La contrée du gouffre - Chris Rose - E-Book

La contrée du gouffre E-Book

Chris Rose

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Beschreibung

Nos chevaliers reprennent du service et forment une élite de représentants du roi, de jeunes apprentis chevaliers ! Ils doivent affronter un mal provenant du fin fond de la terre. Qui sont ces étranges créatures qui se tapissent dans le gouffre ? Jade sent son nouveau pouvoir grandir en elle et le contrôler n'est pas chose facile, seul un mage peut aider la jeune princesse à apprivoiser cette magie ! Mordred veut récupérer son royaume et sa dulcinée, arrivera-t-il à ses fins ? Les chevaliers s'en sortiront-ils indemnes ? Ce deuxième opus du récit de nos chevalier met un terme au mal qui règne sur les contrées et engendre de nouveaux exploits pour les siècles à venir...

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Seitenzahl: 363

Veröffentlichungsjahr: 2017

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« Quand le monde change et que l’avenir vous appartient, vous devez faire votre possible pour que la terre ne tremble pas ! »

Chris Rose

À ma famille…

Sommaire

Carte des contrées

Les chevaliers de premier ordre

Les apprentis chevaliers

Prologue

Chapitre I : La princesse

Chapitre II : Le jeune homme de la contrée des glaces

Chapitre III : Décision confuse

Chapitre IV : Première manche

Chapitre V : Le retour de Mordred

Chapitre VI : Connaissance

Chapitre VII : Dernière épreuve

Chapitre VIII : L’amour perdu

Chapitre IX : Un nouveau compagnon

Chapitre X : En route pour l’inconnu

Chapitre XI : Apprendre à cohabiter

Chapitre XII : Séparation

Chapitre XIII : Désolation

Chapitre XIV : Une fin tragique

Chapitre XV : Le pouvoir

Par le même auteur

La princesse de Tresumand

Carte des contrées

Les chevaliers de premier ordre,

– Aymeric, 37 ans

– Balderic, 38 ans

– Ysengrin, 36 ans

— Aloïs, 33 ans

— Ferréol, 37 ans

— Théobald, 36 ans

Les apprentis chevaliers,

– Kalahan, 15 ans, de la contrée fertile

– Arnault, 17 ans, de la contrée de l’oublie

– Aubin, 18 ans, de la contrée du désert

– Idriss, 16 ans, de la contrée des plaines

– Iseult, 15 ans, de Vissesia

– Sawda (elfe), 16 ans, d’Elffireda

– Clovis, 19 ans, de la contrée avide

– Tarik (centaure), 20 ans, de Tauria

– Zacharia, 17 ans, de la contrée de l’indifférence

– Ryan, 16 ans, de Shalisia

– Robin, 16 ans, de la contrée du milieu

– Auric, 20 ans, de la contrée des glaces

– Jade, 15 ans, de Tresumand

Prologue

La contrée de la Bienveillance est désormais protégée par des chevaliers de premier ordre. Le mal ne s’est pas manifesté depuis plus de quatorze ans. Les contrées ne sont plus en guerre. La paix règne sur les royaumes. Mais lorsque le bruit court qu’un nouvel ennemi dévaste des villages et terrorise le peuple, le roi Gauderic de Tresumand organise un tournoi pour former les meilleurs combattants pouvant rejoindre les rangs de son armée de chevaliers. Tous jeunes gens, garçons ou filles, âgés de quinze à vingt ans, pourront se défier lors de joutes. Les meilleurs resteront parmi les chevaliers et suivront un entraînement intensif. Le roi de Tresumand renouvellera ces joutes tous les ans à venir pour que dorénavant, toutes les contrées aient droit à la protection de chevaliers dignes de ce nom.

Pour le moment, seule la contrée de la Bienveillance possède une armée de guerriers courageux. Ceux-ci devront former l’élite, ne faire partie que d’un cercle. Aymeric, Aloïs, Ferréol, Ysengrin, Théobald et Balderic devront une fois de plus montrer leur savoirfaire et leur expérience pour sauver les contrées d’un fléau plus puissant que le roi noir. Pour ce périple, ils seront accompagnés de treize apprentis chevaliers qui feront leur possible pour maintenir la paix. Sans compter sur l’aide des elfes, qui devront protéger le joyau des contrées. Aussi puissant que fût le roi Kay, le mal qui se répand sur les terres est plus fort et plus horrible. La magie noire en est le noyau. Une armée de monstres surgit de la contrée du gouffre et se prépare pour l’invasion. Une solution existe. Aller où le mal se tapit et combattre de l’intérieur. Les treize apprentis chevaliers sont-ils prêts à mener cette quête ?

Chapitre I La princesse

Dans la contrée de la bienveillance, tout se passait pour le mieux depuis des années. Le mal ne troublait plus l’ordre des choses. Les peuples des contrées voisines vivaient paisiblement dans leur domaine. Le village de Shalisia avait bien augmenté sa population avec les naissances qui se multipliaient depuis une décennie. Pourtant, quelque chose au loin prenait position. Certaines personnes parlaient de dragons, dirigés par un magicien noir. D’autres, d’une forteresse creusée dans la terre où des êtres dotés d’aucune humanité prenaient lieux. Personne n’était jamais parti aussi loin pour vérifier les dires des hommes, sauf, peut-être, nos chevaliers de premier ordre. Cela faisait presque un mois qu’ils avaient quitté la terre de Tresumand et le roi Gauderic attendait leur retour avec impatience. Il avait décidé dorénavant que chaque chevalier de son ordre prendrait un ou deux apprentis sous son aile. Mais pas n’importe comment ! Les jeunes gens de toutes les contrées âgés de quinze à vingt ans, sachant déjà manier une arme, pourront faire valoir leur courage et leur dextérité au cours d’un tournoi de chevalerie qui déterminera ceux qui pourront approfondir leur savoir avec nos chevaliers. Seulement douze des trente candidats inscrits sur la liste du roi seront élus, fille comme garçon ! Grâce à Aloïs Degarde, beaucoup de jeunes filles ont été adoubées chevalier depuis quelque temps. Elles se battent aussi bien que les hommes et chaque domaine possède leurs propres guerrières ! Les tentes pour recevoir les jeunes gens étaient déjà dressées sur les pelouses du château, l’estrade debout sur ses pylônes face à la grande cour arrangée en champs de joute.

