Étude sur les Miracles - César Malan - E-Book

Étude sur les Miracles E-Book

César Malan

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Beschreibung

Ce court essai de César Malan fils résume plusieurs années de ses réflexions sur la personne de Jésus-Christ et sur l'état actuel de l'humanité pécheresse. L'auteur y développe l'idée que les miracles de l'Évangile ne sont pas des faits surnaturels, mais au contraire en adéquation avec la nature de l'homme telle que l'a voulue Dieu, et qu'il serait plus juste de qualifier de sous-naturelle l'impuissance de l'homme déchu. En réalité, Malan n'a pas inventé cette thèse : d'anciens théologiens avaient déjà supposé qu'Adam avant la chute était revêtu de facultés préternaturelles, qui le plaçaient au-dessus des lois physiques. A première lecture, on serait sans-doute tenté de n'y voir qu'une spéculation intéressante mais inutile. Cependant l'auteur produit ici une étude si pertinente et touchante de l'humanité de Jésus-Christ, qu'elle récompense à elle seule le temps consacré à suivre sa pensée. César Malan fils a peu écrit, et en dehors de tout appareil, mais ce qu'il a laissé ne laisse pas indifférent. Cette numérisation ThéoTeX reproduit le texte de 1863.

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Seitenzahl: 240

Veröffentlichungsjahr: 2023

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Ce fichier au format EPUB, ou livre numérique, est édité par BoD (Books on Demand) — ISBN : 9782322483976

Auteur César Malan. Les textes du domaine public contenus ne peuvent faire l'objet d'aucune exclusivité.Les notes, préfaces, descriptions, traductions éventuellement rajoutées restent sous la responsabilité de ThéoTEX, et ne peuvent pas être reproduites sans autorisation.

ThéoTEX

site internet : theotex.orgcourriel : [email protected]
Étude sur les Miracles
Fragment d'Apologétique
César Malan
1863
♦ ♦ ♦Thé[email protected] – 2013 –
Table des matières
Un clic sur ◊ ramène à cette page.
Avant-Propos
Introduction
I. Primauté de la conscience
II. Les faits ordinaires sont sous-naturels
III. Les faits surnaturels sont les seuls véritablement naturels
1. La vie de Jésus
2. Les paroles de Jésus
Conclusion
Note sur la naissance de Jésus-Christ
◊Avant-Propos◊

Ce n'est qu'après une longue hésitation que je me suis décidé à publier les quelques pages qu'on va lire. Elles contiennent en effet l'expression d'un sentiment vif et sincère, bien plutôt que le résultat de l'érudition et des recherches profondes que demanderait le sujet qui y est abordé.

Tel qu'il est, néanmoins, ce court Essai résume pour moi les méditations de plusieurs années. Il soulève, je le sens, bien des questions sur lesquelles il resterait beaucoup à dire. Au cas où je le visse honoré de critiques sérieuses, je me ferais un devoir, ou bien de renoncer aux erreurs dont elles m'auraient convaincu, ou bien de répondre aux nouvelles objections dont elles se seraient faites les organes.

N'eut-il cependant d'autre résultat que celui d'attirer l'attention d'un seul lecteur sérieux sur les sujets qui y sont touchés, ce travail ne me semblerait pas inutile.

Je prie Dieu que les erreurs qu'il pourrait contenir ne trouvent d'écho nulle part, et je regarderais comme une grâce signalée de sa bonté s'il se servait, fût-ce même d'une façon négative, de tel ou tel mot sorti de ma plume pour avancer, chez qui que ce soit, cette cause de la vérité qui est aussi celle de la vie éternelle de l'âme, et à laquelle nous nous devons tous.

Genève, décembre 1862.
C. Malan fils
◊Introduction◊

L'idée du « surnaturel » rappelle deux questions aussi différentes l'une de l'autre par le genre des faits qu'elles, embrassent, que par celui des esprits que captive leur étude. L'une est celle qui ne s'occupe que de l'histoire du merveilleux, et dans laquelle il s'agit surtout de démêler tout ce que l'ignorance ou la mauvaise foi peuvent y avoir accumulé de faussetés. L'autre, plus restreinte peut-être quant au domaine de ses recherches, mais bien plus générale et bien plus vaste par les principes qu'elle implique, se borne à l'étude du miracle, c'est-à-dire du seul fait, entre tous ceux que l'on désigne sous le nom de « faits surnaturels, » qui intéresse d'une manière directe la foi religieuse.

