Gardien Rebelle - Tina Folsom - E-Book

Gardien Rebelle E-Book

Tina Folsom

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Beschreibung

Le guerrier Gardien de la Nuit Logan Frazer est loyal envers sa race, mais lorsqu'on lui ordonne d'éliminer une médium pour qu'elle ne tombe pas entre les mains des démons et ne les aide pas à détruire l'humanité, il passe à l'action et préfère la sauver. Winter ne sait pas qu'elle possède un don de médium et que les terribles cauchemars qui l'assaillent sont en fait des visions – jusqu'à ce que des démons viennent frapper à sa porte. Heureusement, un brave guerrier immortel la sauve, et une connexion électrique instantanée se forme entre la belle médium et l'homme convaincu qu'elle a plus de valeur vivante que morte. Obligés de fuir pour sauver leur vie, Logan et Winter doivent non seulement échapper aux démons, mais aussi aux Gardiens de la Nuit déterminés à éliminer cette dernière. Une course désespérée contre la montre commence alors que Logan puise dans toutes ses ressources – y compris ses liens avec les vampires et les sorciers de Scanguards – pour sauver la femme dont il est en train de tomber amoureux. À PROPOS DE LA SÉRIE Capables de se rendre invisibles, les Gardiens de la Nuit immortels protègent depuis des siècles les humains de la puissance obscure des Démons de la Peur. Les Gardiens vivent dans des bastions invisibles pour les humains comme pour les démons, mais le danger n'est jamais loin. Seuls les Gardiens de la Nuit s'interposent entre l'humanité et les plans diaboliques des démons, qui veulent régner sur l'humanité. Tout en protégeant les humains des démons et de leur chef maléfique Zoltan, le Grand Leader, ils doivent risquer leur propre vie pour accomplir leur mission sans que les humains ne découvrent qui ils sont. Mais tout ne se passe pas comme prévu. Et même les gardiens immortels peuvent tomber amoureux. ⭐️ ⭐️ ⭐️ ⭐️ Lara Adrian, auteure de la série Midnight Breed, best-seller du New York Times : "Préparez-vous à une aventure fantastique ! Les Gardiens de la Nuit sont la seule chose qui se dresse entre l'humanité et une race démoniaque déterminée à dominer le monde. Pour une romance paranormale au rythme effréné et aux enjeux majeurs, ne manquez pas d'ajouter Tina Folsom à votre liste de lectures à ne pas manquer !" Les Gardiens de la Nuit Amant Révélé (#1) Maître Affranchi (#2) Guerrier Bouleversé (#3) Gardien Rebelle (#4) Immortel Dévoilé (#5) Protecteur Sans Égal (#6) Démon Libéré (#7) Les Vampires Scanguards La belle mortelle de Samson (#1) La provocatrice d'Amaury (#2) La partenaire de Gabriel (#3) L'enchantement d'Yvette (#4) La rédemption de Zane (#5) L'éternel amour de Quinn (#6) Les désirs d'Oliver (#7) Le choix de Thomas (#8) Discrète morsure (#8 ½) L'identité de Cain (#9) Le retour de Luther (#10) La promesse de Blake (#11) Fatidiques Retrouvailles (#11 ½) L'espoir de John (#12) La tempête de Ryder (#13) La conquête de Damian (#14) Le défi de Grayson (#15) L'amour interdit d'Isabelle (#16) La passion de Cooper (#17) Le courage de Vanessa (#18) La séduction de Patrick (#19) Autres séries : Les Vampires de Venise Hors d'Olympe Nom de Code Stargate La Quête du Temps Le club des éternels célibataires Thriller : Témoin Oculaire La série Gardiens de la Nuit a tout pour plaire : des coups de foudre, des ennemis devenus amants, de jolies rencontres , des héros alpha, des compagnons prédestinés, des gardes du corps, une bande de frères, des demoiselles en détresse, des femmes en danger, une identité cachée, l'invisibilité, des âmes sœurs, des héros torturés, un écart d'âge, un amour de la seconde chance, un amant en deuil, le retour d'entre les morts, un bébé secret, des enlèvements, des amis devenus amants, un admirateur secret, le dernier à savoir, un amour non partagé, un amour interdit, des partenaires dans la lutte contre la criminalité.

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Seitenzahl: 426

Veröffentlichungsjahr: 2025

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GARDIEN REBELLE

LES GARDIENS DE LA NUIT #4

TINA FOLSOM

TABLE DES MATIÈRES

Chapitre 1

Chapitre 2

Chapitre 3

Chapitre 4

Chapitre 5

Chapitre 6

Chapitre 7

Chapitre 8

Chapitre 9

Chapitre 10

Chapitre 11

Chapitre 12

Chapitre 13

Chapitre 14

Chapitre 15

Chapitre 16

Chapitre 17

Chapitre 18

Chapitre 19

Chapitre 20

Chapitre 21

Chapitre 22

Chapitre 23

Chapitre 24

Chapitre 25

Chapitre 26

Chapitre 27

Chapitre 28

Chapitre 29

Chapitre 30

Chapitre 31

Chapitre 32

Chapitre 33

Chapitre 34

Chapitre 35

Chapitre 36

Chapitre 37

Chapitre 38

Ordre de Lecture

Autres livres de Tina

À propos de l’auteur

RÉSUMÉ

Le guerrier Gardien de la Nuit Logan Frazer est loyal envers sa race, mais lorsqu'on lui ordonne d'éliminer une médium pour qu'elle ne tombe pas entre les mains des démons et ne les aide pas à détruire l'humanité, il passe à l'action et préfère la sauver.

Winter ne sait pas qu’elle possède un don de médium et que les terribles cauchemars qui l’assaillent sont en fait des visions – jusqu’à ce que des démons viennent frapper à sa porte. Heureusement, un brave guerrier immortel la sauve, et une connexion électrique instantanée se forme entre la belle médium et l’homme convaincu qu’elle a plus de valeur vivante que morte.

Obligés de fuir pour sauver leur vie, Logan et Winter doivent non seulement échapper aux démons, mais aussi aux Gardiens de la Nuit déterminés à éliminer cette dernière. Une course désespérée contre la montre commence alors que Logan puise dans toutes ses ressources – y compris ses liens avec les vampires et les sorciers de Scanguards – pour sauver la femme dont il est en train de tomber amoureux.

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Édité par Anne-Lise Pellat et Céline Gaudard

©2024 Tina Folsom

Scanguards® est une marque déposée

1

Zoltan tapa du poing sur l’accoudoir de son trône et se leva.

— Imbéciles ! cria-t-il.

Seule une douzaine de démons étaient rassemblés dans la salle du trône, des messagers qui apportaient des nouvelles d’en haut, du monde des humains. Deux ans s’étaient écoulés depuis qu’ils lui avaient apporté des renseignements dignes de ce nom sur les Gardiens de la Nuit, les protecteurs de l’humanité qui, jusqu’à présent, avaient déjoué toutes les tentatives de Zoltan d’étendre son pouvoir et d’atteindre son objectif de domination du monde.

La frustration s’insinuait dans toutes les cellules de son corps, mettant son sang de démon vert en ébullition. Avec elle, il sentait approcher quelque chose d’autre : une crise semblable à une migraine qui le paralyserait pendant plusieurs minutes, voire plus longtemps. Ces épisodes douloureux avaient commencé bien avant qu’il ne devienne le chef des démons, le Grand Leader. Il avait toujours réussi à les cacher à ses subordonnés. Pourtant, il l’avait échappé belle. Si ses sujets découvraient qu’il ne correspondait pas à l’image de force et de puissance qu’il donnait, il ne resterait pas longtemps le Grand Leader.

