons, le besoin de courir s’estompe, disparaît. Le fait est que dans nos sociétés modernes, nous n’avons plus besoin de courir pour nous déplacer. Que ce soit pour aller chercher notre pain, ou se rendre à l’autre bout de la planète. Nous avons inventé toute une batterie de moyens performants pour ne plus avoir besoin de courir. À l’adolescence déjà, le plaisir de courir sur une piste ou dans les bois s’amenuise. Je me souviens du grand nombre de dispenses de sport données au professeur d’éducation physique quand la course à pied était au programme. Pourtant beaucoup continuent de courir, on estime être environ 50 millions de pratiquants rien qu’en Europe aujourd’hui. Alors pourquoi courir ? Pourquoi l’homme continue de pratiquer ce jeu, qui en est un pour moi, partout sur la planète ?
Courir pour en faire son métier
Quand la nature offre à certains tout ce qu’il faut pour devenir un athlète. Sentir dans son for intérieur que le potentiel est là. À force de travail, d’entraînement, de sacrifices devenir une bête de course en aiguisant ses muscles, en peaufinant jusqu’au moindre détail ce qui va permettre de faire un chrono, une place ou mieux un podium. Les échelons sont difficiles et longs à franchir. Comme dans tout sport de haut niveau, beaucoup de prétendants et peu d’élus. Chacun part avec la même envie, la même motivation, devenir le meilleur des meilleurs dans sa discipline. Vitesse, endurance, il n’y a pas de mystère, ce sont avec des milliers de kilomètres que ces femmes et hommes, essayent d’amener leur corps à son maximum. Dans un sport mécanique, la machine a son rôle à jouer, dans la course, le pilote et la machine ne sont qu’un. Là où des modifications techniques peuvent être faites sur la machine, pour le corps il n’en est rien. Pour être sur la plus haute marche, il faut être exceptionnel, avoir le geste parfait et le mental en harmonie pour que celui-ci donne tout. J’ai un profond respect pour ces athlètes, qui courent des cent mètres avec des pointes de 40 km/h, uniquement avec leur force et une réelle beauté dans le geste. J’ai toujours préféré l’endurance. Mon admiration est encore plus grande envers ceux qui enchaînent des centaines de kilomètres, aux dénivelés défiant parfois le raisonnable. Courir pour en faire son métier n’est accessible qu’à des personnes hors normes, quelle que soit la discipline de course. Gagner sa vie à courir est un véritable engagement quotidien et total. Pas de place à l’improvisation, aux écarts qui se payent cash le jour J. Que ce soit pour faire un 100m en 9s58 ou parcourir 900 km/55000mD+ en 12 jours, il faut une même discipline avec une envie de gagner hors du commun.
Courir pour les autres
Certains mettent leurs jambes au service des autres. Prendre un plaisir décuplé en courant pour une cause, ceux-là vous disent courir utile. Dans ce cas, même en compétition, point de victoire recherchée. Seule l’envie d’apporter sa bonne santé à ceux qui sont moins favorisés et attirer l’attention. Cela va de la simple course locale aux défis les plus audacieux pour récolter des dons. Je me suis parfois posé une question, le coureur qui entreprend ce genre de démarche, le fait-il pour justifier son besoin de courir, ou par pur altruisme ? Je pense que les deux sont intimement liés. C’est cette dimension de la course qui optimise le plaisir pris pendant l’effort. La course peut devenir complètement tournée vers l’autre. C’est le cas pour les Joëlettes (sortes de fauteuils tout terrain à une roue, tirés et poussés par des coureurs valides) qui intègrent une personne handicapée dans une équipe de coureurs pour participer à des courses. Discipline qui a même son championnat du monde, et que l’on retrouve régulièrement sur les trails classiques. Dans ce cas, c’est bien au sens propre que les coureurs valides courent pour la personne handicapée. Pour avoir durant quelques kilomètres sur un trail en forêt de Fontainebleau intégré une équipe de Joëlette, je peux témoigner qu’à ce moment vous ne courez plus pour vous, mais pour l’autre. Émotion garantie lorsque le transporté vous encourage de la voix pour franchir les obstacles. Cela devient une vraie course d’équipe. Parlons d’équipe, deux coureurs attachés physiquement l’un à l’autre, un voyant et un non voyant qui doit faire une confiance aveugle à son guide, l’expression prend là toute sa dimension. Ce ne sont pas les jambes que l’on met au service de l’autre, mais son regard, sa voix, son rythme. L’osmose doit être totale, tant physique que mentale pour franchir une ligne d’arrivée partagée.
