Crime de village - Jules Renard - E-Book

Crime de village E-Book

Jules Renard

0,0
0,50 €

oder
-100%
Sammeln Sie Punkte in unserem Gutscheinprogramm und kaufen Sie E-Books und Hörbücher mit bis zu 100% Rabatt.
Mehr erfahren.
Beschreibung

"Crime de village" est un recueil de nouvelles écrit par Jules Renard et parut en 1888. 
C'est huit tableaux composés par petites touches de couleur vive dont la dominante est le cynisme. La trame narrative de ces nouvelles pourrait rappeler celles de Flaubert ou de Maupassant. Anticléricalisme, peinture des paysans, règlements de compte, crimes et adultères constituent les thèmes principaux.

Das E-Book können Sie in Legimi-Apps oder einer beliebigen App lesen, die das folgende Format unterstützen:

EPUB

Veröffentlichungsjahr: 2024

Bewertungen
0,0
0
0
0
0
0
Mehr Informationen
Mehr Informationen
Legimi prüft nicht, ob Rezensionen von Nutzern stammen, die den betreffenden Titel tatsächlich gekauft oder gelesen/gehört haben. Wir entfernen aber gefälschte Rezensionen.



Jules Renard

Crime de village

table des matières

CRIME DE VILLAGE

Première partie - Crime de village

Chapitre 1

Chapitre 2

Chapitre 3

Deuxième partie - Flirtage

Chapitre 1

Chapitre 2

Chapitre 3

Chapitre 4

Chapitre 5

Troisième partie - La meule

Chapitre 1

Chapitre 2

Chapitre 3

Quatrième partie - Le retour

Cinquième partie - À la belle étoile

Chapitre 1

Chapitre 2

Chapitre 3

Sixième partie - Une passionnette

Chapitre 1

Chapitre 2

Chapitre 3

Septième partie - Héboutioux

Chapitre 1

Chapitre 2

Chapitre 3

Chapitre 4

Chapitre 5

Huitième partie - À la pipée

CRIME DE VILLAGE

Jules Renard

Mon cher papa,

Laisse-moi t’offrir ces quelques pages de collégien, manuscritesdepuis si longtemps, imprimées enfin pour toi seul.

Surtout ne les montreà personne. Seul tu peux, comme papa etcomme camarade, avoir le courage de les lire et de les trouverpassables.

Bienà toi,

Renard.

Première partie - Crime de village

Chapitre 1

La nuit était venue doucement, et le père Rollet, les bras croisés, en manches de chemise, en gilet bleu passé à larges poches, fumait sa pipe courte et noire sur un petit banc de bois qu’il avait cloué sous l’unique fenêtre de sa chaumière.

Il ne pensait pas à grand chose et écoutait la voix de crécelle des rainettes qui chantaient dans les buissons d’alentour et troublaient seules le grand silence. Du fumier qu’il avait enclos devant sa porte, entre quatre petits murs de pierres sèches, il lui venait un air tout chargé d’odeurs chaudes.

Au milieu, se dressait un saule mince et maigre, aux feuilles fines comme des lames, dont quelques-unes, desséchées, tourbillonnaient, à peine retenues par un fil.

Il était drôlement venu, ce saule : un vieux pieu qu’on avait autrefois planté là et qui avait soudain bourgeonné, fait des branches, à la grande surprise de tous, grâce à l’humidité du sol trempé de sucs.

De temps en temps, le père Rollet faisait glisser sa pipe à l’un des coins de sa bouche, tournait la tête vers la fenêtre, et répondait par des phrases brèves et ménagées aux questions de sa femme qui mangeait, à l’intérieur, une assiette sur ses genoux, sans lumière, avec un grand bruit de mâchoires. Ils parlaient peu, mettant de longs intervalles entre leurs phrases, comme pour examiner à leur aise la portée de chacune.

Il s’agissait d’une vache que le père Collard leur marchandait. Eux voulaient la vendre six cents francs ; lui n’en donnait que cinq cents, à cause qu’elle gambillait un peu d’une des pattes de derrière. L’entente n’arrivait pas, chacun y mettant l’obstination pointilleuse de paysans endurcis qui font peu d’affaires, mais les font bien.

« Faudra céder pour la moitié », dit la femme.

L’homme répondit :

« Faudra voir. »

En ce moment, il distingua au loin une ombre, puis une autre plus petite qui se détachaient des ténèbres épaisses.

« C’est vous, Collard ? »

Une voix cria :

« C’est nous. »

Le père Collard avait des sabots blancs à peine équarris, une casquette en peau de loutre, un manche de fouet sans fouet à la main, l’air finaud et avare.

La mère Collard, courte et bavarde, portait un grand cabas toujours plein qui ne la quittait pas dans ses plus petites courses et qui lui battait lourdement les flancs.

Le père Rollet les fit entrer.

« Eh ben ! êtes-vous décidé ? »

Pour sûr que non, qu’il ne l’était pas, décidé. Il devait en démordre ; sans ça, rien.

La mère Rollet alluma une bougie toute neuve dans un lourd chandelier de fer et l’on s’assit, les femmes sur le rebord en briques de la cheminée, les hommes sur l’arche au pain frottée et luisante, les mains sur les genoux.

On causa d’abord de choses et d’autres ; puis, au bout d’un assez long silence, que scandait pesamment le tic-tac de la vieille horloge, les deux hommes reprirent leur débat à propos de la vache.

Ils parlotèrent longuement sans parvenir à se convaincre. Tous les deux donnaient obstinément leurs raisons et ne s’écoutaient ni l’un ni l’autre.

Les femmes demeuraient silencieuses, très intéressées, les yeux fixés sur eux et le menton dans le creux des mains.

Rollet proposa :

« Si on allait à l’auberge ? Ça irait peut-être mieux. »

Collard accepta. Ils sortirent. Les femmes leur crièrent de ne pas rester trop longtemps, la Collard plus fort que l’autre, parce qu’ils demeuraient tout au bout du village. Elles restèrent seules.