Il descendit de son trône, impatient de quitter la vaste caverne où les flammes jaillissaient à travers les crevasses des rochers, projetant des ombres inquiétantes sur les parois dentées et le plafond inégal. Sans un mot, il fit signe à son bras droit, Vintoq, de libérer l’assemblée, et se dirigea vers l’une des quatre sorties.

Une voix l’arrêta.

— Oh Grand Leader, tu n’as pas encore entendu mon rapport.

Zoltan se retourna et jeta un regard au démon qui avait osé parler. Ses yeux se posèrent sur un homme blond et corpulent. Il semblait nerveux, mais lorsque Zoltan chargea vers lui, il ne recula pas.

— Oh Grand Leader, interrompit Vintoq. Pourquoi je ne m’occuperais pas de ça pour toi ?

Bouillonnant de colère, Zoltan dirigea son regard vers son commandant en second. Si cela avait été une autre fois – ou si Vintoq s’était montré plus discret – il aurait accepté, mais il ne pouvait pas laisser ses sujets croire que Vintoq pouvait lui suggérer de faire des choses auxquelles il n’avait pas pensé lui-même.

— Je suis capable d’écouter un autre rapport inutile, rétorqua-t-il, écartant la suggestion de Vintoq d’un revers de main rageur. Et, si son rapport se révèle aussi décevant que les autres, je suis également capable de lui arracher la tête.

Vintoq s’inclina immédiatement en signe de déférence.

— Bien.

Zoltan se retourna vers le démon blond.

— Fais vite. Ma patience s’épuise.

Et la crise douloureuse attendait impatiemment dans les coulisses.

S’inclinant, le démon dit :

— Oh Grand Leader, j’apporte de bonnes nouvelles. J’ai découvert une médium.

— Une médium ?

Zoltan n’était pas le seul à faire écho à ce mot, incrédule. Un grondement de voix basses parcourut la salle du trône, amplifié par les murs de roche.

— On n’a pas entendu parler d’un rapport confirmé d’un vrai médium depuis vingt ans ! Les vrais médiums sont aussi rares qu’une aiguille dans une botte de foin.

Ou qu’un démon avec un cerveau.

Zoltan poussa un grognement de mécontentement.

— Tu me fais perdre mon temps !

Il tendit sa dague, la tirant de son fourreau.

— J’ai une preuve ! ajouta rapidement le démon en sortant une feuille de papier pliée de la poche de son manteau.

Zoltan la saisit et la déplia. Il fixa le dessin puis l’agita en l’air.

— Qu’est-ce que c’est censé être ?

— Elle dessine les choses qu’elle voit dans ses visions. Ça, dit-il en désignant le morceau de papier, c’est l’une des choses qu’elle a vues : un portail des Gardiens de la Nuit.

Zoltan reporta son regard sur le dessin et fixa les lignes et les taches griffonnées à la hâte. Cette médium n’était pas une artiste, mais elle savait transmettre l’idée essentielle. Zoltan reconnut la dague caractéristique que portaient les Gardiens de la Nuit et remarqua qu’elle était gravée dans une porte qui semblait faire partie d’un mur de pierre. S’agissait-il réellement d’un portail ? Cette personne pourrait-elle vraiment être médium ?

— Y en a-t-il d’autres comme celui-ci ?

Le démon acquiesça.

— Beaucoup d’autres. Différents portails, bâtiments, armes. Mais je souhaitais éviter d’éveiller ses soupçons, alors je n’en ai pris qu'un seul, celui que je pensais qu’elle ne remarquerait pas.

Zoltan haussa un sourcil. Un de ses subalternes possédait un cerveau et savait s’en servir ? C’était vraiment une nouveauté. Mais il ne voulut pas vanter les mérites de son sujet. Il était trop tôt pour cela.

— Comment t’appelles-tu ?

— Colton.

Zoltan fit un signe de tête au démon, puis s’adressa aux messagers rassemblés.

— Colton va choisir trois d’entre vous qui suivront son exemple et vérifieront que cette médium est bien réelle. Si c’est le cas, nous devons l’amener de notre côté. Elle a une valeur inestimable. Une vraie médium peut nous fournir des informations et des renseignements sur les Gardiens de la Nuit qui nous permettront de les détruire. C’est notre clé pour gagner la guerre.

Les démons acquiescèrent consciencieusement.

Un souvenir de ce qui s’était passé deux décennies plus tôt, lorsqu’il avait eu affaire à une médium pour la dernière fois, resurgit soudainement.

Il l’avait amenée de leur côté. Elle avait succombé. Mais ensuite, les Gardiens de la Nuit avaient débarqué et l’avaient tuée. Les tripes de Zoltan se nouèrent, tandis que ses tempes commençaient à palpiter sous l’effet des premières vagues de sa migraine.

— Je vous préviens tous. Si elle vous glisse entre les doigts, votre sang repeindra cette grotte en vert. J’espère que nous nous comprenons.

— Oui, ô Grand Leader, répondirent-ils à l’unisson ; que ce soit par loyauté ou par peur, Zoltan s’en moquait.

Tant qu’ils lui obéissaient et exécutaient fidèlement ses ordres.

D’un hochement de tête, Zoltan passa devant ses sujets et se précipita dans le couloir qui menait à ses quartiers privés, ses tempes palpitant sous l’effet de l’horrible douleur. Cette crise était pire que les précédentes. Il avait tout essayé pour les faire cesser, même des médicaments humains, mais les crises persistaient et la douleur ne diminuait pas. C’était comme s’il était maudit. Il n’avait plus qu’à espérer qu’il parviendrait à se réfugier dans l’intimité de ses appartements avant de s’effondrer.

2

Winter Collins tendit le jeu de tarot à sa cliente. Une femme qui s’était présentée sous le nom de Jessica était entrée dans la petite boutique en fin de journée au moment où Winter s’apprêtait à fermer. Comme cela avait été un jour calme et qu’elle avait gagné très peu d’argent, elle avait décidé d’inviter la femme à entrer.

— Mélangez les cartes, s’il vous plaît, lui indiqua-t-elle.

Tandis que Jessica suivait ses instructions, Winter remarqua qu’elle jetait des coups d’œil dans la pièce. La plupart des clients faisaient de même, comme si le décor pouvait les aider à savoir si elle pouvait vraiment prédire l’avenir. Elle ne le pouvait pas. Mais elle savait parfaitement juger le caractère des gens et lire en eux. De plus, elle savait ce qu’ils souhaitaient entendre. Pour cette raison, elle avait fait de la lecture de l’avenir sa profession.

Les cristaux qui ornaient chaque surface de sa petite boutique, l’encens qui brûlait et infusait l’air d’un parfum mystique, ainsi que les photos d’artefacts occultes et de symboles surnaturels accrochées aux murs servaient simplement d’accessoires. Tout comme sa tenue d’inspiration gitane, qui n’était qu'un déguisement. Pourtant, Winter ne se sentait pas mal à l’aise avec ce qu’elle faisait. Dans le monde d’aujourd’hui, les gens avaient besoin d’espoir. Et si elle leur en donnait en disant à ses clients qu’ils obtiendraient le travail qu’ils voulaient, qu’ils rencontreraient l’amour de leur vie et qu’ils surmonteraient leurs problèmes actuels, quels qu’ils soient ? Elle ne faisait de mal à personne. D’ailleurs, beaucoup de ses clients venaient la voir parce qu’ils avaient reçu un cadeau d’un ami – surtout depuis qu’elle proposait des cartes-cadeaux en ligne – et d’autres parce qu’ils n’avaient personne à qui parler. De la même façon que les gens allaient voir leur médecin de famille pour lui parler de leurs problèmes, ils venaient la voir pour qu’elle leur apporte une lueur d’espoir afin d’égayer leur vie terne.

