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Émotionnellement meurtri par le décès, survenu quelques années plus tôt, de sa compagne de sang-mêlé et de l'enfant qu'elle attendait, John Grant, vampire employé comme garde du corps chez Scanguards, évite les femmes à tout prix, tant il est déterminé à ne plus vivre un autre chagrin d'amour. Mais lorsque Savannah Rice, une mère célibataire, le prie de l'aider à retrouver Buffy, sa fille récemment enlevée, il ne peut s'empêcher d'être attiré par elle et par la passion qui sommeille derrière ses yeux bleus. Tandis qu'ils s'affairent à démanteler un réseau de trafic d'enfants remontant jusqu'en Russie, John et Savannah s'autorisent à trouver l'amour et le soutien dans les bras l'un de l'autre. Ce faisant, tout au long de ce combat mené dans le but de sauver la fille de Savannah et toutes les autres filles tombées entre les mains d'un voyou sans scrupules, ils se voient forcés de confronter leur culpabilité et leurs craintes mutuelles. Mais même s'ils parviennent à détruire ce réseau et sauver les filles, Savannah sera-t-elle assez forte pour aimer John lorsqu'il lui révèlera qu'il est un vampire avide de son sang ? À PROPOS DE LA SÉRIE La série Scanguards Vampires est pleine d'action rapide, de scènes d'amour torrides, de dialogues pleins d'esprit et de héros et héroïnes forts. Le vampire Samson Woodford vit à San Francisco et possède une société de sécurité et de garde du corps, Scanguards, qui emploie à la fois des vampires et des humains. Et éventuellement des sorcières. Ajoutez quelques gardiens immortels et quelques démons plus tard dans la série, et vous aurez compris ! Chaque livre peut être lu seul et est toujours centré sur un nouveau couple qui trouve l'amour, mais la série est plus agréable lorsqu'elle est lue dans l'ordre. Et bien sûr, il y a toujours quelques blagues - vous comprendrez quand vous rencontrerez Wesley, un aspirant sorcier. Bonne lecture ! ⭐️ ⭐️ ⭐️ ⭐️ Lara Adrian, auteure de la série Midnight Breed, vendue dans le New York Times : "Je suis accro aux livres de Tina Folsom ! La série des Scanguards® est l'une des choses les plus chaudes qui soient arrivées à la romance vampirique. Si vous aimez les lectures torrides et rapides, ne manquez pas cette série palpitante !" Les Vampires Scanguards La belle mortelle de Samson (#1) La provocatrice d'Amaury (#2) La partenaire de Gabriel (#3) L'enchantement d'Yvette (#4) La rédemption de Zane (#5) L'éternel amour de Quinn (#6) Les désirs d'Oliver (#7) Le choix de Thomas (#8) Discrète morsure (#8 ½) L'identité de Cain (#9) Le retour de Luther (#10) La promesse de Blake (#11) Fatidiques Retrouvailles (#11 ½) L'espoir de John (#12) La tempête de Ryder (#13) La conquête de Damian (#14) Le défi de Grayson (#15) L'amour interdit d'Isabelle (#16) La passion de Cooper (#17) Le courage de Vanessa (#18) Gardiens de la Nuit Amant Révélé (#1) Maître Affranchi (#2) Guerrier Bouleversé (#3) Gardien Rebelle (#4) Immortel Dévoilé (#5) Protecteur Sans Égal (#6) Démon Libéré (#7) Le club des éternels célibataires Séduisant (#1) Attirant (#2) Envoûtant (#3) Torride (#4) Attrayant (#5) Passionné (#6) Hors d'Olympe Une Touche de Grec (#1) Un Parfum de Grec (#2) Un Goût de Grec (#3) Un Souffle de Grec (#4) Les Vampires de Venise Nouvelle 1 : Raphael & Isabella Nouvelle 2 : Dante & Viola Nouvelle 3 : Lorenzo & Bianca Nouvelle 4 : Nico & Oriana Nouvelle 5 : Marcello & Jane Nom de Code Stargate Ace en Fuite (#1) Fox en Vue (#2) Yankee dans le Vent (#3) Tiger à l'Affût (#4) Hawk en Chasse (#5) La Quête du Temps Changement de Sort (#1) Présage du Destin (#2) Thriller Témoin Oculaire
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Seitenzahl: 459
Veröffentlichungsjahr: 2025
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VAMPIRES SCANGUARDS - TOME 12
Chapitre 1
Chapitre 2
Chapitre 3
Chapitre 4
Chapitre 5
Chapitre 6
Chapitre 7
Chapitre 8
Chapitre 9
Chapitre 10
Chapitre 11
Chapitre 12
Chapitre 13
Chapitre 14
Chapitre 15
Chapitre 16
Chapitre 17
Chapitre 18
Chapitre 19
Chapitre 20
Chapitre 21
Chapitre 22
Chapitre 23
Chapitre 24
Chapitre 25
Chapitre 26
Chapitre 27
Chapitre 28
Chapitre 29
Chapitre 30
Chapitre 31
Chapitre 32
Chapitre 33
Chapitre 34
Chapitre 35
Chapitre 36
Chapitre 37
Chapitre 38
Chapitre 39
Ordre de Lecture
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À propos de l’auteur
Émotionnellement meurtri par le décès, survenu quelques années plus tôt, de sa compagne de sang-mêlé et de l’enfant qu’elle attendait, John Grant, vampire employé comme garde du corps chez Scanguards, évite les femmes à tout prix, tant il est déterminé à ne plus vivre un autre chagrin d’amour. Mais lorsque Savannah Rice, une mère célibataire, le prie de l’aider à retrouver Buffy, sa fille récemment enlevée, il ne peut s’empêcher d’être attiré par elle et par la passion qui sommeille derrière ses yeux bleus.
Tandis qu’ils s’affairent à démanteler un réseau de trafic d’enfants remontant jusqu’en Russie, John et Savannah s’autorisent à trouver l’amour et le soutien dans les bras l’un de l’autre. Ce faisant, tout au long de ce combat mené dans le but de sauver la fille de Savannah et toutes les autres filles tombées entre les mains d’un voyou sans scrupules, ils se voient forcés de confronter leur culpabilité et leurs craintes mutuelles.
Mais même s’ils parviennent à détruire ce réseau et sauver les filles, Savannah sera-t-elle assez forte pour aimer John lorsqu’il lui révèlera qu’il est un vampire avide de son sang ?
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© 2020 Tina Folsom
Scanguards est une marque déposée.
Peu de temps après le coucher du soleil, John Grant pénétra dans le garage souterrain du siège de Scanguards situé dans le district de la Mission à San Francisco et se gara à l’emplacement qui lui était attribué. Tant au coucher qu’au lever du soleil, il régnait une grande activité au sein de cet imposant bâtiment : la relève des équipes. Les employés humains quittaient l’établissement le soir, tandis que les vampires prenaient la relève. Avant que John n’eût atteint son bureau situé au deuxième étage, l’endroit bourdonnait déjà d’une frénétique activité. Tout comme chaque nuit. Il en était bien aise, car cela l’aidait à ne pas penser à d’autres choses. Des choses qu’il préférait maintenir enfouies dans les sombres recoins de sa mémoire.
Tandis qu’il longeait le couloir menant à son bureau, il gratifia plusieurs collègues d’un hochement de tête, échangeant ainsi de silencieuses salutations. Une voix l’interpela, alors qu’il avait presque atteint la porte de son bureau.
— John, attends.
John se retourna et vit Gabriel Giles, son supérieur et chef en second au sein de Scanguards, se diriger vers lui. Après nombre d’années de collaboration avec Gabriel, il s’était habitué à la repoussante apparence de l’autre vampire : une grande cicatrice plissée s’étendait de son oreille gauche au menton et défigurait un visage, par ailleurs assez joli, au point d’inspirer, d’un simple regard sombre, de la crainte à n’importe quel adversaire. Et pourtant, en dépit de son apparence, il n’y avait rien de mauvais chez Gabriel. En fait, il était un homme juste, un individu équilibré grâce à l’amour que lui vouait sa compagne, Maya, et leurs trois enfants hybrides dont deux étaient apprentis gardes du corps chez Scanguards. Gabriel possédait tout ce que John avait si durement tenté d’obtenir. Mais en vain.