Les simples amateurs du merveilleux, et même ceux qui ont fait de ce sujet l'objet d'un examen attentif, se sont toujours abstenus d'entrer dans l'analyse du miracle. C'est le miracle, au contraire, que nous avons tout spécialement en vue dans ces pages. Notre première tâche doit donc être ici de préciser la limite qui sépare le domaine du merveilleux de celui du miracle.

Quand on avance d'un fait qu'il est merveilleux, tout ce qu'on veut dire par là, c'est que ce fait a excité notre étonnement, et cela grâce à son caractère extraordinaire. S'occuper de ce fait sous ce seul point de vue, ne saurait donc présenter qu'un intérêt de pure curiosité pour l'imagination. — Ce même fait s'appellera cependant un miracle, dès que, cessant de n'y voir qu'un simple phénomène isolé pour le considérer comme le résultat de l'action d'un agent intelligent et libre, nous aurons trouvé qu'il ne s'accorde pas avec ce que nous sommes en droit de croire que doive être l'action de cet agent. — C'est ainsi que le croyant, celui qui croit au Dieu vivant, n'appellera pas la création un miracle, cet acte, quelque merveilleux qu'il soit, n'ayant rien à ses yeux qui ne s'accorde avec son idée de Dieu. Il réservera cette appellation pour toute action qui semblerait interrompre violemment le cours des lois qui ont leur source dans ce premier acte créateur.

Cette remarque nous permettra de distinguer clairement entre les deux publics qui s'intéressent soit à l'une, soit à l'autre de ces questions.

Le merveilleux, objet d'une simple étude de l'intelligence, ne saurait intéresser, à mieux prendre, que les hommes de la pensée : le miracle, par contre, attirera forcément l'attention des hommes religieux. — Cette distinction suffit pour caractériser, soit le genre de faits dont nous voulons nous occuper ici, soit l'espèce d'intérêt à laquelle nous faisons appel. Ajoutons encore que nous nous adressons surtout, dans ce qui va suivre, au public religieux protestant.

L'Eglise catholique, en effet, soutenant le fait de la perpétuité de l'action miraculeuse dans l'histoire, ne saurait guère, du moins par une règle générale et au moyen d'un principe qui fût appréciable pour ceux qui ne reçoivent pas son seul verdict comme une preuve suffisante en matière de foi, tracer bien nettement aucune limite précise entre ce qui appartient au miracle et ce qui doit être relégué dans le domaine du merveilleux. — Les Eglises protestantes sont ici autrement placées. Elles n'admettent pas, en général, l'existence actuelle du miracle. Pour leurs docteurs, la question des miracles n'implique qu'une étude de faits passés. Aussi, sans aller jusqu'à faire de l'absence de ces phénomènes depuis les temps apostoliques l'objet d'un dogme positif, ne sera-ce qu'avec la plus grande défiance qu'un protestant recevra tout récit miraculeux d'une date plus récente. On le sait d'ailleurs, tout, dans les recherches modernes soit du physiologiste, soit de l'historien, tend à justifier pleinement un semblable sentiment. Bien plus, quoique ces recherches soient loin d'avoir livré leur dernier mot et qu'elles laissent encore maint phénomène sans explication satisfaisante, leurs conclusions, cependant, quelles qu'elles doivent être un jour, ne sauraient jamais, grâce à cette conviction antérieure, avoir aucune importance pour le sentiment religieux des protestants.

