Subtile vermine - Ansley Roland Moyez - E-Book

Subtile vermine E-Book

Ansley Roland Moyez

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Beschreibung

Un monde fou, inquiétant, qui véhicule haine, fiel, stupéfaction ! Voilà près de soixante dix ans que quelques milliers d'êtres se sont réfugiés sur une station spatiale, Citérius A, placée en orbite terrestre. Leur vie est pitoyable, liée aux interdictions, restrictions, frustrations... Le seule espérance de ces individus est de retourner sur leur Terre natale. Dans un ailleurs, monde parallèle, inconnu des hommes ; autre galaxie, autre système planétaire ; au sein d'une tribu puissante et dominante, les Bar Nachas, l'une de leurs progénitures a été choisie pour pénétrer un curieux système organique retrouvé lors de fouilles sur la planète Terre. Ce curieux système propulse l'immergé vers une observation constante intégrant actes et pensées des hommes végétant sur cette fameuse station spatiale Citérius A. Passer de l'observation à l'intégration, voilà tout un problème à résoudre pour notre progéniture ambitieuse, afin qu'elle puisse affirmer à tous, sa supériorité et, sa volonté de puissance !...

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Tous droits de traduction, de reproduction et d’adaptation

Réservé pour tous pays

« Désespéré Gilgamesh errait dans la steppe, en pleurant amèrement son ami Enkidu.

Est-ce que je vais mourir moi aussi ? Se demandait-il.

Est-ce que je vais aussi devenir un cadavre ?

Si je cours dans la steppe, c’est que l’angoisse et la peur de la mort m’étreignent. Mais je vais partir sans tarder pour rejoindre Utanapisthî, lui qui connait le secret de l’immortalité. »

L’épopée de Gilgamesh

(Récit Mésopotamien, Première dynastie d’Uruk (2700 av.JC)

Axiome Alpha

ÂME ET SUPPLICE

Tel un arrogant pirate, du temps de l'apogée de Venise et de ses doges,

(En préambule, cher Aspirant Bar Nachas qui subissez votre première immersion, nous avons élaboré de courts rapports qui vous aiderons à une meilleure compréhension de ce monde)

Venise : Ville située près du centre terrestre, était bâtie sur un groupe d’îlots… les Terriens étaient peu attirés à vivre sur les mers et océans. Petite ville sublimée (romantisme et culture) Nous verrons par la suite quel mécanisme entraine les esprits primitifs de cette espèce humanoïde à une inclination émotionnelle exacerbée. Cette ville incarnait à merveille cette symbolique... Elle disparut du globe lors du terrible séisme qui engouffra, la majeure partie de la région Adriatique englobant le nord de l’Italie jusqu’à la partie ouest de la Turquie (2376 (Datation équivoque, Humanoïdes terrestres, qui pourrait être une date charnière annonçant la fin de cette civilisation)

Antanéus fut jeté dans les soutes interdites de l'immense station Citérius A.

Dorénavant, il serait seul. Il devrait payer durement son erreur, supporter ces lieux, ce vide...

Pourquoi cette image de Venise venait-elle l'asticoter ?

Ce parallèle de la ville flottante sur les bords de l'Adriatique et cette station spatiale figée dans l’espace, le firent éclater d’un rire haineux qui se transforma douloureusement en une affreuse colère. Il se jeta avec rage sur la porte de fibres compressées, cognant d'un poing chargé de hargne.

Honte à eux ! Les imbéciles qui venaient de le faire enfermer. Incapables de comprendre, de ressentir, aveuglés par leurs principes et leurs lois. Mesquinerie de l’Homme organisé !

- Inertie du moi face aux codes et aux lois ! Beurk !

- Abandon du moi pour sacraliser le groupe ! Beurk !

- On ne peut réussir à construire qu'avec la masse populaire !

Beurk ! Beurk! Et Beurk !

Rêves contournés ! Rêves abandonnés ! Rêves fustigés !

Oh, il les haïssait... Tous !

- Moi ! Moi ! MOI ! Hurla-t-il, alors.

Antanéus, le premier à avoir enfreint la loi sur cette miraculeuse station : Citérius A. Accusation formelle : un terroriste ! Bande de minables ! Il éclata d'un rire amer, lui, un terroriste !? Analyse, somme toute ridicule, telle que pouvait l'être cette survie dans ce cosmos.

D’un regard méprisant, il examina rapidement les soutes. Il était là, perdu à jamais, n'ayant plus qu'à croupir dans les cales de ce bâtiment, cette galère, non royale, servant d'exemple à tous ceux qui auraient perdu l’espérance, qui ne feraient plus confiance au conglomérat des chercheurs et seraient animés par une vague idée de rébellion.

Ah, la belle figure emblématique ! La belle tête de proue !

Petit rictus affiché au coin des lèvres, ah, ces pauvres abrutis étaient loin de s'imaginer le vrai visage d’Antanéus. S’ils savaient !...

Il rit un bon coup, suffisamment longtemps, de sorte d’exorciser sa peine, puis se réintégra à ce réel si épouvantable.

Terrible punition ! Aucune possibilité de faire appel. Aucune chance de réintégration. Désormais, nul en ce monde ne le verrait plus, ne l'entendrait, hormis ces minuscules caméra-anatomisantes du système de surveillance, dotées des meilleurs systèmes laser réputés infaillibles puisque visualisant de l’ensemble au moindre détail d’un objet, d’un corps ; de son pur mécanisme, à la minuscule anomalie de fonctionnement. Rien, non, rien, ne pouvant leur échapper.

Antanéus laissa galoper sa colère durant quelques minutes, cognant, donnant des coups de savates contre les portes et les parois de fibres compressées.

Ses cris rauques qui résonnaient dans les soutes, petit à petit, se transformèrent en de courts sanglots qui étranglaient maintenant sa voix rageuse.

Complètement abattu, il se plaqua contre l'une des parois lisses et scintillantes. Se figea, laissant aller ses yeux hagards pour détailler cet hostile environnement aux allures sévères.

Il paraissait si minuscule dans l'immensité de ces soutes.

Il ne restait que cinq aircraftclams de secours, aéronefs à moitié démontés, carcasses poussiéreuses, dont la plupart étaient atteintes d'une décomposition chronique des matériaux composites ; d'un effet bien plus dévastateur que pouvait être la rouille pour le métal, ayant cette particularité de transformer l’ensemble surchargé de couches successives de matériaux composites en une épaisse crème noire qui pendouillait ici et là.

Nul n’arrivait à comprendre les raisons de cette décomposition, qui heureusement, n’apparaissait qu’en cette seule zone de la station.

Certains chercheurs (grands alarmistes) en arrivaient à croire que ce phénomène agissant au sein du noyau même de la matière était lié à la suppression d'apesanteur, que, pour des raisons économiques, on avait limitée dans les soutes à 3% du besoin essentiel.

Dans le doute, on avait donc rétabli les mêmes conditions que sur l’ensemble de la station.

Toutes ces dépendances aboutissaient à des contraintes et forcément à des lacunes dans ce type de recherches scientifiques, cela provoquait d'étranges déséquilibres dont nul ne connaissait vraiment les aboutissants.

En effet, cette crème était un des fléaux contre lesquels différents chercheurs de la station œuvraient depuis des années, sans jamais rien trouver de réellement concluant.

Antanéus constata qu’au moins, ici, il bénéficierait des conditions de vies coutumières à la planète mère. Il pivota sur lui-même un peu pour observer le reste du site.

