Famille, éduque-moi ! - Véronique Scherèdre - E-Book

Famille, éduque-moi ! E-Book

Véronique Scherèdre

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Beschreibung

Qu’arrive-t-il à notre époque pour qu’elle manifeste un tel mépris envers le savoir et qu’elle manque de respect à ceux qui en sont les représentants dans divers domaines ? Par conséquent, comment en est-elle arrivée à confier les rôles de direction, c’est-à-dire les pouvoirs décisionnaires, à des professionnels qui ne possèdent pas les compétences nécessaires ? Cette situation est observable dans de nombreux secteurs de la vie économico-politique mais elle est particulièrement préoccupante dans un domaine qui détermine l’avenir de la jeunesse et de toute notre société : l’école.


À PROPOS DE L'AUTRICE

Après "La fin de vie d’Emmanuel Kant et Napoléon" ou "L’âme du monde", Véronique Scherèdre, docteure en philosophie et enseignante dans le supérieur, signe ici, un troisième essai. "Famille, éduque-moi" ! nous invite à repenser les notions d’éducation et d’instruction.

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Véronique Scherèdre

Famille, éduque-moi !

Essai

© Lys Bleu Éditions – Véronique Scherèdre

ISBN : 979-10-422-0318-4

Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L. 122-5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L. 122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L. 335-2 et suivante du Code de la propriété intellectuelle.

Introduction

En 2013, l’essai Au réveil, citoyens ! sort en librairies (aux Éditions Amalthée). Son auteur, Véra Lorenzi, y dresse le décor de notre société actuelle, qui pleure l’agonie de ses Institutions. Qu’il s’agisse de la médecine, de la justice, de l’Église, la famille ou l’école, chacune est passée au crible, dans une intention salvatrice et reconstructrice, puisque sur chacune pèse la menace de son extinction progressive. Si, prenant enfin la mesure de l’urgence, l’on envisage d’agir, c’est par l’école qu’il faudra commencer, en tant qu’elle intervient en amont, ce qui d’une part, la place en première ligne et, d’autre part, lui donne carte blanche pour formater l’ensemble de la population. Or, force est de constater que, parallèlement à sa récente technologisation spectaculaire (que de moyens matériels déployés, en l’espace d’une génération, que de logistiques mises en place !) sa modernisation ne parvient pas à cacher la régression alarmante, aussi bien des niveaux que des savoirs et des savoir-faire, de celles et ceux qui ont pratiqué ses bancs, depuis la fin des années quatre-vingt, et plus particulièrement, depuis le début des années deux mille. Il suffit pour s’en convaincre d’être attentif aux discours, tant oraux qu’écrits, des journalistes, des enseignants, des juristes, des médecins, et des personnels d’administration, comme de direction, dont l’âge n’excède pas quarante-cinq ans. Quasiment tous sont truffés de fautes de syntaxe, de grammaire et d’orthographe. À quasiment tous, fait défaut la maîtrise des nuances et des subtilités de la langue française. Cela signifie que, s’il fut un temps où la secrétaire, le cas échéant, corrigeait la lettre que son patron lui avait remise, avant de la taper, ce temps est définitivement révolu, car ladite secrétaire, qui est pourtant titulaire d’un BTS en secrétariat, a obtenu ses diplômes (du brevet des collèges à son BTS, en passant par le bac), nonobstant ses nombreuses lacunes linguistiques (et culturelles, de manière générale). Aujourd’hui, dans presque la totalité des cas, ni le dirigeant ni son employé(e) bureautique ne sont capables de s’exprimer correctement, y compris dans les établissements « scolaires, » ce qui est le plus inadmissible. Or, nous savons depuis Boileau que « Ce que l’on conçoit bien s’énonce clairement, et les mots pour le dire arrivent aisément ». L’échec du dire dénonce nécessairement celui du penser. Ainsi, l’étendue et la qualité de l’aptitude à réfléchir de tous ces acteurs de la vie socio-économico-politique, acteurs dont l’influence n’est parfois pas des moindres, sont souvent affligeantes, car la simple appétence pour les choses de l’esprit leur fait cruellement défaut.