— Bonsoir Gabriel, dit John, le ton de sa voix ne trahissant pas le fait qu’il enviât le puissant vampire.
Ce n’était pas de la faute de Gabriel si ce dernier avait tout ce que lui-même désirait.
— Content d’être tombé sur toi.
Gabriel désigna l’épais dossier qu’il tenait en main.
— Les services de police de San Francisco ont envoyé ceci afin que nous y jetions un coup d’œil.
Il céda le dossier à John.
— Le détective Donnelly ?demanda John en en prenant possession tout en haussant un sourcil. Encore un crime dans lequel un vampire est impliqué ?
Grâce à l’accord pris avec la ville de San Francisco et, en particulier, grâce à leurs relations avec le maire et le chef de la police, leur agent de liaison au sein du département de la police rapportait directement tous les crimes supposés commis par des vampires à Scanguards. Seuls quelques officiers du poste connaissaient leur existence et, en confiant la sous-traitance de tous les cas incriminant des vampires à Scanguards, ils s’assuraient que cela ne s’ébruitât pas. Dans le cas contraire, ce serait la panique, ce que, tant le maire que le chef de la police, voulaient éviter. En outre, Scanguards était mieux équipée pour affronter les mauvais vampires contrevenant à la loi. Les membres de la compagnie se chargeaient rapidement et efficacement d’eux. Scanguards les pourchassait avant de les amener devant le Conseil des vampires afin qu’ils fussent poursuivis. Pour les grands délinquants, le verdict était l’exécution. Pour ceux qui pouvaient être remis sur le droit chemin, c’était un séjour prolongé dans la prison pour vampires située dans la Sierra.
— Donnelly n’est pas sûr. Mais, n’ayant aucune piste, il veut qu’on s’y intéresse.
— Bien sûr. De quoi s’agit-il ?
— Enlèvements d’enfants.
Quelque chose se mit à bouillonner dans les tripes de John.
— Combien ?
— Plus d’une douzaine depuis ces dix dernières semaines. Toutes des filles. Et jeunes.
— Quel âge ?demanda John, bien que peu enclin à entendre la réponse.
— Toutes entre neuf et douze ans.
Le dégoût se répandit dans tout son corps, atteignant la moindre de ses cellules. Il échangea un regard complice avec Gabriel.
— Tu penses que des vampires peuvent être responsables ?Qu’ils utilisent peut-être les gosses comme sources de sang ?
Gabriel haussa les épaules. Sa cicatrice se tordit simultanément, signe certain que le sujet l’affectait profondément.
— J’espère que non.
— Ce ne serait pas la première fois.
Gabriel hocha la tête de manière solennelle.
— Jettes-y un œil, tu veux ?Mais s’il devient clair qu’il n’y a aucune implication paranormale, renvoie le dossier à Donnelly. Autant j’aimerais aider la police de San Francisco à trouver ces filles tellement tout ceci me dégoûte. autant nous n’avons pas le personnel nécessaire. Nos missions habituelles, les patrouilles et, maintenant, notre nouvel accord avec les Gardiens de la Nuit…
Il se frotta la nuque, là où ses longs cheveux marron foncé étaient attachés en queue de cheval.
— Honnêtement, poursuivit-il, je ne sais pas comment nous ferons pour traiter tout ce que nous avons déjà à faire.
John hocha la tête.
— Il est temps que la prochaine génération fasse sa part de travail.
La génération suivante était composée d’hybrides, les fils et les filles de couples mixtes qui, par nature, étaient mi-vampires, mi-humains. Ils combinaient donc les avantages des deux espèces, ce qui les rendait plus forts et plus polyvalents et, en fin de compte, moins vulnérables que les vampires de sang pur.
Gabriel soupira.
— Nous préparons les hybrides aussi rapidement que possible. Certains d’entre eux sont déjà sélectionnés pour leurs examens pratiques finaux. Mais n’oublions pas qu’ils sont toujours en formation.
— Je pense que tu les sous-estimes. Ryder est un jeune homme très responsable, dit-il, faisant référence au fils aîné de Gabriel. Tout comme les jumeaux d’Amaury.
Amaury, un des trois plus hauts directeurs de Scanguards, avait deux garçons avec sa compagne humaine de sang-mêlé, Nina.
Malheureusement, John ne pouvait étendre l’éloge qu’il vouait aux fils de Gabriel et d’Amaury à Grayson, le fils aîné du fondateur et PDG de Scanguards, Samson. Le jeune homme de vingt et un ans était une tête brûlée. Son corps avait atteint sa maturité le jour de son dernier anniversaire et resterait tel quel pour le reste de sa vie mais, jusqu’à présent, son esprit n’avait pas évolué de la même manière. Grayson était impulsif, arrogant et imprévisible. Sans compter qu’il était constamment en compétition avec sa sœur aînée, Isabelle, et quiconque qui, selon lui, le devançait.
Gabrielgloussa doucement.
— Et ils se croient tous invincibles. Ce qu’ils ne sont pas. Ryder n’a que vingt ans, tout comme les fils d’Amaury. Leur corps n’a pas encore atteint la maturité finale. Ils sont toujours vulnérables.
John soupira.
— Je comprends. Mais ils guériront aussi rapidement qu’un vampire de sang pur.
Ce qui était la vérité. Mais ils pouvaient avoir des cicatrices. Si Ryder venait à se blesser et à être défiguré par une cicatrice, tout comme Gabriel lorsqu’il était humain, celle-ci deviendrait permanente au moment où son corps se figerait dans son état définitif. Mais excepté cela, il valait mieux être hybride qu’un vampire de sang pur.
— N’oublie pas qu’ils sont avantagés par rapport à nous. Ils n’ont pas nos limites, ajouta John.
Son patron fit la grimace.
— Tu crois que je ne le sais pas ?Mais ce n’est pas parce qu’ils ne se feront pas griller par les rayons du soleil que cela signifie qu’ils seront en sécurité lorsqu’ils seront seuls. Qui va les surveiller durant la journée ?
Gabriel pointa John du doigt, puis lui-même.
— Nous, nous ne pouvons pas.
— Peut-être qu’il est temps d’enlever les petites roues et de les laisser nous prouver qu’ils sont prêts. Je ne me souviens pas avoir eu quelqu’un à ma surveillance quand j’étais un jeune vampire. Et toi ?
Pendant un moment, Gabriel demeura silencieux.
— C’était une autre époque.
— Pas moins dangereuse.
— Mais des dangers bien différents.
Ensuite, Gabriel se figea soudainement et désigna le dossier.
— Fais-nous savoir demain soir, à Samson et moi-même, si nous devons accepter ça.
John hocha rapidement la tête.
— Certainement. Je te tiens informé.
Il se retourna et ouvrit la porte de son bureau avant de la refermer derrière lui un instant plus tard. Il ôta sa veste et la pendit au dos de son fauteuil.
Le dossier était épais et, selon le sommaire collé sur le rabat intérieur, il contenait une douzaine de rapports de police incluant les photos des enfants disparus et tout autre élément jugé pertinent par la police. John jeta un œil à l’horloge pendue au mur. Tout ceci prendrait un certain temps.
Il sortit le premier rapport concernant une fille disparue depuis un peu plus de six semaines et commença à lire. Il avait terminé le second rapport et était sur le point d’entamer le troisième lorsque le téléphone sonna. Il regarda l’écran et décrocha.
— John Grant.
— C’est Louise, de la réception. Il y a une dame qui souhaite vous voir. Elle s’appelle Savannah Rice.