Ici, aucune possibilité de vue sur le cosmos. Ici, pas de ces volets noirs qui s’abaissaient brusquement lorsque la planète, cette chère Terre, risquait d’apparaître nette aux yeux de tous. Juste des parois blanches et lisses, rien que des parois blanches et lisses.

Il grogna, maussade.

Oui, le mérite et la reconnaissance ça n’existait pas sur Citérius A. En d’autres temps, il aurait pu être un héros, cependant ici, on considérait comme une normalité le fait de risquer sa vie pour sauver le reste de la communauté.

Oh cela oui, il avait pu s’en rendre compte, lorsque quelque 70 ans auparavant, il s’était proposé de rejoindre les équipes de démontage de la tuyauterie géante. Son voyage avait été abrégé. En effet, plus rien n’allait entre Sonchel-Climax et les dirigeants de Citérius A.

Côté pouvoir, on s'obstinait à imposer un diamètre de recherche qui n’avait plus de raison d’être face aux innombrables problèmes écologiques qui s’affichaient, alimentant un climat social particulièrement houleux, et cela, à l’ensemble de la planète. Du côté des chercheurs et du personnel, on avait déjà compris que la station était un précieux et véritable refuge en cas de grand danger. La plupart des derniers éminents scientifiques, loin d’être dupes, avaient rejoint discrètement Citérius A.

Il fallait les voir, chacun défendant ardemment sa place, quitte à piétiner le voisin.

La déclaration d’indépendance avait mis le feu aux poudres.

Sonchel-Climax se préparait à envoyer des mercenaires pour remettre de l’ordre, mais, ils furent pris de court. Sur la planète, les premières révoltes sociales rendaient impossibles les préparations d’embarquement.

Des guérillas éclataient aux quatre coins du monde. La débâcle ici et là... Panique totale dans les milieux financiers, politiques, militaires et scientifiques...

En cette optique, plusieurs gros cerveaux sur Citérius A avaient engagé le processus de déconnexion des systèmes de communication et de circulation qui liaient la planète à la station, notamment le cordon ombilical, Virtual Chemney, moyen le plus rapide pour accéder à la station, puis, avaient recalculé l’équilibrage global Citérius A /Carpe diem.

Les dirigeants de Sonchel-Climax craignaient de voir Carpe diem, contrepoids de l’ensemble, subir la pression d’un aimant dont les pôles s’inverseraient soudain, attiré par une force incommensurable : le vide. En effet, déstabilisé par l’insuffisante attraction terrestre, il pouvait entraîner tout l’ensemble vers le cosmos.

Mais, le vieux dicton anachronique : - Quand on veut, on peut !

- s’était avéré, une fois de plus, particulièrement évident.

Sur Citérius A, on avait décidé ; afin qu’aucune bande d’individus contaminés ne puisse se réfugier en une arrivée massive, en force ; de sacrifier Virtual Chemney. Restaient les vieux aircraftclams complètement dépassés, mais si faciles à maîtriser.

Virtual Chemney détruit !

Comment imaginer un tel gâchis… ? Issue d’interminables et folles recherches, la construction de cet insensé système de navigation avait duré plus de quatre-vingts ans... Peu de gens sur Terre croyaient en son efficacité, et, évidemment, moins en sa viabilité. Pourtant, ce fut une réussite totale. Virtual Chemney s’était avéré, plus tard, en fait, étonnamment peu coûteux et des plus fiables qui soient.

On revenait de loin, car, trois siècles plus tôt, on avait imaginé et tout basé sur un moyen de transport particulièrement original : l’ascenseur spatial.

Grossière erreur qui coûta des milliards de dollars ! Les résultats, durant ces nombreuses années, furent des plus médiocres, voire déplorables. Quelques essais avaient coûté de nombreuses vies. Aucun matériau ne pouvait résister correctement à la puissance de l’attraction terrestre, vu le rapport poids/masse. On avait pourtant inventé des microfibres qui, une fois tissées, opposaient une résistance extraordinaire, même à d’éventuels chocs violents ; mais, c’était sans compter un léger détail ; les milliards de pièces, résidus ou déchets de satellites divers qui tournoyaient en orbite terrestre, ou une multitude d’autres particules insoupçonnées qu’il aurait fallu déblayer afin que les risques soient réduits à zéro. Cela aurait coûté des fortunes, sans avoir l’assurance d’obtenir un résultat positif.

Le système ascenseur fut donc abandonné.

Cinquante ans après, on en était revenu aux banals aircraftclams qui restaient toutefois fiables, mais si lents et si coûteux.

Naquit alors cette idée folle, créer un champ magnétique qui rallierait Citérius A à une zone délimitée sur Terre par une cheminée virtuelle dans laquelle l’effet de pesanteur serait neutralisé.

Personne n’y crut, jusqu’à, ce que, deux siècles plus tard, le Trust de recherche scientifique dominant, Sonchel-Climax, valeur sûre, s’y intéressât et décidât de le mettre au point.

Un projet absolument titanesque, comme jamais on n’aurait pu l’imaginer. De cette station spatiale Citérius A, 40 Km de long avec ses 24 sphères reliées à un gigantesque astéroïde artificiel Carpe Diem, et, le fameux cordon ombilical. Virtual Chemney Deux bases pour rallier la station spatiale, l’une sur le lac salé aux États-Unis, l’autre dans le Sahara à la frontière du Maroc, de l’Algérie et de la Mauritanie. Sites où les forces magnétiques naturelles s'ajustaient parfaitement au système.

Des plates-formes d’une superficie de 5.000 hectares s’élevaient à près de 800 mètres de hauteur. Les Cabines/torpilles étaient aspirées à la vitesse époustouflante de plus 85 Km/Secondes dans une gaine virtuelle large de dix kilomètres sur plus de 36000 Km de long.

L’opération durait maximum 3 minutes.

Au-delà de ce temps précis, les cabines n’auraient pu résister à la force attractive, elles auraient explosé, ou au mieux, se seraient retrouvées déviées de leur trajectoire, dans une direction inattendue, car, en cet instant précis, la station spatiale et Carpe diem devaient imposer une force magnétique constante sur l’une de ces deux zones délimitées.

La réussite de ce prodigieux système de navigation résidait en ce monstrueux Carpe diem qui avait trois rôles essentiels :

- 1/ Moteurs suffisamment puissants pour maintenir la station en place et imposer un champ magnétique propre à créer Virtual Chemney

- 2/ Servir de contrepoids à Citérius A.

- 3/ Aspirer les Cabines/torpilles Ce fut un succès sans précédent, alimenté par des milliers de gros investisseurs. Il fallait se l’avouer, le projet de construction de cette gigantesque station spatiale Citérius A, avait été à l’époque sur Terre un cuisant échec pour la concurrence.

Même à la traîne, après avoir reconnu la viabilité de l’entreprise, à l’image du monde des affaires et des finances, chacun voulait, ne projetait plus que dans ce coup extraordinaire. Des milliers d’investisseurs se retrouvèrent ruinés en un rien de temps, faute de moyens suffisants pour mener à bien les autres projets qui devenaient si dérisoires par rapport à l’immensité du sujet. En trois minutes, des Cabines/torpilles contenant 50 individus pouvaient rejoindre la station.

Certes, la préparation du voyage pour chaque individu était épouvantable. Un suivi médical des plus pointus. Vingt-cinq jours de préparation pour ralentir considérablement, au-delà des limites tolérables le flux sanguin. Préparer l’organisme à une pression soudaine, suralimentée. On avait recours à une préparation cryogénique, durée d’intervention : trente secondes.