Or, il importe tout de même de rappeler que, il n’y a pas si longtemps (une bonne cinquantaine d’années), les élèves savaient tous lire, écrire et compter au sortir du CM². Et quand, accidentellement, l’un ou l’autre d’entre eux témoignait d’un retard sur ses camarades, il n’était pas admis en 6e et devrait redoubler. Aujourd’hui, et depuis plusieurs années, les redoublements n’ont quasiment plus cours ; de sorte que tous les élèves, qu’ils aient ou n’aient pas le niveau requis, passent chaque année dans la classe supérieure. Par voie de conséquence, les groupes sont dangereusement hétéroclites et bancals, et leurs plus mauvais éléments, ceux qui logiquement ne devraient pas se trouver où ils se trouvent et dont le nombre ne cesse d’augmenter, ne parviennent, ni à lire, ni à écrire, ni à compter convenablement en quittant le collège. Sacré déclin, puisque si l’on remonte, ne serait-ce que deux générations, le départ de l’école primaire était sanctionné par le Certificat d’études primaires, délivré aux élèves ayant entre onze et treize ans, jusqu’en 1936, puis quatorze ans, ensuite, attestant leur pleine acquisition des connaissances de base : lecture, écriture, calcul, histoire-géographie et sciences appliquées. Les parents et grands-parents de nos sexagénaires n’avaient pas fait d’études, pour la très grande majorité d’entre eux. Pourtant, ils étaient en règle avec les fondamentaux, et leur mémoire avait été stimulée par l’apprentissage « par cœur » (le cœur y était !) de poésies, de conjugaisons, de tables de multiplication, et de leçons d’histoire ; une histoire dont les dates et les noms resteraient gravés en eux jusqu’à leur mort. Ils n’étaient spécialistes de rien, mais ils disposaient d’une petite réserve de fournitures. On ne peut, hélas, plus en dire autant, aujourd’hui, de la plupart des adolescents, si ce n’est que celles et ceux qui entreront au lycée se laisseront une chance (mais, la saisiront-ils ?) d’entretenir et de multiplier leurs connaissances, afin d’atteindre un seuil acceptable de culture générale. En revanche, celles et ceux qui arrêteront là, optant pour l’apprentissage ou le basculement direct dans la vie active, n’auront en poche qu’un bien piètre niveau scolaire.

En ce XXIe siècle déjà bien entamé, l’Éducation nationale (E.N.) arbore désormais le masque d’un système totalement fourvoyé jusqu’à l’aliénation. Il lui incombe d’affronter et d’endiguer les orientations politiques qui mettent de plus en plus fortement en péril l’avenir de l’enseignement, celui des enseignants, les valeurs culturelles traditionnelles de la France, et jusqu’à son patrimoine intellectuel. Qu’est-ce à dire d’autre, sinon qu’il nous faut repartir de la question inaugurale : éducation ou instruction ?

Chapitre 1

Ex ducere, instruere

« Ex ducere », c’est faire sortir (ex) de soi, développer, épanouir, ouvrir sur ; « Instruere », c’est assembler, élever, bâtir, munir, outiller. Ces deux étymologies, à elles seules, nous désignent sans ambages, à la fois l’ordre et la destination des opérations : d’abord, l’éducation, ensuite, l’instruction. La première est parentale, et la seconde, professorale. Ainsi, la première, non seulement préexiste à la seconde, mais elle en est la condition d’existence. Du point de vue hégélien, la première incombe préalablement à la famille et la seconde, à l’État.

