Une étonnante rencontre - Abdellah Harris - E-Book

Une étonnante rencontre E-Book

Abdellah Harris

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Beschreibung

Une étonnante rencontre est une biographie romancée du jeune Harris. Partagé entre le réel et le paranormal, en quête d’une guérison spirituelle, son père et lui rencontreront des personnages étranges et impressionnants. Ces derniers les conduiront à la découverte du mystère de la vie éternelle. Seulement, le chemin qui mène à ces merveilles célestes est parsemé d’embûches…


À PROPOS DE L'AUTEUR


Assailli par de mauvais esprits après la mystérieuse mort de sa mère, Abdellah Harris, soutenu par son père, traverse maintes épreuves à la recherche d’une miraculeuse délivrance. Ce parcours initiatique a provoqué en lui le désir de coucher ses mémoires sur du papier afin de partager ses expériences.

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Seitenzahl: 182

Veröffentlichungsjahr: 2023

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Abdellah Harris

Une étonnante rencontre

© Lys Bleu Éditions – Abdellah Harris

ISBN : 979-10-377-9129-0

Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L.122-5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L.122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L.335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.

À tous les êtres chers qui nous ont quittés,

que la bravoure de leurs existences reste à jamais

gravée dans nos cœurs.

Leurs âmes reposent en paix au royaume des braves

où rayonne la bienfaisance éternelle des gens.

Préambule

Les statistiques sont peut-être formelles, c’est dans les trains et les halls de gare puis sur internet que nous faisons souvent les rencontres – d’amour ou d’amitié – les plus intéressantes de notre vie. Journaliste espagnol de passage à Paris, c’est dans le métro que j’ai fait, pour ma part en cet hiver de l’année 2003, une rencontre aussi étrange que merveilleuse, une rencontre qui allait modifier le cours de ma vie. Un jeune homme d’à peine vingt ans et dans lequel j’ai décelé instantanément une intelligence bien supérieure à celle que l’on aurait pu attendre de quelqu’un de son âge. Il se dégageait de lui mystère et richesse spirituelle, comme si des secrets enfouis au plus profond de lui avaient façonné cette personnalité hors du commun.

Notre vie est pleine de perles heureuses. Chacun des moments passés en sa compagnie en fut une bulle d’éternité dont le souvenir m’obsède. C’était quelqu’un d’étrange, doté d’une profonde sensibilité humaine en même temps que d’une spiritualité rayonnante. Il s’appelait Harris et était originaire de Grèce.

Introduction

Arrivé depuis quelques heures à peine dans la capitale parisienne, je m’apprêtais à rejoindre quelques amis journalistes dans un grand restaurant pour y fêter dignement le Nouvel An. Dans le métro, les gens affichaient pour la plupart un visage réjoui à l’idée des festivités qui les attendaient. Pour ma part, je me sentais très en forme, très en appétit, impatient de savourer le bon repas qui m’attendait et essayant de planifier l’organisation des journées suivantes, tâche difficile, tant les possibilités de découvertes en tout genre, offertes par cette ville qu’est Paris, sont nombreuses.

Nous venions d’arriver à la station « Les Halles », lorsqu’un individu fit irruption dans le wagon. Il devait avoir une quarantaine d’années. Il semblait très excité. Ses violentes invectives et les insultes dont il abreuvait les passagers avaient créé un climat de tension qui se transforma rapidement en frayeur quand l’individu commença à donner des coups de pied dans les sacs qui se trouvaient à sa portée.

J’aurais voulu intervenir, tenter de le raisonner mais vu sa corpulence, je ne me sentais pas capable de l’affronter physiquement. Manque de courage ou simple prudence ? Je ne bougeais pas. Les autres passagers semblaient tétanisés. Assises à côté de moi, une femme et sa petite fille, serrées l’une contre l’autre, observaient avec angoisse ce déchaînement de violence physique et verbale. Un coup de pied dans le petit sac à dos d’une fillette fut de trop pour l’un des jeunes hommes présents dans la rame. Il se leva, s’avança calmement vers l’homme violent, lui demanda de cesser d’importuner les voyageurs et d’aller s’asseoir. Il s’exprimait à la fois de façon ferme et chaleureuse. Surpris par cette intervention et par la détermination de son interlocuteur, par le regard hypnotique qui le fixait, l’homme grogna quelques insanités mais alla s’asseoir au fond du wagon. La tension tomba d’un coup, les conversations reprirent entre les passagers, le calme était retrouvé.