Mais si les miracles qui ont dû se produire depuis les apôtres, disons mieux, si tout miracle en dehors des faits rapportés par les Ecritures de l'Ancien et du Nouveau Testament, est, aux yeux du protestant, du domaine de l'histoire profane, et s'il doit, comme tel, être soumis à la critique la plus attentive ; si le sentiment religieux du protestant est limité, pour son objet, à l'horizon des Ecritures canoniques, lesquelles seules font autorité à ses yeux, il est d'autant plus important pour lui, dans l'intérêt de sa vie religieuse elle-même, que cette autorité soit maintenue en face de tout ce qui pourrait injustement l'ébranler.

Lors des attaques dont les Ecritures ont dernièrement été l'objet, après la première surprise (résultant beaucoup plus de l'imprévu que de la nature de ces attaques), chacun n'a pas tardé à comprendre que la Bible se prouve par elle-même ; en d'autres termes, que la vérité des paroles du saint Livre est un de ces faits si nombreux dont nous ne sommes assurés que par la seule expérience ; que ce sont les conclusions de l'expérience religieuse, et non point celles de la pensée pure, ces dernières fussent-elles même appuyées sur la recherche de la plus laborieuse érudition, qui seules fournissent une base assez large et assez forte, pour y asseoir des convictions dont l'importance est aussi majeure pour nous tous.

Néanmoins, et bien que cette expérience religieuse suffise pleinement à tout homme réellement religieux, voici ce qui peut encore avoir lieu : — Tout en admettant en fait que la connaissance religieuse se base avant tout chez moi sur une expérience personnelle de mon être moral, tout en comprenant que ma foi au Sauveur ne saurait découler que de l'expérience personnelle que je fais de ce salut dont il est pour moi la source, il peut arriver que je n'entrevoie pas clairement les conséquences de ce principe, en particulier, que je ne distingue pas comment ce qui suffit à me faire saisir la vérité de Jésus-Christ Sauveur, suffira aussi à me faire accepter le côté miraculeux de son histoire.

Combien ne se rencontre-t-il pas de croyants qui, sans oser douter hautement des miracles, n'auraient cependant jamais la pensée de faire des récits où ils nous sont rapportés, l'objet de leur pieuse méditation ! — qui admettant, sans bien s'en rendre compte, deux espèces d'activités divines, l'une ordinaire et l'autre extraordinaire, s'en tiennent de préférence à la contemplation de la première, laquelle leur semble naturelle, et évitent de s'arrêter sur le caractère, à leurs yeux surnaturel, de la seconde !

Et ces croyants n'ont-ils pas toute raison d'éviter ainsi la pensée qui les gêne ? — Assurément. S'accoutumer à recevoir, bien plus, à recevoir comme l'œuvre directe du Tout-Sage et du Tout-Bon, des faits dont on n'entrevoit ni la nécessité, ni même l'utilité, c'est non seulement entretenir chez soi cette crédulité maladive qui ne provient, en dernière analyse, que d'une faiblesse dans le caractère et d'une habitude de laisser aller dans la pensée, mais surtout c'est s'accoutumer à une idée de Dieu qui est telle, qu'elle ne peut manquer de fausser peu à peu les bases mêmes de notre sens moral.

Le Dieu dont l'action est une œuvre surnaturelle inexplicable, en d'autres mots le Dieu qui, sans motifs appréciables pour nous, vient, sous nos yeux, détruire sa propre œuvre et enfreindre des lois qu'il aurait lui-même établies, ce Dieu cesse nécessairement bientôt d'être pour nous le Tout-Sage, Celui « dont les voies sont bien réglées, » l'auteur et le garant de tout ce qui constitue en nous les règles du bon sens, du jugement et de la raison. Ce n'est plus là ce grand Dieu dont la nature proclame l'ordre parfait et la sagesse infinie, Celui qui est patient dans ses moyens parce qu'il est tout-puissant dans son œuvre et éternel dans ses plans, Celui dont l'action n'est jamais abrupte, jamais inattendue, mais qui l'a toujours préparée, parce qu'il l'a connue de tout temps.