A) L’éducation est extériorisation. Le nouveau-né surgit et se meut dans un cocon. Qu’il soit douillet ou non, ce dernier constitue un cosmos à part, distinct, qui a ses principes, ses règles et ses spécificités. Mais l’enfant (in-fans : ne parlant pas) n’est pas censé y demeurer, car ce berceau n’a pas vocation à lui suffire. Vivre, c’est aller de l’avant, car la vie est dynamisme et circulation. Comparable au sang irriguant le corps de part en part, elle revendique son refus de la stase. Par conséquent, il va s’agir pour le tout-petit de s’extraire lentement de ce nid, de le quitter une première fois, tant physiquement (en expérimentant l’ailleurs : la crèche, l’école, le monde alentour), qu’affectivement (outre l’attention de sa mère, de son père et de toute la maisonnée, il peut solliciter celle d’une nourrice, d’un enseignant de maternelle, d’amis ou de voisins). Pour cela, la mise en branle de l’appareil éducatif est indispensable. Il est supposé stimuler la convoitise des choses du dehors (y compris, le dehors de soi-même) ; il est par ailleurs supposé prodiguer la confiance nécessaire à cette audacieuse extériorisation ; il est enfin supposé avoir transmis à l’enfant les codes du vivre-ensemble. Car, sans eux, il ne réussira pas à intégrer la collectivité, laquelle en réaction le maintiendra à distance, ne serait-ce qu’en lui réservant une différence de traitement. En d’autres termes, la présence et l’action de la famille (qu’elle soit d’origine ou de substitution) sont capitales et relèvent d’un authentique devoir vis-à-vis de l’enfant, et, dans d’égales proportions, vis à vis de la communauté humaine, dans son entièreté. Où, il apparaît avec évidence que la conception, la mise au monde et l’accompagnement ne sauraient être synonymes. Un parent (d’origine) est aussi un géniteur, aussi mais pas seulement. Son rôle ne se restreint pas à garantir l’entretien matériel de sa progéniture (le pain, les études, les loisirs, la voiture, voire l’appartement), ce qui demeure sans conteste le plus facile et le moins engageant. Car, aux antipodes, en revanche, trépigne le plus complexe et le plus exigeant, qui prend nom d’essentiel, et qui consiste dans l’éveil et le façonnement de la conscience du jeune être : sa conscience sociale, sa conscience morale, sa conscience politique, sa conscience spirituelle. Or, ce n’est pas, dès l’abord, la tâche de l’instructeur (qui, lui, prend le relais), mais bien celle de l’instance responsable de l’être-là du jeune.