♣♣♣

Le roi regardait les portes de son château, debout sur sa terrasse, espérant voir celle-ci s’ouvrir sur ceux qu’il attendait impatiemment. Une voix dans la cour le distrait. C’était celle de Venance, la nourrice des enfants. Elle courait vers les écuries en criant.

– Demoiselle Jade ! Je ne pense pas qu’il serait raisonnable que vous sortiez !

Puis, un cheval blanc sortit de la grange au galop, portant sur son dos une jeune fille et un jeune garçon.

– Demoiselle Jade ! s’époumona Venance.

Un gros chien noir heurta la nourrice et la fit basculer au sol. Venance se retrouva sur le cul par terre. Celle-ci capitula.

– Faites attention à votre petit frère, demoiselle Jade ! lança-t-elle simplement à la jeune fille.

Le roi rit silencieusement à la chute de la nourrice. Jade lui en faisait voir de toutes les couleurs ! La jeune fille vivait depuis toujours au château avec le roi et la reine Mélisande. Le couple royal s’était aussi occupé du jeune Goery, le deuxième enfant du couple chevaleresque, âgé aujourd’hui de sept ans. Enfant, Jade était capricieuse et espiègle, adolescente, elle devint rebelle et malicieuse. Sous la protection du roi, celui-ci l’avait trop choyé et gâté. Jade voyait peu ses parents. Ils étaient toujours en quête. La nourrice se releva tout en frottant le derrière de sa robe et retourna aux cuisines. Le roi Gauderic regarda le cheval transportant l’adolescente et son frère sortir du château. Le chien de Jade, un gros rottweiler noir, les suivait. Le roi retourna dans ses appartements et s’assit face à son bureau. Il regarda la liste des participants. Certains jeunes gens venaient de Tauria, de Vissesia, de Shalisia, de la contrée du désert, de la contrée des glaces, de la contrée fertile, de la contrée de l’indifférence et bien d’autres encore. Certains faisaient un long chemin pour participer à ces joutes et espérer se qualifier. Le roi prit sa plume d’oie et trempa le bout de celle-ci dans l’encre noire. Il ajouta un nom sur cette liste. Jade voudrait devenir comme sa mère, un chevalier de premier ordre et une femme magnifique. Magnifique, certes, elle le devenait, quant à devenir un chevalier, la jeune fille devait faire ses preuves et montrer de quoi elle était capable ! Le roi devrait en référencer aux parents de la jeune fille. Aloïs n’était pas favorable à son envie de bataille. Ses parents ne savaient pas que le roi entraînait l’adolescente au maniement de l’épée et de l’arc en secret depuis presque trois ans. Aloïs voudrait que Jade devienne une vraie princesse et se marie avec un prince qui la comblerait de bonheur. Mais l’adolescente ne l’entendait pas de cette oreille et se moquait des réprimandes de sa mère. Elle disait toujours qu’elle préférait son père, il était plus compréhensible, plus ouvert. Bref, il laissait Jade faire un peu ce qu’elle voulait ! Mais le roi savait pourquoi Aymeric était ainsi avec la jeune fille et grondait constamment Goery. Sa peur de revoir un jour le géniteur de l’enfant le perturbait ! Pourtant, Mordred ne s’était pas encore manifesté. Ce qui soulageait le roi. En tant qu’enfant légitime de celui-ci, il pouvait à tout moment proclamer le trône de Tresumand lorsque Gauderic serait sur la voix des cieux. Ce qui ne réconfortait pas le vieil homme, car ses forces le quittaient à petit feu. Le roi reposa le parchemin sur son bureau en soupirant. Il se leva de son fauteuil et se rendit auprès de sa reine.

♣♣♣

Le cheval blanc galopait à travers la plaine. Les premiers participants du tournoi commençaient déjà à émerger. Certains sur des chevaux, d’autres à pied, transportant cabas et armure. Le chariot de victuailles roulait sur le chemin de terre qui menait au château. Le roi avait prévu nourriture et boissons en quantité pour subvenir au besoin de tout ce petit monde. Jade trouvait certaines personnes affublées d’étranges vêtements. Elle stoppa son cheval au bord du chemin tout en regardant vers la forêt de Dryade. C’était par cet endroit que les chevaliers devaient réapparaître. Elle avait hâte que ses parents arrivent pour leur faire part de son intention. Elle avait décidé de participer au tournoi et comptait bien se faire entendre ! Goery descendit du cheval et approcha du gros chien noir qui s’était couché sur l’herbe, à côté de la jument. Il s’accroupit près de l’animal et caressa sa tête.

– Regarde, Saferin ! De futurs chevaliers de premier ordre se trouvent parmi tous ces gens, souffla-t-il au rottweiler.