— Et maintenant ?

Jessica interrompit ses pensées.

— Coupez, ordonna Winter, en parlant lentement et à voix basse.

Elle avait appris qu’en parlant à voix basse, les clients se rapprochaient instinctivement. Cela créait une atmosphère d’intimité, comme si de grands secrets étaient sur le point d’être révélés.

Lorsque Jessica déposa le jeu sur la nappe de velours violet qui recouvrait la petite table ronde, Winter prit le jeu et ferma les yeux un instant, en fredonnant quelques notes. Puis elle disposa dix cartes en forme de croix celtique et les plaça face cachée sur la table en faisant tinter ses bracelets.

Ce n’était pas parce qu’elle ne croyait pas aux lectures de tarot qu’elle ignorait les règles rudimentaires de son métier. Elle connaissait la signification de toutes les cartes du jeu, qu’elles soient affichées à l’endroit ou à l’envers, ne voulant pas se faire prendre par un client qui pourrait en savoir assez pour la dénoncer comme l’imposteur qu’elle était.

— Quelle est votre question, Jessica ? demanda Winter à sa cliente.

— Ma question ?

Une expression de confusion s’afficha sur le visage de Jessica. C’était sa première lecture.

— Oui, la raison pour laquelle vous êtes venue ici aujourd’hui.

Parce qu’il y avait toujours une raison. Peut-être que l’homme dont elle était amoureuse ne lui déclarait pas son amour aussi rapidement qu’elle l’espérait, ou peut-être qu’elle avait postulé pour un emploi et qu’elle attendait toujours une réponse pour un entretien. Mais bizarrement, Winter n’arrivait pas à mettre le doigt sur ce qui préoccupait Jessica. D’habitude, elle devinait assez vite les désirs de ses clients. Un regard amoureux, une crispation anxieuse, tant d’indices trahissaient l’état intérieur d’une personne.

— Euh, oui, je, euh, voulais savoir si mon petit ami me trompe, finit-elle par dire.

— Humm.

Winter hocha la tête. Elle n’aurait pas deviné que c’était ce qui préoccupait la femme. Jessica ne semblait pas s’inquiéter d’un petit ami infidèle. Winter haussa mentalement les épaules. Peut-être qu’elle était simplement fatiguée et qu’elle n’était donc pas à l’écoute de l’état émotionnel de cette femme.

— Bon, alors, voyons voir, dit-elle en retournant la première carte de la croix celtique.

C’était la carte de la Lune, une carte qui suggérait que des événements inhabituels et surnaturels pourraient se produire. Mais c’était aussi un signe de folie. Ce n’était pas quelque chose qu’elle voulait dire à sa cliente. Elle commença donc par un commentaire vague.

— Des événements inhabituels vous ont amenée ici.

Les yeux de la femme s’élargirent sous l’effet de la surprise.

Winter réprima un soupir de soulagement. Même une horloge cassée donne l’heure juste deux fois par jour. Elle retourna la deuxième carte et suivit son intuition en interprétant la carte de la grande prêtresse, disant à sa cliente qu’elle détenait une force intérieure lui permettant de surmonter n’importe quelle tempête. Elle fonctionnait maintenant sur pilote automatique. Une fois qu’un client adhérait à quelques hypothèses correctes, il gobait tout ce que Winter lui proposait.

Au moment où Winter avait retourné la dernière carte, elle avait dit à Jessica que son petit ami lui disait la vérité, mais qu’elle devait assumer sa responsabilité pour son propre bonheur et ne pas compter sur quelqu’un d’autre. C’était toujours un bon conseil, peu importe les circonstances.

— Merci, merci beaucoup, s’exclama Jessica en fouillant dans son sac à main.

Winter ramassa les cartes sur la table et les remit dans la pile, les mettant soigneusement de côté, prêtes pour le lendemain, tandis que Jessica lui remettait de l’argent liquide.

— Le montant est-il correct ?

Winter jeta un coup d’œil aux billets de banque et acquiesça.

— Je vous remercie. Revenez quand vous le voulez.

Une fois la porte refermée derrière Jessica, Winter la vérouilla et tourna la pancarte de la porte sur le côté qui indiquait : « Désolé, nous sommes fermés ». Puis elle baissa le store de la porte vitrée et se retourna.

Elle n’alla pas plus loin. Une douleur aveuglante lui traversa le front, faisant vaciller ses genoux. Elle tendit la main vers la chose la plus proche pour se stabiliser – le rebord de la fenêtre – et s’y agrippa pour se soutenir.

— Merde ! jura-t-elle.

Ce n’était pas la première fois que cela lui arrivait. Et d’une certaine façon, elle savait que ce ne serait pas non plus la dernière. Et la douleur n’était même pas le pire. Ce n’était qu’un précurseur de la terrible agression mentale qui allait suivre. C’était un peu comme un cauchemar – un cauchemar éveillé.

Elle s’accrocha au rebord de la fenêtre, fermant les yeux, espérant contre toute attente qu’elle pourrait bloquer les images affreuses qui s’abattaient sur elle comme une pluie incessante.

Le vert poison apparut en premier. Deux points de cette couleur qui l’aveuglaient presque avant que les points ne se retirent et qu’un visage ne devienne visible. Le visage d’un homme. Un homme en colère. Un homme violent. Un être non humain. Elle le savait, car aucun humain n’avait de tels yeux. Des yeux vert poison qui semblaient cracher le mal à l’état pur. Et ces yeux maléfiques la fixaient.

Au fur et à mesure que son champ de vision s’élargissait, elle pouvait en distinguer davantage. L’homme terrifiant était debout, avec de larges épaules et un torse musclé, vêtu de ce qui ressemblait à un treillis militaire. Un combattant de la guérilla ? Elle chercha une ceinture de munitions en bandoulière sur le haut du corps de la créature, mais elle n’en portait pas. Pas de pistolet ou de fusil non plus. À la place, dans sa main, il tenait un poignard. Un poignard qui se dirigeait maintenant vers elle.

Elle essaya de crier, mais aucun son ne sortit de sa gorge, juste un gargouillis impuissant. La peur la paralysa. C’était ainsi qu’elle allait mourir. Elle l’avait déjà vu auparavant. Elle avait vu trop souvent comment le couteau s’enfonçait dans son cœur et lui volait sa vie.

Elle se prépara à l’inévitable, elle se prépara à la douleur, parce que la mort, c’était douloureux, et ça prenait du temps, contrairement aux croyances populaires. Mais l’homme aux yeux verts s’arrêta en plein mouvement. Il lui fallut presque une seconde pour que son cerveau réalise ce qui se passait. Une épée trancha le cou de la créature, séparant la tête du corps.

