Erhalten Sie Zugang zu diesem und mehr als 300000 Büchern ab EUR 5,99 monatlich.
Parce que « la poésie est une union avec tous ou quelques-uns, et c'est aussi, hélas ! une solitude sans frontière » (Alliette Audra,
Poèmes choisis, 1964), Christian Satgé invite les Muses dans son musée personnel pour y muser parmi quelques œuvres sans vernis. C’est sans artifice ni prétention, que ce jongleur de mots, amusé, avançant sur le fil ténu d’un temps éreintant, s’expose ici entre lyrisme et légèreté, sensibilité et sensualité, humeur et humour, valeurs et couleurs…
Au fil de ces pages, il vous propose de partager quelques vers en peignant des paysages intérieurs et en brossant des portraits vus par un humble voyageur immobile. Pour pigmenter sa vie, il les colore en mettant sa plume modeste, mais toujours loquace, au vent d’une inspiration capricieuse et s’amuse de ce que l’on ne voit plus à force de l’avoir sous les yeux. Car notre monde, qu’il a du mal à voir en peinture, toujours pressé, toujours pressant, ne sait hélas plus se regarder vraiment…
Venez donc, à vos minutes perdues, courir en toute liberté ses phrases, en glanant ici ou là, un instant de saison voire un moment de déraison où petites joies et menus plaisirs tentent d’égayer cette solitude partagée qu’est la vie en société et les profondes tristesses de notre époque si peu épique. Ce sont, un peu, ses « riches heures » à lui, qu’il aimerait ainsi partager par petites touches…
À PROPOS DE L'AUTEUR
Toulousain de naissance, Pyrénéen d’adoption,
Christian Satgé, jeune auteur cinquantenaire professe l’Histoire et prise la langue du bon J. de La Fontaine.
Ce rimeur solidaire sait toutefois que « la littérature est la preuve que la vie ne suffit pas » (Fernando Pessoa) et vous convie, sans hauteur, à des tours et détours dans son petit monde de monts en « méchant écriveur de lignes inégales » selon les mots de ce démon d’Edmond.
Sie lesen das E-Book in den Legimi-Apps auf:
Seitenzahl: 73
Das E-Book (TTS) können Sie hören im Abo „Legimi Premium” in Legimi-Apps auf:
Christian Satgé
HORS CADRE
Préface de Françoise Pauly
Du même auteur
– Petites fables affables… des champs d’en face
5 Sens Édition, décembre 2019
À mes enfants…
D’après deux vers de Delolly (Oliver Delabre)
et avec son consentement.
Le froid vous attendra
Non ne vous hâtez pas
Profitez du printemps
De la brise de l’instant
Respirez ses parfums
Avant qu’ils soient défunts
La pluie attendra
Non ne vous pressez pas
Vivez donc votre été
Ses joies et ses gaietés
Ses chaleureux moments
Échos du firmament
Le gris vous attendra
Ne vous dépêchez pas
Jouissez des couleurs
D’automne sans pâleur
De la douceur d’un temps
Encore palpitant
Car l’hiver viendra
Jà il presse son pas
PRÉFACE
« Écrire une préface ? Quel exercice convenu ! » Vous le croyez, ça ? C’est peut-être vrai… mais quand, comme moi, on connaît depuis plus de vingt ans celui qui a commis l’œuvre, c’est surtout un plaisir.
J’ai d’abord connu et apprécié le jeune collègue, professeur passionné et passionnant, qui faisait vivre l’Histoire avec verve et humour.
Un peu plus tard, j’ai découvert l’impénitent rimeur qui soulignait de ses vers les travaux d’un complice, professeur d’Arts Plastiques de son état et créateur pour notre plaisir ; car ce fut un plaisir que de prêter ma voix aux textes de Christian pour exalter les œuvres de Marc.
Entre Christian et moi, l’amitié est faite de beaucoup de partages, à l’occasion d’événements de nos vies – heureux ou non ; un partage au fil du temps, semaine après semaine, en toute fidélité. Depuis longtemps, Christian m’apporte tout ce qu’il écrit, que je découvre avec bonheur et annote avec sévérité.