— Connais pas. Que veut-elle ?
— Elle est envoyée par le détective Donnelly de la Police de San Francisco.
— Hum.
Si Donnelly l’avait envoyée, ce devait être important.
— Bien. Faites-la escorter jusqu’à mon bureau.
— OK.
La réceptionniste mit fin à l’appel.
John referma le dossier et inspecta son bureau. Mais tout était propre. La poubelle était vide, le petit frigo sous son bureau, là où il gardait ses provisions de secours en sang humain, était verrouillé. Scanguards fournissait gratuitement du sang humain en bouteille à ses employés dans le but de réduire leur besoin de le chercher au sein de la population humaine de San Francisco. Bien sûr, la compagnie ne pouvait empêcher quiconque de puiser du sang directement dans une veine, s’il le désirait, mais le fait de fournir un accès aisé à la nourriture dont ils avaient tous besoin ou, le plus souvent, avaient terriblement envie, facilitait leur résistance à l’urgent désir de mordre un humain.
John s’était nourri lorsqu’il s’était levé et se sentait parfaitement rassasié du sang consommé. Celui-ci le sustenterait jusqu’au prochain coucher du soleil.
Un autre coup d’œil dans son confortable bureau lui confirma que tout était à sa place. Bien. Puisque la personne qui souhaitait le voir avait été envoyée par Donnelly, il était probable qu’elle fût humaine. Quoiqu’il n’eût pu en être certain. La probabilité qu’un vampire eût contacté Donnelly en sachant qu’il avait un lien direct avec Scanguards était toujours envisageable.
Le visiteur de John s’annonça d’un cognement à la porte.
— Entrez.
La porte s’ouvrit, et l’odeur d’une humaine parvint jusqu’à l’intérieur de son bureau, bien que sa silhouette fût cachée par le corpulent vampire qui l’escortait.
— John, une certaine Savannah Rice veut te voir.
Il fit un pas sur le côté et laissa entrer la femme avant de refermer la porte derrière elle.
John aurait dû entendre les pas du garde, tandis que celui-ci s’éloignait, mais le sang qui se précipitait dans ses veines couvrait tout autre son. Tout autre son excepté celui des battements de cœur de l’humaine qui se tenait, hésitante, dans son bureau.
Sois maudit, Donnelly ! Sois maudit de me l’avoir envoyée !
C’était une étrangère, une femme qu’il n’avait jamais vue auparavant. Et pourtant, alors qu’il la regardait, son cœur bondissait de reconnaissance, d’espoir, de désir. Elle représentait tout ce qu’il avait voulu oublier depuis quatre longues années. Nicolette, la femme qu’il avait aimée et perdue. Il la voyait en cette femme, bien qu’il sût que ce fût impossible. Il distinguait les similitudes, mais également les différences.
Tout comme Nicolette, Savannah Rice était une belle femme, sensuelle et gracieuse. Elle était grande, mais pas maigre. Elle avait des formes, partout où il le fallait, partout où un homme voulait sentir la chaleur de la chair s’abandonnant sous ses doigts. Elle ne dévoilait pas grand-chose, peu de femmes le faisait à San Francisco, les nuits étant trop fraîches, même durant l’été. Mais ce qu’il voyait lui réchauffait le sang. Douce et un peu plus foncée que du chocolat au lait, sa peau recouvrait des doigts élégants, des pommettes saillantes et un cou impeccable. Un cou où une veine pulsait de concert avec les battements de cœur. Il se mit à imaginer sa peau blanche contre celle de la jeune femme, ses mains lui étreignant les épaules, tandis qu’il buvait à même la source en jetant son dévolu sur cette veine, celle de sa compagne de sang-mêlé.
Mais elle n’était pas Nicolette. Il était suffisamment lucide pour le réaliser. Le visage de cette femme ne ressemblait en rien à celui de Nicolette. Ses yeux n’étaient pas marron foncé comme ceux de sa femme, mais bien d’un bleu éclatant qui suggérait qu’elle avait des parents ou des grands-parents de race blanche. Ses cheveux noirs étaient longs et onduleux, si différents de ceux de Nicolette, laquelle les avait toujours gardés plus courts et bien plus bouclés, de façon naturelle. Il y avait quelque chose de mystérieux chez cette femme, cette étrangère, quelque chose qui semblait être caché derrière le bleu de ses yeux.
Lorsqu’elle inspira, le regard de John fut attiré par le haut de son corps : un pull à l’encolure en V qui lui seyait comme un gant. Il épousait ses courbes les plus précieuses, deux globes circulaires plus parfaits qu’il n’eût jamais pu l’imaginer. Et une autre chose était également évidente. Il l’avait immédiatement aperçu lorsqu’elle était entrée dans son bureau : elle ne portait pas de soutien-gorge. Des seins bien fermes ne nécessitant aucune aide. Aucun support. Il sentit ses canines le démanger à la simple pensée d’imaginer ce qu’il ressentirait s’il les enfonçait dans sa chair tout en la sentant gémir sous lui. Il refoula difficilement ce besoin qui tentait soudainement de le contrôler. Ce besoin de posséder cette femme. De la prendre. De la chevaucher. De la mordre.
Mais il savait que c’était mal. Elle n’était pas Nicolette. Et le fait qu’elle partageât des similitudes physiques avec sa défunte compagne ne signifiait pas qu’elle pouvait combler le vide laissé par Nicolette. Balayer le vide dans lequel il vivait depuis ces quatre dernières années. Le fait que son corps répondît à celui de la jeune femme de la même manière qu’il avait répondu à son épouse ne signifiait pas que son cœur en ferait de même. Il valait mieux oublier tout ceci.
— Monsieur Grant ?
Cette voix, un doux filet d’eau semblable à une source de montagne, le fit tressauter. Il se releva d’un bond de son bureau et s’approcha d’elle en tendant la main.
— Madame Rice, comment puis-je vous aider ?
Elle lui serra rapidement la main, puis la relâcha tout aussi vite.
— C’est Mademoiselle. Il n’y a aucun Monsieur Rice. Je suis mère célibataire. Buffy n’a pas de père.
Quelque peu confus, John fouilla dans sa mémoire. Était-il censé savoir qui était Buffy ?La seule Buffy dont il eût jamais entendu parler était une tueuse de vampires dans une série télé des années quatre-vingt-dix.
— Buffy ?
— Oui, ma fille. Elle a disparu il y a trois jours. Le détective Donnelly ne vous a-t-il pas mis au courant ?Il a dit—
Le téléphone du bureau sonna à nouveau. Il fut content, car cela signifiait qu’il pouvait détourner le regard avant qu’elle ne se rendît compte qu’il ne pouvait s’empêcher de la dévisager. Plus que probablement en train de baver comme un pauvre idiot.
— Excusez-moi.
Il regarda l’écran et reconnut le numéro de la police de San Francisco.
— Il se peut que ce soit lui, ajouta-t-il.
Il tendit la main vers le téléphone et décrocha.
— Mike ?
— Salut, John. J’ai pensé que je pourrais t’appeler en vitesse au sujet de ta nouvelle affaire.
— C’est encore à décider, dit John, sachant que Donnelly comprendrait ce qu’il voulait dire.
— Oui, bien sûr. De toute façon, il y a eu un fait nouveau. La mère de la dernière fille qui a disparu n’est pas satisfaite de nous.
— Hum-hum.
— Elle pense que les policiers sont tous incompétents. Tu vois le genre. Alors, j’ai pensé à te l’envoyer pour que tu puisses lui assurer que nous faisons tout ce qui est en notre pouvoir. Elle s’appelle—
— Je sais comment elle s’appelle, l’interrompit-il.
Une minuscule pause s’ensuivit.
— Elle est dans ton bureau, n’est-ce pas ?
— Merci pour le tuyau.