Tandis que la tête tombait au sol, roulant quelque part à l’abri des regards, un liquide vert jaillit de la blessure. Du sang ? Du sang vert ! Elle n’eut pas le temps de bouger, de s’écarter, qu’elle en fut immédiatement aspergée. Une partie lui éclaboussa les yeux, brouillant sa vision. Elle arrivait à distinguer un homme derrière le monstre qui tombait, mais ne pouvait pas vraiment le voir à travers l’horrible sang vert.

Avant qu’elle ne puisse remercier son sauveteur, elle vit d’autres points vert poison apparaître au loin. D’autres monstres aux yeux verts ?

Affolée, Winter tendit le bras vers eux, les désignant du doigt, tout en essayant vainement de former des mots, réalisant seulement maintenant qu’elle était enchaînée à un mur. L’homme qui avait tué la créature se retourna vers les attaquants aux yeux verts qui s’approchaient. Elle s’essuya les yeux avec la main, réussissant à retrouver une partie de sa vision.

Ils se trouvaient dans une grotte où des flammes léchaient les parois rocheuses. Tout à coup, une odeur d’œufs pourris l’assaillit. Des grognements et des jurons parvinrent à ses oreilles. Et d’autres lumières vertes empoisonnées s’allumèrent. D’autres monstres. Trop nombreux.

Elle cria de désespoir.

C’était l’enfer. Il n’y avait pas d’échappatoire possible.

C’était sa fin.

Winter s’effondra. Et aussi rapidement que le cauchemar n’avait commencé, il s’arrêta. Elle se força à ouvrir les yeux et regarda autour d’elle. Elle toucha son torse, ses cuisses, son visage. Pas de sang, pas de taches vertes sur ses vêtements, pas de blessures. Aucun monstre dans sa petite boutique.

Elle était seule. Pour l’instant.

Elle réussit à se lever, d’abord en tremblant, puis chaque pas lui donna plus de force. Respirant bruyamment, elle se dirigea vers l’autre bout du magasin, où une porte avec un panneau indiquant « Privé » menait à son appartement. Elle l’ouvrit et traversa un petit couloir jusqu’à la grande cuisine.

Sur le comptoir à côté de la machine à café se trouvait un plateau avec plusieurs piluliers en plastique orange contenant des médicaments sur ordonnance. Elle détestait les prendre, mais lorsqu’elle s’en passait trop longtemps, les cauchemars diurnes survenaient plus fréquemment. Au moins, les pilules émoussaient ses sens et la calmaient quelque peu. En ce moment, elle en avait besoin, car elle tremblait.

Les choses qu’elle voyait étaient devenues plus vivantes au cours des derniers mois. Plus réelles, même si elle savait que rien de tout cela ne pouvait être réel. Des monstres comme ça ne pouvaient pas exister. Des yeux verts comme le poison, du sang vert ? Même Hollywood n’aurait pas pu inventer des créatures aussi ridicules, des monstres qui semblaient parfaitement humains à part ces deux caractéristiques. Pourtant, chaque fois qu’elle les voyait, chaque fois qu’elle voyait ces yeux vert poison, elle éprouvait la terreur la plus intense de sa vie. Parce qu’elle savait qu’ils venaient pour elle.

Elle sentait qu’ils l’appelaient. Elle entendait leurs voix dans sa tête. Et à chaque fois qu’elle les entendait, elle sentait son sang se transformer en glace, car elle ressentait physiquement le mal. Chaque cellule de son corps se révoltait. Elle savait qu’elle ne pouvait pas succomber à leurs attaques. Elle ne pouvait pas céder à leurs appels. Sinon, elle finirait comme sa grand-mère. Elle passerait le reste de ses jours dans un hôpital psychiatrique, griffant les murs, prétendant entendre des voix dans sa tête et voir des choses qui n’étaient pas réelles.

Les larmes montèrent aux yeux de Winter lorsqu’elle se remémora ses dernières visites à sa grand-mère. Les infirmières l’avaient attachée à son lit avec des lanières en cuir, de peur qu’elle ne se blesse ou qu’elle blesse les autres. Elle avait un regard fou et les choses qu’elle disait n’avaient aucun sens. Deux jours plus tard, elle avait disparu. Elle était morte.

Winter avala deux des pilules et ferma les yeux. Comme elle était déterminée à ne pas finir comme sa grand-mère, elle était allée voir un psychiatre peu après son premier cauchemar diurne, dans l’espoir qu’il puisse arrêter la progression de la maladie dont elle avait hérité. Il lui avait diagnostiqué un syndrome de stress post-traumatique causé par le traumatisme de la perte de sa grand-mère, le dernier membre de sa famille, même si cet événement s’était produit vingt ans plus tôt. Il lui avait prescrit des antipsychotiques et lui avait suggéré de dessiner les images qui l’agressaient pour faire face aux hallucinations et les rendre moins effrayantes. Il lui avait promis que cela l’aiderait à faire face aux épisodes, comme il les appelait.

Mais elle savait qu’il avait tort. Au fond d’elle-même, elle le savait, elle était certaine qu’elle devenait folle, qu’elle succombait à la même maladie mentale qui avait emporté sa grand-mère.

Et ni l’art-thérapie, ni la psychothérapie, ni les pilules ne pourraient la guérir.

3

Logan entendit les gloussements des enfants en s’approchant de la grande salle. La vie dans le bastion des Gardiens de la Nuit avait radicalement changé depuis deux ans et demi, lorsque Leila, la compagne d’Aiden, avait donné naissance à des jumeaux.

Au début, tout le monde avait pensé qu’Aiden se retirerait de ses fonctions de guerrier et que le couple quitterait le bastion pour s’installer dans sa propre résidence sécurisée. Mais Aiden et Leila avaient surpris tout le monde en restant. Ils voulaient que leurs enfants grandissent parmi les guerriers de leur race en leur apprenant dès le plus jeune âge ce que cela signifiait d’être un protecteur de l’humanité.

De plus, l’union faisait la force. Le bastion comptait encore parmi les endroits les plus sûrs pour tout Gardien de la Nuit. En particulier pour les enfants, qui étaient plus vulnérables que leurs parents immortels et devaient bénéficier d’une protection pour assurer la pérennité de leur race. Le danger planait, puisque les démons se terraient partout. Au cours des deux dernières années, les démons avaient tué un certain nombre de Gardiens de la Nuit, mais heureusement, ils n’avaient pas réussi à trouver et détruire un autre bastion comme ils l’avaient fait avec celui d’Écosse quelques années auparavant. Les responsables du lieu – le Conseil des Neuf – l’avaient déménagé dans un endroit plus sécurisé.

Logan hésita devant la porte menant à la cuisine et à la grande salle. Il n’avait rien contre les enfants, mais il trouvait les jumeaux difficiles à gérer. La paix et la tranquillité que le bastion leur avait offert, à lui et ses frères, avant leur arrivée, lui manquaient. Mais il ne l’aurait jamais dit à Aiden, sachant que pour son vieil ami, la naissance de ses jumeaux signifiait bien plus que devenir père. Elle signifiait qu’il se remettait enfin de la mort de sa propre jumelle, Julia.

Logan ouvrit la porte et fit un pas dans la pièce. L’odeur de la nourriture flotta vers lui, tandis que des rires lui indiquaient où se trouvaient les jumeaux. À sa grande surprise, ils ne couraient pas dans la vaste pièce, leurs parents aux trousses. Leila et Aiden étaient assis autour de l’îlot central, en train de prendre tranquillement leur petit déjeuner. La principale raison de cette scène assez civilisée était la présence d’un visiteur, Barclay, le grand-père des enfants, connu de tous les autres sous le nom de Primus, le chef du Conseil des Neuf.