Le Dieu du surnaturel inexpliqué n'est plus le Dieu de la vie, du développement régulier, organique des êtres : c'est un magicien effrayant, dont les caprices ne sont limités par aucune impuissance et arrêtés par aucune considération, que son œuvre elle-même ne saurait enchaîner, dont l'aide ne peut être ni méritée ni même amenée par nos efforts, aux intentions et à l'action duquel il nous est impossible de nous associer, et entre lequel et notre âme il ne peut être question d'autres rapports, que de celui de l'intérêt propre de notre côté, et de celui de la simple faveur du sien.

Nous voudrions contribuer à faire cesser, ne fut-ce que pour quelques-uns de nos lecteurs, chez les uns, des doutes aussi précis, chez les autres, des hésitations, ou du moins une acceptation forcée et aveugle, qui présenteraient de tels dangers. — Pour cela, nous rappelant que c'est à des hommes religieux que nous parlons ici, nous prendrons à tâche de leur faire voir comment l'admission du miracle, et tout spécialement comment celle des miracles de Jésus-Christ, est la conséquence naturelle et nécessaire d'un fait qu'ils admettent déjà et dont ils ont tous fait l'expérience personnelle, du fait de la chute morale de l'homme.

Quant aux moyens de preuve dont nous ferons usage, le choix nous en est indiqué d'avance par la nature même des doutes que nous entreprenons de dissiper.

Ces doutes tendant, dans le fond, à ébranler chez ceux qui les partagent, l'autorité des Ecritures, nous ne saurions, du moins dès le début, chercher nos preuves uniquement dans les déclarations du saint Livre. Notre première tâche devra bien plutôt être de rechercher quels sont, parmi les faits primitifs de l'âme, les véritables sources de la certitude religieuse. — S'il nous est ainsi impossible, surtout pour les premiers pas, d'éviter entièrement un travail de définition d'idées et d'analyse psychologique, nous le limiterons cependant à ce qui nous semblera indispensable pour le but pratique que nous avons seul devant les yeux.

Ce but est d'examiner jusqu'à quel point les miracles ont droit à la qualification de faits surnaturels qui leur est attribuée dans l'usage commun, qualification sur laquelle ceux qui les nient appuient leur principal argument.

Hâtons-nous cependant de le dire, si nous ne venons point inviter nos lecteurs à nous suivre dans une laborieuse analyse d'idées abstraites, si nous désirons nous en tenir avant tout à l'observation des faits qui ont lieu soit dans le domaine des sens, soit dans celui de la vie de l'âme, nous n'avons pas non plus la prétention d'entreprendre ici la critique spéciale de chacun des récits miraculeux que renferment nos livres saints. Nous voudrions seulement examiner, en général, les droits que le miracle, considéré comme tel, possède à notre créance : ce à quoi nous aspirerions, ce serait à déterminer le caractère intrinsèque du fait miraculeux, et la place qui lui appartient sous le rapport de la crédibilité.

Un miracle est-il, dès l'abord et sans autre, un fait impossible, et son admission chose absurde et jugée, ou bien, comme tout ce à quoi l'on doit ajouter foi, a-t-il des raisons suffisantes d'avoir été, et par conséquent d'être cru ?

Telle est la question que nous désirons contribuer à éclaircir.

Nous croyons qu'il est à cette heure beaucoup d'hommes qui admettent le fait des miracles par un acte de consentement tacite, par une foi aveugle ; disons mieux, qu'il est de nos jours beaucoup d'hommes qui, tout en admettant encore les miracles, n'y croient cependant plus.

Refuserons-nous à de tels hommes le titre de croyants ? — Nous n'en aurions pas le droit ! Incapables de justifier à leur propre raison les faits miraculeux, s'ils en évitent la pensée, c'est justement parce qu'ils hésiteraient à se déclarer franchement incrédules sur un point dont ils sentent qu'il intéresse d'aussi près leur foi religieuse. Leur silence, la suspension de leur jugement est, dans le fait, un sacrifice qu'ils apportent à la réalité de leur foi. Bien loin, par conséquent, de devoir nier la présence de cette foi chez eux, il serait injuste de ne pas leur tenir compte du sacrifice qu'ils lui font sous nos yeux.

Néanmoins, cette indécision, ce silence sont un mal lorsqu'ils font souffrir ceux qui y persistent et deviennent un danger imminent dès qu'ils commencent à ne plus les gêner.