B) L’instruction s’adresse à celui qui vient à sa rencontre, qui la brigue, et qui se dispose à la recevoir. Il est capable de s’acheminer jusqu’à elle, à présent qu’il sait s’éloigner de chez lui, sans crainte de ne pouvoir y retourner. Car, il a compris que sa maison était un abri, le lieu des retrouvailles familiales vespérales, après que chacun a consacré sa journée à parfaire son investissement dans le monde environnant. Par ailleurs, il marque une curiosité pour l’instruction scolaire, car il est lui-même taraudé par son ignorance, d’où le fait qu’il questionne constamment les grands, à travers une cascade de « pourquoi ? ». Désormais, en classe, tuteuré par un enseignant, il pourra satisfaire son besoin d’être orienté en direction de l’information. Enfin, il acquiesce à l’idée d’être enseigné, d’abord, dans la mesure où il aspire au connaître, ensuite, parce qu’il a été initié aux règles élémentaires de la politesse et du savoir-vivre avec autrui, lesquelles règles, pour le dire sommairement, consistent dans un savoir-rester-à-sa-place. À l’école, l’élève écoute le maître, cependant qu’à l’occasion, il demande la parole, mais il ne la prend pas anarchiquement ; il ne met pas en doute l’autorisation d’exercer de l’enseignant, ni davantage son « métier » ; il ne marchande ni ses notes ni les décisions du conseil de classe. En bref, il consent à être élevé par celui dont hisser l’intellect est la fonction propre, faute d’être en mesure de se dispenser de ses services. Les Grecs antiques tenaient l’excès pour le pire ennemi. Leurs tragédiens, Eschyle, Sophocle et Euripide, ont révélé avec brio quelle malédiction s’abattait sur celui qui outrepassait le cadre de sa condition, tel Prométhée : pour avoir pris l’initiative de voler le feu à Zeus, afin de l’offrir aux hommes, il a été enchaîné au sommet du Caucase, puis victimisé par un aigle, qui dévorait son foie, petit à petit. Platon s’est, en parallèle, fortement employé à dissuader de tomber dans l’hubris (la démesure), en démontrant que la cité est « juste » (« idéale », cf. La République), si et seulement si chacun y remplit sa tâche, et y occupe la place qui lui est assignée. Que l’esclave serve, que le guerrier combatte, et que l’homme d’État philosophe : l’équilibre et l’ordre régneront ! À noter que le « Récit de la Création », dans L’Ancien Testament, livre le même message. Car, qu’est d’autre l’Eden, sinon cette modalité d’existence sous laquelle le fil des jours est fluide et sans heurt (« paradisiaque »), aussi longtemps qu’Adam et Eve tiennent la réserve, c’est-à-dire respectent les limites qui leur ont été posées (en l’occurrence, ne pas goûter au fruit de l’arbre de la connaissance du bien et du mal). Mais, l’humain est aussi, naturellement, un être phénoménal : il est titillé par sa sensibilité, laquelle l’assujettit à l’empirique. Eve se laissera séduire, et Adam, de même. Pour autant, Dieu ne les fera pas dévorer par un rapace, mais il les condamnera au travail (tripalium : instrument de torture), la sanction ayant vertu pédagogique d’élévation : par l’effort, se corriger, se dépasser, s’ériger. Longtemps après, Hegel expliquera la puissance de l’élan dialectique processuel par lequel, sous l’effet du travail (sur la nature et sur soi), l’esclave devient maître, et le maître, esclave de celui qui s’est affranchi en servant, soit en produisant, en agissant (cf. La dialectique du maître et du valet).

L’enseignement (scolaire) est transmission d’un savoir. Il prend place dans un cadre trinitaire, pour autant qu’il met primordialement en relation trois termes : l’élève, le professeur et le programme. Cela signifie que la raison d’être du binôme élève/professeur, c’est le programme, auquel le premier vient se préparer, parce que le second le lui communique et lègue. Si chacun a préalablement satisfait aux prérequis (la docilité, pour l’élève, et l’habilitation, pour le professeur), c’est-à-dire si chacun colle à son personnage et joue bien son rôle, le cursus est suivi par l’un et mené par l’autre, raisonnablement, et le but est atteint, à savoir : la diffusion culturelle. Dans le cas contraire, si les statuts de chacun sont bafoués, voire intervertis, soit par la famille, soit par l’institution, soit par la société tout entière, la tâche scolaire ne peut pas aboutir : l’élève n’apprend pas assez, ou pas bien, voire pas du tout ; l’enseignant peine ou échoue à accomplir normalement sa mission ; l’école vacille sur un terrain délicat, face à la famille qui l’accuse d’être improductive. Et, sur cette scène objectivant l’impact mortifère de l’incohérence gouvernementale, ce qui est certain, c’est que les seuls véritablement intéressés, car les premiers concernés par cette aventure – l’élève, son professeur et le savoir – sont en souffrance.