— Bonjour, dit Logan.

— Salut, Logan, répondit Aiden.

— Il y a une omelette dans le four, si tu en veux, déclara Leila.

— Merci, Leila.

Puis il regarda Barclay qui était en train de se lever du canapé où les jumeaux s’étaient servi de lui comme d’un trampoline.

— Primus, on dirait que tu ne peux pas rester à l’écart, hein ? Ces deux monstres ne t’ont-ils pas rendu visite il y a à peine trois jours ?

Barclay prit un enfant sous chacun de ses bras et se dirigea vers Logan.

— Même si je les aime ces deux-là, je ne suis pas venu pour les voir. Même si je dois admettre que je savoure chaque occasion qui se présente de passer du temps avec eux.

— Ils t’adorent, interrompit Aiden. Leila et moi, nous ne verrions pas d’inconvénient à ce que tu les emmènes avec toi pour quelques jours.

Il fit un clin d’œil à sa femme, qui sourit en signe d’assentiment.

Barclay poussa un petit rire.

— Bien essayé, mais je ne suis plus un jeune homme. Je manque d’énergie pour courir après Xander et Julia toute la journée. Ta mère aussi. Alors, merci pour la proposition, mais non merci.

Aiden échangea un regard avec Leila et haussa les épaules.

— J’aurais essayé.

Barclay fit retomber les deux enfants sur leurs pieds. Xander se précipita immédiatement vers Logan. Ce dernier le souleva dans ses bras et lui ébouriffa sa crinière noire. Il n’avait jamais vu un gamin avec des cheveux aussi épais, à l’exception de la sœur du garçon, qui arborait elle aussi une crinière très dense, mais légèrement plus longue.

— Hé, mon pote.

Puis il reporta son regard sur Barclay.

— Alors, qu’est-ce qui t’amène chez nous ?

— J’ai une mission à vous confier, à Manus et toi. Une mission très délicate.

Logan haussa un sourcil. Dans la plupart des cas, les missions étaient transmises électroniquement au centre de commandement, puis remises au guerrier qui était soit le plus apte à accomplir la tâche spécifique, soit, comme c’était souvent le cas, dont la charge de travail était la moins lourde.

— On va au centre de commandement ? suggéra Barclay.

Logan acquiesça et remit Xander à sa mère.

Tandis qu’ils marchaient dans les couloirs du vaste bâtiment, Barclay restait silencieux. Logan n’était pas du genre à presser son supérieur pour obtenir des informations, surtout lorsque ce supérieur semblait manifestement réticent à parler. Il marcha donc lui aussi en silence.

Il n’y avait que deux personnes dans le centre de commandement. Pearce était assis devant la console informatique, où il surveillait plusieurs grands écrans. L’un d’eux affichait des données qui défilaient rapidement sur la surface noire, à la manière de gouttes de pluie. Un autre montrait des images provenant de plusieurs caméras, tandis qu’un troisième présentait diverses fenêtres ouvertes sur des courriels et d’autres applications de messagerie.

Manus était assis à un bureau voisin et feuilletait une pile de dossiers. Tous deux regardèrent par-dessus leur épaule lorsque la porte s’ouvrit, un salut décontracté sur les lèvres. Mais dès qu’ils aperçurent Barclay entrer avec Logan, ils se retournèrent complètement et se redressèrent sur leurs chaises. Un signe de respect pour l’homme d’État le plus âgé.

— Primus, dirent-ils tous les deux.

— Pearce, Manus, content de vous voir.

Barclay fit un signe de tête à Pearce.

— Peux-tu nous laisser seuls s’il te plaît, Pearce ?

Surpris par cette demande, Pearce se leva.

— Euh, bien sûr, dit-il en pointant du doigt la porte. Je resterai juste à l’extérieur.

— Il y a un petit déjeuner qui attend dans la cuisine. Pourquoi ne pas faire une pause ? suggéra Barclay.

— Comme tu veux, dit Pearce d’un ton sec, visiblement un peu vexé que Barclay l’ait expulsé de son domaine.

Après tout, il était le geek résident, chargé des dispositifs de communication et de sécurité électroniques.

— Merci, répondit Barclay en se retournant pour regarder Pearce partir et fermer la porte derrière lui.

Pendant ce court moment sans surveillance, Manus articula silencieusement une question à Logan. Mais Logan ne put que hausser les épaules. Il ne savait pas pourquoi Barclay se montrait si secret. En général, les membres du groupe évoquaient ouvertement les missions entre eux. Ils n’avaient pas besoin de secrets. Après tout, ils travaillaient tous dans le même but : détruire les Démons de la Peur, leurs ennemis mortels, et sauver l’humanité de leur influence destructrice.

— Je suis convaincu que tu te demandes de quoi il s’agit, commença Barclay, le regard rebondissant entre Manus et Logan.

Logan croisa le regard de son supérieur, mais ne répondit pas. Il savait qu’on ne s’attendait pas à ce qu’il le fasse.

— Permets-moi de faire court. La mission dont tu seras chargé doit rester entièrement confidentielle. Seules quelques personnes extérieures au conseil connaissent le contenu de mon message pour toi.

Il se racla la gorge.

— On nous a informés de l’existence d’une médium.

Logan aspira une bouffée d’air.

— Une médium ? Une vraie ? demanda Manus avec excitation.

Barclay acquiesça.

— Tu dois te moquer de moi, poursuivit Manus. On n’en a pas vu depuis des années, voire des décennies. Les vrais médiums sont plutôt rares…

Logan enfonça son coude dans le flanc de Manus pour l’empêcher de terminer sa remarque grossière. Ni Barclay ni Logan n’avaient besoin qu’on leur rappelle la rareté des médiums et leur grande utilité pour les Gardiens de la Nuit. Même si ces créatures étaient surnaturelles, elles n’avaient pas d’aura révélatrice, pas d’odeur particulière, ce qui rendait impossible leur identification au milieu d’une foule. Elles pouvaient se cacher à la vue de tous.

— Où l’as-tu trouvée ? demanda Logan.

— Un émissaire l’a croisée à Wilmington, dans le Delaware. Elle tient une petite boutique de tarot.

— Elle lit le tarot ? Ce n’est pas exactement une vraie médium, répliqua Logan en secouant la tête. Tu es certain que ton émissaire a bien compris ? Dans chaque ville il y a des boutiques de tarot, et ce n’est pas parce qu’une pancarte dans la vitrine dit « médium » que le propriétaire est un vrai médium.

Barclay lui lança un regard sévère.

— J’en suis conscient. C’est pourquoi j’ai envoyé un deuxième agent pour nous apporter plus d’informations.

— Et ? demanda Manus avec curiosité.

— Elle a confirmé les conclusions de la première. Cette femme est vraiment médium, même si nous avons des raisons de croire que, de son côté, elle ignore son don. Ce qui rend la situation encore plus délicate.

Une courte pause s’installa, pendant laquelle seuls les bruits de respiration coupaient le silence.

— Si elle ignore qu’elle possède ce don, comment tes émissaires peuvent-ils en être certains ? demanda Logan qui interrompit le calme de la pièce.

— Elle dessine ce qu’elle voit dans ses visions.

— Excuse-moi ? demanda Logan.

Barclay laissa échapper un soupir.