Un voyageur à destination de Citérius A était donc aussitôt pris en charge par une équipe médicale. Isolé, il disposait de ces quelques jours pour adapter son organisme. En cas d’échec, il se retrouvait exclu du voyage.

À chaque arrivée, les voyageurs sortaient paisiblement de la spatiogare, affichant cette impression de bien-être relative à tout individu satisfait, reposé, détendu. En réalité, ils sortaient de soins intensifs qui avaient duré au total près d’un mois.

Il n’y avait eu jusqu’à présent qu’une dizaine d’accidents mortels, la plupart liés à des problèmes cardio-vasculaires.

Antanéus ravala un sanglot qui passait mal, se remémorant difficilement le gâchis orchestré. Il se rappela donc ces dirigeants de la station qui voulaient rester maîtres. Ne surtout pas subir ce risque d’afflux de gros actionnaires du groupe Sonchel-Climax rendus furieux, qui voulaient, coûte que coûte, recouvrer leur bien, sauver leurs peaux, puis imposer leurs diktats. En ces moments difficiles, ceux-ci avaient été obligés d’en convenir, on ne pouvait repenser un autre système de navigation des cabines/torpilles. Bien qu’ils aient à leur disposition des milliers de chercheurs, les meilleurs, sans aucun doute, ils n’avaient aucune chance de parvenir à un résultat satisfaisant, en si peu de temps.

La station devenait surchargée. Il fallait à tout prix ne plus accueillir le moindre individu.

En bas, c’était l’apocalypse et tous voulaient rejoindre ce paradis. Ce fut alors la guerre à outrance livrée contre la station. Des centaines d’aircraftclams militaires firent leur apparition dans l’espace. Ils ne purent rivaliser, face au Gitro/laser à impulsions ultra-courtes, un des engins de destruction élaboré justement par Sonchel-Climax sur la station. Les commanditaires faisaient là une malheureuse expérience de l’arroseur/arrosé, car ces machines de guerre pour les Terriens agresseurs n’avaient pas été livrées dans les délais.

Sur Citérius A, on se régalait. Ici, pas d’embarras, de véritables frappes chirurgicales. Les systèmes de propulsion des engins ennemis s’arrêtaient d’un coup, plus rien ne répondait aux commandes. Les aircraftclams en étaient rendus à errer, sans aucune résistance, au hasard du vide du système solaire ou bien allaient se fracasser contre d’anciennes stations spatiales laissées à l’abandon ou trop vétustes.

Plus de 1000 aircraftclams furent détruits. 3500 Missiles nucléaires, tous détournés, abandonnés et menaçants à jamais, au sein du cosmos. En peu de temps, 870 engagés volontaires de la station avaient disparu dans l’espace.

Le deuil !

Aucun ne voulait, désormais, imaginer ce qui pouvait bien se passer sur Terre.

Antanéus sourit amèrement, revisitant ces instants de mauvaise gloire où l’on évitait politiquement de trop relater les inévitables conditions matérielles, les pertes humaines, subitement oubliées, pour ne laisser transparaître que la réussite technique de réorientation de la station spatiale.

Quant aux autres, les rescapés, ils devaient se contenter d’être vivants, le hasard avait bien fait les choses !

Puis, temps aidant, on oublia bien vite leur dévouement.

Voilà comment on remerciait la bravoure dans ce monde !

De rage, il cracha sur le sol.

Cracher, jamais, il n’aurait fait cela, s’il ne l’avait vu, un jour, dans un vieux film de cinéma (l’archaïque technologie utilisée aux environs de la fin du dernier millénaire qui permettait la visualisation d’une œuvre fictionnelle), film dont il ne pouvait se souvenir tant ils avaient été nombreux dans le genre. La colère, l’exécration faisait que, à cette époque insouciante, les hommes crachaient sur le sol.

- Quand tu craches sur le sol, c’est sur toi-même que tu craches ! -

Avait répondu, railleur, le vieux chef Sioux Sitting Bull à ce jeune nerveux et belliqueux Sioux, deux figures emblématiques qui avaient fait l’histoire des Hommes.

L’agressivité face à la sagesse.

Ce souvenir le soulagea dans sa hargne.

Bien que révolté, il se laissa glisser mollement sur le sol. Il imagina très vite que, livré à toutes sortes de bactéries inconnues ou non maîtrisées, il ne tiendrait pas le coup très longtemps. Cela le rassura quelque part.

Des sanglots contenus qui lui obstruaient la gorge rivetaient son crâne telle une pince/étau le resserrant sur un morceau ferraille, ils se libérèrent ; il se mit à pleurer à l’image d’un gosse perdu.

L'éclairement des soutes se troublait.

Les lumières balançaient d'un extrême à l'autre.

Du noir, elles pouvaient éclater et émettre une brillance fulgurante sur ces parois froides devenues d'un coup flamboyantes. Ces carcasses d'alliages carbone, kevlar et autres fibres synthétiques semblaient reprendre vie, redonnaient maintenant l'espoir, puis, tout retombait dans ce noir absolu préfigurant fatalement, à la longue, cette hantise de la mort.

Adossé toujours contre l'une de ces parois, il plaqua sa joue droite pour prendre un peu du frais de ce laqué glacé. Il se donna, en grognant, deux bonnes claques sur la joue pour s'efforcer de réagir positivement.

Les lieux étaient, certes, hostiles, mais un homme qui se respecte se doit de lutter.

- La lutte : le fondement même de l'être humain. – Lutter !

Lutter pour vaincre. Oui, vaincre ! Vaincre qui ? Vaincre quoi ?

- Ah, à quoi bon ?... Grogna Antanéus.

Ici, que lui restait-il donc ?

Pour se donner du courage, encore, faut-il avoir l'espoir !

Espoir ? Pourquoi ? La Terre ?... Y retourner un jour ?...

Foutaise ! Impossible ! Espoir pour qui ?

Comment communiquer ici dans ces soutes ?

D'abord, ne détestait-il pas tous les êtres qui peuplaient cette station ? Comment à cet instant pourrait-il simplement imaginer éprouver un moindre sentiment pour quelqu'un ou quelqu'une ?

Désormais, il serait seul. La bonne affaire ! Rien de nouveau, sauf, que pour s'aider à survivre, il faut se passionner, viser l'espoir ou l'amour. Ah, l'amour !... D'autant que si l'amour est impossible, au moins qu'il y ait la haine ! Et pour que s'affirme la haine, encore faut-il qu'il y ait un semblable à proximité.

Une simple vie ! La seule mémoire ici, n’aurait pu en aucun cas étancher sa soif de compagnie pour développer pleinement ce ressentiment.

Les mercenaires du Commandeur avaient jeté deux gros sacs.

Antanéus, en grimaçant, essuya du revers de sa manche deux petites larmes amères qui glissaient sur ses joues. Il se releva pour aller examiner le contenu. Dedans, il paraissait y avoir des vivres et des produits hygiéniques. Il retourna vivement les sacs pour les analyser. Poussant un soupir dédaigneux, il constata qu'il y avait là de quoi survivre pendant près d'un an.

Un Hydrocaptogène (appareillage sophistiqué recréant et combinant le mélange gazeux hydrogène/oxygène pour en obtenir de l'eau, élément indispensable à la vie terrestre et « subterrestre »), des produits hygiéniques, des pastilles d'assainissement, plaquettes de comprimés de Décafunks

Décafunks : Selon les transcriptions du Computspects il s’agit ici d’une substitution vitaminée, ce nom rendrait hommage à un biologiste Funk, qui aurait découvert en 1912 (Datation équivoque Humanoïdes terrestres) la « vitamine ». Le Décafunks est un concentré extraordinaire, composé de la plupart des vitamines essentielles au métabolisme de l’Homme. Le dosage quotidien des différentes vitamines indispensables et nécessaires à la vie étant resté obscur, cette invention figure comme l’une des plus remarquables.