Le chien releva la tête doucement, puis la reposa sur ses grosses pattes avant. Cela ne déconcentrait pas sa sieste. Jade sauta de son cheval et posa les pieds au sol. Elle garda les rennes dans sa main pour éviter que Neige, la jument, ne s’enfuie au galop. De jeunes gens, ainsi que des personnes d’un certain âge (sûrement leurs parents), avançaient en file indienne vers le château du roi Gauderic. Une famille de centaures passa près de l’adolescente et la salua. Les parents avaient une fourrure noire et celle du jeune homme était rousse. Celui-ci avait de longs cheveux bruns qui lui descendaient jusqu’aux épaules et de grands yeux verts. Jade connaissait l’existence des centaures et savait à quoi il ressemblait, mais c’était la première fois qu’elle en voyait de si près. Elle était émerveillée ! Le jeune centaure le remarqua et sourit à la princesse. Car tous les habitants des contrées voisines avaient déjà entendu parler de la princesse de Tresumand et de sa beauté resplendissante. D’ailleurs, certains jeunes damoiseaux n’étaient pas ici que pour le tournoi ! Soudain, le rubis au centre du médaillon que portait Jade autour du cou se mit à briller. La jeune fille posa ses mains sur celui-ci. Le diamant ne s’était jamais illuminé auparavant ! Que se passait-il ? Un bruit de pas de chevaux attira l’attention de Jade. Elle laissa ses mains sur le médaillon et détailla les montures et leurs cavaliers qui passaient devant elle. Deux étalons noirs à la robe brillante laissant ressortir leurs muscles saillants se dressaient sur leurs quatre pattes fièrement. Un homme, vêtu de noir, dévisagea Jade. Celui-ci avait les cheveux noirs et de grands yeux bruns. Il devait avoir à peu près l’âge de son père. Le jeune homme à côté de lui assis sur la deuxième monture était affublé de vêtements gris et noir. Ses cheveux bouclés portaient la couleur de l’or et descendaient dans sa nuque. Ses yeux, d’un gris clair, fixaient le château. Le coeur de Jade s’accéléra. Le jeune homme avait tous les atouts pour devenir un grand chevalier ! Il ressemblait à son père. Lorsque les deux cavaliers s’éloignèrent de l’adolescente, la pierre autour du cou de Jade cessa de briller. Le gros chien noir se redressa brusquement et aboya vers la forêt de Dryade. Le jeune garçon se leva. Jade ne s’interrogea plus sur son collier et fixa le bois. Six chevaliers sortirent de la forêt, leur monture au galop. Jade monta sur sa jument très vite et tendit la main à son petit frère.

– Monte, Goery ! ordonna-t-elle.

Le jeune garçon sauta sur le dos de Neige, derrière la princesse et l’animal parti au galop vers les chevaliers de premier ordre.

♣♣♣

Lorsqu’Aymeric aperçut la jument de sa fille courir vers eux, il positionna son cheval au pas, les autres chevaliers en firent de même. Aloïs passa avec sa monture devant tous les cavaliers et rejoignit Jade qui avait stoppé son cheval. La femme chevalier n’était pas contente. Elle le fit savoir à sa fille.

– Jade ! Que fais-tu à l’extérieur du château ? gronda-t-elle. L’adolescente soupira et se dressa sur son cheval.

– Je voulais être la première à vous saluer, mère ! Aloïs fronça les sourcils.

– Tu ne dois pas sortir des murs du château ! Tu le sais, pourtant ! reprit Aloïs sévèrement.

Jade enfouit sa joie de revoir ses parents et laissa échapper son caractère difficile.

– Interdit de ci ! Interdit de ça ! C’est toujours la même chose avec vous, mère ! Je ne vois pas ce qu’il pourrait m’arriver de mal, ronchonna l’adolescente.

– Tu n’es encore qu’une enfant et beaucoup de choses pourraient t’arriver à l’extérieur, s’enquit Aloïs.

Jade fit la moue.

– Je ne suis plus une enfant, mère ! Quand le comprendrez-vous ? s’écria Jade, les larmes aux yeux.

Aloïs sortit de ses gonds, agacée par le comportement de sa fille.

– Quand tu pourras me prouver que tu n’es plus une enfant,

Jade, affirma Aloïs calmement. Pour l’instant, je ne vois devant moi qu’une gamine insolente et gâtée, ajouta la femme.

Jade se pinça les lèvres, mécontente. Sa fille ne répliquant pas à son affirmation, Aloïs reprit :

– En plus de cela, tu emmènes ton petit frère avec toi ! Imagine qu’il lui arrive quelque chose à lui aussi. Est-ce que tu t’en rends compte au moins, Jade ?

L’adolescente, furieuse des réprimandes de sa mère, demanda à son petit frère de descendre de son cheval. Le jeune garçon approcha de son père et celui-ci lui tendit la main pour qu’il puisse monter sur le cheval, devant Aymeric. Jade lança un regard noir à sa mère.

– Puisque vous vous moquez de ma joie de vous revoir, mère, je vais faire mon devoir et vais de ce pas dire au roi que vous arrivez !

Puis l’adolescente donna deux coups de talons secs à sa jument et Neige s’élança au galop vers le château. Jade laissa échapper ses larmes. Pourquoi sa mère était-elle dure avec elle ? Ne l’aimait-elle pas ? Furieuse, elle n’avait même pas eu le temps de saluer les autres chevaliers et son père ! Elle irait voir celui-ci dès que sa mère aurait le dos tourné et se consolerait entre les bras de l’homme qui la comprenait.

Les chevaux des chevaliers reprirent leur allure au pas jusqu’au château. Aymeric positionna sa monture près de celle de sa femme.

– Tu es un peu dur avec ta fille, Aloïs, ne crois-tu pas ? constata Aymeric.

Aloïs tourna son visage vers le grand chevalier et s’étonna.

– Dur ? Il le faut pourtant ! Tu le sais très bien, Aymeric. Nous en avons beaucoup discuté !

Les autres compagnons des deux chevaliers pensaient comme leur grand chef, mais n’en discutaient jamais avec Aloïs. La femme prenait toujours la mouche ! Parfois, lors de confrontations entre mère et fille, on se demandait toujours laquelle des deux allait capituler la première. Cela pouvait durer des heures !

Goery regarda sa mère. Il aimait beaucoup sa grande sœur et prenait souvent sa défense en affirmant que c’était lui qui avait fait une bêtise. Il n’aimait pas que sa mère gronde Jade.

– Mère ? demanda-t-il.

Aloïs regarda son fils.

– Oui, Goery ?

– Pourquoi n’aimez-vous pas Jade ?

Aloïs hoqueta. Aymeric écarquilla les yeux, étonné. Les autres chevaliers se regardèrent. La femme soupira.

– J’aime ta sœur, Goery. C’est juste que je dois la protéger.

– Jade dit que vous ne la comprenez pas et que vous la séquestrez !