Pour nous, tout en respectant la sincérité qui est à la source du silence de ces personnes, ce que nous leur reprocherions, ce ne serait pas de ne pas assez croire, ce serait plutôt de croire trop encore.

En effet, en retenant une foi dont ils ne peuvent justifier les bases et qui, par conséquent, leur demeure inutile ou même gênante, ils sont forcément amenés à fausser bientôt cet instinct puissant de vérité qui constitue, dans chacun de nous, comme la colonne de l'âme elle-même.

Avant de pouvoir reprendre possession de cette foi, il faudrait tout d'abord qu'ils eussent eu le courage de s'en avouer la perte à eux-mêmes, et d'en laisser voir l'absence à leurs frères. — On ne possède réellement que ce qu'on a loyalement conquis. Ce qu'on retient de force ne saurait jamais être à nous, ni conférer à notre âme aucune richesse légitime.

Aussi bien n'y a-t-il qu'un seul moyen d'échapper à de certains doutes : ce moyen c'est de les traverser. Reculer, ici, c'est avoir renoncé à la lutte, c'est avoir été vaincu, et cela d'autant plus complètement qu'on hésite davantage à se l'avouer à soi-même. Forteresse escarpée et solitaire, la foi naïve, la foi de l'enfance, la foi sur une autorité étrangère, n'a plus de chemins de retour ouverts à ceux qui ont une fois déserté son enceinte.

On le voit peut-être, malgré le titre de ces pages, malgré les allures sévères auxquelles nous invite notre sujet, c'est une œuvre émue que nous entreprenons ici, c'est un cri du cœur auquel nous voudrions prêter une voix. — Nous sommes vivement frappés du malheur des temps où nous vivons ! Et qui ne le serait ! La foi simple, la foi naïve est détruite ! L'analyse, introduite par les hommes du réveil comme une arme de conquête, l'analyse est devenue un poison qui a pénétré dans les masses et qui les corrode incessamment. Déjà les formes du culte des chrétiens ne parlent plus à la foule, et personne ne s'y passionne plus pour l'Evangile de Jésus-Christ !

Tant que cet Evangile n'avait à souffrir d'attaques que de la part de ses ennemis, aucun de ceux qui le confessent n'eût pensé à douter de son triomphe. Mais voici que ce sont ses disciples eux-mêmes qui le trahissent. C'est parmi les « évangéliques » qu'il est même, à cette heure, le plus méconnu, le plus audacieusement attaqué. — Jusqu'à présent ces attaques n'ont été que le retentissement attardé de luttes qui avaient déjà divisé les esprits dans un pays voisin du nôtre, et il serait facile, si l'on voulait se borner à faire ici de l'érudition théologique, de réfuter pas à pas ce « rationalisme » emprunté. Mais il mourra en France comme il se meurt en Allemagne, et cela plus promptement encore, grâce au bon sens et à la clarté naturelle de l'esprit français. D'ailleurs une réfutation de détails, à part le fait qu'elle serait longue et fatigante, ne nous mènerait pas au but que nous voulons atteindre, qui est celui d'être de quelque utilité à la foi de nos lecteurs. La négation d'une négation, quelque concluante qu'elle ait pu être, n'a jamais produit aucune lumière, aucune vie nouvelle pour l'âme.

Il y a deux classes de douteurs. Ceux qui doutent par amour-propre ; — à ceux-là le mot de Paul, apôtrea : « Si quelqu'un aime à disputer, ce n'est pas là notre coutume, ni celle des Eglises de Dieu. »

Mais il y a aussi les vrais douteurs, les douteurs sincères. — Ce sont là peut-être les amis les plus chauds de la vérité. En tout cas, ce sont ceux chez lesquels son nom seul réveille les plus profondes émotions ; aussi bien est-ce à eux seuls, entre tous ses disciples, que la Vérité finit par se faire toucher comme au doigtb. Courageux, impétueux parfois, mais avant tout consciencieux et fidèles de cœur, ces hommes-là souffrent de leurs doutes et ne s'en parent jamais ; aussi ont-ils plus de droits à notre affectueux respect que ceux qui pensent posséder une foi inébranlable, parce qu'ils ne se sont jamais vus aux prises avec le doute.