Ainsi que..., surprise, une trentaine de boîtes de conserves lyophilisées à l'ancienne, qui provoquèrent, malgré la situation, un bref éclat de satisfaction sur sa face blême. Des conserves qui avaient probablement été ratées. Elles étaient réservées pour les hauts dignitaires, pas pour les modestes techniciens tels que lui !

Il se redressa, marmonna entre ses dents, mordillant sa lèvre inférieure.

-Si vous croyez que je vais me laisser crever dans cette ratière ?!

Une façon de narguer la surveillance et surtout de se motiver pour affronter des lendemains qui ne chanteraient pas.

On diffusa dans les soutes de la "Surroundmuzac". Mélodies insipides, qui avaient largement fait leurs preuves en ce qu'il s'agissait de contenir et de refouler les tourments, les cris et plaintes. Musique, dite rafraîchissante, musique d'ambiance. Musique censée calmer les agressivités en leur état primitif. Musique composée uniquement par des systèmes intra-numériques, où l’on ne faisait plus appel au moindre artifice provenant de l’exercice humain.

Cette Surroundmuzac, Antanéus ne l'avait jamais supportée. Il se tourna vers les zones sonores, sourit amèrement, dédaigneux, n'en dit pas plus. Il haussa les épaules sous l’abandon. Décidé à ne s'intéresser qu'aux seuls aircraftclams, il se dirigea vers la première.

Ces engins du passé étaient vraiment étonnants de résistance.

Ces aircraftclams étaient stationnés, là, depuis le début de la construction de Citérius A. Ils avaient transporté pratiquement toute l’ossature de la station, pièces par pièces. On les avait gardés là par mesure de sécurité au cas où l’un des systèmes, aspiration ou autre, aurait eu des défaillances techniques graves.

Il ramassa une échelle métallique qui traînait sur le sol, la porta contre l'aéronef. Aussi vite, il grimpa avec vivacité jusqu'au haut de l'échelle et regarda à travers les hublots poisseux, en les essuyant un peu du plat de la main.

Il n'avait pas vu l'intérieur d'un aircraftclams depuis... Oui, plus de soixante-quinze ans. Il avait été embauché à l’âge de 67 ans, et, soixante-quinze ans plus tard, il n’en était toujours pas ressorti de cette satanée station. Bientôt, il atteindrait cinquante ans, tout ça pour en arriver là ! Un autre jet de salive, commun à une vive émotion, obstrua sa gorge.

Bien qu’il eût en charges, durant des années entières à l’image de tant d’autres techniciens, l’entretien des aircraftclams, son boulot de mécano ne lui autorisait en aucun cas la visite des compartiments voyageurs, et bien moins celle de la cabine de pilotage. S'en tenir, essentiellement, à l'état des moteurs, telle était sa tâche. On avait décidé, en haut lieu, par deux fois, que ces interventions incitaient à abaisser le moral du groupe.

Alors, après réflexion, on était revenu à une plus sage décision, une vérification moins fréquente effectuée rapidement par différents groupes de mécanos.

En quelque sorte, on l’avait évincé de la seule besogne qu’il aimait accomplir sur cette station de mort, pour l’orienter à bricoler minablement sur l’un des réacteurs du système d’aspiration des Cabines/torpilles.

Écumeux, il se mordilla les lèvres. Évacua cette nouvelle envie de pleurer qui le harcelait. Amer. Cherchant à s’essuyer contre sa combinaison le plat de ses mains encrassées par la poussière. Pleurer. Oui, pleurer de rage, face aux souvenirs qui le torturaient. Très atteint, il descendit et donna un grand coup de savate contre l'échelle, qui tomba aussitôt, en un grand fracas, émettant une résonance singulière dans l'immensité des soutes.

Déprimé, il se prit la tête entre les mains, se ressaisit aussitôt.

Hors de question de livrer cette image de désolation à l'équipe du Commandeur, qui devait se délecter de cette scène, tous, assis là, confortablement face à leurs écrans de contrôle.

Il poussa un de ces brefs cris de hargne et d'encouragement que lancent les soldats pour aller au-delà de leur courage alors qu'ils sentent rôder la mort autour d'eux. Il replaça l'échelle près de l'habitacle de pilotage, monta rapidement jusqu'à la porte, non verrouillée. Après s'être excité à tirer sur la poignée, il réussit enfin à l’entrouvrir. Se faisant mince, il s'engouffra à l'intérieur de l'habitacle, se dirigea immédiatement vers les commandes de l'engin.

Un petit bruit de moteur piloté lui fit relever la tête.

Face à lui, trois caméra-anatomisantes se dressèrent vivement par un ridicule effet de rotation, s'orientèrent vers lui, à l'image d'autruches, Autruches, qui, faisant naviguer leurs longs cous semblant chercher ce quelque chose de rare à découvrir, et, ce "quelque chose de rare" était forcément, en cet instant, l'analyse de ses déviances.

Autruche : Espèce animale disparue. Parmi les espèces dites animales, nous savons que certaines auraient vécu dans l’eau, d’autres dans les airs ou sur Terre. Par le truchement d’une rigoureuse interprétation scientifique tirée des propos du personnage Antanéus, des diverses informations cédées par le Computspects, nous pouvons imaginer, que, vraisemblablement, il s’agit ici d’une espèce «semi-aquatique ». Nous savons que l’Homme disposait d’élevages de certains animaux dont il consommait la chair, la plupart de ces animaux dociles s’alimentaient de la flore, la flore, nous ne pouvons imaginer sa forme tant sa diversité, ayant complètement disparu lors des grandes catastrophes et, « au fil du temps » (Expression typique Terrienne) Nous supposons que cette flore fut à l’identique de celles que l’on trouve sur les planètes « triploïdiques » du système Coltax : Tica, Xacta, Furlina ou peut-être plus loin dans la proximité des astres troués : Nupta, Stroa, Nymba…

Selon le Compustspects, maintes espèces vivaient en harmonie avec les exigences et espérances de l’Homme ; nous savons que certains, curieusement, ne se seraient pas toujours principalement nourris de la chair animale, mais uniquement de certaines espèces florales.

Toujours par provocation, souriant mièvrement, il leur fit signe, la main droite prenant bien le tissu de sa combinaison au niveau du sexe, secouant l’ensemble vivement.

L'Opérator ; casque de développement virtuel posé sur le crâne, étalé sur son fauteuil de contrôle, emmailloté dans sa combinaison en matière acétate visqueuse, reliée par plusieurs câbles, liaison interactive ; reçu une autre affirmation.

L'Ordiaspt : système informatique pilotant et analysant les données envoyées par les Caméra-anatomisantes, envoyait par projection holographique le futur visage d’Antanéus, image fort négative. Gueule démesurée par la rage, fureur extrême...

-Commandeur ! L'interné, après avoir fracturé la portière du poste de pilotage de l’aircraftclams N°14, provoque maintenant, par des attitudes outrageantes toute l'équipe de surveillance ! Dénonça l’Opérator, à l’esprit diffamateur.

Aussitôt, d’autres Opérators présents se retournèrent vers lui, l’air surpris, toutefois, empreints de cette grande joie de pouvoir, à leur tour, observer.

- L’Ordiaspt est formel ! Névrose obsessionnelle entrainant irrémédiablement d’un instant à l’autre une violence extrême !