Au demeurant, pourquoi « L’éducation nationale » s’est-elle substituée à « L’instruction publique » ? Le site du ministère de l’Éducation nationale et de la jeunesse (education.gouv.fr) se contente d’un balayage historique abusivement succinct, dans un paragraphe intitulé « De l’instruction publique à l’éducation nationale : En 1932, le gouvernement d’Édouard Herriot décide de rebaptiser l’instruction publique “éducation nationale”. L’expression date de la fin du XVIIIe siècle, où elle était employée par les partisans de la prise en main par l’État des affaires d’enseignement. Elle était réapparue dans les années 1910-1920 sous la plume des adversaires de la division du système éducatif en filières distinctes. Anatole de Monzie est le Premier ministre à porter cette nouvelle titulature. Il explique dès sa prise de fonction qu’elle est synonyme d’égalité scolaire et de développement de la gratuité et que, en somme, qui dit “éducation nationale” dit “tronc commun”. Cette titulature sera remise en cause pendant les premiers mois du gouvernement de Vichy, où l’instruction publique fait sa réapparition, mais l’appellation “éducation nationale” sera rétablie dès le 23 février 1941. Elle avait d’ailleurs été conservée à Londres, puis à Alger, par les gouvernements du général de Gaulle. Aucun changement n’intervient sous la IVe République, ni d’ailleurs sous les mandats du général de Gaulle et de Georges Pompidou. Valéry Giscard d’Estaing innove, en 1974, en privant l’éducation de son épithète de “nationale” et surtout en confiant tout ce qui relève de l’enseignement supérieur à un secrétariat d’État, puis à un ministère autonome. Initiative appelée d’ailleurs à un certain avenir puisqu’elle s’est maintenue presque sans interruption jusqu’en 1995, sous des appellations diverses (“universités” de 1974 à 1986, “enseignement supérieur” de 1986 à nos jours) et avec des statuts divers (secrétariat d’état de 1974 à 1978, de 1983 à 1986 et en 1995, dans le gouvernement d’Alain Juppé ; ministère délégué de 1986 à 1988 ; ministère de 1978 à 1981 et de 1993 à 1995) ».

Or, si ce tour d’horizon flirte avec la stérilité, c’est parce qu’il élude le problème majeur contenu dans cette transition et qui se trouve à son origine, en se contentant d’arguer de « l’égalité », de la « gratuité » et du « tronc commun », ce qui a pour effet de la réduire à un changement de terminologie sans conséquence, d’où l’absence de soupçon à son égard. Pourtant, il n’en est rien, et ce double passage de « l’instruction » à « l’éducation », puis de « publique » à « nationale » est évidemment lourd de sens (une implication qu’avait manifestement perçue le Président Giscard d’Estaing, puisqu’en retirant « nationale » à l’expression, il épargnait à la nation la fonction d’éduquer). Car, il pointe implicitement du doigt le déficit éducatif des jeunes, à l’origine de l’inefficience de l’instruction. En clair, ce que la formulation novatrice – et visionnaire – d’E. Herriot nous clame (visionnaire, car en 1932, les mères restent encore à la maison, où elles s’occupent de leurs enfants), c’est que, les élèves présentant une carence en matière d’éducation, l’école ne peut plus envisager de les instruire. Par conséquent, elle se chargera elle-même de la tâche normalement dévolue aux parents (l’éducation), parce que l’exercice de l’enseignement requiert l’assimilation d’une discipline par l’enseigné, une tâche qui s’avère être de moins en moins endossée par la famille : comment cette dernière, les décennies s’accumulant et avec elles, les perturbations sociétales, trouverait-elle le temps et l’énergie pour cela ? Le père travaille, la mère, également. En plus de leur emploi, ils ont peut-être des activités externes, assurément des contraintes. Le jeune devra apprendre l’autonomie : se rendre à l’école, puis en revenir par ses propres moyens, gérer ses devoirs, ses loisirs et ses repas tout seul. Pour l’ensemble, il obtiendra l’assurance de la bénédiction parentale, laquelle se sera auto-justifiée par une cécité bien commode. Du reste, l’affaire est sans grand risque, puisqu’au moindre coup dur, tous les regards se tourneront vers l’école, pour mettre au jour ses manquements, étant établi noir sur blanc que c’est à elle que revient, désormais, la mission d’ex ducere