Il faut que je revienne sur ce jeune homme, car je n’ai plus jamais rencontré, depuis lors, quelqu’un qui possède cette lumière d’étoiles dans le regard. Je m’apprêtais à aller m’asseoir à côté de lui pour engager la conversation, lorsque l’individu qui s’était tenu calme invectiva le jeune homme qui s’était opposé à lui. Selon lui, l’armée avait fait de lui un homme fort et la Légion étrangère le protégerait en cas de déboires avec la Justice. Manifestement, il souhaitait nous faire peur, je ne suis pas sûr qu’il ait été véritablement dangereux ni qu’il ait eu le projet d’agresser physiquement l’un ou l’autre des passagers. Je suis persuadé qu’il avait des problèmes psychiatriques, certes, mais aussi qu’il était très seul et très malheureux. Pourquoi hurlait-il sa haine et son mépris pour la jeunesse ? Quelle blessure avait marqué son esprit pour en faire un tel condensé de violence ?

Le jeune homme ne semblait ni effrayé ni angoissé par les insultes qui déferlaient sur lui.

Son visage pâle ne trahissait aucune inquiétude. Au contraire, il rayonnait de paix comme illuminé par une lumière intérieure, par la lumière divine de la vie. Cette sérénité, autant que la maîtrise de soi qui animait ce jeune homme, impressionnait les occupants du wagon. Il lui aurait été facile de se soustraire à cette situation désagréable qui pouvait à tout instant tourner au drame, en descendant du métro et en alertant les responsables de la sécurité. Pourquoi ne le faisait-il pas ? La peur lui semblait inconnue et son esprit semblait voguer dans des sphères lointaines et inconnues comme s’il reposait sur de tendres nuages.

Face à une telle sérénité, l’homme se leva de son siège, se dirigea vers le jeune homme, le poing levé, avec l’intention manifeste de le frapper. Le coup de pied du jeune homme dans l’estomac fut si vif, impossible à anticiper. Son agresseur fut projeté quelques mètres plus loin. À terre, l’homme semblait avoir perdu brusquement son agressivité et sa superbe ; son regard était triste comme s’il implorait de l’aide sans pouvoir l’exprimer ouvertement. Sa détresse n’avait été perceptible qu’au mystérieux jeune homme, capable de lire dans les yeux les émotions les plus enfouies.

Aussi surprenant que cela puisse paraître, le jeune homme tendit la main à celui qu’il avait frappé et l’aida à se relever, puis il le fit asseoir, prit place à côté de lui sur la banquette et commença à lui parler à voix basse, presque tendrement.

— Monsieur, savez-vous que dans la vie on ne peut pas faire n’importe quoi ? Il y’a des choses à respecter absolument, et des interdits qu’il ne faut en aucun cas transgresser, comme faire du mal aux enfants ou les effrayer comme vous l’avez fait tout à l’heure. Même si cela n’était pas votre intention, votre comportement a terrorisé une petite fille. Ensuite, vous vous en prenez à moi, vous tentez de me frapper. Pourquoi ? Face à votre agression, je me suis défendu mais je ne vous déteste pas. Le monde vous répugne peut-être et il est vrai qu’il n’est pas toujours beau, mais pourquoi attribuer aux autres votre malheur alors que vous en êtes probablement le propre artisan ? La conscience de votre infortune est si aiguë qu’elle vous a conduit à perdre la maîtrise de vos actes et c’est le premier pas vers une folie meurtrière.

Ce qui peut vous sauver de cette dangereuse dérive, c’est votre lucidité et cette bonté qui demeurent au fond de vous et que vous tentez de cacher derrière des comportements agressifs.

Souvenez-vous qu’il faut aimer, ne pas craindre de laisser transparaître ses émotions et qu’avoir les yeux humides n’est pas honteux, loin de là. On dit souvent que les yeux sont le reflet de l’âme. Je le pense vraiment. Les troubles de l’âme brouillent la tranquillité de l’esprit alors que la réflexion dans le silence et la conscience maîtrisée conduisent à la sérénité.

Vous êtes jeune encore, quels que soient vos problèmes, vos troubles, pourquoi ne pas user de tout ce que la vie nous offre pour que nous soyons en paix avec nous-mêmes et avec les autres : le pouvoir spirituel du yoga, la prière, la lecture, le sport et tant d’autres choses encore ! Il faut avoir la volonté de faire face, de ne pas s’abandonner au sort lorsqu’il semble s’acharner sur nous, ouvrir les yeux sur toutes les belles et bonnes choses qui nous entourent. Parfois, ce sont les choses les plus simples qui procurent le plus de joie.