Il s’assura que Donnelly entendît le ton sarcastique dans sa voix.
— Comme je l’ai dit, elle n’est pas satisfaite de nous. Une grande gueule, si tu vois ce que je veux dire. Je n’ai pas le temps de faire quoi que ce soit si elle se pointe toutes les cinq minutes pour demander l’évolution du dossier.
Génial ! Elle était donc de ce genre : autoritaire, exigeante, insistante.
— Eh bien, merci de me l’avoir adressée. Je ne manquerai pas de réciproquer quand je le pourrai.
Donnelly eut l’audace de glousser.
— Pas nécessaire. Tiens-moi juste informé et, honnêtement, j’espère que tu trouveras que cette affaire pue le paranormal car, moi, je n’ai rien. Aucune demande de rançon dans aucun des dossiers. Aucun témoin oculaire des enlèvements. Rien. Pas la moindre piste.
— Te tiens au courant.
Il n’attendit pas la réponse de Donnelly et reposa le cornet sur le récepteur. Quoi qu’il en fût, ceci était son affaire, du moins pour ce soir. Et il ne laisserait rien faire obstacle à son professionnalisme. Il était garde du corps depuis plus longtemps qu’il ne pouvait s’en souvenir, tout d’abord au service du vampire roi de Louisiane et, durant ces quatre dernières années, au service de Scanguards. Il était entraîné à ne montrer aucune émotion, et c’était exactement de cette manière qu’il dirigerait cette affaire. Bien qu’il ne lui serait pas aisé d’avoir affaire à cette humaine dont le sang imprégnait son bureau d’une odeur qui lui démangeait les canines et faisait durcir son sexe bien malgré lui.
Il inhala cet arôme, en emplit ses poumons avant de s’armer de courage et lui faire à nouveau face. Lorsqu’il rencontra son regard, il sut immédiatement qu’elle l’avait minutieusement examiné durant tout le temps où il avait été au téléphone. Et conscient de ce fait, pour une raison inexplicable, il éprouva des difficultés à faire preuve d’indifférence.
— Mademoiselle Rice, asseyez-vous, je vous prie.
Savannah s’assit sur le siège qui lui était offert. Sans toutefois avoir la moindre idée de la personne qu’elle trouverait lorsque le détective Donnelly lui avait suggéré d’aller voir John Grant afin d’obtenir de l’aide pour retrouver sa fille, elle ne s’était pas attendue à tomber sur quelqu’un comme lui. Pour commencer, elle l’avait imaginé plus âgé, bien plus âgé. Donnelly n’avait-il pas dit que John Grant était très expérimenté en matière de recherche de personnes disparues ?Comment pouvait-il avoir acquis une telle expérience alors qu’il n’avait visiblement que la trentaine ?
Et ensuite, il y avait son apparence : pour un détective privé, il était trop bel homme, trop grand, trop athlétique. Quelqu’un ressemblant à un top-modèle choisirait-il vraiment une carrière dans laquelle il serait quotidiennement confronté à des criminels et à la violence alors qu’il pourrait aisément trouver du travail dans le mannequinat, le cinéma ou la mode ?Son abondante chevelure noire pouvait, à elle seule, faire la publicité de n’importe quel produit capillaire et en faire un best-seller.
— Comment puis-je vous aider, Mademoiselle Rice ?
Cette question extirpa Savannah de sa rêverie. Elle mit de côté ses pensées relatives à l’apparence de son interlocuteur en se remémorant les brillantes éloges que Donnelly avait faites, tant envers lui qu’envers Scanguards. Afin d’être certaine de leur sérieux, elle s’était renseignée sur la compagnie et n’avait trouvé que des avis élogieux. Apparemment, même le maire s’assurait leurs services de temps en temps. Et ce qui était suffisamment bien pour la Ville de San Francisco devait l’être également pour elle. Du moins l’espérait-elle.
Elle déglutit et joignit les mains sur ses genoux en se forçant à demeurer calme. C’était difficile, car à chaque fois qu’elle devait raconter ce qui s’était passé, les larmes survenaient inévitablement et anéantissaient toute capacité à s’exprimer. Cela n’aidait personne, et encore moins Buffy. Pour le bien de sa fille, elle devait se ressaisir.
Je n’abandonnerai pas avant de t’avoir retrouvée, chérie. Je le promets.
— Mademoiselle Rice ?
Elle reposa brusquement le regard sur le visage de John.
— Le détective Donnelly a dit que votre fille avait disparu il y a trois jours, ajouta John. Pouvez-vous me dire ce qui s’est passé ?
Elle hocha la tête. La voix de son interlocuteur était à présent empreinte d’un certain intérêt, et cela l’aida à se mettre à l’aise. Il était désireux d’écouter.
— Monsieur Grant, merci de me recevoir—
— Appelez-moi John, s’il vous plaît. Parlez-moi de votre fille. Buffy, c’est bien comme cela qu’elle s’appelle ?
Savannah acquiesça d’un hochement de tête.
— Elle n’a que dix ans.
Et elle était probablement morte de peur, où qu’elle se trouvât.
— Elle a disparu après l’école, ajouta-t-elle.
— Dites-moi tout en commençant par le jour où elle a disparu.
— Elle fréquente l’école primaire de Grattan, à Cole Valley et ce, depuis la maternelle. Je la dépose habituellement juste après huit heures et, ensuite, je me rends à mon bureau dans South Market et—
— Habituellement ?l’interrompit-il.
Bien que l’école de Buffy ne fût pas très éloignée de son bureau situé dans le quartier essentiellement commercial de South Market, ce jour-là, elle avait dû se rendre directement à son bureau.
— Oui, mais ce matin-là, j’avais une réunion d’affaires de bonne heure. Alors, j’ai demandé à ma voisine de l’emmener. Son fils va à la même école qu’elle et, donc, Buffy s’y est rendue avec eux.
— Et vous avez confiance en votre voisine ?J’aurai besoin de son nom et de son adresse.
Savannah fit un mouvement dédaigneux de la main.
— Ça ne s’est pas passé à ce moment-là. Buffy est bien arrivée à l’école. Elle y était toute la journée. Les professeurs et les élèves l’ont confirmé. Ça s’est passé plus tard.
— Plus tard ?L’heure de sa disparition n’a pas encore été établie ?
— Oui et non.
Et c’était précisément à ce sujet que sa frustration envers la police avait commencé. Ils écartaient certaines affirmations des témoins, juste parce que ces témoins étaient des enfants.
— Elle suit également le programme d’activités parascolaires là-bas. Et alors que certains des élèves disent l’y avoir vue, d’autres disent qu’elle était déjà partie.
— Comment cela se fait-il ?
— Ils faisaient une sortie éducative improvisée.
— Où cela ?
— Juste à quelques pâtés de maisons, jusqu’à un belvédère appelé Tank Hill.
John hocha la tête.
— Je le connais. N’est-ce pas inhabituel d’entreprendre une telle sortie de manière impromptue ?
— Il arrive, à l’occasion, que des activités soient reportées d’un jour à un autre en fonction de la disponibilité des enseignants ou du mauvais temps. Vous savez, la veille, tout était complètement recouvert par le brouillard. Ils n’ont donc pas pu aller se promener le jour prévu. Cet après-midi-là, quand le brouillard s’est levé, le professeur a décidé d’en profiter.
— Et vous dites que personne n’est certain que votre fille était en balade avec sa classe ?
— L’instituteur a dit qu’elle était avec eux. Elle avait même coché son nom sur le registre, avant la balade et après, quand ils sont rentrés à l’école. Mais plusieurs enfants ont dit qu’ils n’avaient pas vu Buffy.
— Hum.
John joignit les mains sous son menton et ferma les yeux pendant un instant.
Ce geste attira l’attention de Savannah sur les longs cils noirs de John, de même que sur les épais sourcils qui suivaient le contour de ses paupières. Lorsqu’il rouvrit subitement les yeux, son regard épingla celui de Savannah.