– Séquestrez ? s’étonna-t-elle. Je ne la séquestre pas ! Je la protège simplement du monde qui l’entoure.

– Est-ce que le monde est si mauvais que cela, mère ?

– Oui, Goery. Tu comprendras cela lorsque tu deviendras toi-même un chevalier.

Puis Aloïs mit fin à cette conversation en lançant son cheval au galop. Elle devra parler à sa fille ! Lui dire combien son amour pour elle est immense, avant que celle-ci ne lui échappe. Aymeric et les autres chevaliers ordonnèrent à leur monture de galoper et ils suivirent Aloïs jusqu’au château.

♣♣♣

Jade stoppa sa jument devant les écuries, un palefrenier vint audevant d’elle pour prendre l’animal en charge. Mais Jade le renvoya, exaspérée. Elle voulait s’occuper seule de Neige ! Elle fit entrer la jument dans l’écurie et la conduisit à son box, lui ôta la selle de son dos et le tapis. Elle prit la brosse souple dans le seau et commença à brosser la robe de Neige. La jument était très calme. Jamais elle n’avait rué ou n’avait fait du mal à Jade. Le rottweiler était entré dans la grange avec sa maîtresse et s’était couché devant le box de la jument. Jade s’occupa ensuite de décrotter les sabots du cheval et lui caressa la tête. Elle approcha son visage de celui de la jument et lui susurra des mots doux à l’oreille avant de la laisser manger la paille que le palefrenier avait étalée le matin lors du nettoyage. Saferin suivit Jade à l’extérieur. L’adolescente regarda la cour du château. Les participants du tournoi commençaient déjà à affluer et des domestiques les guidaient jusqu’à leur tente qui se trouvait dans les grands jardins. Elle fixa au loin les deux chevaux noirs. Mais leurs cavaliers n’étaient plus visibles ! Une voix à côté d’elle la fit sursauter.

– Le monde afflue, mon enfant. J’espère que nos chevaliers seront bientôt de retour !

Jade regarda le roi. Son grand-père était bon avec les gens et il lui offrait toujours ce qu’elle voulait. Jade adorait le roi.

– Je voulais justement vous voir pour vous dire qu’ils arrivent, majesté !

Le roi en était ravi. Jade ne lui parla pas de l’altercation qu’elle avait eue avec sa mère, cela ne concernait pas le vieil homme ! Gauderic posa les mains sur les épaules de l’adolescente et la positionna devant lui.

– Regarde mon enfant, toutes les contrées ont répondu à ma demande ! Beaucoup de jeunes gens veulent devenir chevaliers de premier ordre, ma princesse, souffla le roi à son oreille.

Jade soupira. Elle aussi voulait devenir chevaleresse ! Le roi lui prit la main et posa celle-ci sous son bras.

– Allons saluer nos premiers visiteurs, ma princesse !

Jade accepta d’accompagner son grand-père. Le roi la présenta aux nouveaux venus. Les parents des jeunes gens complimentaient le roi pour la beauté de son château et l’entretien de ses jardins. Quant aux jeunes hommes que Jade rencontra, ceux-ci la regardaient avec beaucoup d’intérêt. Elle se demandait si sa mère n’avait pas mijoté quelque chose dans son dos pendant ces joutes ! Puis, elle reconnut une personne non loin de là et laissa en plan le roi pour se diriger vers son ami. Lorsqu’elle fut près du jeune homme, Jade lui agrippa le bras, car celui-ci, concentré sur la selle de son cheval, ne l’avait pas encore aperçu.

– Ryan !

Le jeune homme aux cheveux châtain clair ébouriffés se retourna vers elle. Jade contempla ses yeux bleus. Ryan sourit et lui tendit les bras.

– Bonjour, princesse ! Tu as bien grandi, dis donc. Une vraie demoiselle ! la taquina-t-il.

Cela faisait presque trois ans qu’elle n’avait pas revu Ryan. Il avait une année passée de plus qu’elle et était le fils du chevalier Ferréol et de dame Hermine, la meilleure amie de sa mère. Ryan n’avait pas de sœur ni de frère. Alors, il aimait venir autrefois au château pour partager les jeux de Jade.

– Pourquoi ne viens-tu plus me voir, Ryan ? Le jeune homme fit une grimace d’embarras.

– Mon père m’a demandé de ne plus venir au château, le temps que… (Ryan hésitait) le temps que tu grandisses.

Jade plissa le front.

– Comment ça ? interrogea-t-elle. Ryan cherchait ses mots.

– Je ne dois plus venir au château durant ton adolescence. Tu es une princesse et je ne dois pas perturber ta croissance, soupira Ryan.

– Perturber ma croissance ? s’étonna Jade.

– Mais tu me manques, Jade, et je ne…

Ryan se tue. Son père approchait d’eux. Le chevalier Ferréol posa sa main sur la croupe du cheval de son fils et salua Jade. L’adolescente en profita pour éclaircir cette histoire.

– Chevalier Ferréol ? demanda-t-elle poliment.

– Oui, princesse Jade ?

Jade posa ses mains sur ses hanches et fronça les sourcils.

– Pourquoi refusez-vous que Ryan vienne me voir au château ?

Le chevalier Ferréol fut décontenancé. Il fixa son fils et comprit en un regard que celui-ci n’avait rien dit à la jeune fille. Il soupira.

– Que vous a dit Ryan, jeune princesse ?

– Qu’il ne venait plus au château pour éviter de perturber ma croissance !

Le chevalier Ferréol en fut ravi.

– Et cela est vrai, princesse Jade ! Vous devez apprendre à grandir luxueusement avant de revoir Ryan.

Jade fit la moue.

– Qu’est-ce que cela veut dire, chevalier Ferréol ? demanda Jade rageusement.

Ferréol fut heureux d’apercevoir son compagnon Aymeric. Celui-ci vint à sa rencontre et posa sa main sur le bras de sa fille.

– Jade ! N’importune pas Ryan et son père, ils ont beaucoup de choses à préparer pour le tournoi.