— Elle a consulté un psychiatre. Mentalement instable, dit-il en haussant les épaules. Il lui a prescrit des médicaments antipsychotiques et lui a suggéré une thérapie par l’art pour faire face à ses soi-disant cauchemars, à ses visions. Notre agent a pris des photos des dessins qu’elle expose ouvertement dans sa boutique.

Il sortit son téléphone portable et tapota du doigt dessus. Un instant plus tard, il le tourna pour que Logan et Manus puissent voir l’écran. Tous deux s’approchèrent. Logan fixa le dessin. Cette médium ne se démarquait pas sur le plan artistique, mais, même si son dessin à la craie manquait de finesse, il n’eut aucun mal à identifier de quoi il s’agissait.

— Les pierres de Callanish.

L’emplacement du bastion du conseil que des démons avaient attaqué et détruit.

— Ce n’est pas tout.

Barclay fit défiler l’écran jusqu’à la photo suivante.

Ce dessin était de meilleure qualité, presque comme si la vision de la médium s’était clarifiée.

— La dague d’un membre du conseil.

Les neuf anneaux entrelacés sur le manche se trouvaient clairement dans la bonne formation. Ce n’était pas un hasard. Ce n’était pas une coïncidence.

— Elle sait des choses sur nous, des choses que personne en dehors de notre cercle de confiance ne pourrait savoir. Si les démons ont vent de son existence, s’ils peuvent la faire passer de leur côté et utiliser ses visions contre nous...

— ... ils pourraient nous anéantir, termina Logan.

Barclay hocha la tête avec un air grave.

— Oui. Si elle sait où se trouvait le fief de notre ancien conseil, nous devons supposer qu’elle connaît l’emplacement du nouveau, et peut-être de nombreux autres bastions à travers le monde. Ou si elle ne le sait pas encore, sa prochaine vision pourrait le lui dire. Dans les deux cas, cela nous rend plus vulnérables que jamais, soupira-t-il. Et avec l’état mental dans lequel elle se trouve, elle n’a aucune chance de lutter contre l’influence des démons une fois qu’ils auront jeté leur dévolu sur elle. Si cela n’a pas déjà eu lieu.

Logan échangea un regard avec Manus. Protéger cette femme et la mettre à l’abri des démons constituerait une tâche monumentale. Une mission qui ne durerait pas seulement quelques semaines ou quelques mois. Il faudrait la protéger jusqu’à ce qu’elle puisse combattre l’influence mentale qu’un démon pourrait exercer sur elle pour la faire basculer du côté obscur. Et cela pourrait prendre des années. En attendant, il fallait empêcher que la rumeur selon laquelle les Gardiens de la Nuit avaient trouvé une véritable médium ne se répande. Barclay avait raison de garder cela secret. En revanche, combien de temps Logan et Manus pourraient-ils le cacher à leurs compagnons du bastion, c’était une autre question.

— Nous devons agir rapidement, déclara Barclay, interrompant les pensées de Logan. Je t’ai envoyé toutes les informations rassemblées sur elle en un délai très court. J’aimerais pouvoir mener une vérification plus approfondie de ses antécédents, mais je crains que nous n’ayons pas le temps. C’est un esprit libre, qui défie les conventions.

Il désigna l’ordinateur.

— Le fichier n’est accessible que sous vos identifiants à vous deux. Pearce n’y a pas accès. Étudiez bien toutes les informations, mais rapidement. Vous n’avez pas le droit à l’erreur sur ce coup-là. Notre existence en tant qu’espèce est en jeu.

Barclay croisa le regard de Logan.

— Je t’ai choisi pour cette raison. Je sais que tu suivras à la lettre les directives du conseil.

— Oui, Primus.

Manus inclina la tête sur le côté.

— Et moi, je suis le comique ?

Barclay lui lança un regard plein de dérision.

— Tu n’étais pas mon premier choix pour ce poste, mais les autres membres du conseil ont eu raison de moi. Apparemment, certains membres ont pensé que ton manque d’empathie dans des circonstances précédentes pourrait être utile pour cette mission.

— Je ne savais pas qu’on me percevait comme une personne insensible.

— Tu es connu pour beaucoup de choses, Manus, admit Barclay, mais je n’ai pas le temps ni l’envie de te les énumérer toutes. Je suis convaincu que tu as conscience de tes propres défauts. Sois heureux que nous ayons besoin de tous les gardiens qui sont en mesure d’accomplir les tâches d’un guerrier, et que nous puissions donc ignorer tes nombreuses infractions. Pour l’instant.

La réprimande fit taire Manus. Pour l’instant.

Logan devait reconnaître le mérite de Barclay : il savait comment s’y prendre avec ses subordonnés.

— Eh bien, alors, dit Barclay, passons en revue les détails.

Logan acquiesça. Il connaissait la marche à suivre, mais protéger une médium serait différent. Ses visions l’empêchaient qu’on la traite comme une mission normale. On devait la mettre au courant de secrets qui ne pourraient jamais être révélés à d’autres.

— Combien de choses sommes-nous autorisés à lui dire sur notre espèce ?

— Lui dire ?

Barclay le dévisagea, comme si un frelon l’avait piqué.

— Oui, pour que nous puissions obtenir sa coopération et la protéger efficacement, précisa Logan.

— La protéger ?

Barclay secoua la tête.

— Elle représente un risque pour notre sécurité, un risque qui appelle une action, et une seule. Vous n’êtes pas chargé de la protéger. Le conseil a voté pour l’élimination de la menace.

Les derniers mots résonnèrent dans la tête de Logan.

Éliminer la menace. Il savait ce que cela signifiait.

La tuer.

4

— Aïe !

Winter poussa un cri de douleur et fixa le sang qui jaillissait de la plaie. La lame avait été aiguisée comme un rasoir, la visée parfaite – si elle avait voulu se couper l’index. Ce qui n’était pas son intention. Mais le morceau de salami lui avait échappé des doigts lorsqu’elle avait essayé de le couper en tranches fines pour s’en faire un sandwich.

— Bon sang !

Ne pouvait-elle pas faire une seule chose de bien aujourd’hui ? D’abord, elle ne s’était pas réveillée, puis elle avait failli se brûler les cheveux avec son sèche-cheveux, distraite par un bulletin d’informations à la radio, et maintenant ceci.

Elle courut jusqu’à l’autre côté de la cuisine et ouvrit le tiroir du haut. Tout en fouillant, elle maintint la pression sur le doigt blessé pour ne pas faire couler le sang sur le comptoir. Sans succès. Elle déchira une feuille d’essuie-tout et l’enroula autour de son doigt pour absorber le sang, tout en continuant à chercher les pansements qu’elle savait avoir placés dans le tiroir une semaine plus tôt, puisqu’elle avait épuisé sa réserve de matériel de premiers soins après une mésaventure similaire.

Eh bien, elle manquait simplement de dextérité avec les couteaux, le feu, les marteaux et les clous. « Deux mains gauches » avait fait remarquer sa grand-mère bien des années auparavant, et elle lui avait suggéré de trouver un travail qui ne l’obligerait pas à manipuler des outils.

— C’est tout simplement génial, râla Winter, prête à piquer une crise lorsqu’elle aperçut soudain la boîte de pansements dans le coin le plus éloigné du tiroir.

Avec difficulté, elle réussit à tirer un pansement de la boîte et à le retirer de son enveloppe protectrice. Sa plaie continua à suinter avant qu’elle ne parvienne à la refermer avec le pansement. Elle continua à maintenir la pression, et, après une minute ou deux, le sang sembla avoir commencé à coaguler.