— À quelle heure se termine le programme parascolaire ?
— À dix-huit heures.
— Et vous y étiez pour la reprendre ?Vous l’attendiez ou étiez-vous en retard ?
Savannah se pencha en avant sur sa chaise.
— Ni l’un ni l’autre. J’ai assisté à une réunion, et elle a débordé.
— Alors, vous avez demandé à votre voisine de la ramener à la maison ?
Était-il en train de la juger parce qu’elle n’avait pu être présente au moment où sa fille en avait eu besoin ?
— Non.
Savannah réalisa à quel point tout cela commençait à la bouleverser, mais elle ne put s’empêcher de laisser la détresse s’immiscer dans sa voix.
— Son fils n’est pas inscrit au programme parascolaire, ajouta-t-elle. J’ai appelé ma babysitter. Elle est venue chercher Buffy. Mais lorsqu’elle est arrivée, ma fille n’était pas là.
— Je présume que votre babysitter— comment s’appelle-t-elle ?
— Elysa. Elysa Flannigan.
— Je présume qu’Elysa figure sur la liste des personnes autorisées à venir chercher Buffy ?
— Oui. L’école ne libère les enfants qu’aux personnes inscrites sur leur liste. Et Elysa y figure.
— Était-elle à l’heure ?
— Elle a dit qu’elle l’avait été.
Et Savannah la croyait. Elysa était sa babysitter depuis que Buffy avait trois ans, et c’était une fille très responsable.
— Elle était à l’heure. Elle est toujours ponctuelle.
— Même si vous lui dites à la dernière minute que vous avez besoin d’elle pour aller chercher votre fille ?
Sur ce, Savannah se mit en colère et bondit de son siège.
— Qu’êtes-vous en train d’insinuer ?Que je suis une mauvaise mère ?Que je ne veille pas sur mon enfant ?
John se leva et contourna le bureau.
— S’il vous plaît, Mademoiselle Rice, calmez-vous.
— Vous avez raison, c’est ma faute. Je ne lui ai pas accordé assez de temps. J’ai fait passer le travail avant elle, alors que j’aurais dû aller la chercher moi-même, la garder avec moi plutôt que de lui faire suivre un programme parascolaire afin de pouvoir passer plus de temps au boulot. C’est ma faute.
— Ce n’est pas votre faute, et je n’insinue pas que vous êtes une mauvaise mère. J’essaie juste de définir ce qui s’est passé et comment ça s’est passé. Je ne vous juge pas. Je suis certain qu’il est assez difficile d’élever un enfant seule.
Ces dernières paroles apaisèrent un peu Savannah. Elle se sentait mal de s’être emportée.
— Vous devez bien comprendre que Buffy représente tout pour moi. Je l’aime plus que ma propre vie.
Des larmes se formèrent dans ses yeux, et elle n’eut plus la force de les retenir.
— Penser qu’elle est là, quelque part, enlevée par quelqu’un, seule et effrayée, me bouffe à l’intérieur, ajouta-t-elle. Je dois la retrouver. À n’importe quel prix.
Elle frotta le revers de la main sur sa joue humide.
— La police est trop lente, précisa-t-elle. L’alerte Amber n’a donné aucun résultat. Et les policiers n’ont aucune idée de la suite à donner. Aucune suggestion, aucun plan.
Elle regarda John droit dans les yeux.
— Avez-vous des enfants ?
Quelque chose sembla secouer John, mais cela disparut tout aussi rapidement.
— Non.
— Si vous en aviez, vous comprendriez que je ne peux reculer devant rien. Quoi que cela coûte, je dois retrouver Buffy. Il faut que vous la rameniez à la maison.
John se tenait là, visiblement en train de contempler quelque chose, presque comme s’il ne savait pas comment dire ce qu’il avait à dire.
— Je dois être honnête avec vous. Il se peut que l’inspecteur Donnelly ait surestimé ce que Scanguards est en mesure de faire. Je ne veux pas que vous, euh…
— Qu’êtes-vous en train de dire ?Que vous n’allez pas accepter le travail ?Je présume que vos services ne sont pas bon marché, mais je peux néanmoins payer—
Il leva la main.
— Cela n’a rien à voir avec l’argent. En fait, si la disparition de votre fille est bien liée à d’autres disparitions survenues dans la Baie, et si nous acceptons le dossier, la Ville nous paiera.
Elle secoua la tête.
— Je ne comprends pas. D’autres disparitions ?Combien y en a-t-il eu ?
— Une douzaine de filles de l’âge de Buffy ont disparu rien que depuis ces six dernières semaines. La police—
— Oh mon Dieu !
Savannah tendit la main vers la chaise afin de se ressaisir. Mais avant qu’elle n’eût pu y parvenir, John lui avait attrapé le coude afin de l’aider à maintenir son équilibre.
Elle avait bien lu certains articles à propos de quelques disparitions. Ce genre de choses arrivait et, pour une grande agglomération, il n’était pas rare qu’il y en eût une ou deux par mois. Mais une douzaine ?
— Les journaux. Pourquoi—, poursuivit-elle.
— Pourquoi les journaux ne l’ont-ils pas largement rapporté ?Parce que la police et les parents des enfants ont décidé qu’il était dans l’intérêt de tous de maintenir cela secret afin que la police puisse investiguer sans que des malades ne viennent inonder leur numéro vert avec leurs fausses observations et théories.
— Secret ?
La colère l’emporta.
— Si j’avais su, poursuivit-elle, je l’aurais protégée. J’aurais engagé quelqu’un pour la surveiller vingt-quatre heures sur vingt-quatre, sept jours sur sept !
— Je sais que vous l’auriez fait.
Surprise, elle rencontra son regard. La teinte chocolat des yeux de John scintillait de compréhension, comme si une flamme la transformait en un marron doré.
— J’ai reçu le dossier de la police ce soir.
Il désigna un épais dossier sur son bureau.
— Je vais voir si je peux relier la disparition de votre fille à celle des autres filles et trouver un dénominateur commun, précisa-t-il. S’il y a quelque chose qui relie ces cas, je le trouverai.
Sa voix était empreinte d’une confiance contagieuse.
— Merci !
— Ne me remerciez pas encore. Je ne pourrai vous confirmer que nous acceptons le dossier que lorsque j’aurai vérifié tous les détails. Êtes-vous venue en voiture ?
Un peu confuse par cet abrupte changement de sujet, elle secoua la tête.
— J’ai pris un taxi. Il n’y a jamais de place de stationnement dans la Mission.
— Bien. Nous prendrons ma voiture. Elle est au garage qui se trouve au sous-sol.
Elle fronça les sourcils.
— Pour faire quoi ?
— Vous allez me montrer tous les endroits qui vous sont associés, à vous et à Buffy : votre maison, votre boulot, l’école de Buffy, la maison de votre voisine, celle de votre babysitter. Je dois visualiser la vie de Buffy.
Elle jeta un œil à l’horloge pendue au mur. Il était bien vingt heures passées, et il faisait noir dehors.
— Vous voulez dire, maintenant ?
— La sécurité est un boulot de vingt-quatre heures.
Savannah eut envie de serrer cet homme dans ses bras. Sa volonté de se plier en quatre et de ne pas perdre davantage de temps, mais bien de se mettre immédiatement en action, emplit son cœur d’espoir.
Tiens bon encore un peu, Buffy. Maman arrive.
John attrapa sa veste, ouvrit la porte à Savannah et lui fit signe de le précéder. Un geste courtois, oui, mais cela signifiait également qu’il pouvait la suivre du regard, regard qui se porta immédiatement sur son postérieur. Peut-être, aurait-il dû, pour une fois, renoncer à ses manières du Sud car, regarder ce postérieur bien galbé, ces fesses rondes et fermes, lui procura toutes sortes d’idées totalement inappropriées dans ce genre de situation. Il s’enorgueillissait d’être un vampire civilisé, un homme qui maintenait fermement ses besoins et ses désirs sous contrôle. Mais simplement regarder Savannah, tandis qu’elle se déhanchait dans le couloir, à la sortie de son bureau, lui donna l’envie de briser cette retenue et de balancer toutes ses bonnes intentions par la fenêtre.