Jade écarquilla les yeux tout en contemplant son ami.

– Tu participes au tournoi ? Tu veux devenir chevalier ?

Ryan sourit et baissa son regard sur les sangles de sa selle.

– Oui, Jade, souffla celui-ci.

Aymeric approcha sa bouche de l’oreille de sa fille.

– Si tu ne rentres pas tout de suite au château pour ton cours d’écriture avec maître Calia, ta mère te grondera et sûrement te confiner dans ta chambre, susurra-t-il.

Jade s’enfuit en courant, elle ne voulait pas rester enfermée dans sa chambre durant les joutes ! Aymeric rit, ainsi que son compagnon Ferréol. Ryan se contenta de les observer. Lorsque Jade apprendra les vraies raisons qui empêchaient Ryan de la revoir, elle serait furieuse, sans aucun doute ! Aymeric laissa Ferréol et son fils visiter leur tente et s’installer à l’intérieur. Le chevalier déposa les besaces sur le tapis du sol.

– Comment la trouves-tu, Ryan ? demanda Ferréol à son fils.

– Qui ? interrogea le jeune homme.

Ferréol se tourna vers son fils et croisa ses bras sur son torse. Il leva un sourcil, l’air interrogateur.

– Ne me dis pas qu’à ton âge, on ne ressent pas ces choses-là !

Le jeune homme compris ce que son père voulait dire et rougi.

– Je la trouve très belle, père.

– C’est pour cela que je t’ai écarté de Jade. Tu comprends, n’est-ce pas, Ryan ?

Le jeune homme se baissa au sol et fouilla dans une besace.

– Oui, père, soupira-t-il.

Ferréol fut satisfait et rentra le restant des affaires de son fils à l’intérieur de la tente. Le chevalier vivait avec sa femme et son fils au village de Shalisia. Ses trois autres compagnons aussi. Théobald avait enfin trouvé chaussure à son pied au bout de longues années de recherche de la femme parfaite ! La dame en question venait de Vissesia. Elle n’était pas la beauté parfaite comme Aloïs, mais assez jolie pour la prendre pour femme. Celle-ci avait donné naissance au premier fils du chevalier un an après leur union. C’était il y a trois années ! Aujourd’hui, Elvira était enceinte de leur deuxième enfant. Balderic n’avait jamais cherché à se marier et préférait attendre encore, malgré les années qui le ridaient. En fait, nos chevaliers savaient très bien que Balderic ne trouverait jamais une femme pour le rendre heureux, à moins que celle-ci ressemble trait pour trait à Aloïs ! Quant à Ysengrin, il se contentait de jeune fille de passage et de filles de joie. Il ne désirait pas d’enfant et ne voulait pas qu’une femme dépende de lui ! Les deux chevaliers, Aymeric et Aloïs vivaient au château avec le roi et leurs enfants. Cela faisait quinze ans qu’ils étaient mariés à présent. Mais quelque chose disparaissait dans leur amour. Les chevaliers s’en rendaient compte. Depuis un certain temps, lorsqu’Aymeric se retrouvait seul avec son camarade Ysengrin, celui-ci profitait de la situation pour prendre du plaisir avec une autre femme. Balderic lui faisait les mêmes remontrances chaque nuit passée loin de son épouse. Pourtant, Aloïs restait la plus belle femme du château et des alentours. Aucun de ses amis ne comprenait le chef des chevaliers ! Ceux-ci n’en référaient pas auprès de leur amie Aloïs, ils ne voulaient pas lui briser le cœur. Mais les disputes incessantes entre les deux mariés leur montraient bien que la jeune femme n’était pas dupe et avait des doutes sur les sentiments de son mari. Mais ils restaient soudés, à cause de leur fille Jade. Ils devaient protéger le joyau et savaient qu’un jour, l’adolescente sauverait les contrées !

En haut des remparts du château, Ferréol regardait au-delà de la forêt de Dryade et pensait à ce qu’ils avaient appris au cours de ce dernier voyage. Peut-être était-ce le moment ? Peut-être que la pierre devra bientôt faire son travail ? Jade était-elle sur le point de sauver leur monde ? Le chevalier se posa un tas de questions dont aucune n’avait de réponse imminente. Il soupira et regarda les participants du tournoi qui s’affairaient autour de leur demeure en toile. Puis il rejoignit les autres chevaliers et le roi dans la salle de réunion.

♣♣♣

Le roi Gauderic attendait que le chef des chevaliers prenne la parole et lui compte ce qu’ils avaient appris au cours de cette quête. Aymeric se leva de son fauteuil et posa ses mains à plat sur la grande table ronde.

– Sir, ce qui se raconte est vrai. Beaucoup de personnes ont prononcé le même discours. Des êtres inhumains se tassent dans les profondeurs de la terre de la contrée du gouffre. Mais ils ne sont pas assez intelligents pour s’orienter seuls.

Le roi croisa ses doigts devant sa bouche.

– Penses-tu que quelqu’un les manipule, Aymeric ?

– Nous avons parlé avec des mages et ceux-ci ressentent de la magie noire sur cette terre. Nous pensons qu’un magicien s’y cache. En ce qui concerne les dragons, nous ne pouvons pas prouver leur présence pour l’instant.

Le roi réfléchit un instant puis se leva à son tour de son fauteuil.

– Bien, soupira-t-il. Nous aurons besoin de beaucoup d’aide si ce magicien et ces bêtes immondes passent à l’attaque ! affirma-t-il. J’enverrai un message au souverain de chaque contrée pour leur faire part de la situation. Celle du gouffre est assez éloignée des autres et très lointaine. Ce… magicien ne pourra pas attaquer maintenant et il faudra des mois à ces êtres pour arriver jusqu’à nous et les contrées qui nous précèdent. (Le roi regarda les chevaliers un par un) Vous prendrez deux jeunes gens sous votre aile. Ils seront douze à poursuivre un entraînement intensif !