Winter soupira et nettoya le désordre, essuya les gouttes de sang sur le comptoir, puis reporta son regard sur sa tentative de préparation d’un sandwich. Soudain, elle n’avait plus vraiment faim. Elle attrapa le salami et le regarda.

— Euh, et puis zut !

Elle y mordit à pleines dents, arrachant un gros morceau qu’elle mâcha. Elle n’allait pas donner une seconde chance au découpage en tranches.

Elle remit les deux tranches de pain dans le sac et le referma, lorsqu’un bruit la fit sursauter. Mâchant toujours le salami, elle se retourna et regarda dans le petit couloir. La porte qui menait à sa boutique était fermée. Elle en était certaine : elle avait accroché à la porte la pancarte indiquant qu’elle prenait une pause déjeuner. Alors pourquoi entendait-elle les vieilles planches grincer dans la boutique ? Avait-elle oublié de verrouiller la porte ?

Winter s’essuya les mains sur une serviette, puis marcha jusqu’à la porte de communication et l’ouvrit. Un homme de grande taille se tenait dans la boutique, le dos tourné vers elle alors qu’il regardait certains des dessins accrochés aux murs. Il lui semblait familier. Elle sentit une étincelle de reconnaissance s’allumer dans son esprit, mais aucun souvenir ne vint.

— Je suis désolée, mais nous sommes fermés pour le déjeuner, dit-elle d’une voix ferme.

Il se retourna avec assurance, comme si sa présence ne l’avait pas surpris. Leurs yeux se croisèrent. Elle se figea, incapable de bouger. L’étincelle de reconnaissance qu’elle avait ressentie en regardant son dos revint, plus forte cette fois. Comme si elle l’avait vu quelque part, même si elle ne reconnaissait pas son visage.

Et elle s’en serait souvenue. Quelle femme vivante dans la force de l’âge – et elle se trouvait dans la force de l’âge, malgré le fait qu’elle n’ait pas eu beaucoup de rendez-vous ces derniers temps – oublierait un visage comme le sien ? Des traits ciselés, des pommettes fortes, des sourcils noirs prononcés, un nez droit, des cheveux noirs courts : tout soulignait son allure classique. Son menton exprimait de la détermination, mais ses lèvres promettaient autre chose, quelque chose d’incompatible avec la stature de cet homme, qui semblait avoir sa place sur une affiche de recrutement de l’armée. L’armée, oui, parce que son corps était musclé, pas comme celui d’un bodybuilder, mais comme celui d’un homme qui connaissait le combat. Tout chez cet homme exprimait de la dureté. Chaque muscle semblait avoir un but, et pourtant ses lèvres étaient entrouvertes, trahissant une douceur, une gentillesse, qui vivaient en lui.

Néanmoins, elle vit qu’il était troublé. Qu’il avait besoin de réponses. Qu’il en avait besoin maintenant. Qu’il ne pouvait pas attendre.

— Mlle Collins ? Mlle Winter Collins ? demanda-t-il.

Le timbre de sa voix résonna dans sa poitrine comme s’il avait utilisé ses côtes à elle pour produire le son.

— Oui, murmura-t-elle, se sentant tout à coup à bout de souffle.

Elle tenta de faire disparaître la sensation d’étourdissement. Pourquoi se sentait-elle soudain si étourdie ? Elle avait déjà rencontré des hommes séduisants et n’avait jamais eu de problèmes à s’exprimer. Bizarrement, elle savait que sa réaction n’avait rien à voir avec son physique, mais avec le sentiment de l'avoir déjà vu.

Il t’a sauvée dans ton rêve.

Ce n’était pas possible. Elle en savait beaucoup sur les rêves, sur le fait qu’on ne pouvait pas rêver d’un visage qu’on n’avait jamais vu auparavant. Que les rêves n’étaient qu’un moyen pour l’esprit de travailler sur les choses qu’on avait vécues pendant la journée. Mais elle savait aussi que ses cauchemars étaient différents. Qu’ils lui montraient des choses qui ne pouvaient pas exister. Mais s’il était l’homme de son cauchemar, l’homme qui avait tué les monstres aux yeux verts, alors pourquoi était-il dans sa boutique maintenant ?

Elle ne se trouvait pas au cœur d’un de ses cauchemars. Elle n’avait pas ressenti la douleur qui les précédait. Elle savait qu’elle était lucide. Elle devait se tromper à son sujet. C’était un client comme les autres. Un client qui n’avait manifestement pas vu le panneau de la porte indiquant que le personnel se trouvait en pause déjeuner.

— Prenez un siège, lâcha-t-elle, alors qu’elle avait prévu de lui dire de revenir après sa pause.

— Un siège ? répéta-t-il, comme s’il ne l’avait pas entendue.

Elle désigna la table et les deux chaises.

— Oui, pour votre tirage de tarot. Vous êtes là pour ça, non ? Parce que vous avez des questions à poser. Quel est votre nom ?

— Logan, répondit-il lentement, en marchant vers la table encore plus lentement, comme s’il reconsidérait sa visite.

Elle avait déjà vu cette hésitation chez des clients qui venaient pour la première fois. Il leur avait fallu tout leur courage pour venir, puis, une fois à l’intérieur de la boutique, ils avaient hésité et étaient partis. Mais Logan ne lui semblait pas être le genre de personne à manquer de courage. Non, c’était autre chose. Comme si, d’une certaine façon, il ne voulait pas vraiment connaître la réponse à sa question.

Winter s’assit et attendit que Logan ait pris le siège en face d’elle.

— La lecture coûte quarante dollars. J’espère que ça vous va ?

Il acquiesça.

— Pas de problème.

Elle prit le jeu de cartes et le lui tendit.

— Mélangez-les.

Elle observa ses mains pendant qu’il agissait. Des longs doigts, des ongles propres, et pourtant ce n’étaient pas les mains d’un homme qui travaillait dans un bureau. Trop de cicatrices, trop de blessures, trop de callosités. Il travaillait avec ses mains, avec tout son corps. Elle pouvait imaginer à quoi il devait ressembler lorsqu’il travaillait, le haut de son corps dénudé, ses muscles fléchissant, la sueur faisant scintiller sa peau. Elle imaginait ses mains glissant sur les crêtes bronzées...

Oh mon Dieu, qu’est-ce qui n’allait pas chez elle ? Elle avait l’impression d’être une chienne en chaleur.

Elle toussa.

— Quand dois-je m’arrêter ? demanda Logan.

Sa question l’amena à se demander depuis combien de temps elle le fixait, l’observait, l’imaginait à moitié nu.

— Euh, maintenant, c’est bien.

Il posa le paquet sur le velours violet.

— Coupez, indiqua Winter.

Il suivit son ordre et attendit. Winter prit les cartes et les étala en fer à cheval, contente d’avoir quelque chose à faire de ses mains.

— Dites-moi votre question, Logan.

Elle leva les yeux des cartes et s’aperçut qu’il la regardait fixement.

* * *

Il aurait dû écouter Manus, qui avait suggéré de l’approcher de façon invisible, de l’éliminer sans qu’elle ne sache jamais ce qui lui arrivait. Mais Logan ne l’avait pas écouté, car éliminer une innocente n’était pas une tâche qu’il prenait à la légère. C’était une étape irréversible, et il devait donc prendre des mesures décisives. Cela signifiait qu’il devait confirmer qu’elle savait vraiment pour les Gardiens de la Nuit et qu’elle représentait un danger.

