La Parole qui sauve - Tome 2 - Benoît Serge Placide Melibi - E-Book

La Parole qui sauve - Tome 2 E-Book

Benoît Serge Placide Melibi

0,0

Beschreibung

Ce second volume de La Parole qui sauve est essentiellement composé des dimanches du temps ordinaire A, B et C. Il s’agit de la période qui va du deuxième dimanche au trente-quatrième du temps ordinaire. Ce dernier dimanche correspond également à la solennité du Christ Roi de l’univers. L’auteur propose des réflexions parfois provocantes, des méditations et une approche homilétique éclectique capable de booster une compréhension élargie de la Parole de Dieu présélectionnée pour la liturgie dominicale.


À PROPOS DE L'AUTEUR

Titulaire d’une licence en théologie et ordonné prêtre en 2009, Benoît Serge Placide Melibi a été vicaire paroissial pendant un an et curé durant six ans. Il poursuit en outre des études en sciences de l’éducation. Cet ouvrage est le second volet d’une série consacrée à des méditations profondes sur la Parole de Dieu.

Sie lesen das E-Book in den Legimi-Apps auf:

Android
iOS
von Legimi
zertifizierten E-Readern

Seitenzahl: 455

Veröffentlichungsjahr: 2022

Das E-Book (TTS) können Sie hören im Abo „Legimi Premium” in Legimi-Apps auf:

Android
iOS
Bewertungen
0,0
0
0
0
0
0
Mehr Informationen
Mehr Informationen
Legimi prüft nicht, ob Rezensionen von Nutzern stammen, die den betreffenden Titel tatsächlich gekauft oder gelesen/gehört haben. Wir entfernen aber gefälschte Rezensionen.



Benoît Serge Placide Melibi

La Parole qui sauve II

Réflexions homilétiques pour

les dimanches du temps ordinaire A-B-C

Essai

© Lys Bleu Éditions – Benoît Serge Placide Melibi

ISBN : 979-10-377-6674-8

Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L.122- 5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L.122- 4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L.335- 2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.

À tous les lecteurs

Présentation

On entend souvent dire que l’homme est un homo religiosus. L’énonciation de ce constat mérite cependant d’être expliquée pour mettre en lumière une dimension de l’homme qui souvent est mal comprise et même mal gérée dans les contextes où l’esprit du laïcisme et du modernisme bat son plein. Pour bien asseoir la compréhension de cette dimension de l’homme, il faut rentrer dans l’origine des termes. De fait, le terme religion vient du génitif latin religionis (religio). Et le dictionnaire illustré de la langue latine1 explique religionis par : scrupulosité, consciencieux, conscience, exactitude, loyauté, sincérité. Définies par le nom ou par l’adjectif, la scrupulosité ou la conscience ne rendent pas compte de l’ensemble des actions qui sont à la base de la construction de la réalité de la religion. Voilà pourquoi il faut repartir des verbes : religere ou religare qui signifient attacher, relier. Il s’agit alors de relier ou d’attacher le scrupule, la conscience, la loyauté, la sincérité à un lieu, une personne, un objet, une attitude. C’est ici qu’émerge la notion du sacré ou réservé. Par ailleurs, le mot religionis signifie aussi un ensemble de rites pour le culte2, parmi lesquels ceux qui rendent sacré, c’est-à-dire béni et réservé. Toutefois, ce qui est dit jusqu’ici ne nous plonge pas totalement dans l’univers de création des convictions qui sont le support de la religiosité. Voilà pourquoi il faut ajouter le verbe rilegere qui signifie : relire. Il s’agit de la relecture du réel pour déchiffrer les codes et les lois de sorte qu’il en ressorte un sens. Et dans le domaine religieux, le sens implique la causalité et la finalité, un début et une fin. On notera alors cette forte tendance du religieux à canaliser le sens de l’existence dans ce couloir. La relecture du réel, en ressortant les codes et les lois qui y sont inscrits, porte ainsi les experts du religieux et du spirituel à construire un sens qui lie le créé à un ordre cosmique sacré, à la Transcendance. L’homme qui est un être rationnel met donc son intelligence à contribution pour trouver la logique cachée derrière ce qui existe. De cette construction ressortent un ensemble de vérités capables de lui procurer une certaine sécurité face à l’immensité de l’univers et la densité des réalités et vérités à découvrir. Entendu que le réel ne nous livre pas tous les secrets au seul regard, l’immensité du créé plonge l’homme dans une angoisse existentielle due à l’ignorance. Ce qui provoque une forme d’insécurité. Le fait de décoder, découvrir la vérité et donner un sens, restitue quelque peu cette sécurité.

Ainsi, l’homme est homo religiosus parce qu’il use de son intelligence et de sa volonté pour construire le sens de son existence en incluant la loyauté, la sincérité et la scrupulosité. La religion est un ensemble d’attitudes et de comportements culturels et cultuels qui expriment la relation de l’homme avec le divin ou la Transcendance3. La religion dans sa forme cultuelle a donc pour devoir de mettre l’accent sur ces aspects fondamentaux. Par ailleurs, le domaine du culte est assis sur deux autres piliers très déterminants pour la religion. Il s’agit de la foi et de la spiritualité. Nous définissons la Foi comme la ferme conviction des choses qu’on espère. Il ne faut surtout pas oublier que cette conviction dépend de la qualité et de la véracité du sens qu’on se construit à partir de l’intelligence du réel. Donc si le circuit de construction du sens est biaisé et faussé, la foi l’est aussi. La spiritualité n’échappe pas à cette logique de fausseté, vu qu’elle est la mise en pratique, sous forme de rites, attitudes et comportements, de ce que la relecture du réel et les convictions prescrivent.