Les chevaliers hochèrent la tête en même temps. Le roi avait raison, il fallait gonfler les troupes le plus vite possible !

Balderic intervint.

– Sir, pensez-vous que toutes les contrées nous aideront ? Certains rois ou reines ne se soucient nullement des autres ! Ils sont avides et perfides.

Le roi Gauderic regarda le chevalier Balderic.

– C’est pour cela que j’organise ce tournoi, chevalier Balderic, je veux prouver à tous les gouverneurs des contrées voisines que nous acceptons leurs enfants comme chevaliers de premier ordre !

Balderic se pinça les lèvres.

– Je pense que certains jeunes gens sont ici pour autre chose, sir, exposa le chevalier.

Aloïs regarda froidement le chevalier Balderic. Son ami posa ses yeux bleus sur elle sans baisser son regard. Il n’appréciait pas la façon dont Aloïs dirigeait la vie de sa fille. Cela ne ressemblait pas à la jeune fille qu’il avait connue et dont il était amoureux. Aloïs se leva de son fauteuil et posa ses poings sur la table, fermement. Elle fixa Balderic.

– Ce que je choisis pour Jade ne regarde personne, Balderic ! Elle est ma fille et celle de Mo… (Aloïs retint ses paroles. Elle ferait mal à certaines personnes en ravivant le passé) et celle d’Aymeric, se reprit-elle.

Puis, la femme quitta la table et sortit de la pièce en claquant la porte. Théobald siffla.

– Eh bien ! Après, on se demande de qui Jade tient son sale caractère !

Aymeric se contenta de regarder Aloïs partir. Il savait que depuis un certain temps, sa femme repensait au prince noir. Jade le lui faisait rappeler ! L’adolescente avait les mêmes cheveux que son père et les mêmes traits. Seuls ses yeux étaient de couleur différente. Ceux du prince noir étaient bruns et ceux de l’adolescente ressemblaient à un ciel étoilé la nuit. Les cheveux de Jade formaient des boucles qui ondulaient du haut de son crâne jusque dans son dos. Le roi disait souvent qu’elle ressemblait trait pour trait à sa chère épouse disparue, Eloïse. C’est pour cela qu’Aymeric délaissait Aloïs. Il savait que sa femme ne ressentait plus l’amour du premier jour qu’elle éprouvait pour lui. Parfois, elle le repoussait ! Aymeric devait se contenter d’être là pour elle. Le roi convia aux chevaliers à se retirer sauf Aymeric. Il attendit que ceux-ci sortent pour avouer à son chevalier préféré qu’il avait ajouté le nom de Jade sur la liste et lui révéler qu’il l’entraînait à l’épée et au tir à l’arc. Le roi ne voulait pas que sa petite fille ne soit qu’un objet de désir et Aymeric approuva, même si la fureur d’Aloïs se retournait contre lui ! Il s’en amusa et rejoignit sa chambre. Aloïs était couchée dans le grand lit et avait déjà les yeux fermés. Aymeric s’assit sur le fauteuil et ôta ses bottes. Puis il se leva et enleva son braie et son gambeson. Il revêtit sa chemise et se glissa sous le drap. Il se positionna sur le dos et croisa ses bras sous sa tête. Lorsqu’il faisait cela autrefois, Aloïs venait se blottir contre lui et posait sa tête sur sa poitrine. Mais plus maintenant ! Il soupira et ferma les yeux.

Aloïs attendit qu’Aymeric s’endorme pour ouvrir les yeux. Comment lui avouer ce qu’elle ressentait sans lui faire de mal ? Elle se leva de la couche doucement et sortit sur le balcon de la chambre. Nous étions en plein été et l’air était doux. Aloïs resta un long moment pieds nus sur la pierre à contempler les étoiles dans le ciel avant de se recoucher.

Chapitre II Le jeune homme de la contrée des glaces

Le jour se leva sur le château de Tresumand. On entendait déjà les coups d’épée résonner dans la cour. Les jeunes gens s’entraînaient pour le tournoi qui débuterait dès le début de l’après-midi. Jade regarda par la fenêtre de sa chambre. Elle avait décidé de demander à sa mère de la laisser participer à ce tournoi, même si elle devait, pour cela, faire la comédie ! Pour l’instant, Jade décida de se vêtir et de se rendre dans les oubliettes du château. Celles-ci n’étant plus utilisées depuis fort longtemps, elle pouvait s’exercer à la magie. Jade avait découvert ses pouvoirs par inadvertance il y avait de cela quelque mois.. En colère, elle était dans sa chambre et voulait la dévaster, quand, tout à coup, sa chambre se mit sens dessus dessous et trembla. Elle savait que c’était elle qui avait fait cela ! Ses parents l’avaient puni pour cet acte. Mais ils croyaient qu’elle avait utilisé ses mains et avait fait basculer les meubles ! Jade n’avait pas encore révélé qu’elle possédait des pouvoirs magiques. L’adolescente marcha dans les couloirs du château en évitant les chevaliers et sa nourrice. Elle poussa la porte en fer qui menait aux oubliettes et descendit le grand escalier fendu par endroits. Des toiles d’araignées pendaient ici et là aux coins des murs humides. Jade alluma la lampe à huile qu’elle cachait derrière un muret et s’enfonça dans le couloir sombre. Elle entra dans une petite pièce qu’elle avait aménagée pour son plaisir. Elle posa la lampe sur le sol et s’assit à terre. Elle positionna ses mains au-dessus d’un tas de feuilles entassées sur la pierre et se concentra. Les feuilles se mirent à voler doucement autour d’elle, puis de plus en plus vite. Ensuite, celles-ci dansèrent dans toute la pièce. Les feuilles formaient un arc-en-ciel de jaune, de rouge et de vert. L’adolescente se releva et dansa parmi les feuilles mortes. Cela dura un long moment. Assez longtemps pour qu’un mage noir, qui se trouvait dans la cour du château, ressente cette nouvelle magie.