Prenez votre courage à deux mains, faites avec votre conscience le travail nécessaire et vous aurez gagné, vous serez libre dans votre tête. Faites de la vie votre amie et de Dieu votre allié. Partez avec la conviction que vous n’êtes ni fou ni méchant et qu’il y a sur cette terre des gens prêts à vous sourire.

Au revoir, monsieur, je vous souhaite tout le courage du monde.

Et sur ces mots, le jeune homme se leva, quitta la rame et descendit sur le quai. Je le suivis.

Une fois sorti du métro, je me décidai à l’aborder.

— Excusez-moi, jeune homme, je me nomme Sam, je suis journaliste et j’aimerais vous poser une question. Auriez-vous quelques instants à m’accorder ?
— Bien sûr ! me répondit-il en souriant. Moi, c’est Harris. Que puis-je pour vous ?
— J’ai assisté au différend que vous avez eu avec cet homme dans le métro. J’ai été particulièrement stupéfait par votre façon de l’appréhender. Vous avez su déceler en lui autre chose que de la violence et avez trouvé les mots pour le ramener à la raison. Mais ce qui m’échappe, c’est ce que vous entendez par « regard humide ».
— Comme je l’ai dit, les yeux sont le miroir de l’âme. On peut lire comme dans un livre dans les yeux de son prochain. Tout y est concentré. L’amour comme la souffrance. Mais pour cela, il faut décrypter le sens spirituel de nos propres émotions. Ainsi, il est possible de saisir les énergies transmises par les uns et les autres, énergies positives autant que négatives. Il suffit alors de tendre l’oreille pour entendre celui qui demande de l’aide.

Pour revenir aux yeux humides, je dirai que c’est l’émotion fluide de l’amour qui tout autour du regard se propage comme une étincelle de lumière divine. Naissance de l’éternel amour de notre vie spirituelle composé d’une émotion complètement humidifiée, si profondément océanique que nous finissons tendrement par laisser couler des larmes de joie ou de tristesse.

C’était justement le cas de cet homme dans le métro. Un bon esprit et des yeux humides dans un corps tourmenté.

En fonction de notre éducation, nous voyons notre amour croître ou s’assécher.

C’est pourquoi il nous faut toujours respecter notre source d’énergie. En facilitant la fluidité de nos sentiments, nous avons le moyen de faire face à nos souffrances. Nous sommes notre meilleur remède.

— Stupéfiant ! Avez-vous d’autres surprises.
— Je pourrais vous parler du pouvoir spirituel de la vision panoramique. Cette vision dépend des valeurs de notre esprit. À esprit large, vision large et lointaine, à esprit rétréci, vision rétrécie…

Il est important de souligner que la vision panoramique ne peut être profitablement réalisable qu’à une seule condition : celle principalement de respecter les règles fondamentales des valeurs humaines que nous recevons logiquement dès l’enfance.

Nous récoltons ce que nous semons.

— Mais où avez-vous appris tout cela ?
— L’expérience de la vie…
— Merci, merci pour ce partage. Merci pour cette rencontre, si étonnante. Quelle belle façon d’achever l’année ! Je vais rester un mois ici. Pourrions-nous nous revoir ?
— Avec plaisir. Votre intérêt pour la nature humaine et les secrets et pouvoirs de l’âme me touche. Vous rencontrer est pour moi aussi une chance. Et à mon tour, je voudrais vous demander quelque chose. Je suis en train d’achever un manuscrit. Une belle histoire, composée d’intrigues et de merveilles. Accepteriez-vous de lire cette copie ? Vous comprendrez alors comment la vie et ses mystères ont fait de moi ce que je suis aujourd’hui.
— Pourquoi me demander cela ? Nous nous connaissons à peine…
— Vous m’inspirez confiance. Votre regard humide exprime beaucoup de bonté, et votre avis sur ce roman pourrait m’être très utile. Surtout en tant que journaliste.
— C’est un grand honneur que vous me faites là, et c’est avec le plus grand plaisir que je lirai votre ouvrage. J’ai hâte de le découvrir, car comme vous l’avez compris je suis passionné par la nature humaine et ses secrets. Et si je peux vous aider dans votre parcours d’écrivain, c’est avec bonheur et fierté que je le ferai.

Sans plus attendre, il tira de son sac une copie de son manuscrit.

— Voilà, c’est pour vous.

En échange, je lui donnai mes coordonnées.

— Je suis descendu dans un hôtel de Montmartre.
— Que notre rencontre soit le début d’une longue amitié ! Tous mes meilleurs vœux de bonheur, Sam.
— Bon réveillon à toi, Harris.