L’homo religiosus est confronté à certains problèmes issus de la construction du sens basée sur la recherche des causes premières et du discours téléologique. En effet, la diversité et la multiplicité du créé le met face à la multiplicité des perceptions, des compréhensions et des interprétations. La venue du monde de la science et de la connaissance rend plus complexe ce qui autrefois jouissait d’une estime, d’une considération et d’un ensemble de prérogatives et faveurs illimités. Voilà ce qui engendre le sécularisme et le laïcisme poussé ; tous surgis du rationalisme et de l’illuminisme. L’actuelle révolution techno-scientifique ne facilite pas davantage la situation. La pluralité des perceptions qui engendrent la multiplicité des cercles cultuels plonge l’humanité dans une confusion de plus en plus palpitante. Entre philosophies, magies, ésotérisme, religions, sectes, spiritismes, spiritualités et matérialisme-consumérisme, l’homo religiosus ne sait plus trop à quel saint se vouer. Tous prétendent offrir à l’homme le meilleur sens, la vérité et la sécurité.

En même temps que nous trouvons pertinents certaines remarques qui viennent de certains savants qui pensent qu’il ne faut pas réduire l’histoire de l’humanité à deux mille ans de christianisme et surtout au christianisme hégémonique occidental, en même temps nous ne pouvons pas nier l’impact positif et déterminant du même christianisme qui a provoqué une véritable mutation historique dans la compréhension et la définition du sens de la vie. La scrupulosité fondée sur la crainte de Dieu répandue par le christianisme, en mettant l’accent sur la loi de l’amour est une révélation exceptionnelle par rapport à l’ensemble des valeurs qu’elle fait émerger ensuite. La conscience d’être des êtres de Dieu et des êtres pour Dieu, en partant du principe de rationalité de l’homme, l’aide à travailler sa volonté pour la faire correspondre au plan ou dessin de Dieu. La multiplicité des cultes et des pratiques religieuses ne doit donc en aucun cas conduire à l’oubli de l’unique enjeu qui est celui du salut de l’homme. Dans la mesure où tous veulent le salut, la pluralité des propositions ne doit nullement éluder la pertinence de la loi d’amour qui régit les êtres. Pour nous chrétiens, elle est le cœur et la beauté même du christianisme. Sans elle, on ne saurait parler de miséricorde, de service, de sacrifice, de fraternité universelle et toutes ces valeurs qui distinguent le christianisme des autres propositions religieuses et philosophiques. La fragmentation du christianisme ne doit pas, elle aussi, être motif et occasion de dénaturation et de dépréciation de la proposition religieuse et spirituelle, fruit de la loi d’amour proposée par le Christ. C’est par ailleurs une des raisons pour lesquelles il m’a semblé important de méditer la Bible et surtout les textes liturgiques pour en ressortir, dans un style propre à moi, quelques réflexions homilétiques qui sont et peuvent être développées dans ces écrits.

Pour aider le chrétien à vivre sa foi, l’Église propose aux fidèles un ensemble de rites et de cérémonies qui prennent le nom de liturgie. Cette liturgie est conçue sous forme de sanctification du temps, élaborée autour d’un chronogramme qui regroupe des périodes bien déterminées, bien agencées ; périodes pendant lesquelles la Parole de Dieu est proposée aux fidèles. Elle connaît des moments d’alternance entre mélancolie, joie et ordinariété. Les rites sont vécus avec ces orientations précises et accompagnés par un langage symbolique marqué par les gestes et les couleurs. Du premier jour du temps de l’Avent à la célébration du Christ Roi, en passant par les solennités, les fêtes et les mémoires, la structure du temporal est soit tricyclique, les années A-B-C, soit bi-cyclique, les années paires et impaires. Dans ces tomes, nous voulons mettre ensemble le cycle qui part de l’Avent à la Pentecôte, tous les dimanches du temps ordinaire, la liturgie quotidienne des années impaire et paire. Certaines solennités, fêtes et mémoires constitueront un tome à part. De façon générale, le chronogramme des activités liturgiques, cultuelles et spirituelles est constitué :

Des solennités de précepte (les dimanches de l’Avent, les dimanches du carême et de Pâque, le Triduum Pascal).

Les solennités simples, c’est-à-dire qui ne sont pas de précepte (la commémoration de tous les fidèles défunts, le mercredi des Cendres, les trois premiers jours de la semaine sainte, l’octave de Pâque.

Les dimanches du temps de Noël et du temps ordinaire, les fêtes).

Les féries de l’Avent du 17 au 24 décembre (féries de l’octave de Noël et les féries du Carême).

Les mémoires obligatoires (les féries de l’Avent jusqu’au 16 décembre, les féries du temps de Noël jusqu’au 2 janvier, les féries du temps de Pâque).

Les féries du temps ordinaire.

Les périodes fortes de cette sanctification du temps sont organisées autour des préparatifs et célébrations de l’Avent à toute la période natale, et le carême et toute la période pascale. Il s’agit de la célébration des deux mystères de l’incarnation et de la résurrection. Toutes les prescriptions qui accompagnent le culte divin sont consignées dans le document conciliaire Sacrosanctum concilium sur la sacra liturgia, dans les différentes rubriques qu’on peut lire directement dans les livres liturgiques (Missels).