Je me suis réjouie avec lui de la publication de son recueil de fables, qui célèbre un genre à la fois ancien et intemporel qu’il affectionne particulièrement.
L’autre corde à l’arc du fabuleux fabuliste, c’est la poésie. Par définition, le poète est LE créateur par excellence, selon l’étymologie grecque du mot.
Christian crée des atmosphères, des mondes, des univers. Il aime les mots, leurs sonorités, il les choisit parfois rares ou vieillis, avec gourmandise. Il fait écho à d’illustres prédécesseurs ; il y a parfois chez lui du Charles d’Orléans, du Clément Marot, du Ronsard… Excusez du peu ! Mais il en est nourri. Et je le reconnais bien dans ces quelques vers :
« J’ai chaussé des semelles
De sable que le vent
Entraîne trop souvent
Où sons et sens s’emmêlent
En entrelacs savants. »
Amoureux de la chanson française, qu’il connaît sur le bout des doigts, il aime aussi les rythmes, les audaces de versification, les acrobaties de rimes, les accointances de sons, écoutez : « Face aux vents souffleurs aux vents siffleurs. » Il n’oublie pas d’adresser des clins d’œil à G. Brassens, à J. Brel, à Renaud… Bref, il est un vrai poète qui nous prend par la main et nous invite à visiter son domaine.
Paysages vus ou rêvés, magnifiques portraits de femmes (celles qui souffrent, qui luttent, qui résistent : « Pieds nus dans la boue de la rue / Elle quête de quoi survivre »), souvenirs de jeux ou de rêves d’enfant : « Robinson désolé attendant son goûter / Pirate isolé au mât d’un marronnier sage », évocation d’amours adolescentes ou nostalgie du parasol des vacances passées : « Roue blanche aux stries d’azur, cercle au motif floral / Coupole or et sang ou corolle émeraude », tout ce qui fait que la vie défile dans ces textes qui parlent à chacun de nous.
J’espère que, comme moi, vous aimerez suivre Christian dans ses déambulations poétiques, et que la musique de ses vers vous accompagnera longtemps.
En guise de viatique avant votre lecture, je ne résiste pas à vous chuchoter à l’oreille deux vers de mon poème préféré :
« De ses saveurs salées, sensuel, il essouffle
La vertu obstinée de la grève sauvage… »
Françoise Pauly (Argelès-Gazost, février 2020)
PAYS SAGES
BROUILLARD SUR LES CRÊTES
Cycle pyrénéen
Pudique comme une vierge biblique, la brume embrouillée jette un voile mouillé et vaporeux sur une gorge nue offerte aux nues. Elle cache dans un coton uni et nébuleux un vallon profond et ses frondaisons fleurant les fruits de saison ; elle couvre d’un drap fluide et humide des ballons aux rondeurs provocantes et y perle doucement ses pleurs en rosée d’aurore.
Dans la moiteur de la brume embuée de nuages, le relief semble dévoré par une onde blafarde qui esquisse et gomme ses courbes, estompe et aquarelle ses couleurs. Accrochée, elle écrête les sommets mamelonnés et transpire un ciel de sueur fraîche et pénétrante. Attachée, elle étête les crêtes discrètes et coiffe les pics effilés d’une chevelure filasse qu’emmêle le vent qui s’y mêle. Elle encapuchonne les monts d’écume immaculée et mouvante où se claquemurent les murmures et les fadaises d’un soleil affadi.
DANS LES BRAS DE BOUKHARA
Face aux vents souffleurs aux vents siffleurs
Loin des persifleurs écornifleurs
Qu’on la prenne ou même qu’on la vende
Toquade caprice ou bien passade
Boukhara-la-Belle est femme est fleur
Terre de provende ocre et lavande
Où l’azur s’invite à cent façades
Éclats éclos céleste ambassade
Ce nénuphar posé sur les flots
Calmes du désert est un îlot
De paix, salvateur, une Cythère
Que jamais ne corrompit le temps.