Insista-t-il, teigneux, cherchant à aggraver le sens de l’outrage.

Le Commandeur étalé les bras en croix, en pleine rotation sur son Général/Opérator le central de contrôle des Ordiaspts reliant, seul, le Commandeur à l'ensemble de la surveillance de la station, bloqua sèchement le système, tandis qu'il lançait furtivement un coup d'œil sur la projection.

Il sauta avec souplesse hors du système Général/Opérators, s'étirant et faisant des mouvements de gymnastique.

-Qu'il rêve un peu. Ça le stimulera !

Les autres, sous cette réflexion, se figèrent, déçus.

Antanéus, dans son inspection, s'aperçut très vite que le matériel qui, de l'extérieur donnait une image de vétusté, puisque les vérifications techniques n’avaient plus été effectuées depuis plus de dix ans, semblait pouvoir, malgré tout, être remis en état.

Malgré les chamboulements perpétrés par les démontages de certaines pièces majeures, la poussière organique n'avait pas réussi à endiguer les systèmes électroniques. Evidemment tout ce qui était lié à la nanotechnologie, cela, jamais il ne pourrait le vérifier du fait de l’absence d’un outillage approprié.

Il s'effondra sur le siège moelleux et défraîchi du pilote.

Face à lui, sur le tableau de bord, plusieurs cavités dues à un démontage des moniteurs, compteurs, néanmoins subsistaient encore quelques systèmes contrôles lasers.

Son regard devint lumineux, il savait que ces systèmes étaient des plus résistants, ils étaient probablement encore en état de fonctionnement. Si l’ensemble lui redonnait un peu d'amertume, c’est tout autant l'espoir qui s’installa.

-Insipides idiots ! Vociféra-t-il, …Médiocrités ambulantes avilies par les lois d'un groupe fascisant et trouillard !... N’êtes pas prêts de la revoir votre planète !

Regard provocateur, il fixa les caméra-anatomisantes qui s’affairaient à l'analyser dans tous les sens.

Très vite, il comprit qu'il se devait de cesser cette entreprise de défi. Dans ces conditions, la surveillance s’accentuerait pour un rien et ne lui laisserait pas la moindre chance de tenter quoi que ce soit.

Il décida donc, instantanément, de leur livrer prochainement une impression de docilité.

Il se releva et descendit de l’aircraftclams.

En bas, il s'adossa à l'échelle, constata discrètement que, maintenant, une multitude de caméra-anatomisantes virevoltant dans l’espace en des bonds d’une hauteur inégale le surveillaient, l'analysaient à distance. Elles avaient l'air aussi saugrenu qu'un troupeau de girafes.

Girafes : Autre espèce que nous nommerons également « aquatique », du fait de sa taille, elle ne pouvait qu’être à l’aise dans les airs ou bien dans les eaux, notamment les océans. Nos dernières recherches la situeraient plutôt comme espèce aquatique, cette Girafe fut sans aucun doute assez ridicule, dotée d’un immense cou. Quant à son utilité sur la planète ?...

Probable nourriture pour l’Homme. Il semblerait que la plupart des animaux aquatiques aient été dotés d’un long cou, outre le besoin d’aller chercher leur nourriture en profondeur, nos scientifiques supposent que ce long cou les aidait à sortir très rapidement la tête hors de l’eau pour surveiller à distance et déjouer les intentions de capture d’un éventuel prédateur car il semblerait que sur cette planète infernale toutes les espèces cherchent à se nourrir l’une de l’autre.

Il esquissa un sourire sec, mais l’exaspération, inévitablement, prit le dessus.

-Filmez-le, Filmez-le cet insoumis !

Son courroux l'emporta. C’était plus fort que lui.

Il ramassa une gaine rigide métallique d'environ un mètre cinquante, et se rua sur trois caméra-anatomisantes légèrement décalées du groupe. Il fit tournoyer son arme.

La fureur le dévisageait. Il fonça sur les machines outrageantes et les frappa de toutes ses forces.

L'Opérator eut juste le temps de parer le coup, en faisant s’élever très haut les caméras. S'en amusa, prenant la bataille pour un jeu vidéo.

Antanéus dans la foulée, tenta un autre coup.

-Oh là, mon beau ! On veut s'amuser un peu. L'Opérator tout excité para.

Antanéus enchaînait les coups, laissant tournoyer sa barre métallique, il avançait droit sur les caméra-anatomisantes ; déterminé, gueulant à l’image d’un déséquilibré.

L’Opérator les releva toutes pour les regrouper.

Glissement doux et fluide les caméras qui restaient là, trop proches, le narguant. Elles s’élevèrent vers les poutrelles de la charpente des soutes, se baissèrent avec délicatesse, s'approchèrent doucement de lui : - Provocation au duel :

l'Hydre contre Héraclès.

L’Hydre, ou peut-être « Lidre » contre Héraclès : Impossible de trouver un sens à cette expression probablement liturgique. Le Computspects n’ayant pu répondre à cette question, ni même à d’autres formulations… Ne connaît ni l’un, ni l’autre ! De fait, deux Hommes s’affrontent, faudrait-il, peut-être, là, y déceler quelques subtilités de langage propres à certaines coutumes et us. Nous savons que les Hommes adoraient les référents historiques. Il s’agirait là, probablement, d’un fait historique? Un effet visuel ? Il semblerait que l’Homme (humanoïde terrestre) soit très attaché aux effets visuels... Aux métaphores.

Antanéus serrait les dents, maxillaires crispés, veines du cou explosives.

Il hurla et attaqua faisant tournoyer sa gaine.

Un sabre menaçant, l’arme préférée des grands combattants. Il frappait, frappait, encore plus fort, mais toujours dans le vide.

L'Opérator, amusé par l'enjeu, pilotant les engins par l’unique pensée, dirigeait, on ne peut mieux, tout le système caméras.

Celles-ci évitaient un à un, avec brio, tous les coups portés.

Antanéus écumait de rage. Il se présenta, les bras écartés l’air vindicatif, face aux caméras.

-On a enfin trouvé le bouffon ! Voilà des décadiés que l'on attendait cela ! Hein !... Refouler ses inhibitions. N'est-ce pas ?

Minables !

Le Commandeur fixa gravement l’Opérator se grattant nerveusement la joue droite, s’interrogeait sur le comportement pécheur de son Officier. Cette façon de jouer avec un paria était illégale. Après tout, ces hommes n'avaient pas souvent l'occasion de se distraire.

Se sentant observé, l’Opérator lâcha malencontreusement sa concentration.

En un fragment de seconde Antanéus atteignit une caméra.

- Des décadiés ! Soupira-t-il en serrant les dents.

Rageur, il ne put s’empêcher de penser à cette idiotie, ce décadié : nouvelle mesure de temps décrétée sur Citérius A, puisque désormais sur cette station, il était interdit de faire référence aux aspects Terrestre, ceci pour des raisons évidentes d’ordre moral, on avait donc décidé de recalculer un nouvel espace-temps fondé sur la base moyenne des rotations synodiques de la station spatiale, juste avant qu’elle ne retrouve sa rotation sidérale autour de la planète.

En réalité, il n’y avait là que très peu de minutes de décalage par jour sur la valeur d’une année, on restait sur l’équivalent de 24 heures.

- Gros plan visage ! Exigea le Commandeur.

Immédiatement, le visage du révolté apparut en projection frontale

-Tension artérielle ?

Une caméra-anatomisante amorça un rapide zoom avant, détailla la veine jugulaire d'Antanéus.