Savannah se retourna et le regarda. Surpris, il se figea. Merde, avait-elle, d’une manière ou d’une autre, ressenti qu’il lui matait le derrière ?
— Par où ?demanda-t-elle.
— Euh, par ici, dit-il en désignant les ascenseurs.
Tandis qu’il marchait à côté d’elle, le silence qui planait entre eux était gênant.
— Mademoiselle Rice, lui demanda-t-il alors. Je suis certain que, malgré les recommandations de l’inspecteur Donnelly, vous avez considéré d’avoir recours à l’aide d’autres compagnies pour retrouver votre fille. Pourquoi avoir choisi Scanguards ?
— J’ai parlé à plusieurs autres compagnies, mais aucune d’elles ne m’a parue aussi qualifiée.
Elle lui lança un regard latéral et poursuivit.
— Elles ont toutes débuté la réunion initiale en exposant leur structure tarifaire et leurs indemnités journalières, leurs dépenses et tout le reste. J’ai alors su qu’ils ne se soucieraient pas de retrouver Buffy avant de m’avoir facturé plusieurs heures.
— Hum.
Il aurait éprouvé la même crainte s’il avait été traité de cette façon.
— Mais quand votre première réaction a été de de me demander de vous parler de Buffy et de ce qui s’était passé, j’ai su que Scanguards était différente. Les recommandations de l’inspecteur Donnelly y ont certainement contribué, mais je ne me fie pas à l’opinion des autres. Je me forge la mienne.
C’était peut-être cet état d’esprit que l’inspecteur Donnelly avait voulu qualifier d’autoritaire et d’exigent, mais John le considérait plutôt comme pourvu de bons instincts. De très bons instincts.
— Je ferai de mon mieux afin de ne pas vous décevoir.
Lorsqu’ils arrivèrent aux ascenseurs, John appuya sur le bouton, et Savannah se tourna vers lui.
— Au départ, je n’ai pas eu très confiance en la police. Mais après ce que vous venez de me dire au sujet des autres enfants, je sais que je ne peux me fier à eux pour retrouver Buffy. Je déteste vous mettre davantage de pression, mais Scanguards représente mon dernier espoir.
Avant qu’il n’eût pu répondre, les portes de l’ascenseur s’ouvrirent, et Amaury, meilleur ami de Samson, le fondateur de Scanguards, et directeur haut-placé de la compagnie, en sortit. Comme toujours, il était habillé de manière décontractée, en pantalon cargo et chemise à col ouvert. Ses longs cheveux noirs, toutefois plus courts que ceux de John, lui touchaient les épaules. Des épaules aussi larges qu’un tank. Il aurait certainement fait un bon défenseur, quoique John sût qu’Amaury n’avait jamais joué au football américain durant sa jeunesse passée dans la France du seizième siècle.
— Salut, John, le salua Amaury.
Il hocha la tête à l’intention de Savannah.
— Bonsoir, Amaury.
— Content de tomber sur toi. Il y a eu un petit changement d’horaire.
John haussa un sourcil. Allait-il devoir laisser Savannah aux mains de quelqu’un d’autre ?
— Ouais ?
— Damian et Benjamin ont demandé de faire leurs exercices pratiques avec toi à partir de la nuit prochaine. Emmène-les patrouiller et trouve-leur quelque chose à faire.
Amaury fit la grimace.
— Désolé, ajouta-t-il, mais j’ai dû y consentir ou ils m’auraient rabattu les oreilles avec ça.
John haussa les épaules et tendit la main vers la porte de l’ascenseur afin de l’empêcher de se refermer.
— Ça ne me dérange pas. Comme je l’ai dit tout à l’heure, les garçons doivent commencer à faire leur part de travail. Nous avons besoin de ces bras supplémentaires.
Amaury le gratifia d’une tape sur l’épaule.
— Content que tu le voies de cette façon. Tout le monde n’aime pas entraîner la nouvelle génération.
Il fit mine de s’éloigner, puis s’arrêta et sourit.
— Oh, ajouta-t-il. Et je leur ai dit que ta parole est loi. Ils ne tiennent pas compte de moi parce que je suis leur père, mais il n’y a aucune raison que tu tolères un tel comportement.
Involontairement, John dut glousser.
— Ce sont de bons garçons. Tu aurais pu avoir pire.
Amaury lui adressa un clin d’œil.
— Ouais, j’aurais pu avoir Grayson comme fils.
D’un hochement de tête accompagné d’un « M’dame » adressé à Savannah, il s’en alla.
John regarda Savannah et désigna l’ascenseur.
— On y va ?
Dans la cabine, John appuya sur le bouton du deuxième niveau de parking et observa la fermeture des portes.
— Je n’ai pu m’empêcher d’entendre que vous patrouillez. Quel genre de patrouilles faites-vous ?demanda Savannah.
— Nous avons un contrat avec la Ville. Des services de sécurité.
— Les forces de police de la Ville sont trop petites pour faire face à leurs obligations, ajouta-t-il, tandis qu’elle lui lançait un regard empreint de curiosité. Alors, ils ont engagé Scanguards afin de patrouiller dans certains quartiers, la nuit. De manière à garantir une certaine sécurité en ville.
Sécurité contre des créatures de la nuit. Des créatures telles que lui.
— La Ville semble avoir énormément confiance en Scanguards.
— Nous travaillons avec elle depuis longtemps.
Le précédent maire de San Francisco, un hybride et ami de Samson, avait négocié ce marché. Lorsque le nouveau maire avait repris les fonctions, tant ce dernier que le chef de la police avaient été mis au courant de l’existence des vampires. Par chance, ils avaient accepté d’honorer l’arrangement pris par le maire précédent et avaient juré de maintenir secrète l’existence des vampires, des sorciers et des autres créatures surnaturelles.
Cet accord fonctionnait bien pour les deux parties : la ville était en sécurité, et Scanguards recevait un salaire régulier du Trésor.
Les portes de l’ascenseur s’ouvrirent.
— Allez-y. Ma voiture est garée sur la gauche.
Il suivit Savannah dans le propre garage bien éclairé.
— Le SUV ?demanda-t-elle en désignant un van aux vitres teintées.
Protégeant les vampires du soleil, conducteur inclus, ce van était un des modes de transport préférés de Scanguards.
John secoua la tête et appuya sur le bouton de sa télécommande. Les phares de la voiture garée à côté du SUV s’éclairèrent brièvement.
Le regard de Savannah dériva brusquement vers ce véhicule.
— La voiture de sport ?
Il y eut un soupçon de surprise dans ses yeux, comme si elle ne s’était pas attendue à ce que John conduisît une voiture de sport ou gagnât suffisamment d’argent pour se permettre un véhicule aussi cher. Ou peut-être appréciait-elle tout simplement la belle machine allemande qu’il possédait. Il ne savait pour quelle raison il avait du mal à la cerner.
La Mercedes noire AMG était une élégante voiture à deux places. Elle était toute sa fierté et sa joie. Elle avait également été sécurisée pour les vampires, ses vitres étant recouvertes d’un film imperméable aux UV qui laissait toutefois pénétrer suffisamment de lumière afin que la voiture n’eût pas l’air suspecte.
Il ouvrit la portière du côté passager et attendit que Savannah se glissât sur le siège en cuir avant de refermer la portière. Il s’installa ensuite du côté conducteur et mit le moteur en marche. Quelques instants plus tard, la voiture se trouvait dans le dense trafic de la rue de la Mission avant de prendre la direction nord vers Cole Valley.