L’histoire du salut, rendue présente dans la célébration, révèle dans le temps de l’Église, l’action du Père qui, par la puissance du Saint-Esprit, envoie le Fils, afin que l’homme puisse retourner à la sainteté de sa première origine. Cela s’effectue dans un cheminement de transfiguration radical configuré au mystère pascal. L’Année liturgique est essentiellement la mémoire de l’évènement de la résurrection et des autres mystères qui caractérisent l’historique du déploiement du premier. Le sens chrétien de l’histoire met le Christ au centre pour que la communauté exprime en lui sa foi, le célèbre et espère en Lui en attendant d’être transfigurée dans la liturgie céleste. Il s’agit là de l’intention de manifester la présence du ressuscité au milieu de ses amis. Cette présence mystérieuse est rompue par les sacrements qui sont la modalité par laquelle l’Église en prière manifeste cette présence mystérieuse.

Dans tout ce processus de sanctification du temps, les Saintes Écritures sont l’élément clé à partir duquel et autour duquel tout est élaboré. Elles sont, pour nous chrétiens, la présence avec nous du Verbe incarné de Dieu. Elles sont le creuset dans lequel le chercheur de Dieu peut approfondir sa relation avec Lui. Nous avons procédé à une interprétation éclectique, c’est-à-dire qui associe le sens littéraire, le sens mystagogie, parfois quelques remarques critiques, et plus de parénèse basée sur certaines compétences, fruits de notre profil de formation où se croisent philosophie, théologie, expérience pastorale et pédagogie sociale. En l’absence physique du Fils, elles continuent la mission du Salut qu’il nous a apporté. Elles sont donc comme son Auteur, la Parole qui sauve ; Parole qui sauve parce qu’elle éclaire l’homme, l’enrichit de la bonne et de la vraie connaissance. Elle est annoncée à l’homme pour qu’il sorte des sphères de la destructivité où règnent l’instinct et ses forces dévastatrices. Elle est Parole qui sauve parce qu’elle met l’emphase sur les joies et transforme les peines en perspectives de gloire. Elle sauve parce qu’elle invite à viser haut, à exploser les limites du fini pour tendre vers l’infini et l’atteindre ; si on en devient passionné. Elle sauve parce qu’elle ouvre le voile qui couvre les potentialités qui destinent l’homme à construire une humanité meilleure, une humanité fondée sur la fraternité universelle et qui vit de l’unique loi qui gouverne tout, qui se fait contempler dans le créé, loi qui est chantée dans le cantique des cantiques. Celle-là même qui est exprimée par l’alliance sur la croix : l’Amour. Dieu crée par amour, il nous sauve aussi par amour. Il nous invite par la contemplation du créé pour construire nos actions et nos interactions fondées sur la Charité qui ne finit point.

Les dimanches du temps ordinaire

et les solennités

2e dimanche du temps ordinaire – Année A

Textes : Is 49, 3.5-6 ; Ps39/40 ; 1Co 1, 1-3 ; Jn 1, 29-34

Dans la suite immédiate des méditations de Noël, nous continuons à contempler la relation entre Jean le Baptiste et la venue de Jésus qui vient à lui recevoir le baptême, occasion de se manifester comme celui qui vient sur le monde, celui qui nous apporte le salut. Effectivement, Jean voit ce que la foule ne voit pas ; il voit l’Agneau de Dieu qui enlève le péché du monde. La manifestation de la divinité de Jésus à Jean ouvre la nouvelle ère, celle de la mission salvatrice dont il perçoit les fruits à venir. Ce que perçut Jean à cette époque s’est pleinement réalisé et se réalise encore de nos jours. La question est : Comment Jésus enlève-t-il le péché du monde ?

Il est l’Agneau de Dieu qui enlève le péché du monde parce qu’il est la manifestation, l’incarnation de l’amour miséricordieux de Dieu qui s’offre pour que les hommes abandonnent la voie du mal et choisissent de servir le Bien, le Juste, le Beau. Jésus pour le chrétien est celui qui manifeste de la meilleure des façons le don de soi, c’est-à-dire : tout donner et se donner soi-même pour que les autres aient la vie. Les chrétiens sont à la suite du modèle d’homme qui se révèle en Jésus qu’ils s’engagent à assumer. C’est aussi cela l’incarnation comme révélation de ce que Dieu attend de l’homme. Le péché du monde serait alors le refus d’accueillir cette vision johannique, le refus d’accueillir cette révélation, le refus d’assumer le dessein de Dieu pour l’homme. Nous savons toujours trouver des justifications à nos refus, surtout quand vient le moment d’assumer l’aspérité des péripéties de la vie. La nature faible de l’existence matérielle de l’homme n’accepte pas facilement les coupes de douleurs que la création et les interactions produisent. Nous aimons que tout coule, que tout aille pour le mieux dans le meilleur des mondes. Pourtant la réalité est brutale, elle nous rattrape souvent et nous rappelle que nous devons tout simplement nous mettre dans les dispositions de l’humilité pour apprendre à accepter et les coupes et les mystères de la vie. Refuser d’épouser dame humilité, c’est choisir l’orgueil, péché capital et racine de tous les maux dont souffre l’humanité.

Dans son action de sanctification du temps, l’Église s’efforce de comprendre et de manifester la force salvifique que Dieu déploie en faveur de l’homme pour le tirer, l’arracher des griffes du mal, du péché et de la mort. Les sacrements en sont les signes palpables et vérifiables qui participent à cette action divine. L’Eucharistie qui est la plénitude temporelle de cette manifestation est le sommet par lequel tout redevient comme avant. Jésus s’immole continuellement sur la croix pour que son sang versé purifie nos nombreux et affreux péchés. Il est aussi celui qui opère dans le presbytre au confessionnal pour que les irrégularités permanentes bénéficient d’une possibilité de purification elle-même aussi permanente. La confession est décidément le lavabo dans lequel le chrétien entreprend de se laver ou de se débarbouiller pour avoir un autre visage. Une pratique spirituelle, un rite symbolique qui nous restitue l’état de grâce, un bien-être spirituel, une harmonie avec soi-même, avec le prochain, avec la nature et avec Dieu.