Sur l'écran, le détail de l'influx nerveux schématisé et animé, suivit une analyse médicale complète accompagnée d’un remède adéquat. Préconisant un neuroleptique doublé d’un hypnotique antihistaminique, c’est-à-dire l’injection de 0,02 ml de Puma 4.

Le Commandeur secoua la tête en faisant une moue dubitative, regarda à travers un hublot. Les volets étaient ouverts.

Normal ! La Terre semblait s’éloigner de plus en plus.

- Nous allons entrer en phase restrictive d’énergie ! Soupira-t-il.

… Pas très méchant tout cela ! Nul besoin d'intervenir pour l'instant. Autorisation de jeu durant deux girations.

Exécution !

- Merci, Commandeur ! Adopta l’autre, fort ravi.

La luminosité baissa sérieusement dans les soutes.

Des microprojecteurs balayaient toute la zone suspectée.

L’Opérator s’amusait à les allumer et les éteindre tout aussitôt, pour déstabiliser le forcené. Le rendu des caméras donnait pleine visibilité.

Antanéus surpris et gêné, s'écarta un peu, alla se dissimuler sous un aircraftclams, les bras télescopiques, en cet endroit, avaient bien du mal à s’actionner.

Un noir intense ne tarda pas à envahir, envelopper définitivement tout le site. Les projecteurs s’éteignirent.

Cette suspension gagna l’ensemble de l’appareillage électrique.

Pour l’Opérator surveillant, la projection frontale se changea instantanément en une projection holographique.

Antanéus, baignant dans cette obscurité, ne sachant plus que faire, alla se terrer dans un coin.

Les caméra-anatomisantes en infrablack, continuèrent, sans difficulté, leurs analyses. L'une d'entre elles s'approcha doucement de son visage.

L'Opérator s'amusait à le frôler doucement, insistant sur les passages de plus en plus rapprochés.

Soudain, la lumière revint d’un coup.

Antanéus en fut tout ébloui. Il sursauta, surprit par la présence de la caméra-anatomisante, enchaîna instantanément un violent mouvement rotatif, frappa d’une telle force avec sa gaine métallique l’engin observateur que celui-ci reçut un fatal coup de plein fouet.

L'optique microscopique éclata. Le minable et minuscule corps ouvert en deux laissa apparaître un bloc électronique qui gisait au sol parmi de fines et ridicules gerbes d’étincelles.

Un grand éclat de rires circula dans la salle de surveillance.

Les autres Opérators qui voulaient assister au spectacle se moquaient allègrement de leur collègue, harponné par ce terroriste.

Celui-ci, vexé, secoua la tête en s’efforçant de sourire.

D'autant plus qu’Antanéus redoublait de violence, frappait, et refrappait cette pauvre chose, de toute la haine qu'il avait pu emmagasiner durant ces dernières années de vide.

Le Commandeur fut pris aussi par le jeu.

-La Surroundmuzac ! Rendez-la un peu plus trash ! Et augmentez donc l'amplification.

Le son éclata d'un coup. Cette musique devint plus agressive par un rythme élevé, bousculant les viscères, excitant fatalement l'esprit.

- Plus fort ! Gueula-t-il.

Le son devenait agressif.

Antanéus en était d’autant plus gagné par une rage de destruction.

Les Caméra-Anatomisantes, deux d’entre elles touchées, explosèrent lamentablement contre les autres.

Qu’à cela ne tienne, les autres caméras tourbillonnaient plus provocantes, définitivement narquoises.

Il s'essoufflait à frapper dans ce vide créé par l'Opérator qui évitait avec adresse chaque coup porté.

Le combat était inégal.

Les schémas de l'influx nerveux, du cerveau, de la circulation du sang défilaient à vive allure en surimpression à l‘holographie.

Par déduction, il était facile de prévoir le prochain coup porté par le révolté.

Exténué, Antanéus finit par s'affaler.

Sa tête heurta au passage un morceau de la carcasse démontée d'un aircraftclams. Assommé, il chuta lourdement sur le sol.

Bouche baveuse, un filet de sang fluait au coin des lèvres, se mélangeant à la sueur perlée du front qui avait fini par dégouliner, glissant d’abord sur ses joues creusées de fatigue pour, enfin, couronner l’ensemble coloré en une miroitante explosion sur les dalles lustrées en kevlar.

Dans la salle de surveillance, les Opérators s'exclamèrent par un hourra vindicatif.

Le Commandeur sourit, regarda à travers le hublot.

-Fin du jeu !

La projection fut arrêtée.

L'Opérator 1 retira son casque et descendit de son fauteuil.

Les autres le félicitèrent.

Le Commandeur voulut calmer les esprits.

-Il serait bon de museler votre animosité, messieurs. À l'avenir, pas de jeu sans mon autorisation. S'il venait à l'apprendre, le conglomérat verrait ces pitreries d'un mauvais œil. Nous avons reçu ordre d'observer, sans agir.

- Même si le forcené force les portes des aircraftclams dernières générations ? Questionna l'Opérator 2, dont on sentait l’évidente envie d’en découdre avec Antanéus le rebelle.

- Dans cette éventualité, cher Opé 2, j’aurais pris une décision avant même que vous n’ayez remarqué l’incident ! Rétorqua le Commandeur avec un air professoral, montrant les dents.

Animal !

Histoire que tous ici présents comprennent bien qu'en aucun cas, ils seraient les décideurs de quoi que ce soit.

- Portez ma voix dans les soutes. Demanda-t-il fermement.

L'Opérator 2 s’exécuta. Fermant les yeux pour communiquer mentalement l'ordre à exécuter à son Ordiaspt.

Le Commandeur s’adressa alors vivement à l’insubordonné.

-Ex Techno 18107 ! C'est le Commandeur qui vous parle !

Antanéus redressa légèrement la tête, la sueur et le sang mêlés s'étalaient et coulaient sur son visage.

-…Il faut vous résigner. Vous devez payer vos erreurs.

Enchaîna le Commandeur.

… Vous êtes banni à vie de notre communauté, et il n'y aura pas de recours possible ! Vous vous dirigez tout droit vers un inéluctable naufrage. Abandonné de tous, voilà ce que vous avez décidé ! Enfoncez-vous ça dans le crâne ! Vous êtes l’unique responsable de ce funeste déclin. Conduisez-vous un peu en être civilisé. Ces observations qui vous dérangent ne se rapportent qu'à votre seule sécurité. Vous devez les accepter.

Titubant, Antanéus grommela, entre ses dents,

-Va te faire foutre !

Et ce fut le silence du côté du commandement.

La "Surroundmuzac" éclatait maintenant dans les soutes.

Agressive. Insupportable.

Antanéus se boucha les oreilles.

Affalé sur le sol, il se débattit dans le vide, afin que cette musique disparaisse, puis, s’efforça de fermer les yeux.

La colère et ses actions violentes l’ayant exténué, il resta cloué au sol. Impuissant, incapable de remuer ses membres devenus lourds. Il se concentra. Imaginait, voulait se souvenir d’effets plus prenants qui estomperaient cette épouvantable Surroundmuzac.

Cependant elle pénétrait si fort son esprit, son intellect... Pris de rage, il remuait dans tous les sens. Il tenta de se souvenir de son vieil HolographicVersatiledDisc, datant des années 2025 ; certes, bien archaïques, une antiquité, par rapport aux meilleures technologies modernes, ce système lui avait donné tant de plaisir et de satisfaction, conservant un son authentique, très proche du réel. Pas de sophistication réductrice. Pas de complexifications abusives, des sonorités qui n’avaient besoin de rien d’autre que de pureté musicale absolue. Cette antiquité qu’il avait sauvegardée avec précaution durant des années, on le lui avait confisquée lors de son arrestation.