Nous nous quittâmes non sans une certaine émotion en nous promettant de nous revoir très vite.

C’est au lendemain d’un réveillon bien arrosé que, profitant des rayons du soleil de ce mois de janvier naissant, je m’installai sur un banc du parc du Luxembourg, décidé à consacrer ma journée à la lecture du manuscrit de mon jeune ami.

J’allais découvrir l’aventure d’Harris et ses mystères.

Merveilleuse Grèce, pays de ma naissance. J’avais tout juste 25 ans lorsque, de retour en terre natale pour les vacances d’été, l’envie de raconter mon histoire se fit de plus en plus intense. Et c’est sur les hautes collines de Crête, face à l’océan et la plume au bout des doigts que je démarrai mon récit.

Certains des évènements parmi les plus marquants de notre existence exigent d’être couchés sur le papier.

Il nous faut laisser quelques témoignages de cette vie terrestre si vite achevée, répondre au besoin impérieux de léguer à ceux que nous aimons nos plus belles histoires, transmettre nos expériences aux générations futures et partager nos trésors spirituels, comme un acte d’amour éternel. Notre mémoire devient alors une éternité et ce sont les secrets du sens de la vie que nous consacrons telle une offrande universelle.

Je n’avais que 6 ans lorsque ma tendre mère décéda. Un sombre matin d’hiver, elle ne se réveilla pas. Ma mère, si belle, si douce, aimante et aimée de tous, jeune encore et bien portante, emportée dans son sommeil… Elle se prénommait Myriam et mon père, Nikos.

Cette disparition prématurée autant que mystérieuse plongea toute notre famille dans le désespoir et l’incompréhension. La veille encore, au soir de sa mort, je la revoyais, sourire aux lèvres, poser un doux baiser sur mon visage d’enfant.

Père et moi étions désormais seuls. Mais bien que bouleversé par cette tragédie, Père, grâce à sa foi en Dieu et son infinie sagesse, sut faire face à cette épreuve et je pus trouver auprès de lui réconfort et secours. Car s’il se livrait peu, les regards dont il m’enveloppait, en revanche, en disaient long sur l’affection qu’il me portait.

La perte d’un être cher est sans aucun doute l’épreuve la plus douloureuse que nous ayons à endurer. Lorsque ma mère disparut, je fus terrassé par le chagrin. Pour soulager ma peine, Père me rappelait sans cesse que ma mère était désormais auprès de Dieu, que la mort n’était qu’un passage et que Mère avait désormais accédé à l’éternité, éternité qu’un jour nous connaîtrions à notre tour, et que compte tenu de sa moralité et de sa spiritualité, nul doute qu’elle a gagné sa place au Paradis.

Mais malgré ces bonnes paroles et les efforts répétés de mon père pour me distraire, mon chagrin et l’absence de ma mère demeuraient toujours aussi douloureux. La propre tristesse de mon père était également palpable. Mes parents se connaissaient depuis l’enfance, ma mère avait été son premier amour et tous deux s’aimaient d’un amour profond.

Cependant, après quelques mois éprouvants, je retrouvai peu à peu le goût à la vie, et ce, précisément lorsque ma mère vint se manifester dans mes rêves. Elle m’apparaissait tel que je l’avais toujours connue, belle et vivante. Main dans la main, nous volions par-delà les nuages dans un ciel aux couleurs arc-en-ciel tandis qu’elle m’invitait à être heureux malgré les circonstances, car désormais elle reposait en paix. Son heure était venue et il me fallait accepter cette cruelle réalité.

Elle m’assurait que Père avait raison de croire en l’éternité, que rien ne sépare les cœurs aimants et qu’un jour de nouveau nous serions tous réunis au royaume des cieux pour nous aimer encore. Dans ce décor baigné de lumière divine où nous flottions l’un l’autre, elle me serrait dans ses bras et m’embrassait tendrement avant de s’en retourner auprès de ses ancêtres.

Avec l’arrivée du printemps, Père et moi retrouvâmes le sourire et notre peine, tout comme la météo, s’adoucissait peu à peu. Je n’allais pas encore à l’école, et pendant que Père, ouvrier du bâtiment, travaillait, je passais mes journées chez une tante en compagnie de mes cousins, goûtant de nouveau au plaisir des joies enfantines. Le soir, je retrouvais Père et ensemble nous passions de merveilleux moments. Nous allions au cinéma, ou faisions du vélo lorsque le temps le permettait. Il me donnait le meilleur de lui-même souhaitant plus que tout me voir heureux. Mon père était un humaniste, profondément enclin à la tolérance et au respect de l’autre. Pour lui, c’est dans ce que l’autre a de meilleur à nous donner que nous apprendrons à nous connaître. C’est ce qu’il appelait « l’échange équivalent ».