C'est à ces douteurs-là, qui du reste comprendront l'émotion de notre parole, que nous voudrions surtout nous adresser. Voici à peu près quel pourrait être le langage de ceux que nous avons spécialement en vue :

« Je suis tenté de douter de l'Evangile, parce que j'y trouve affirmés des faits qui me paraissent surnaturels. Je ne puis croire à la réalité de faits semblables, puisque ce serait admettre, dans l'Auteur de toutes choses, deux volontés qui se contredisent et par conséquent s'excluent.

Mais ce doute me fait souffrir, aussi ne le proclamé-je pas. Il tend à détruire ce qui me faisait vivre en paix, et il ne met rien à la place. — Ce doute attaque la base où reposait ma vie religieuse elle-même, dont il gêne l'exercice et la profession. »

Si quelqu'un de nos lecteurs trouvait dans ces mots l'expression de sa pensée avouée ou secrète, nous souhaitons vivement que les pages qui vont suivre puissent lui être de quelque utilité.

◊I. Primauté de la conscience◊

Appréciation de la position prise par ceux auxquels nous nous adressons, laquelle se résume dans cette thèse : qu'en fait de foi religieuse individuelle, la source de toute certitude doit être cherchée dans la conscience de chacun.

Afin de ne pas courir le risque de vouloir prouver des vérités déjà admises par les personnes pour lesquelles nous écrivons, il est nécessaire que nous voyions tout d'abord ce qui, en fait de convictions religieuses, ressort de leur confession telle que nous venons de la formuler.

Ce point une fois acquis, nous examinerons encore s'il nous est loisible de les suivre sur le terrain sur lequel elles se sont placées, ou si c'est bien plutôt dans le fait de leur point de vue spécial que l'on doit voir la cause des doutes qui les assiègent.

La première chose à constater, à l'égard des hommes qui tiennent un pareil langage, c'est que ces hommes-là croient en Dieu. — Et cette foi n'est pas chez eux la simple admission passive d'un Etre supérieur ou suprême. Non ! C'est bien la foi, une foi précise, inébranlable en un Dieu vivant et tout-puissant, c'est-à-dire libre, présent partout, et d'une sainteté et d'une perfection absolues. Ce qui prouve la présence, chez ces hommes, d'une foi semblable, c'est la nature même de l'objection que soulève dans leur esprit le fait surnaturel. Cette objection témoigne d'une foi en Dieu telle que nous l'avons décrite.

De plus, ces hommes croient au fait du péché, à leur propre état de péché. — Et cette conviction n'est pas non plus chez eux la simple admission passive d'une imperfection, d'une faiblesse qui soit après tout excusable et sans importance absolue. Nullement ! Le fait qu'ils tiennent encore à l'Evangile, puisqu'ils cherchent à dissimuler, à oublier les doutes qui tendraient à en obscurcir la lumière à leurs yeux ; le fait que ces doutes sont pour eux une cause de souffrance, une occasion de secrets reproches, qu'ils ne se les avouent pas volontiers à eux-mêmes ; ce fait seul prouve l'existence, chez ces hommes, d'un attachement profond à l'Evangile.

Or cet attachement ne saurait provenir ni des conclusions de leur intelligence, puisque ce sont justement ces conclusions qui tendraient plutôt à leur faire rejeter cet Evangile, ni d'un simple respect humain pour une autorité qu'ils voient reconnue par ceux qui les entourent, la présence de ce dernier mobile n'étant pas admissible chez des hommes dont les doutes eux-mêmes montrent autant d'indépendance dans la pensée. Cet attachement ne saurait donc être, chez eux, que le résultat d'une expérience positive qu'ils ont faite à l'égard de l'Evangile, expérience dont l'impression domine encore les conclusions négatives de leur esprit. Cette expérience consiste en ceci : qu'ils ont senti que l'Evangile est pour eux la parole du salut. Or, s'ils tiennent à là parole du salut, c'est qu'ils tiennent au salut ; c'est donc qu'ils en sentent la nécessité pour eux-mêmes.