Ah... oui, de magnifiques Motets à deux voix. Voilà qu’ils lui revenaient en mémoire.

La Surroundmuzac continuait son travail de sape, Malgré tout la ténacité l’emporta. Il se mit à chantonner un extrait musical dont il voulait à tout prix se remémorer, Marc Antoine Charpentier, fabuleux musicien du XVIIe siècle.

Non. Cette souillure de Surroundmuzac ne l’atteindrait pas !

Médiocrité ambiante. Dégueulis de musique. Rachitisme sonore baignant dans le pire des ordinaires. Petit à petit, ça flambait, flambait dans son crâne !

La musique fictive de Charpentier s'imprégnait en lui, venait divinement lui flatter les sens, estompait l’ébauche d’un doute qui s’avérerait sans nul doute dévastateur, trouvait fond à s’imposer face à ce réel musclé. Quel bonheur ! Cet enchantement évinçait l’affreuse réalité. La Surroundmuzac s’effaçait enfin… Ah, c'était si bon. Revisiter la vraie musique !

Ah, la musique de Marc Antoine Charpentier. Marc Antoine Charpentier... Il finit par s'endormir.

****

Le Doctor 229 suivait les couloirs blancs de l'aile 2 de Citérius A.

Une violente lumière bleue très franche martelait par intermittence sa silhouette qui longeait les laboratoires G5 du service Médecine Générale.

Le Doctor 229 était déterminée, comme jamais elle n’avait pu l’être. Cette fois-ci, elle passerait à l'acte. Oh Non ! Plus question d'attendre ou de s’accorder quelques décadiés de plus pour oser aborder cette expérience. Maintenant, elle agirait.

Quoi qu’il arrive ! Alors qu'elle débouchait sur le bras 12 de la station, elle stoppa net, ferma les yeux, se figea dans un espace plus que réduit (moins d'un mètre de large sur deux mètres de haut).

En cet endroit, le champ d'action des caméra-anatomisantes était limité et n’avait plus l’efficacité souhaitée. Une négligence de la surveillance qu’elle avait pu discerner depuis un certain temps. À sa connaissance, c'était le seul endroit de la station qui échappait à tout contrôle. Personne ne le savait, ou du moins ceux qui auraient pu le savoir s’en cachaient. Peur de la remontrance du supérieur hiérarchique. Peur des enquêtes et de cette condition à rendre des comptes.

Mille cinq cents décadiés à prendre enfin confiance. Elle appuya sa tête contre la paroi lisse du couloir. Respira un grand coup. Son front reçut toute la fraîcheur désirée du matériau synthétique. Pour se donner du courage, elle récita, durant de longues minutes, quelques versets de la philosophie bouddhiste…

Philosophie bouddhiste : Aborder ici la philosophie demande une préparation de grande envergure. Il faut imaginer que ces Hommes ont évolué en construisant des concepts ; nos chercheurs en ont déduit que ces espèces primitives durent s’imposer face aux éléments et aux ennemis physiques ; qu’ils durent établir de premières lois et de premiers concepts qui ont évolué selon leurs inventions techniques, rappelons que ces êtres sous-développés furent particulièrement liés à un besoin d’inventions d’objets, d’où une surenchère de consommation liée à leur réflexion les rendant d’autant plus dépendants. (Nous devons prévenir que la compréhension de ces suites normatives entraînera inévitablement l’Aspirant à une dure exposition au temps, ne pas envisager de se prêter à cet exercice serait toutefois une erreur fondamentale. Sans compter les surprises agréables que vous réserve cette autre exposition. Se faire violence sera donc un très bon exercice pour accéder à la connaissance)

…connue pour apaiser la tension, aborder tout acte physique et moral en toute sérénité.

Toute cette fraîcheur parcourant son front. Toute cette chaleur excitante qui avait envahi l'ensemble de ses vaisseaux sanguins. Toutes ces pensées qui l'entraînaient à outrepasser les lois...

Un bruit.

Elle sursauta.

Un Viroflacter ! Un de ces minables robots ménagers, tant silencieux et inintéressants, qu’on avait tendance à les oublier un peu trop facilement.

La surprise, la peur, la fit déglutir.

Minable machine, sorte de pyramide aspirante d’un demi-mètre cube dotée de rayons-laser qui chassaient la moindre particule ennemie, nettoyait méticuleusement cette partie du couloir. Les rayons lui indiquèrent que la zone était « nickel/ chrome »… Le Viroflacter continua son chemin de labeur sans se préoccuper du Doctor 229.

Du revers de la manche, d’un air agacé, elle essuya furieusement son front moite.

Évacuer le visible. Évacuer cette tension ! Se maîtriser. Sinon, l'Ordiaspt qui contrôlait les entrées des services "Recherche Biologique", dans le doute, aurait tôt fait d'alerter le Commandeur et le Suprêmordi.

Le Suprêmordi ! Rien que ce nom la faisait trembler d’inquiétude. Cet ordinateur central où convergeaient toutes les informations possibles de la station, recherches scientifiques, gestion de l’ensemble, surveillance générale pouvait décider à tout moment de vous mettre hors circuit.

Alors elle répétait inlassablement cette formule censée apaiser son angoisse.

- Yacatona ! Yacatona...Yacatona essa !

Elle secoua sèchement la tête pour évincer son doute.

Fin prête, elle se redressa et alla s'immobiliser devant une caméra-anatomisante.

Celle-ci se mit en action. Son bras hydraulique dirigea l'objectif face au visage du Doctor 229.

Comme à l'habitude, elle fut reconnue.

Tandis que l'Ordiaspt analysait en détail les principaux systèmes nerveux, prêt à interdire l'accès, si par malheur, l'individu était en état de fébrilité quelconque.

Durant cette observation, elle resta parfaitement calme.

L'Ordiaspt ne révéla aucune trace pouvant amener à une mauvaise conjecture.

Le sas s'ouvrit sèchement.

Elle pouvait enfin passer dans le service de recherche.

Elle se dirigea droit vers le laboratoire de son supérieur hiérarchique : le Professor Vurié.

Une autre caméra-anatomisante l’identifia sans problèmes et ouvrit aussitôt.

Une lumière franche bleuâtre lui éclata au visage.

En un même instant, un éclair jaillissait dans ses yeux.

Elle sentit cette fureur intense la parcourir tout entière.

Violence qui se développait maintenant dans les abîmes de son ego et lui imposait de réussir dans sa démarche. Elle savait ce qu'elle risquait, en avait pesé toutes les conséquences.

Les lois étaient terribles pour les rebelles, toutefois, en elle, résidait une responsabilité, non des moindres, celle de savoir qu'il y avait une solution à cette lente destruction, cette agonie, et que, ne rien tenter, trop attendre, par peur de l’inconnu, pour soi-disant sauver l'espèce humaine, se révélait être plus que criminel.

****

Hormis les caméra-anatomisantes il n'y avait désormais à proximité d’Antanéus que ces aircraftclams, machines extravagantes, imaginées par l'homme ; rendues là, minables, immobilisées à jamais. Ce qui était sûr, c'est qu'en ces lieux, il ne se sentait bien qu’auprès d’elles. N’avait-il pas toujours fait bon mariage avec les technologies nouvelles et les matériaux de pointe ? De ce lieu où il était enfermé, il ne connaissait pratiquement rien. Pourtant, sa passion pour l'électromécanique lui avait accordé des privilèges que bon nombre d'Amicitériens eussent aimé partager. Ce job lui avait donné l'occasion de naviguer fréquemment sur la station, en des espaces insolites, espaces, par ailleurs, qui lui avaient permis de tenir le coup, en assouvissant son feu, son besoin, sa raison d'être...

