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"Vitalité de l’espérance" offre des voies de réflexion pour mieux saisir une espérance universelle, inhérence à la vie et aux forces qui nous animent. Cependant, jamais elle ne se situe du côté de l’évidence. Son mouvement dépasse celui de l’attente. Elle est la promesse d’un surpassement du tangible. Tel qu’il est démontré dans cet ouvrage, l’espérance chrétienne n’exclut pas l’espérance commune. Elle la soulève sur le plan divin dans une foi qui ouvre toute vie.
À PROPOS DE L'AUTEUR
Au sortir d’études en théologie,
Bernard Chatenet a accumulé de nombreuses connaissances sur le sujet. À travers les livres et son vécu quotidien de soignant, il a exploré les sentiments liés à l’espérance. Ainsi, il conçoit l’écriture comme un processus de révélation qui lui permet de mener des recherches et d’élargir les faisceaux de l’imaginable.
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Seitenzahl: 95
Veröffentlichungsjahr: 2024
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Bernard Chatenet
Vitalité de l’espérance
Espérance commune
et espérance chrétienne
Essai
© Lys Bleu Éditions – Bernard Chatenet
ISBN : 979-10-422-1388-6
Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L.122-5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L.122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L.335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.
À Jean-Pierre Guéry, prêtre qui m’a accompagné fraternellement tout au long de ce travail,
a suggéré des horizons,
a corrigé avec sollicitude ce texte.
À Jean-François Schaaff,
qui a conduit amicalement,
avec finesse, l’ultime correction.
À Danielle, pour son accompagnement discret.
À mes enfants et petits-enfants,
signes vivants d’espérance.
À l’Église qui m’a construit
et conduit dans l’espérance.
À la vie source et fin de l’espérance.
Des sources d’eaux pures, Jamais elle n’en trouverait assez, dans (toute) ma création. Car il n’y en a pas beaucoup. Mais c’est justement avec les eaux mauvaises Qu’elle fait ses sources pures. Et c’est pour cela qu’elle n’en manque jamais. Mais c’est aussi pour cela qu’elle est l’Espérance.
Charles Péguy, Le Porche du Mystère
de la deuxième vertu. P. 640. La Pléiade, 1975
À cet instant terrible où il n’y a plus rien à croire ou à espérer – plus d’air ni de portes –, tu surgis.
Christian Bobin, Le Christ aux coquelicots,
Les différentes régions du ciel,
Ed. Quarto Gallimard, P. 670, 2022
Je voyais sans cesse le Seigneur devant moi, car il est à ma droite pour que je ne vacille pas…/… ma chair elle-même reposera dans l’espérance que tu n’abandonneras pas mon âme…
Ac 2, 25 par Pierre à la Pentecôte
Seigneur mon Dieu, tu es mon espérance.
Psaume 71,5,
Bible de Jérusalem, 1958
On obtient de Dieu autant qu’on en espère
Sainte Thérèse de Lisieux,
Histoire d’une âme, 1898
Tout ce que vous demandez en priant, croyez que vous l’avez déjà reçu, et cela vous sera accordé
Mc 11, 24,
Bible de Jérusalem, 1958
L’heure viendra cependant où dans un monde organisé pour le désespoir, prêcher l’espérance équivaudra tout juste à jeter un charbon ardent en flamme au milieu d’un baril de poudre.
Georges Bernanos,
Monsieur Ouine, 1940
Bousculés, tourmentés, dépassés peut-être par le fil très rouge de l’actualité (2022), nous n’exprimons plus dans notre quotidienneté un seul mot qui poserait un soupçon d’ouverture, un semblant d’espoir. Notre monde occidentalisé après avoir connu ses glorieuses décennies (années 1960-2000) découvre en un dévoilement inattendu, rapide, qu’il a perdu sa splendeur, son aura jusqu’à sa raison de vivre. Tellement persuadés de pouvoir vivre sans complexe, sans questionnement quant à notre mode de vie dispendieux que notre réveil écologique et sociétal, que notre conscience jaillissante ne sait plus vers quel horizon se diriger !