Ce frais paradis d’Allah sur terre,
Pour tant de califes, de sultans,
Dévoile ses rondeurs généreuses,
En dômes aux nuances heureuses.
Elle offrit des délices discrètes
Et, en maîtresse expérimentée,
Ouvrit ses portes les plus secrètes,
Tout en langueurs, en charmes bleutés.
Terre de provende ocre et lavande
Où l’azur s’invite à cent façades
Éclats éclos céleste ambassade
Face aux vents souffleurs aux vents siffleurs
Loin des persifleurs écornifleurs
Qu’on la prenne ou même qu’on la vende
Toquade caprice ou bien passade
Boukhara-la-Belle est femme est fleur
Sur une route où tant on brigande,
Cette sœur aînée de Samarcande,
Fille d’oasis, sans khôl ni fard,
N’en déplaise aux vizirs, aux eunuques,
N’a jamais eu le teint blanc-blafard
Des villes où l’on tranchait des nuques
Pour le plaisir d’imams, de mollahs…
Ici, voyageurs, marchands et fellahs
Trouvent un vert et soyeux refuge,
Jouissant de ce joyau joyeux :
Ombres jamais sombres, Dieu, qu’on en juge,
Réjouissent l’âme, le cœur, les yeux…
Terre de provende ocre et lavande
Où l’azur s’invite à cent façades
Éclats éclos céleste ambassade
Qu’on la prenne ou même qu’on la vende
Boukhara-la-Belle est femme est fleur
Face aux vents souffleurs aux vents siffleurs
Loin des persifleurs écornifleurs
Toquade caprice ou bien passade
SANCTUAIRE
Il est, dans ces bois touffus, je me rappelle
Sous une pluie de roses sang, une chapelle
Oubliée à la Vierge, hélas, mutilée…
Vandales d’hier ou bien contemporaine
Racaille l’ont brisée et l’ont maculée,
Dans sa solitude sylvestre de reine.
Murs effacés, toit effondré, son autel
Livré au lierre reçoit, matin, l’offrande
Des oiseaux et sert aux écureuils d’hôtel
Dans ses couleurs et ses saveurs odorantes.
L’allée ombrée, esquissée, n’est empruntée
Que par les chevreuils égarés qui cheminent,
Loin des chasseurs que l’automne dissémine,
Pour prier dans ce lieu empreint de piété…
HIC & NUNC
La ville s’endormait
Dans les parfums de mai
Que drapaient d’un noir d’ombre
Les plis de la pénombre
Dans ce manteau aimé
Les rues enfin calmées
Hument tout leur saoul nombre
De ces senteurs si sombres
La ville s’endormait
Dans les parfums de mai
Que drapaient d’or et d’ambre
Les fenêtres des chambres
Le silence lamé
Des rues désembrumées
S’offre en piquant gingembre
Titillant cœur et membres
La ville s’endormait
Dans les parfums de mai
PLUIE EN PLAINE
Plic, Ploc, Plic, Ploc, Plic, Ploc, Plic.
Les nues d’un grain noir sont pleines
Quand la pluie que, seul, j’épie,
Picote la plume aux pies
Et plie l’épi dans la plaine.
Plic, Ploc, Plic, Ploc, Plic, Ploc, Plic.
Elle tombe, en paix, sans peine,
Cette pluie-là que j’épie
Et qui picore, c’est bien pis,
Lasse, et mes plaies et mes peines.
Plic, Ploc, Plic, Ploc, Plic, Ploc, Plic.
Car cette pluie plisse et pique
Mes yeux soudain tout emplis,
En donnant, comme on supplie,
À mon dépit la réplique.
Plic, Ploc, Plic, Ploc, Plic, Ploc, Plic.
Les cieux au soir, sans répit,
Pleurent sur tous les replis
De mon cœur, et sur leurs plis,
Dans mon âme bien tapis.
Plic, Ploc, Plic, Ploc, Plic, Ploc, Plic.
Alors, mes yeux, à la peine,
Pleuvent, en coupes remplies,