Jean rend témoignage devant la foule venue à lui. En disant ne pas connaître Jésus, cela semble surprenant, entendu qu’il est son cousin. Mais il faut plutôt y voir le souci d’un discernement de l’identité messianique de son cousin. C’est pour cela que l’Esprit lui révèle, après un long discernement et la descente de l’Esprit – sous une forme corporelle – qui est réellement son cousin : l’Agneau qui enlève le péché du monde. Nous aussi, quand nous avons compris le sens de ce que nous sommes venus faire chez Jean et qu’il nous l’a découvert, nous sommes invités non seulement à suivre le Christ, mais surtout comme Jean à rendre témoignage. C’est aussi ce même témoignage qui permet à André d’amener son frère Simon au Messie. Notre témoignage a pour mission d’amener nos frères à Jésus le Christ.

2e dimanche du temps ordinaire – Année B

Textes : 1Sm 3, 3b-10.19 ; Ps 39/40 ; 1 Co 6, 13c-15a.17-20 ; Jn 1, 32-42

L’homme est-il naturellement un être religieux ? Est-il naturellement un être spirituel ? Voilà une question à partir de laquelle nous pouvons conduire notre méditation de ce dimanche. Ces questions, nous les posons en lien avec la deuxième lecture et un peu par rapport à la question que les disciples de Jean posent à Jésus : Maître, où demeures-tu ? Sans aller chercher dans les théories philosophiques, anthropologiques, spiritistes, psychologiques et autres, contentons-nous d’expliquer ce que nous dit la lettre aux Corinthiens et l’Evangile, du moins les extraits de ce jour.

Nous venons de célébrer Noël, la fête de l’incarnation ; Dieu s’incarne, l’Esprit, le Divin, le Fils prend la forme humaine. En cette fête, il faut voir la révélation du processus de tout être humain qui venant du Père prend forme humaine. Nous sommes des incarnations, c’est-à-dire des esprits qui prennent chair. Dieu nous a créés à son image et ressemblance, or Il est pur Esprit, nous partageons donc avec Lui cette substance qui est en nous et par nous sa semence. Ceci étant, il devient aisé de comprendre le discours de Paul aux corinthiens. De fait, il rappelle la vocation à la sainteté de l’homme. Or pour répondre à cette vocation, il faut d’abord bien comprendre ce que nous sommes et ce que nous voulons. Si nous nous réduisons à la corporéité, alors notre vie sera centrée sur la satisfaction des désirs de la chair. Par contre si nous prenons conscience de la semence divine que nous sommes, nous changeons la donne. Car nous nous orienterions vers notre vraie vocation. C’est à juste titre que la vocation de Samuel et l’appel des premiers disciples dans l’Évangile nous interpellent.

Si nous vivons selon la chair, il nous sera difficile d’écouter l’appel, qui probablement ne se manifeste pas dans les tourbillons charnels, mais dans l’ouverture à l’intériorité qui constitue l’essence de l’humain ; celle-là même qui le met en lien avec sa dimension spirituelle. Se connecter à son monde intérieur et surtout laisser l’écho de la voix du Créateur nous ouvrir le chemin de notre vocation, voilà ce à quoi le texte de Samuel nous initie. Le matérialisme et la superficialité du monde actuel sont la cause des nombreuses vocations manquées. Pourtant c’est le fait de laisser surgir l’étincelle divine que nous sommes qui nous révèle à nous-mêmes et nous révèle au monde ; de sorte que nous répondions convenablement à ce que Dieu attend de nous. La vocation ou l’appel ne se limite plus alors à la vie consacrée et religieuse. Car toute vie et tout service devrait être orienté en fonction du dessein de Dieu. Si l’homme peut être défini comme un homo religiosus, c’est seulement parce qu’il est capable, en tant qu’être volontaire et intelligent, de donner sens à ce qu’il est et à ce qu’il fait. L’être religieux de l’homme ne veut pas forcément dire qu’il remonte jusqu’à son créateur. Pour aller jusqu’à Lui, il faut bien plus que la recherche et la donation du sens ; il faut être spirituel. C’est ici qu’entre en jeu l’étincelle de Dieu qui est en nous en tant que créés par Lui.

Lorsque les disciples viennent demander à Jésus où il demeure, il nous est possible de considérer cette requête comme l’allégorie ou le langage symbolique de l’homme qui cherche Dieu. Oui, nous nous posons tous la question de savoir : Dieu où demeures-Tu, où te caches-Tu ? Ceux qui pensent le voir avec les yeux de chair se fabriquent des instruments pour scruter le macrocosme et le microcosme, malheureusement, difficile de le voir à l’œil nu ; si nous nous attendons à voir un être prédéterminé. Nous voyons Dieu lorsque nous nous ouvrons à l’intériorité, pour écouter l’écho de sa présence en nous et autour de nous. C’est à juste propos que Jésus porta le nom : Emmanuel qui signifie, Dieu avec nous. Il est ici là et maintenant en nous parce qu’Il est la source de ce que nous sommes et la source de tout ce qui existe. Il faut dépasser l’intelligence et s’ouvrir à la contemplation. Ce n’est pas en se limitant à scruter les cieux et la terre que l’homme entend l’écho de l’appel de Dieu ; mais plutôt en s’écoutant et en contemplant. Ceux qui comme Élie reçoivent mandat d’enseigner et de renseigner sur Dieu, sont à côté de nous pour nous aider à répondre à cet appel. Et quand nous aurons découvert où est Dieu, empressons-nous comme André d’aller l’annoncer à nos frères. À la fin posons-nous les questions suivantes :

Comment travaillons-nous à découvrir Dieu ?