♣♣♣

Mordred interrompit l’entraînement d’Auric, son neveu. Une forte puissance magique le fit tressaillir sur place. Depuis qu’il était arrivé au château de Tresumand avec le jeune homme, il évitait de se montrer au grand jour. Quelqu’un pouvait le reconnaître ! Il gardait toujours le capuchon de sa cape sur sa tête pour dissimuler son visage. Auric était ici en tant que représentant de la contrée des glaces. La reine de ce royaume avait pris l’orphelin sous son aile dès que Mordred le lui avait amené. Elle le considérait comme son fils à présent ! Mordred ne bougea plus, haletant. Auric baissa sa lame.

– Que se passe-t-il, mon oncle ? lui demanda le jeune homme, inquiet.

Mordred se ressaisit et fixa son neveu.

– Ce n’est rien, Auric ! (Mordred fit tourner son épée dans sa main) Allez ! Reprenons !

Le jeune homme s’exécuta et croisa sa lame rapidement avec celle de Mordred. Celui-ci avait tout appris de lui ! Il était très fort. Le mage noir, car c’est ainsi qu’il se faisait appeler maintenant, savait qu’Auric serait dans les élus de ce tournoi. Il n’avait aucun doute là-dessus ! Grâce à son neveu, il se rapprocherait de sa fille et surtout d’Aloïs. Il avait observé la femme chevalière lorsque celle-ci se trouvait sur son balcon, la veille au soir. Aloïs n’avait pas changé ! Elle était toujours aussi belle. Le temps ne l’avait pas défiguré. Lorsque l’entraînement d’Auric arriva à sa fin, Mordred se fit discret et longea les murs du château jusqu’au souterrain. Le mage suivit la source de magie qui émanait des murs humides. Il se retrouva sur le seuil d’une porte donnant sur une petite pièce éclairée par une lampe à huile. Une jeune fille tournait en rond dans la pièce, yeux fermés et bras tendu en l’air. Ses cheveux bruns ondulés virevoltants en même temps que les feuilles mortes. Sa robe de princesse saillait ses formes de future femme. L’adolescente n’avait pas senti Mordred arriver. Celui-ci s’adossa au chambranle de la porte.

– Savez-vous faire autre chose avec votre magie, petite fille ? demanda-t-il.

Jade cessa de tourner et se raidit sur place. Les feuilles mortes s’éparpillèrent au sol. L’adolescente foudroya du regard l’homme habillé de noir.

– Je ne pense pas que vous devriez être ici ! lui lança-t-elle. Mordred lui sourit.

– Et vous, petite fille ? Je ne pense pas que vous ayez le droit de venir ici, souffla le mage noir.

Mordred entra doucement dans la pièce et contempla celle-ci tout en effleurant de sa main les différents objets posés sur une table en bois. Jade ne le quittait pas des yeux.

– Comment saviez-vous que j’étais ici ? demanda-t-elle.

– J’ai ressenti votre magie, avoua Mordred en tournant son visage vers elle.

Jade fut surprise.

– Êtes-vous magicien ? interrogea-t-elle.

Mordred s’assit sur le bord de la table et regarda l’adolescente.

– Je suis un mage, souffla Mordred tout simplement.

Les yeux de Jade s’écarquillèrent, mais la jeune fille resta méfiante.

– Comment pourrais-je en être certaine ? demanda-t-elle.

Mordred se leva de la table en soupirant. Puis, sans prononcer un mot, il dirigea ses mains devant lui et se concentra, les yeux ouverts. Les feuilles tombées au sol commencèrent à virevolter de nouveau dans la pièce. Jade les regardait. Puis, celles-ci formèrent la silhouette d’un dragon qui s’élevait devant la jeune fille. Mordred bougea ses mains rapidement et l’animal fait de feuilles se rua sur l’adolescente en hurlant. Jade recula rapidement, tomba au sol et rampa jusqu’au mur humide où elle s’adossa. Le visage du dragon de feuille disparu juste devant ses yeux, se dispersant sur les pierres. Puis, les feuilles formèrent un cercle et se soulevèrent de nouveau du sol pour former la stature d’un aigle royal. L’oiseau feuillu battit des ailes et s’élança à travers l’ouverture de la porte. Jade se releva très vite et se retrouva dans le couloir sombre, suivant des yeux l’aigle qui se dirigeait vers la sortie. Lorsque celui-ci disparut, Jade retourna dans la pièce. Mordred restait debout à la contempler. Soudain, le médaillon de la jeune fille scintilla. Jade posa sa main sur celui-ci. Elle se pinça les lèvres et décida d’en savoir plus sur l’homme face à elle.

– Qui êtes-vous ? demanda-t-elle. Mordred se rassit sur la table.

– Je vous l’ai déjà dit, petite fille, je suis un mage !

Jade fit la moue. Et pendant un instant, Mordred se retrouva devant Aloïs. Enfin, c’est ce qu’il croyait. L’adolescente ressemblait à sa mère !

– Je veux savoir votre nom ! affirma Jade.

– Mordred, soupira le mage noir.

Jade en resta bouche bée. Elle avait déjà entendu parler de cet homme. Mais ce qui se disait était mauvais. Elle se rapprocha de l’homme vêtu de noir et se positionna devant lui. Vu qu’il était assis, celui-ci était à sa hauteur. Elle le fixa dans les yeux.

– Je sais qui vous êtes ! avoua l’adolescente.

Mordred se raidit. Se pourrait-il que Jade sache qu’il était son père ? Il devait savoir !

– Et qui suis-je, petite fille ? lui demanda-t-il.

– Vous êtes l’ancien prince de la contrée noire ! Votre royaume n’est plus ! Les chevaliers vous ont anéantis.

Mordred rageait intérieurement, mais gardait son calme et souriait à sa fille.

– Et cela est tout, petite fille ? Savez-vous autre chose à mon sujet ?

– Que vous vous en êtes échappé et que personne ne vous a revu, ajouta Jade.

Alors, Jade ne savait pas ! C’était mieux ainsi, du moins, pour l’instant. Mordred se rassura.