En tant que sentinelle, chef de cette mission, il avait passé outre les protestations de Manus et lui avait ordonné de rester dehors dans la voiture et de surveiller toute activité démoniaque. Manus avait accepté à contrecœur.

Logan avait attendu que Winter se soit enfermée pour le déjeuner afin de s’assurer qu’ils seraient seuls. Il avait utilisé sa capacité surnaturelle à passer à travers des objets solides pour entrer dans la boutique. Étant donné que le rapport sur elle affirmait son instabilité mentale, il savait qu’il pouvait lui dire qu’elle avait oublié de fermer la porte à clé avec une telle conviction qu’elle douterait de ses propres souvenirs. Cela n’avait pas été nécessaire, car elle ne l’avait pas interrogé sur ce point.

Au lieu de cela, elle l’avait regardé fixement. Tout comme elle le fixait maintenant.

— Votre question, demanda-t-elle.

— Je dois prendre une décision importante. J’ai besoin de savoir si je prends la bonne, dit-il, car il devait lui donner quelque chose pour qu’elle ne se méfie pas de lui.

Winter acquiesça et retourna la première carte. Il n’y jeta même pas un coup d’œil. Au lieu de cela, il reporta son regard sur les différents dessins accrochés aux murs. L’un d’eux correspondait à la même représentation des pierres de Callanish que Barclay lui avait montrée sur son téléphone portable, l’autre au dessin de la dague de cérémonie d’un membre du conseil. Quelques autres dessins, tous à la craie noire sur fond blanc, ornaient les murs.

— Vous êtes à la fois en train de donner des ordres et d’en recevoir, constata Winter en levant brièvement les yeux de la carte.

Il hocha la tête.

Elle laissa retomber son regard sur les cartes, en retourna une autre, tandis que Logan en profitait pour laisser ses yeux errer sur le mur derrière elle, où une porte portant le mot « Privé » menait au reste de la petite maison de ville. Il s’apprêtait à détourner le regard lorsqu’il remarqua les inscriptions au-dessus du cadre de la porte : des runes. Le même genre de runes que celles qui ornaient les bastions des Gardiens de la Nuit. Le rapport n’en avait pas fait mention. Mais si Winter savait à quoi ressemblaient les runes, elle en savait déjà trop.

— Cette fois, vous hésitez à suivre l’ordre qu’on vous a transmis.

Logan ramena la tête vers Winter et remarqua un froncement de sourcils sur le visage de la jeune femme. Comme si elle avait vu quelque chose qu’elle n’arrivait pas à comprendre. En tant que véritable médium, pouvait-elle deviner ses pensées, ses projets ? Parce que maintenant qu’il avait vu les runes, qu’il avait constaté par lui-même qu’en affichant négligemment leurs secrets, elle pouvait nuire à leur espèce, il savait qu’il avait pris sa décision. Il devait suivre l’ordre.

— Vous luttez à l’intérieur de vous, ajouta Winter.

Non, elle ne pouvait pas voir en lui, sinon elle verrait que sa lutte était terminée, sa décision prise. Elle récitait le charabia habituel que n’importe quel lecteur de cartes de tarot débitait à ses clients. Quelques phrases sans signification qui pouvaient être interprétées n’importe comment. Mais les choses qu’elle avait dessinées, celles qu’elle affichait sur les murs de sa boutique, c’étaient ses visions, c’était la vérité.

— Se battre, lutter... balbutia-t-elle en pressant une main sur sa tempe.

Encore plus de drame. Il devait lui reconnaître qu’elle était une excellente vendeuse.

Ses lèvres frémirent et sa respiration s’accéléra.

— Non, pas encore, non...

Son visage se déforma sous l’effet de la douleur. Elle leva ses deux mains vers son visage, les pressant contre sa tête comme pour essayer de l’empêcher d’exploser.

Alarmé, Logan dit :

— Qu’est-ce qui ne va pas ?

Elle se leva de la table en titubant, renversant sa chaise par la même occasion.

— Non ! S’il vous plaît, non !

Logan se leva d’un bond, juste au moment où Winter s’agrippait à la table pour se soutenir, mais ne réussit qu’à s’agripper au velours violet. Déséquilibrée, elle tomba en arrière, faisant voler les cartes de tarot. Logan s’élança en avant et ne put la rattraper à temps. Ils s’écrasèrent tous les deux sur le sol, mais Winter atterrit sur lui et non sur le sol dur, où elle aurait pu se blesser.

— Winter, vous allez bien ?

Elle se débattait dans ses bras, mais il savait que ce n’était pas pour s’échapper. Elle était au milieu de ce que quelqu’un d’autre aurait pu interpréter comme une crise d’épilepsie, même si elle n’était pas aussi violente. Mais il savait : elle vivait une de ses visions. Le rapport avait indiqué qu’elle était inconsciente de ce qui lui arrivait, et qu’elle luttait probablement physiquement contre les visions, ce qui se manifestait par un spasme de tout le corps.

— Vous devez lâcher prise, Winter, dit-il doucement en écartant quelques mèches de ses cheveux noirs de son visage.

Il savait que c’était le moment idéal pour lui glisser le poison qu’il avait apporté. C’était indolore et presque instantané. En quelques secondes, elle serait morte, et elle ne le saurait même pas. C’était son plan. Mais lui ôter la vie maintenant, alors qu’elle se trouvait dans une situation de vulnérabilité, le répugnait, même s’il savait que c’était son devoir.

Hésiterait-il si elle n’était pas une belle femme ? Hésiterait-il si elle était moins séduisante, moins fascinante ? Il savait qu’il n’hésiterait pas. Mais en la regardant maintenant, alors qu’il la berçait et la réconfortait, des doutes s’élevèrent en lui. Des doutes sur ses ordres, sur son devoir.

Winter dans les bras, il se leva. Elle tremblait encore, mais moins maintenant, comme si la vision s’était estompée. Il la porta jusqu’à la porte, l’ouvrit et la franchit, la refermant d’un coup de pied derrière lui. Il traversa le court couloir qui s’ouvrait sur une cuisine. Une table avec quatre chaises se trouvait au milieu de la grande pièce, un canapé en lambeaux contre un mur. Il fit descendre Winter sur le canapé au moment même où elle rouvrait les yeux.

Leur couleur bleu profond l’aveugla presque, et il se figea dans ses mouvements, la tenant toujours comme dans l’étreinte d’un amant. Ce qui, bien sûr, n’était pas le cas. Cette femme n’aurait jamais d’autre amant, car elle allait mourir aujourd’hui. Pendant un instant, le regret l’envahit. Mais il se ressaisit. Il était ici pour accomplir son devoir envers son espèce, pour la protéger du danger. Il l’avait juré il y a plusieurs décennies, et il n’avait jamais rompu ce serment. Il ne le briserait pas maintenant. Peu importe à quel point tuer cette femme s’avérerait difficile.

Winter le regarda d’un air gêné.

— Vous vous êtes effondrée, s’empressa-t-il d’expliquer.

Elle déglutit péniblement et acquiesça. Instinctivement, Logan la libéra de son emprise et elle se redressa rapidement.

— Je suis désolée, lui dit-elle en évitant son regard.

Qu’avait-elle vu ? Cela avait-il un rapport avec lui ? Ou avec ses frères ? Pourrait-il peut-être obtenir d’elle quelques informations supplémentaires avant de devoir mettre son plan à exécution ?