Comment travaillons-nous à découvrir notre vocation ?

Comment travaillons-nous à répondre à notre vocation ?

Qui nous aide dans ces entreprises ?

2e dimanche du temps ordinaire – Année C

Textes : Is 62, 1-5 ; Ps 95/96 ; 1Co 12, 4-11 ; Jn 2, 1-12

En lisant l’Évangile du miracle de Cana, je me suis posé la question de sa signification profonde de nos jours. Mis à part la dimension messianique, l’intervention de la puissance de Dieu pour garantir la joie de la fête, que nous enseigne cet évangile hautement humain et hautement symbolique ? De prime abord, il faut situer l’événement de la fête du mariage comme sacrement des noces de l’Agneau, comme figure de l’amour de Dieu pour l’humanité, préfiguration du banquet éternel, dans sa dimension festive et béatifique. Marie est invitée au mariage de sa cousine, elle y va avec Jésus, qui lui-même vient avec ses amis. Un acte purement humain comme nous en connaissons et faisons au quotidien. En organisant nos fêtes, nous invitons nos familiers, nos amis et collègues qui à leur tour viennent avec leurs amis ; des fêtes populaires comme nous savons organiser. Ces fêtes sont souvent l’occasion de nous rendre compte de tant de choses et de comportements. Ce qui nous intéresse ce n’est pas tant de dire le côté négatif des comportements que nous connaissons tous, mais de voir comment mettre en lien le comportement de Marie et celui de Jésus pour constituer une manière de faire qui nous aide à vivre nos fêtes, mais aussi à nous ouvrir à la dimension spirituelle sous-jacente à l’événement de Cana.

Si vous organisez une fête, et que deux heures après le vin finit dans la cave ou au magasin, vous paniquez sûrement et vous commencez à vous demander comment tout le vin prévu pour la fête a pu finir de sitôt. Vous vous lamenterez en cherchant des voleurs supposés. Vous vous emporterez dans une colère qui incrimine tous les soûlards venus de partout vous mettre en difficulté. Oubliant que la fête est organisée pour que les mangeurs et les buveurs viennent se donner à fond dans leur domaine de compétence. Si la fête est populaire, il faut par conséquent se donner les moyens de satisfaire les invités, les gourmands et les soûlards. Dans l’événement de Cana, l’évangéliste nous met en face d’un cas de rupture de stock. Or le vin plus que la nourriture est ce qui anime la fête. La raison est simple, la nourriture remplit le ventre, le vin remplit la vessie, mais réjouit le cœur de l’homme. C’est cette réjouissance qui anime la fête. Heureusement à l’occasion de Cana, Marie y est et elle a le pourvoyeur de tout bien et de toute joie avec elle ; c’est son Fils. Elle sait chez qui aller chercher ce qui manque à la fête de sa cousine. Elle sait et est convaincue qu’il fera ce qu’il faut faire pour que le mariage de sa sœur soit une réussite. Elle ne se trompe pas à l’occasion, car le maître du repas dit très bien que les époux ont réservé le meilleur vin pour la fin, mais il ne sait pas qui est le pourvoyeur du meilleur.

Quand nous organisons nos fêtes qu’est-ce qui fait office du meilleur vin ? Qui est notre cousine qui intervient pour nous ? Qui est notre neveu qui intervient pour que l’eau se transforme en vin de qualité ultime ? De nos jours, nos fêtes se remplissent de personnes qui n’apportent aucune contribution, mais qui exigent à boire plus que ceux qui se sont offerts à fond pour les préparatifs et pour la gestion de l’événement. Cela est d’autant plus grave que ce comportement se transporte même dans les lieux où on devrait pleurer avec ceux qui pleurent.

Dans les sociétés traditionnelles d’autrefois, on venait à un deuil, à une fête non pas pour venir se remplir les estomacs et les sacs, mais pour soutenir ceux qui sont dans la joie et pour pleurer avec ceux qui pleurent. De nos jours, les événements de tristesse et de joie sont devenus occasions de ruine des familles et des querelles inutiles avant, pendant et après événements. Quel dommage ! Marie et Jésus nous enseignent sur ce qui doit être fait quand nous sommes partie prenante d’un événement triste ou joyeux à organiser et à gérer. Aucun chantage, aucun orgueil, aucune concurrence, aucune corruption, seul le cœur aimant d’une sœur qui veut que tout se passe bien pour tous, autant pour les époux que pour les invités. C’est de cela qu’il s’agit d’abord dans une circonstance festive ou difficile.

Par ailleurs, ce texte est aussi l’un des textes far que nous utilisons en Église pour illustrer la puissante intervention de la Vierge auprès de son Fils. À la fin peut-on dire que les mères de nos jours aient l’influence sur leur fils au point d’intercéder pour ceux qui pourraient recourir à leur intercession ? Le pourcentage est probablement infime, dans nos sociétés où les libertés ont pris le dessus sur la filiation et le sens de la communauté. C’est pour cela que je pose au début la question de savoir : qui est la personne qui interviendra pour nous pour que nous ayons des faveurs d’une tierce ? Nous, chrétiens catholiques, nous sommes fiers de savoir que nous avons une Maman qui peut intercéder pour nous. Notre sanctification du temps l’a bien compris et l’exploite à fond à travers la dévotion mariale qui fait partie des spiritualités multiples qui composent nos associations paroissiales, à la plus grande gloire de Dieu.