— Nous allons commencer par l’école, annonça-t-il.
— Il n’y aura personne, maintenant. C’est la nuit.
— Aucune importance.
En fait, il valait mieux fouiner tout autour sans être questionné par le personnel scolaire. De plus, une visite diurne était totalement exclue.
— Je pourrai voir ce que j’ai à y voir.
— Vous travaillez beaucoup la nuit ?demanda-t-elle.
— La plupart du temps.
Quoique pas par choix.
— Ça ne vous dérange pas ?
— On s’y habitue.
Après plusieurs centaines d’années.
— Hum.
Elle regarda par la vitre passager et demeura silencieuse pendant un moment.
— Ouais, poursuivit-elle. Je suppose qu’on peut s’habituer à beaucoup de choses si on y est obligé.
John put percevoir de la tristesse dans sa voix. Il sut alors qu’il était temps d’orienter la conversation dans une autre direction. Cela était tout aussi bien, car il avait encore beaucoup de questions afférentes à Buffy à poser.
— Vous avez dit qu’il n’y avait pas de Monsieur Rice. Alors, où est-il, le père de Buffy ?
Elle tourna la tête vers lui.
— Je ne sais pas. Pourquoi demandez-vous cela ?
— Parce que nous ne pouvons pas exclure la possibilité qu’il puisse l’avoir kidnappée. Cela arrive régulièrement que des parents n’ayant pas la garde kidnappent leurs propres enfants dans le but de rendre la monnaie de la pièce à leur ex-conjoint.
— Je n’ai probablement pas été claire tout à l’heure.
Elle soupira avant de poursuivre.
— Il n’y a pas de père. Aucun que Buffy puisse connaître. Je n’ai jamais été mariée.
— Votre ex-petit ami, alors ?
Du coin de l’œil, il la vit secouer la tête.
— Je voulais un enfant, mais je ne voulais pas d’un homme par-dessus le marché. Le père biologique de Buffy ne sait même pas qu’il a un enfant. Il a fait don de son sperme à une banque et, pour ce que j’en sais, il a beaucoup d’enfants dont il ne sait rien. Il était un donneur très désirable.
Cette nouvelle le surprit et le rendit curieux.
— Que voulez-vous dire par désirable ?
Elle haussa les épaules.
— On peut choisir les profils à la banque de sperme. Vous voyez, choisir le genre d’attributs que vous espérez que le donneur transmettra à votre enfant. Il avait un doctorat de l’Institut de Technologie du Massachussetts, un QI qui l’a placé au plus haut niveau chez Mensa. Je sais que certaines personnes me jugeraient pour la façon dont je l’ai choisi. Mais je voulais les meilleurs gènes pour mon enfant.
Stupéfait par ces paroles, John la dévisagea.
— Étaient-ce les seuls critères qu’ils vous ont donnés ?Rien d’autre afin de pouvoir l’identifier ?
Elle secoua légèrement la tête.
— Je savais qu’il était de race blanche, aux yeux bleus et cheveux noirs. Mais ils ne vous donnent pas grand-chose d’autre. Aucune photo, si c’est ce que vous voulez dire.
— Hum. Je vois. Donc, je suppose qu’il ne pourrait jamais découvrir que son sperme a donné naissance à un enfant.
Sachant à quel point les lois sur la vie privée étaient strictes, John ne s’attendit pas à une réponse.
— Vous ne connaissez pas plus son nom que lui ne connaît le vôtre, ajouta-t-il.
Une impasse, donc.
— Non, désolée. Peut-être aurais-je dû, à l’époque, récolter plus d’informations à son sujet, mais je ne l’ai pas fait.
John fronça un sourcil.
— Que voulez-vous dire ?Comment ?
— Leurs systèmes sont piratables.
— Piratables ?Comment le savez-vous ?
— Je suis programmeuse. À l’époque, j’ai été tentée d’en savoir plus au sujet du père potentiel de Buffy. Je suis rentrée dans leur système. C’était facile.
Elle soupira.
— Mais je ne suis pas allée jusqu’au bout. En fin de compte, j’ai décidé qu’il valait mieux ne pas en savoir trop. Je n’ai donc jamais accédé à son dossier. Ce que je savais me suffisait. Le donneur de sperme était sain, jeune et intelligent. C’était tout ce qui comptait.
John hocha la tête tout en analysant ces paroles. Elle avait pris la sage décision de ne pas aller plus loin dans sa démarche. Mais une chose le rendait toutefois curieux.
— Pratiquez-vous toujours en tant que pirate informatique ?
Après tout, il se pourrait tout à fait qu’elle eût attiré l’attention de quelqu’un sur elle en ayant piraté un système. Quelqu’un qui voulait à présent lui faire du mal en kidnappant Buffy.
Elle secoua la tête.
— En fait, je travaille à présent dans la cyber sécurité. Cette expérience m’a démontré à quel point certaines organisations sont vulnérables. Mon boulot consiste à les aider à se protéger contre une cyber attaque. Un de mes premiers jobs en tant qu’indépendant consistait à consolider la sécurité de la banque de sperme.
— Vous dirigez votre propre affaire ?En tant qu’expert en cyber sécurité ?
Il la regarda, laissant courir longuement les yeux sur la féminité de ses traits.
— Pourquoi est-ce que cela vous surprend ?Parce que je suis une femme ?
— Je ne voulais pas—
Elle leva une main.
— Inutile de vous excuser. Cela arrive souvent.
— C’est juste que, lorsque je pense à un consultant en cyber sécurité, j’imagine quelqu’un d’un peu plus excentrique.
Et Savannah était tout sauf excentrique. Elle était sensuelle, sexy, comme le péché. Et voilà qu’il pensait à nouveau à elle de manière sexuelle. Combien de temps était-il parvenu à ne pas penser à ses délicieuses courbes en agissant de manière professionnelle et en lui posant des questions sur des choses qui auraient dû être de nature innocente ?Cinq minutes ?Dix ?
S’il continuait de la sorte, une ou deux choses se passeraient. Soit il se retrouverait à plaquer Savannah contre la surface plane la plus proche et à enfouir son sexe en elle tout en s’abreuvant de son sang, soit il retournerait chez lui au lever du soleil en ayant besoin d’une douche glacée, d’un travail manuel ou probablement les deux.
La première solution, il ne pouvait se l’autoriser sous aucun prétexte et, la seconde, ne semblait pas le moins du monde attrayante.
John était devenu subitement silencieux, et Savannah se demanda si elle avait dit quelque chose de mal. Elle espéra que sa confession au sujet du père de Buffy ou de sa tentative de piratage ne l’avait pas monté contre elle, car elle ne pouvait risquer que Scanguards n’acceptât pas de l’aider. Elle devait retrouver Buffy et la ramener à la maison. C’était tout ce qui comptait. Si nécessaire, elle ferait n’importe quoi. Demeurer silencieuse durant le reste du trajet de manière à éviter de prononcer toute parole pouvant lancer la polémique était un petit prix à payer si cela lui permettait de s’assurer les services de Scanguards.
Lorsqu’ils se garèrent à côté de l’école primaire de Grattan, Savannah fut soulagée de sortir de la voiture. Le bâtiment scolaire occupait plus de la moitié d’un pâté de maisons. Une seule rangée d’habitations faisait face à la cour de récréation qui occupait l’autre moitié du bloc.
— Montrez-moi où les parents viennent rechercher leurs enfants.
Elle poussa presque un cri au son de la voix de John. Elle ne l’avait pas entendu contourner la voiture pour la rejoindre.
— Je ne voulais pas vous effrayer, dit-il doucement.
— Ce n’est rien. Je suis juste à bout de nerfs.
Elle désigna le coin de la rue.
— Par ici, précisa-t-elle.