Courir pour rester en forme
La mode du jogging pour garder la forme et la ligne a mis à la course un très grand nombre de pratiquants. Cette activité est facile à mettre en œuvre. Tout un chacun peut aller s’acheter une paire de chaussures, un short, un maillot, pour aller courir en bas de chez lui. Partout les gens se sont lancés, avec pour seul objectif de se sentir bien. Ils redécouvraient le plaisir ludique de la course. Aucune contrainte, selon son envie, le temps à disposition, quel que soit l’heure ou l’endroit, il suffit d’enfiler ses chaussures. Aller courir c’est contrer la vie moderne et sédentaire. S’offrir une parenthèse pendant laquelle on reprend possession de son corps, lui redonnant l’occasion de s’exprimer par un geste naturel qui fait partie intégrante de l’être humain. Beaucoup ont redécouvert la course à pied de cette manière, pour au fil du temps, se laisser gagner par l’envie de plus de distance, jusqu’à accrocher un jour un dossard sur le maillot. De courir pour rester en forme, on bascule vers une autre approche. La pratique d’un sport est addictive, la course l’est particulièrement, c’est sûrement pour cette raison que le nombre de pratiquants n’a cessé d’évoluer. Pour le novice, les débuts sont difficiles. Il faut que le corps retrouve ses réflexes naturels, la synchronisation entre le souffle, le cœur et l’effort. Mais cela revient très vite, car cela fait partie de la mémoire de notre corps. Une fois passé ce cap, au-delà de courir pour rester en forme, une nouvelle notion apparaît, celle du plaisir de courir, à partir de ce moment tout est possible.
Et courir… de plaisir(sur l’air d’une chanson bien connu)
Le souffle est court. Le chemin de cailloux roulants monte en lacets serrés, il faut les mains pour ne pas chuter. Au-dessus de moi, l’échancrure du col de Contraix, dans le parc d’Aigüestortes, Pyrénées espagnoles, se découpe dans le ciel. Je ne me souviens pas avoir entendu mon corps haleter autant dans un effort. Passer de 1950 mètres d’altitude à 2800 mètres en trois kilomètres, pour un habitant des plaines, c’est un gros morceau. C’est la première fois que je m’engage dans une course aussi longue avec autant de dénivelés. La Carros de Foc est une course atypique. Une boucle de 70 km/9800 m D+/- dont le parcours se situe entre 1800 m et 2800 m. Jusque-là rien de spécial, pourtant ici point de dossard, ni de chronomètre, encore moins de ravitaillement ou de balisage. Vous choisissez votre refuge de départ, votre sens de la boucle. Une fois par an en octobre, le village d’Espot organise cette course. À votre arrivée, c’est une carte IGN du parc que l’on vous remet ainsi qu’une carte de route à faire tamponner dans les neuf refuges qui jalonnent le parcours. Moins de 24 h vous êtes skyrunner, entre 24 h et 33 h vous êtes finisher. Aucun classement, aucune remise de coupe, juste un diplôme et un maillot selon votre arrivée.
J’ai découvert cette course en 2011, un petit encart dans Pyrénées Magazine. La première fois, j’ai été finisher en moins de 25 h. J’y suis revenu en 2013. Comptant sur les expériences de trail de montagne accumulées en deux ans pour faire mieux. La météo en a décidé autrement, course arrêtée au kilomètre 56. Je pense que j’y retournerai. Cette course représente pour moi la quintessence de la course plaisir. On ne vient pas ici pour briller sous les flashs, il n’y a aucun public qui vous encourage, juste des randonneurs que l’on côtoie sur le chemin. C’est une course de haute montagne sans assistance, en autonomie. À chaque rencontre avec un autre coureur, on s’enquiert de sa forme en le saluant. Chacun est là pour le plaisir de l’effort dans un endroit magnifique. En solitaire ou en groupe, on vient sur cette course pour faire une expérience. J’en garde un souvenir très fort. Cette course avait marqué une année de préparation pendant laquelle j’avais retrouvé un plaisir décuplé à courir, surtout à courir longtemps.
Pour faire du sport, il faut aimer mettre son corps en mouvement, le sentir bouger, respirer. Si vous posez la question à une personne sur le pourquoi elle fait tel ou tel sport, la première réponse est presque toujours la même, j’aime ça. Au regard de ceux qui ne font aucune activité physique, c’est de la démence. Pourquoi se faire mal, transpirer, s’entraîner des heures ? À leurs yeux, la notion de plaisir est inexistante. C’est vrai pour des activités physiques que je classerais de raisonnables, alors quand vous entrer dans le domaine de l’endurance, ou de l’ultra endurance, vous êtes assez rapidement pris pour un fou, même par des sportifs. C’est un peu moins vrai en 2020. L’ultra médiatisation dans tous les domaines, en particulier dans les exploits sportifs, a sorti de l’isolement et de l’incompréhension, les adeptes des sports longue durée. La fulgurante évolution du trail, tant dans le nombre de courses que de participants n’y est pas étrangère.