3e dimanche du temps ordinaire – Année A

Textes : Is 8, 23b – 9, 3 ; Ps 26/27 ; 1Co 1, 10-13.17 ; Mt 4, 12-23

La naissance de l’enfant Dieu sur terre, et par la suite celle du christianisme, a signé un tournant décisif dans l’histoire de l’humanité. L’étoile qui autrefois indiquait l’enfant de Bethléem brille dans la vérité de l’Évangile prêché à tout homme. Cette Bonne Nouvelle éclaire tous les hommes de tous les peuples d’une lumière nouvelle. On peut alors dire avec le prophète que « le peuple qui marchait dans les ténèbres a vu se lever une grande lumière » ; un verset que nous écoutons aussi la nuit de Noël. Isaïe, depuis l’Ancien Testament, avait annoncé ce qui est arrivé par la suite avec la venue de Jésus. Matthieu reprend ce verset pour nous expliquer que Jésus est la lumière qui se lève sur le monde. Il est la lumière qui éclaire les ténèbres de nos nombreux défauts et péchés, la lumière qui montre à l’humanité le chemin à suivre pour correspondre au dessein de Dieu. Jésus vient à notre rencontre et nous trouve dans nos milieux de vie, nos lieux de travail et nous invite à nous convertir. Il nous appelle comme il appela les pêcheurs du lac de Galilée à changer de style de vie ; passer de pêcheur à disciples et de disciples à pêcheurs d’hommes.

Quand j’étais petit, un des catéchistes de mon village aimait raconter l’histoire de la conversion en utilisant la métaphore du serpent et de la chenille. Il nous faisait souvent comprendre que la conversion n’est pas synonyme de changement de peau, car le serpent au lieu de changer procède souvent à la mue, laquelle lui donne une nouvelle apparence de beauté et de brillance, pourtant, il redevient plus brillant, plus gros et plus dangereux. Par contre, la conversion est un changement total qui peut d’ailleurs conduire à la métamorphose. Pour cela, il utilisait la figure de la chenille, qui entrant dans le cocon ressort en papillon. Les dégâts d’antan causés par la chenille sont minimes avec le papillon. Le chrétien dans son existence terrestre est comme dans le cocon à la manière de la chenille, l’Évangile est le catalyseur de sa métamorphose, de la métanoia. Il faut juste qu’il accueille ce projet dans sa vie.

Quand le soleil de vérité, de justice, d’honnêteté, de charité, d’humilité, de service et de don de soi touche notre vie, si nous sommes disposés à nous laisser façonner, notre vie change. Ce changement en bien est perceptible par nous-mêmes et par ceux qui sont autour de nous. Cela nous constitue en modèle et des fois en leaders ou guides. À ce moment nous pouvons effectivement influencer plus d’une personne dans leur manière d’être et de faire. Par ce fait, nous devenons lumière du monde, lumière qui se lève sur les ténèbres ; nous devenons des pêcheurs d’hommes pas seulement par la parole prêchée, mais aussi par notre témoignage de vie. Le monde actuel en a besoin. Il est vrai, le modèle chrétien est désormais concurrencé par les modèles mondains, et les modèles d’autres religions. Voilà pourquoi il faut travailler davantage à purifier notre proposition des grossièretés de l’anthropomorphisme déformant et aliénant, pour offrir une vraie spiritualité, une vraie religion et une belle humanité. La cohérence entre les trois déterminera et la pertinence du christianisme et son avenir. L’Église qui est sacrement du corps du Christ et signe de sa présence dans le monde doit s’assurer de ne pas éteindre la lampe de la vérité, de la justice et du service qui jusqu’ici ont fait leur preuve avec à la clé beaucoup de sang versé pour témoigner de la foi au Christ. Jésus nous appelle donc quotidiennement à nous lever à sa suite, il nous appelle à œuvrer pour l’avènement du Règne. Chacun à son rang et selon ses capacités et talents, œuvrons à sauver les âmes.

3e dimanche du temps ordinaire – Année B

Textes : Jon 3, 1-5.10 ; Ps 24/25 ; 1Co 7, 29-31 ; Mc 1, 14-20

Jésus commence son ministère d’annonce du Règne en utilisant l’expression : « les temps sont accomplis ». On peut se poser la question de savoir de quel temps il parle ? Le temps historique, le temps mathématique ? Heureusement en mettant au pluriel, il s’agit de la somme des temps. Le temps est le repère historique sur lequel l’homme se réfère pour se narrer et pour narrer aux autres. Il est passé, présent et futur. Le présent dans lequel parle Jésus ramène le passé en éveillant chez ses auditeurs de l’époque la mémoire des promesses que Dieu fit à son peuple par la bouche des prophètes. Les temps sont accomplis parce que Lui le Messie, Dieu fait chair et maître du temps est parmi les hommes. Il est là pour jeter la bonne semence pour qu’enfin l’homme comprenne le sens de la création et de la vie. Ce sens réside dans la recherche de la perfection, de la sainteté. D’où le « convertissez-vous ».