Ces hommes admettent par conséquent, dans le fond, la chute morale de l'homme. En effet, ils éprouvent vivement, sans peut-être pouvoir se rendre un compte exact de ces faits, que l'homme n'est pas, dans là direction de sa volonté, dans son amour, ce qu'il devrait être, ce que Dieu avait voulu qu'il fût.

Ainsi donc : la foi en un Dieu personnel, au Dieu vivant, libre, tout-puissant et tout-sage, au Saint des saints ; la conviction d'un état de péché de l'homme, état qui nécessite pour l'homme un salut ; enfin, comme résultat de ces deux premières pensées, un attachement profond à l'Evangile, attachement qui découle de l'expérience de sa vérité salutaire, — telles sont les convictions dont nous devons admettre l'existence chez ceux que nous avons désignés plus haut ; telles sont aussi les propositions sur lesquelles, dans ce qui va suivre, nous aurons le droit de baser notre étude.

Cependant nous devons encore apprécier le point de vue spécial de ceux dont il est ici question, afin de voir s'il nous est loisible de les suivre sur le terrain où ils se sont placés.

La position morale des hommes auxquels nous nous adressons, implique l'admission chez eux de deux principes d'autorité : la conscience ou le sens moral intime, et l'Evangile. En effet, c'est du conflit de ces deux autorités que naît le malaise dont ils souffrent. — De plus, chez ces personnes, l'autorité de la conscience prime celle de l'Evangile, puisque ce sont des motifs de conscience qui viennent ébranler leur foi à l'Evangile.

Pouvons-nous les suivre sur ce terrain ? Sommes-nous en droit d'admettre qu'il y ait, en chaque homme, une autorité qui soit supérieure à celle de l'Evangile ? — qu'il existe en chacun de nous un tribunal sans appel, à la barre duquel nous soyons appelés à faire comparaître l'Evangile lui-même ?

Cette question n'est point oiseuse, surtout dans le moment actuel, et nous devons nous y arrêter quelques instants.

Il est des hommes, et ils sont nombreux et respectés, qui repousseraient comme un blasphème la seule pensée que l'on pût admettre l'existence d'une autorité supérieure à l'Evangile.

Ce n'est pas pour ces hommes-là que nous écrivons ; ce ne sont pas non plus de tels hommes qui peuvent être utiles à ceux auxquels nous nous adressons ici. — Forts de la clarté de leurs convictions, ayant tout à fait perdu de vue les degrés successifs par lesquels ils ont dû passer pour y arriver, confondant le sentiment d'une longue habitude, ou même celui d'opinions reçues dès l'enfance, avec la voix de Dieu lui-même, ces croyants inébranlables sont trop étrangers aux doutes de leurs frères pour pouvoir les comprendre et les discuter. Bien qu'il puisse nous arriver de sentir notre foi se rallumer à la leur, nous craindrions cependant de leur dévoiler des hésitations que nous sentons qui les trouveraient sans merci. — Ce sont là les hommes qui mettent l'Ecriture avant et par-dessus leur conscience, c'est-à-dire par-dessus leur sentiment immédiat de la vérité. Laissons-les proclamer leurs éclatantes convictions, mais ne leur demandons jamais de nous les prouver.

Néanmoins, si nous n'hésitons pas à prononcer bienheureux ceux qui n'ont pas besoin, disons mieux, qui n'ont plus besoin qu'on leur prouve la divine autorité de l'Evangile, nous ne saurions pourtant oublier qu'à côté de ces croyants-là il en est encore d'autres. Est-il permis, vis-à-vis de ces derniers, de chercher dans la conscience les preuves de la Parole sainte, ou bien doit-on, comme le veulent les premiers, se contenter d'en répéter devant eux les déclarations, en se reposant sur ce fait, « que là Parole de Dieu porte son évidence en elle-même ? »