Il n’est pas nécessaire ici de développer la situation (environnementale, politique…) de notre monde actuel. Tous, nous ressentons et exprimons sa réalité. L’urgence est à tous les niveaux et dans tous les esprits.
Afin de rentrer dans l’objet de notre étude, nous proposons une courte lecture du Psaume XXII de David dans la Bible. Que l’on soit croyant ou pas, ce texte est fondateur : des gouffres intérieurs, des sentiments les plus extrêmes que signent le sentiment d’abandon, une toute petite espérance jaillit de ce rien et conduit la renaissance :
Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? Loin de me sauver, les paroles que je rugis ! Mon Dieu, le jour j’appelle, point de réponse, La nuit pour moi, point de réponse.
Le sentiment d’abandon, la détresse face au silence de Dieu et des hommes n’est-il pas une réalité universelle ? À tel point que nous rugissons, nous proclamons notre désarroi sans que la violence de ces paroles ne change la réalité de la violence de l’abandon. La révolte alors est juste ; elle est celle d’un homme (anthropos) juste qui refuse son état et s’y oppose. La révolte est l’acte de dire non, acte de résistance en cette inséparable confrontation2 avec le mal et la souffrance, la solitude. Cette solidité, cette fermeté par la révolte prend la mesure d’un jaillissement toujours possible vers un au-delà de la douleur. Et ainsi elle part du présent pour l’orienter vers un avenir qui, bien qu’imprévisible, ne peut qu’apporter une ouverture.
En toi, Yahvé, nos pères ont espéré. Espéré et tu les as délivrés. (PS 22,5)
Du cri du cœur meurtri et jamais de l’ignorance du mal, l’homme trouve la délivrance attendue, l’espérance folle qui nous console des jours à venir.3
Et moi, ver et non pas homme honte du genre humain, rebut du peuple, tous ceux qui me voient me bafouent. Il s’est remis à Yahvé, qu’il le libère. (22, 7)
Le désespoir creuse en l’être un gouffre dans lequel il s’enferme souvent. Véritable enfer-mement, il se dévalue lui-même, il n’est qu’un ver et pas un homme et pense que les autres le rabaissent, le repoussent, se moquent de lui. Cette souffrance extrême qui fait perdre ses repères ne trouve son ouverture que dans une énergie plus forte encore, un mouvement intérieur de dépouillement, d’ouverture à soi-même. L’espérance apparaît au terme de cette nuit telle une aube nouvelle quand toute volonté s’estompe, que tous les freins sont relâchés. C’est en ce sens que le désenchantement est plus à craindre que le désespoir,4 car le désenchantement, tel un rétrécissement de l’esprit, ne laisse plus passer la lumière (Ibid.).
L’espérance ne s’identifie ni à un état psychologique, ni à un tempérament, ni à l’illusion de l’optimisme, trop sûr de sa pensée, ou à la marge, c’est un optimisme qui a connu les larmes5 ; elle ne peut naître du pessimisme, du défaitisme qui ferme toute éventualité d’un rebond. Elle n’est réservée à aucune personne. L’espérance apparaît alors comme l’émergence d’une vitalité plus profonde encore que la détresse, que le plus grand mal. Plus enfouie que la souffrance est cette capacité de l’homme à espérer là où il n’y a plus aucun espoir. C’est alors par ce manque absolu d’espoir, celui que chante le Psaume, que l’espérance illumine l’être. Car espoir n’est pas espérance ! Nous le verrons.
C’est toi ma louange dans la grande assemblée J’accomplirai mes vœux devant ceux qui le craignent Les pauvres mangeront et seront rassasiés. Ils loueront le Seigneur ceux qui le cherchent Que vive leur cœur à jamais !
Les plus malheureux, les pauvres parmi les pauvres trouveront leur joie au fil de leur quête, leur recherche d’espérance. De cet horizon, l’intelligence inscrite en leur cœur vivra éternellement.