Un soir, un an après la disparition de Mère, tandis que mon père quittait ma chambre après, comme à son habitude, m’avoir embrassé et souhaité une bonne nuit, je fus pris d’un accès de fièvre accompagné de visions effrayantes. Je me mis à hurler :

— Papa ! Au secours ! Il y a trois petits monstres qui flottent là, juste au-dessus de moi ! Ils me veulent du mal !

Mon père se précipita dans ma chambre.

— Qui y a-t-il, Harris ? Je ne vois rien…

Tentant de me calmer, il constata que j’étais brûlant.

— Je vais appeler le médecin.

Mais je continuais de plus belle :

— Regarde ! Ils sont là, tout près du lit ! Ils me regardent méchamment…
— Harris… Je ne vois rien…
— Écoute ! Écoute-les ! Ils disent que l’éternité n’existe pas, que Dieu n’existe pas… Oh Père, aide-moi ! Je ne veux plus les voir ni les entendre. Ils sont l’œuvre du mal !

Soudain, je cessai de m’agiter.

— Oh père ! Vois-tu cette merveilleuse lumière ? Elle me protège comme un bouclier. Les monstres ne peuvent plus approcher…

Évidemment, Père ne voyait rien. Ni les monstres, ni même la lumière. Mais il se réjouit d’apprendre que je me sentais désormais protégé. Mon père appela le médecin qui me prescrivit un médicament pour faire tomber la fièvre.

— Maintenant, il te faut dormir, dit mon père. Grâce aux bons soins du médecin, ta fièvre va tomber et tu retrouveras la paix.

Le lendemain, je me réveillai avec une légère migraine. Mais comme Père l’avait promis, le médecin avait réussi à éloigner la fièvre. D’après lui, les hallucinations avaient été causées par ce soudain accès de fièvre. Il ne fallait pas s’en alarmer. Tout ceci n’était que passager.

Malheureusement, la réalité fut tout autre. Une nuit sur deux, je me réveillais, en proie à une forte fièvre, et aussitôt m’apparaissaient ces horribles créatures. N’ayant de cesse de me harceler, elles m’ordonnaient de renoncer à Dieu et affirmaient encore que l’éternité n’était qu’un leurre. Pas de Paradis pour les morts. À quel terrible chantage elles me soumettaient ! Pour retrouver la paix, il me fallait vendre mon âme au diable… Heureusement, cette lumière divine, apparue dès la première nuit et que je nommais bouclier magique, continuait de me protéger de leurs assauts.

Au petit matin, elles disparaissaient, effrayées par la lumière du jour naissant.

Les sages du village, ayant eu connaissance de mes troubles, y voyaient la manifestation de mauvais esprits.

Pour expliquer ces fièvres répétées, on me fit passer des examens médicaux qui ne révélèrent ni anomalie ni pathologie. Ces phénomènes apparemment dépassaient le cadre médical et dans le village on commença à avancer la possibilité de phénomènes paranormaux.

Même si mes troubles pesaient lourdement sur notre vie de famille, mon père s’attachait à rester positif et avait grand espoir que Dieu me libère bientôt de mes démons.

Un soir, trois semaines après la première fièvre, et tandis que nous dînions, Père m’annonça, avec une certaine émotion dans la voix, qu’il avait l’intention de me faire découvrir la France. Une de ses sœurs vivait là-bas, et lui-même avait vécu et travaillé quelques années à Paris avec Mère. La France était un beau pays et il était sûr que ce voyage me serait fort bénéfique. De plus, il avait entendu parler d’une certaine Catherine, une femme très pieuse, capable de grands miracles, et qui aurait le pouvoir de me guérir des mauvais esprits. Il souhaitait que nous la rencontrions. Le travail ne manquait pas dans le bâtiment et il était sûr de trouver rapidement un emploi. Il m’inscrirait à l’école, chargerait ma tante de veiller sur moi quand son travail serait trop prenant et faisait confiance à un bon ami installé à Paris pour nous trouver un logement à bas prix.

Je me réjouissais à l’idée de ce voyage et fondais déjà de grands espoirs sur les prouesses potentielles de cette dénommée Catherine.

Quelques jours plus tard, nous quittions notre village bordé par l’océan. J’avais 7 ans. Et lorsque l’avion décolla, je ne pus retenir quelques larmes, conscient déjà de ce que nous laissions derrière nous.