- Ah !... Grogna-t-il. Il ferma les yeux pour se remémorer, savourer des plaisirs auxquels il n’avait plus goûté depuis si longtemps, s'efforça de sourire, en contemplant cette espèce d'Hydre que composaient les caméra-anatomisantes. Derrière tout cela, aux manettes, probablement d’autres abrutis.

Pourraient-ils imaginer un instant, tous ces demeurés, ce que lui, Antanéus, avait pu commettre, ici et là, à proximité des regards et des contrôles !...

Il sourit, amer, bien que satisfait, masqua très vite l’effet par une affliction marquante, reprenant conscience de la réalité présente. Désormais, plus d'action. Plus de plaisir intense.

Par quelle manière, lui, Antanéus, le pur, le provocateur, lui, l’insubordonné métaphysique, pourrait-il supporter cela ?... Il ragea, hurla quelques instants, cherchant à évacuer cette horreur dans sa réflexion, ramassa et balança dans l'espace un minable morceau de Kevlar qui traînait à ses pieds. Il se reprit : Ah, réfléchir, encore et encore !... Comment les autres Amicitériens avaient-ils pu accepter cette décrépitude ? Par simple réflexe d'espérance ? Lui n'était jamais vraiment tombé dans cette préoccupation durant toutes ces années passées.

"Année"... Voilà un mot que plus personne n’osait utiliser depuis bien longtemps.

Il haussa les épaules. Secoua la tête. Toutes ces années passées sur Citérius A, étaient le pire cauchemar qu'aucun être humain n'aurait pu imaginer. Un cauchemar qui n'en finissait plus.

Heureusement que ses besoins à lui l'avaient projeté dans un tout autre univers... Il sourit, amer. Oui, leur espérance n'était devenue qu'un vague effet de nostalgie. Rien de pire que la nostalgie ! On comptabilise le temps, on s’accroche aux bons moments du passé et rien ne peut faire revenir en arrière. Ce passé, vous revient immanquablement en pleine tronche !

Médiocre passé ! N'empêche que dorénavant, pour tenir, espérer profiter d'un avenir prometteur, il lui fallait compter uniquement sur la valeur quasi thérapeutique du souvenir, qui, seule pouvait lui apporter le réconfort.

Qu'allait-il devenir dans ces soutes, enfermé loin de tous ?

Il fallait absolument qu'il se reprenne, lui, le pur, le limpide, l'extraordinaire.

Il épia dans la direction des caméra-anatomisantes. Réaction vive.

- Petits !... Petites gens ! Petites vertus ! Il éclata de rire.

****

Antanéus semblait s'être résigné, non seulement face aux systèmes d'observation, peut-être aussi à l'idée de cette difficile survie qu'il allait devoir gérer.

Il avait classé par genre les vivres et les produits hygiéniques. Ceux qui pourraient être utilisés à longs termes seraient, évidement, consommés en dernier recours. Il avait parcouru les soutes de long en large, et reconnaissait maintenant parfaitement les lieux.

Il avait opté pour le seul des quatre aircraftclams resté ouvert, affiché numéro 14. Il était confortable et gardait la chaleur.

Lorsque la luminosité variait, suivait immanquablement une terrible vague de refroidissement. La température, en l'espace de quelques minutes, baissait de près de trente degrés. Il s'était empressé de recueillir tout ce qui pouvait lui apporter de la chaleur. Les tissus synthétiques ne suffisaient pas. Il s'empara d'autres matériaux qui lui serviraient de couverture et l'aideraient à surmonter ce terrible froid.

Face aux caméra-anatomisantes, il s'efforçait de donner l'apparence du type résigné, tout en maintenant une certaine indifférence, histoire de montrer qu'il restait Maître de lui-même. L'enthousiasme l'emportait, le dépassait, de temps en temps, il lui arrivait de les provoquer, affichant ce petit sourire en coin lorsqu'il venait de trouver un remède ou la solution d'un problème délicat à résoudre... Ces caméra-anatomisantes, en fait, étaient désormais sa seule compagnie. Il savait que derrière elle, un regard humain était là. Cela l'aidait un peu à surmonter cette solitude accablante.

Ce qui lui était particulièrement insupportable, c'était la Surroundmuzac, composée d'ambiances aux mélodies pompeuses combinées pour adoucir, ramollir l'esprit, ce n’est pas pour rien qu’elle était recommandée aux chercheurs et aux techniciens après leurs longues heures de travail, cela les aidait à décompresser. Bon nombre d’entre eux semblaient aimer cette ambiance sonore. Il les avait bien blâmés ces abrutis, lors des réunions décadielles (cent décadiés)... Antanéus s'était souvent prononcé pour leurs suppressions, fustigeant avec véhémence les méthodes, la bassesse d'opter pour de telles créations insipides. Déjà sur Terre, le principe de diffusion de Surroundmuzac, dans les bureaux, les usines, les centres commerciaux, avait ses détracteurs. Ces lamentables sonorités, pour lui, ne correspondaient en aucune manière à de la musique, seulement à des effets sonores purement manipulateurs, un envoûtement permanent, dans un traitement normalisateur, élémentaire, trop simpliste, ne pouvant que s’entendre et non pas s’écouter. Simple à digérer.

Forcément haïssables.

Particularité sournoise : -Vous empêcher de réfléchir !

L'effet sonore annihilait toutes pensées négatives durant le travail, les achats, ou encore, durant un débat bidon dans une émission télévisuelle ou bien même sur le net.

De la pommade, du strass, des paillettes… Et des gonzesses à poils…

Strass, paillettes : Les primitifs aimaient à se parer de certains objets qu’ils enfilaient sur certaines parties molles du corps cou, nez oreilles ou sur certains membres doigts, poignets, cheville (ces êtres étant dotés de pieds qui possédaient eux-mêmes cinq doigts particulièrement laids, on peut comprendre ce besoin d’embellissement, si puéril soit-il)

Gonzesses à poils : Logiquement il s’agirait là d’une parure fabriquée avec des poils. Ces primitifs avaient quelques poils disposés sur le corps, peut-être les rasaient-ils pour les tresser et en faire des objets liés à leur frivolité.

Métaphore à laquelle n’aurait pu échapper cette musique. Antanéus s'enorgueillissait de faire partie de ceux qui n'avaient jamais accepté ces mélodies guimauves, caramels mous, qui collent aux dents

Guimauves caramels mous : Ici le Computspects nous rappelle à un référent nourriture, il n’en dit pas plus. Nous savons que l’être humain passait la majeure partie de sa vie à dormir et à manger. Il se nourrissait particulièrement d’animaux et de certaines espèces issues de la flore. Supposer que par cette expression Guimauves caramels mous qui colle aux dents, définirait une probable espèce animale, serait plutôt aventureux de l’affirmer. « Guimauves caramels mous » devrait être plutôt l’une de ces espèces florales que l’on ingurgitait à profusion, nombreuses sont les espèces dans l’univers qui ont cette pratique du mâchage constant.

Des sons informatiques où aucun instrument naturel n'intervenait. Il aimait, avant tout, les sons purs, naturels, provenant d’instruments de musique, faits de bois rares et de matériaux nobles, façonnés par la main, le savoir-faire, le génie de l’homme... Ah, les musiciens de l’époque Baroque.

Quant à la musique