– Oui, c’est vrai. J’étais blessé et je me suis réfugié dans la contrée des glaces dont je suis le mage à présent. Mais je voudrais que personne ne sache qui je suis vraiment. Je vous ai donné mon nom, mais pour les autres, je suis le mage Mordredus.

Jade hocha la tête positivement, puis reprit, curieuse :

– Avez-vous une femme ?

Mordred rit intérieurement. L’adolescente allait droit au but !

– J’en avais une, il y a fort longtemps.

– Que s’est-il passé ?

– Elle s’est enfuie avec un autre et m’a fait très mal, avoua tristement Mordred.

Le mage se leva. Il se dirigea vers la porte. Jade réfléchissait un instant. Elle devait apprendre plus de tours de magie !

– Attendez ! héla Jade.

Mordred se retourna et regarda sa fille. Il attendit. Jade approcha de l’homme et posa sa main sur le bras de celui-ci.

– Apprenez-moi à faire les tours que vous venez d’effectuer ! implora-t-elle.

Mordred savait que l’adolescente ne résisterait pas. Il lui sourit.

– Ferez-vous tout ce que je dis ? (Jade hocha la tête positivement) Sans rechigner ? ajouta Mordred. (Jade hochait toujours la tête en guise de réponse) Bon, je vais y réfléchir, petite fille. Pour l’instant, ne parlez pas de notre rencontre ! Certaines personnes me perçoivent encore comme le prince noir.

– Oui, souffla Jade gaiement. Mais comment saurais-je que vous acceptez ? s’inquiéta-t-elle.

Mordred lui donna sa première leçon.

– Je suis un mage, petite fille, et vous possédez des pouvoirs. Si vous vous concentrez, vous pourrez me parler par simple pensée. Nous serons reliés !

Mais Mordred savait très bien que cela ne marchait pas pour tout le monde ! Il omit de le dire à Jade, sachant que l’adolescente aurait beaucoup de facilité à communiquer avec lui par pensée vu que celle-ci était de son sang. Mordred laissa l’adolescente seule et retourna auprès de son neveu. Jade ramassa la lampe au sol et longea le couloir. Elle éteignit la flamme et cacha l’objet derrière le muret, puis sortit des oubliettes.

♣♣♣

Les serviteurs du roi arrangeaient des mets sur les grandes tables en bois, installées à l’occasion du tournoi pour ravitailler les participants. Le roi et la reine les observaient et leur donnaient leurs ordres. Venance tournait en rond dans la cour. Elle regardait dans les moindres recoins des murs du château ainsi que sous les nappes posées sur les tables. Le gros chien noir suivait la servante. Le roi Gauderic aperçut Venance et il se demanda ce qu’elle était en train de chercher. Il regarda Mélisande.

– Savez-vous ce que Venance cherche, ma reine ? demanda-t-il.

La reine contempla à son tour la nourrice.

– Pas du tout, mon roi. Le mieux serait de le lui demander.

La reine approcha de la servante qui regardait sous une table.

– Que cherches-tu, Venance ?

La servante se releva rapidement. Elle fit une révérence à la reine.

– Je cherche Jade, reine Mélisande.

– Sous les tables ? s’étonna la reine.

– Vous savez, Jade aime me faire des plaisanteries, majesté. Et elle aime beaucoup se cacher !

La reine savait tout ça.

– Si elle était venue ici, le roi et moi l’aurions forcément vu, ne crois-tu pas, Venance ?

– Oui, majesté, bien sûr. Mais sa mère la demande et je dois en faire part à demoiselle Jade de suite.

La reine regarda vers les tentes disposées dans les jardins et aperçut la silhouette de Jade qui longeait le mur qui menait aux oubliettes.

– Regarde dans cette direction, Venance ! ordonna la reine d’un mouvement de la main. Jade est de ce côté !

La servante remercia la reine et courut vers l’adolescente, le rottweiler à ses trousses. Le roi approcha de Mélisande.

– Alors ? Que cherchait Venance ?

– Jade, tout simplement.

– Sous les tables ? s’étonna le roi.

Mélisande sourit et regarda son roi tendrement.

– Lorsqu’elle était enfant, Jade adorait se cacher sous les tables et le fait encore parfois, pour être tranquille. Je la voyais et laissai toujours Venance la chercher. Cela m’amusait. Pauvre femme ! Mais je sais que Jade adore sa nourrice et si elle lui fait des plaisanteries, c’est pour la taquiner.

Le roi prit le bras de sa reine et l’emmena à l’écart.

– Je dois vous faire part d’une décision que j’ai prise, ma reine. Seul votre fils est au courant pour l’instant.

Mélisande écouta attentivement le roi lui avouer qu’il avait inscrit sa petite fille à ce tournoi. Mélisande se contenta de lui sourire et de lui tapoter l’épaule. Elle savait que Jade voulait devenir chevalier et était heureuse pour l’adolescente. Mais elle aimait aussi Aloïs et ne voulait pas prendre le parti du roi. Elle resterait neutre sur cette décision. La reine se rendit près de son petit fils qui jouait avec d’autres enfants et décida de leur raconter quelques histoires pour les distraire un moment.

♣♣♣

Jade aperçut Saferin courir vers elle. Le gros chien noir posa ses grosses pattes sur elle et la fit basculer au sol. Puis, il lui lécha le visage. Venance cessa de courir et se plia en deux devant Jade. Elle reprenait son souffle tout en parlant à la jeune fille.

– Jade ! Votre… votre mère vous… cherche ! L’adolescente se releva en ronchonnant.

– Que me veut-elle ? Je n’ai pas le temps ! Venance soupira.

– Je ne sais pas, demoiselle Jade. Je dois vous amener auprès de votre mère !

Jade leva les yeux au ciel et fit une grimace de mécontentement.

– Dites à ma mère que je n’ai pas le temps de venir maintenant, Venance !

La nourrice soupira.

– Comme vous voudrez, demoiselle Jade, mais votre mère ne sera pas contente.