Mais, si ce dernier fait est vrai, si les déclarations de la Parole de Dieu produisent en réalité chez plusieurs l'obéissance immédiate de la volonté, c'est sans doute que ces déclarations ont commencé par convaincre l'âme et par désarmer la négation dé la pensée. Personne n'admettra que, lorsque Dieu se présente à l'âme de l'homme, sa victoire consiste à la soumettre de vive force, à imposer silence à ses scrupules sans même les avoir entendus. Si la conviction qu'il produit est invincible, ce n'est certainement que parce qu'elle aura été complète. Or, comment Dieu s'y est-il pris pour la rendre telle ? En discutant avec l'esprit ? Non ! mais en parlant directement à la conscience.

Un seul regard jeté sur la méthode des Ecritures, et en particulier sur celle de Jésus-Christ et des apôtres, suffit pour nous montrer que, loin de négliger l'autorité de la conscience, c'est à elle-même qu'ils font appel. Jamais ils ne mettent en avant une vérité nouvelle sans y faire voir le résultat nécessaire de vérités déjà reçuesc, et, dans le cas où ce qu'ils annoncent est un fait nouveau, ils ne donnent leur témoignage qu'en l'appuyant de tout ce qui doit en justifier la véracité au sentiment moral de leurs auditeursd, et ont soin de ne le produire que devant ceux dont ils ont lieu dé croire qu'ils sont préparés à le recevoir.

C'est ainsi que Christ et ses apôtres s'en réfèrent aux Ecritures et aux miracles, lorsqu'ils parlent aux Juifs, le peuple des prophètes et des miracles, et qu'ils omettent ces preuves-là lorsqu'ils ont à faire à des païense. C'est ainsi que Christ lui-même, pour ne parler que de l'Auteur de l'Evangile, modifie sa parole à chaque fois d'après le degré de réceptivité de ses auditeurs, et qu'il fait usage d'autres arguments soit à l'égard de Nicodème, soit lorsqu'il s'adresse à la femme samaritaine ou au jeune homme riche, tandis que nous le voyons s'éloigner de ses concitoyens de Nazareth « à cause de leur manque de foi, » et taire à ses disciples « ce qu'ils n'étaient pas encore à même de comprendre. » C'est ainsi que, lorsque l'autorité reçue par ses auditeurs, lorsque l'Ancien Testament ne suffit pas à prouver ce qu'il avance, il fait un appel direct à la conscience de ceux auxquels il parle en s'adressant à leur loyauté et à leur sincéritéf.

Mais qu'entendons-nous ici par cet appel à la conscience ?

En disant que Jésus et les apôtres, en disant que Dieu lui-même s'adresse, pour avoir accès dans l'âme, à la conscience, nous excluons avant tout cette pensée qu'il fait appel à l'idée abstraite ; nous constatons tout d'abord que la voix de Dieu frappe chez nous, non pas à la porte du raisonnement logique de l'intelligence, mais à celle de la volonté, et cela par une impression immédiate et instinctive.

Cependant, si nous posons en fait que la connaissance religieuse pénètre en nous par voie d'expérience intime, ce n'est pas que nous entendions nier que cette connaissance nous parvienne par l'intermédiaire de l'Evangile. Même en admettant toutefois que la parole de l'Evangile soit la source prochaine de la vérité religieuse, il n'en reste pas moins la question de savoir si cette parole s'adresse chez nous, en dernière analyse, à l'intelligence ou à la conscience, si l'Evangile touche notre âme par voie de conviction ou bien par voie de persuasion ; de savoir si ce à quoi il vise, c'est à produire tout d'abord en nous une pure impression morale, ou bien avant tout à dissiper, par une lumière nouvelle, les obscurités de notre esprit.

Mais nous pouvons éviter d'entrer dans cette question spéciale, en nous adressant d'emblée à une autre question que celle-là présuppose. C'est celle qui tend à déterminer quelle est, en thèse générale et d'après la constitution elle-même de notre être spirituel, la première source de toute connaissance religieuse pour notre âme. En d'autres termes c'est la question de l'autorité, ou, pour mieux dire, de la certitude en matière de foi religieuse.