Il faut donc aller voir le rapport que l’homme entretient avec le temps. S’il est africain et camerounais, il prend tout son temps. S’il est européen, il regarde régulièrement la montre ; à tel point qu’il est né un proverbe : « l’Africain a le temps, l’Occidental a la montre ». Pour la mentalité occidentale, « le temps c’est de l’argent » mettant ainsi l’emphase sur la dimension comptable du temps. Probablement parce qu’il n’invente pas les instruments de comptabilité du temps, l’Africain ne considère pas beaucoup la dimension mathématique du temps ; il le considère dans son ensemble et se focalise un peu plus sur le kairos comme vécu du hic et nunc. Cependant, cette compréhension et ce vécu du temps sont plus proches de ce que Jésus dit en parlant de l’accomplissement des temps. Car ce qui se fait se fait dans le présent en bien comme en mal. De fait, l’éternité entre dans le temps chronologique pour le capitaliser dans le kairos. Ce qui a pour conséquence d’inviter l’homme à réfléchir sur sa manière d’être au présent. La dimension historique assumée dans le présent provoque la dynamique de la conversion impliquant l’impérieux devoir de changement de vie, au cas où celle-ci n’aurait pas été conforme à la volonté de Dieu. Cela a pour conséquence d’aider l’homme à améliorer la qualité de la vie. Il s’agit d’abandonner les chemins de perversion de l’humain pour s’orienter vers ceux de son élévation, de sa divinisation. Les temps sont accomplis parce que grâce au Christ l’homme sait à quoi s’en tenir pour hériter du royaume, pour avoir la vie éternelle, pour améliorer ses conditions sur la terre où il n’est que de passage.

Les temps sont aussi accomplis parce qu’il nous appelle en tout lieu. L’appel des premiers disciples montre qu’il n’y a pas de lieu préféré pour être appelé, qu’il n’y a pas de préférence de profil pour répondre à l’appel de Dieu. Et si préférence il y avait, les classes sociales les moins privilégiées sont concernées en premier. L’appel des pêcheurs du lac en témoigne à suffisance. En appelant tous les hommes à se convertir, Jésus nous implique personnellement chacun dans le processus du salut de l’humanité. En appelant les pêcheurs du lac et le reste du groupe des douze qu’il construira, il s’associe des hommes à cette même mission du salut des âmes. Car quand l’homme ne peut pas se sauver en s’impliquant bénévolement et personnellement, ses semblables doivent se sentir concernés. Ceux qui sont donc choisis pour participer à la mission de salut sont les envoyés-instruments et tuteurs en guise d’aide à notre salut. Ils ne pourront être que des porteurs ou transmetteurs de la bonne nouvelle et de l’exhortation au changement, à la conversion. Parce que tout compte fait, la décision nous appartient.

3e dimanche du temps ordinaire – Année C

Textes : Ne 8, 2-4a.5-6.8-10 ; Ps 18/19 ; 1Co 12, 12-31a ; Lc 1, 1-4 ; 4, 14-21

Le très beau panorama décrit par la première lecture tirée du livre de Néhémie est la narration d’une cérémonie de liturgie dominicale. Le rassemblement dans la maison de Dieu, la liturgie de la Parole, la louange et l’adoration qui la constituent, l’explication de la loi et les comportements prescrits pour cette journée. Une description qui préfigure ce que Jésus ensuite accomplit dans l’extrait de l’évangile du jour et que l’Église à sa suite a formulé dans la célébration de la messe. Dit autrement, l’Ancien Testament a initié ce que Jésus est venu accomplir et l’Église continue cette œuvre de prédication de la Bonne Nouvelle en repartant des traditions vétérotestamentaires. Comme dans l’AT, nous retrouvons les éléments de pupitre (ambon), lecture de la Parole, explication (homélie), louange ou l’amen d’antan qui devient les chants liturgiques, l’adoration (consécration et culte eucharistique, gestuel de prostration, agenouillement), l’invite au partage ou la communion et l’invite à aller annoncer aux autres la même Bonne Nouvelle du jour. Le dimanche dans la nouvelle alliance a gardé jusqu’à nos jours cette orientation voulue joyeuse, sereine, reposante et festive. Pour certains, c’est aussi l’occasion de partager ; partage de la chaleur humaine en allant rendre visite à des familiers aux amis et collègues. Chez nous, le dimanche est aussi le jour préféré de rencontre des associations ou tontines haut lieu de partages divers. Le dimanche est devenu aussi le temps des clubs 2-0. Toutes ces rencontres sont des hauts lieux de manifestation des lieux d’affection des uns vis-à-vis des autres, mais elles peuvent aussi être des lieux de tensions et de crises entre nous ; surtout quand les intérêts égoïstes de certains plombent la dynamique du bien commun qu’on recherche avant tout.

L’Église comme communauté de foi et de prière devient alors un lieu de ressourcement de l’humanité en quête d’une manière d’être. Rarement, on y va pour des querelles et des luttes armées, du moins selon ce qui est prévu et visible. Les lieux de prières sont des hauts lieux de paix, de sérénité, de joie et de fraternité. Elles peuvent pour cela être considérées comme modèles et creusets où l’humanité s’améliore et se forge. Elles ne se transforment en lieux de luttes que lorsque l’animalité domine les objectifs du spirituel qui y sont poursuivis. Ceux qui ont fait le choix d’être chrétiens sont comme Jésus, des personnes qui ont reçu l’onction de l’Esprit pour accomplir la même mission dont il est question dans l’évangile, c’est-à-dire : annoncer la Bonne Nouvelle, ouvrir les yeux des aveugles, libérer les opprimés et les prisonniers et annoncer l’année ou le temps de grâce. Voilà la mission accomplie par Jésus, celle que l’Église encore aujourd’hui continue. Elle est œuvre de tous les membres du corps du Christ. Et quand on dit membre, il s’agit des forts et des faibles, des vertueux et des moins vertueux ; une synergie qui exclut toute stigmatisation, tout préjugé et surtout pas la discrimination. Cela s’accomplit effectivement aujourd’hui dans le moindre acte charitable, de bonté, de justice, d’attention, d’enseignement, de correction fraternelle charitable, de conseil, de service et ainsi de suite. C’est en persévérant sur ces chemins du salut que nous réalisons la Parole de Jésus : c’est aujourd’hui que ce que vous venez d’entendre s’accomplit.