Un instant plus tard, un bip se fit entendre derrière elle : John venait de verrouiller les portières de sa voiture. Le brouillard était à nouveau tombé sur la ville, et l’air froid et humide semblait transpercer le pull de Savannah. Cela lui fit remarquer qu’elle n’avait pas pris de veste. Elle frissonna involontairement.
— Vous avez froid, dit John, d’un ton neutre.
— Aucune importance.
Mais déjà, il ôtait sa veste afin de la poser sur les épaules de la jeune femme. L’intérieur était toujours empreint de la chaleur de son corps. Elle ne put s’empêcher de s’emmitoufler dans le vêtement afin de ne pas laisser échapper cette chaleur.
— Merci. Normalement, je n’ai pas aussi vite froid. Mais je n’ai pas beaucoup dormi depuis…
Elle ne termina pas sa phrase. Elle savait qu’elle n’avait pas à le faire. Elle désigna une barrière.
— C’est là que les parents attendent dans leur voiture, et que les professeurs signent le registre de sortie des enfants.
John hocha la tête.
— Attendez ici.
Savannah l’observa se diriger vers la barrière, regarder minutieusement de l’autre côté et ensuite évaluer les environs. Il ne regardait pas uniquement l’école, mais également les maisons en face et les bâtiments situés des deux côtés de la rue suivante. Lorsqu’il remonta la petite côte et se retourna afin de regarder le toit de l’école et le parking des professeurs contigu à la cour de récréation des enfants, Savannah se demanda ce qu’il cherchait.
Il fut de retour quelques instants plus tard.
— Que regardiez-vous ?
— Si je devais enlever un enfant de cette école, je devrais tout d’abord examiner les lieux, déterminer où les professeurs se trouveraient, qui pourrait me voir en fonction de l’endroit où je me tiendrais et où se situerait la meilleur cachette.
— Mais vous ne pouvez pas suffisamment bien voir, la nuit. Il fait trop noir.
— Je reviendrai demain, pendant la journée, promit-il. Mais je voulais avoir une idée, ce soir, afin de pouvoir visualiser le tout quand je parcourrai le rapport de police.
Il lui attrapa le coude.
— Maintenant, ajouta-t-il, rendons-nous chez votre babysitter.
Dans la voiture, Savannah lui donna l’adresse d’Elysa, et il l’encoda dans le système de navigation de sa voiture. L’appartement de Laurel Heights que la jeune babysitter partageait avec deux colocataires ne se trouvait pas loin. Dès qu’ils furent arrivés, John stoppa la voiture, mais ne coupa pas le moteur.
— Voulez-vous que je vous la présente ?demanda Savannah.
Il secoua la tête.
— Je ne veux pas qu’elle sache qui je suis. Je ne vais pas lui parler tout de suite. Du moins, pas dans l’immédiat. Si elle est impliquée dans la disparition de Buffy, je ne veux pas l’effrayer. Je la surveillerai pour vérifier s’il n’y a rien de louche.
— Et maintenant ?
— Je vous raccompagne chez vous. Ensuite, je me pencherai sur différentes choses.
Elle lui donna son adresse dans le quartier de Lower Pacific Heights. Ce n’était pas loin, et il y avait très peu de trafic à cette heure de la nuit. Elle était occupée à trouver quelque chose à dire afin de noyer ce silence qui planait entre eux, lorsque John se mit soudain à parler.
— Vous avez mentionné diriger votre propre entreprise. Y a-t-il des employés ?
— Deux experts en informatique travaillent pour moi : Rachel Ingram et Alexi Denault. Pourquoi ?
— Ont-ils rencontré Buffy ?
— Bien sûr. Buffy m’accompagne occasionnellement au bureau quand les cours se terminent tôt ou quand je ne peux avoir la babysitter. Ils la connaissent bien.
— Donc, tous deux sont à votre service depuis longtemps ?
— Alexi est relativement nouveau. Je l’ai engagé il y a environ huit mois. Mais Rachel est avec moi depuis presque trois ans. Pourquoi demandez-vous cela ?
— La plupart des cas d’enlèvement implique des gens qui connaissent la victime, répondit-il.
À ces paroles, Savannah prit une profonde inspiration. Elle n’aimait pas penser à sa fille en tant que victime. Cela la déshumanisait et faisait d’elle un objet.
— Je suis désolé, dit rapidement John, comme s’il comprenait.
Était-ce le cas ?
Elle le regarda et hocha la tête.
— Donc, vous pensez qu’Alexi ou Rachel pourraient avoir quelque chose à voir avec la disparition de Buffy ?Je ne vois pas ça comme ça. Ni Rachel ni Alexi n’ont jamais montré le moindre intérêt pour elle. Vous savez, ils n’aiment pas les enfants. Ils étaient assez gentils avec elle quand elle venait au bureau, mais je pouvais voir qu’ils n’étaient pas enthousiastes à l’idée de l’avoir dans les parages, en train de poser des questions et de faire du bruit pendant qu’ils tentaient de travailler. Buffy est une petite fille curieuse. Certains adultes trouvent cela épuisant.
Mais Savannah ne rechignait jamais à répondre aux nombreuses questions de sa fille afin de satisfaire sa curiosité.
— Nous ne pouvons exclure cette possibilité. Envoyez-moi leur adresse par email, de même que l’adresse de votre bureau. Je ferai des recherches les concernant, insista John.
Un instant plus tard, il se garait devant chez elle, un condo situé dans un bâtiment victorien à deux étages dans une petite rue calme.
— Vous habitez au-dessus ou en-dessous ?
— Au-dessus.
— Et la voisine qui a emmené Buffy à l’école ce jour-là ?
Savannah désigna une maison unifamiliale dans le même pâté d’immeubles.
— Deux habitations plus bas. La petite maison jaune. Nancy y vit avec son mari et son fils.
John hocha la tête.
— J’aimerais voir la chambre de Buffy.
— Bien sûr.
Savannah tendit la main vers la poignée de la portière et sortit de la voiture.
Lorsqu’elle contourna le véhicule, elle remarqua que John regardait en bas de la rue, en direction de la maison de sa voisine, puis de l’autre côté de la rue. Il examinait les alentours tout comme il l’avait fait à l’école de Buffy. Elle ne put s’empêcher de se demander à quoi ressemblait la rue dans ses yeux entraînés : s’il y voyait des dangers passés ou présents. Pouvait-il immédiatement déterminer les points faibles d’un lieu, de la même manière qu’elle détectait les vulnérabilités dans les rangées et colonnes d’un code informatique ?
John la rejoignit à la porte d’entrée, quoique son regard demeurât vigilant, toujours en train de scruter la rue déserte. Il y avait quelque chose de réconfortant à le voir se tenir là, en train d’attendre qu’elle eût ouvert la porte. Il respirait l’assurance. C’était son métier de voir les choses que les autres ne voyaient pas, de trouver ce qui était caché, de protéger ceux qui avaient besoin de protection. Savannah ressentit le fait qu’il se tint là, sur le seuil de son appartement, comme s’il lui avait raconté son curriculum vitae, comme s’il lui avait parlé de chaque affaire qu’il avait résolue, de chaque personne qu’il avait sauvée. Cela la combla et la réchauffa tout autant que la veste qu’elle avait sur elle.
— Aucun système d’alarme ?demanda-t-il lorsqu’elle ouvrit la porte et commença à gravir l’étroit escalier.
— C’est un quartier plutôt sûr. Et je ne possède rien qui ne vaille la peine d’être volé.
Il y avait nombre de plus grandes demeures à seulement quelques pâtés de maisons. Un cambrioleur les trouverait plus attrayantes.
Il ne répondit pas, mais la suivit. Dans le long couloir de l’étage, particularité propre à tant d’appartements victoriens, elle actionna l’interrupteur.
— La chambre de Buffy donne sur le jardin.
Elle se dirigea vers celle-ci. Mais, devant la porte, elle hésita. John la rattrapa et s’arrêta à côté d’elle.
— Quelque chose ne va pas ?
Elle le regarda.