Celui qui n’espère pas l’inespéré ne le trouvera pas, écrivait Héraclite (VIe siècle av. J.-C.) en une sagesse qui défie tous les temps. Puisque l’espérance appartient à la vie et que le temps est promesse d’un dépassement, l’homme peut-il trouver en lui-même la source de son espérance ? Est-il si fragile qu’il en soit incapable ? Est-il si capable qu’il puisse trouver ce qu’il espère ?
L’espérance oubliée6, délaissée, refusée peut-être est si ardente qu’elle défie aujourd’hui notre cécité du quotidien vécu là où l’homme croit l’avoir perdue. Elle est au bout de cette perte, la vie renaissante et forte de sa vie propre.
Aucune opposition entre l’espérance commune, universelle que nous observons en premier et l’espérance juive et chrétienne, en un second temps. Comme le psalmiste nous oscillons du désarroi le plus profond à la foi-espérance en un Dieu éternel.
La Théologie médiévale a marqué durablement la foi chrétienne sur notre sujet : la seule chose à espérer est la béatitude, la vie éternelle au ciel, c’est-à-dire la vision de Dieu. Cette conception idéale, idéalisée, n’a jamais tenu compte des réalités purement terrestres. Notre réflexion ne peut être conduite par elle, car l’espérance demeure toujours une dimension de l’expérience humaine.
Ce qui nous pose les questions suivantes : quelle est cette expérience humaine universelle ? De quelle façon celle-ci peut-elle rejoindre la foi chrétienne ? La foi chrétienne modifie-t-elle cette expérience ?
Tous nous connaissons des situations dans lesquelles l’espérance apparaît impossible, inenvisageable. Quel avenir peut entrevoir un jeune violenté, torturé, défiguré ? Quelle espérance pour ceux qui développent une dépendance à l’alcool, aux stupéfiants au point de détruire leur vie ? Certains expriment qu’ils n’ont que cela de bon dans la vie. De nombreuses situations (dépression, suicide, violence, mort de l’être aimé…) sont reçues comme l’expérience extrême d’un non-sens radical de la vie. Quelle projection en l’avenir en effet pour la vie quand il n’y a plus rien à attendre de la vie ?
Des circonstances multiples, individuelles ou même collectives apparaissent souvent comme des impasses sociales, professionnelles, sentimentales ou même corporelles (maladies graves, souffrances). La résignation face aux coups de boutoir de la vie, l’acceptation passive souvent désabusée, l’abandon de toute réactivité laisse supposer ou apparaître une lassitude, un rejet, un refus d’avancer au présent comme au futur.
Une forme de lucidité jaillit aujourd’hui de notre quotidien : l’avenir est chimérique, improbable, inconcevable et de toute façon, le temps et la vie ne tiennent pas leurs promesses ! La désillusion est d’autant plus grande qu’aucun signe, aucune prise sur le quotidien ne permet d’envisager ou d’acter un quelconque changement. Dans ces conditions, il apparaît plus simple de ne rien changer du tout. Cet hyper réalisme, tel une forme d’acquiescement du présent n’est pas sans valeur, mais elle est sans espérance. Quel désir en effet peut naître d’un relativisme total ou d’un présent hypertrophié qui centre toute vie à l’immédiat ?
Nous venons de le voir, l’espérance ne va pas de soi7. Qu’elle soit individuelle ou collective, ne trouve-t-elle pas son fondement dans un élan et une pratique qui mettent en valeur le temps, l’histoire et la vie, un désir de vivre ? Si le désespoir est universel, l’espérance vécue, elle, est de l’ordre de l’exception8.
Par excellence, l’homme possède en lui le désir de vivre et d’être heureux. Ce désir jaillit en une quête ou une conquête qui tente de maîtriser le devenir. Une situation de misère totale n’engendre le plus souvent ni le suicide ni la dépression, mais une profonde volonté de vivre, d’émerger vers un mieux, de s’en sortir. Les personnes confrontées à la misère sont dans l’incapacité de prévoir, mais font au mieux avec leurs possibilités et recommencent à chaque étape pour éviter l’humiliation, repousser l’anéantissement, inventer toujours, prendre soin, malgré tout en des tâtonnements continus et finalement résistent. Ce n’est pas l’espérance qui produit la résistance, mais l’inverse.9