4e dimanche du temps ordinaire – Année A

Textes : So 2, 3 ; 3, 12-12 ; Ps 145/146 ; 1Co 1, 26-31 ; Mt 5, 1-12

Le discours de la nouvelle alliance rapporté par Matthieu sur la nouvelle loi enseignée par Jésus sur la montagne, comme Moise autrefois, met en évidence neuf préceptes à partir desquels l’homme qui cherche Dieu peut le trouver. C’est intéressant de remarquer que la spiritualité avec Jésus selon ce discours des béatitudes n’est plus bipolaire entendu, orienté vers Dieu et sur l’homme. Jésus propose à ses fidèles une démarche spirituelle qui concentre la spiritualité sur l’amélioration de soi, l’amélioration des rapports entre hommes et le bénéfice qu’il en tire. Élaborées sous la forme positive, les béatitudes ou nouveaux commandements incitent l’homme à se focaliser sur le perfectionnement de soi et non attendre que l’autre soit parfait. Faisons une analyse une par une.

Heureux les pauvres d’esprit : pendant une longue période, on a associé la pauvreté d’esprit à la pauvreté matérielle. Il est vrai le mot esprit est remplaçable par : cœur. Il est tout aussi vrai qu’il ne faut pas confondre pauvreté4 et misère. La pauvreté de cœur elle, ne désigne pas le manque de richesses spirituelles, mais plutôt le dépouillement de son cœur ou son âme de l’esprit d’orgueil qui habite les possesseurs et jouisseurs de biens matériels. C’est cet orgueil qui fait dire que l’argent ou la richesse rend insolent. Et dans ce sens, la pauvreté matérielle à certains égards est un avantage, si l’on vit sans jalousie et sans aigreur en acceptant sa condition et en se battant au quotidien pour améliorer autant que faire se peut, sa qualité de vie. Être pauvre de cœur c’est reconnaître sa place dans la création, comme être limité, collaborateur de Dieu dans la création des biens matériels, et intendant de cette même création. La pauvreté de cœur est synonyme d’humilité, vertu recommandée à tous, riches et pauvres.

Heureux les affligés ou ceux qui pleurent : une vraie antithèse. Comment peut-on être heureux parce qu’on pleure ou bien en pleurant ? Faut-il comprendre que Jésus vante la faiblesse ? C’est possible, lorsqu’on sait ce qu’il a incarné lui-même. Les pleurs ici peuvent avoir diverses causes. Elles peuvent être dues à des causes naturelles et à l’angoisse existentielle que provoquent ces dernières. Il faut juste retenir que les épreuves dans ce cadre renforcent notre endurance et vérifient la qualité de notre foi, car au bout des afflictions la joie de la consolation subsiste. Ne vivant pas dans un monde où tous sont insensibles, il arrive très souvent que la douleur de certains suscite l’empathie et la commisération des autres. Ceux-là, sensibles à la turpitude de l’autre, savent pleurer avec ceux qui pleurent, parce qu’en le faisant ceux qui pleurent s’en trouvent consolés. Face à la douleur et les souffrances, l’homme perd la maîtrise, et se laisse aller par l’émotion, et les pleurs sont une manière d’exprimer cette douleur. Il est d’ailleurs conseillé de le faire souvent, car comprimer en soi la tristesse, l’angoisse et le stress est source d’autres problèmes sanitaires bien plus dangereux. On est heureux de pleurer non pas par sadomasochisme, mais par souffrance et par solidarité et commisération à la situation de celui qui est cause de ces douleurs et qui ne sait pas qu’il est dans les ténèbres. Nous chrétiens devons accepter les souffrances avec l’intention de participer avec le crucifié (Ga 2, 20) à sauver le monde.

Heureux les opprimés : Lorsqu’on sait aussi ce que dit Saint-Paul dans (2Co 12, 10) « lorsque je suis faible, c’est alors que je suis fort ». Face au désir d’affirmation de soi et de puissance, la promotion du stoïcisme n’est pas forcément la chose la mieux partagée dans un monde où les forts n’attendent que ça pour assujettir les faibles. L’un des griefs contre le christianisme est bien cette approche des relations humaines avantageuse pour les amateurs de l’hégémonie. Tout le problème repose pourtant sur l’accueil que toute l’humanité fait à la proposition du Christ. Il s’agit d’une spiritualité orientée vers la non-violence, non-vengeance. Il semble que les lois de la nature régulent elles-mêmes le système de prédation et de domination des êtres les uns sur les autres. Les prédateurs les plus dangereux finissent toujours par disparaître, laissant place à un équilibre acceptable dans la création. Un monde régi par une prédation féroce est voué à « l’apocalypse ». À l’état actuel, le monde continue parce que la majeure partie des vivants est douce.

Heureux êtes-vous lorsqu’on vous insultera, calomniera, persécutera à cause de moi : une reprise synthétique des autres formes pour dire que le rôle du chrétien n’est pas d’être et de vivre comme tous les hommes. Il s’agit ici de la gestion de notre réactivité. Bien évidemment, il est difficile de se contenir face à tous ces outrages à son endroit, par contre il est préférable de ne pas s’encastrer dans le ping-pong des violences et dommages en gestation. C’est à ce titre qu’il faut apprendre à contrôler ses émotions, à savoir les gérer et à opter pour la tempérance. Comme on peut le constater, le monde va bien et ira toujours bien tant qu’il y a une majorité qui décide de garder sous éteignoir briquet et essence. Ceci dit, l’objectif est que tous les hommes le comprennent et travaillent à désamorcer les bombes de l’ego surdimensionné.

Heureux les doux, ils obtiendront la terre promise : la douceur qui peut aussi être associée à l’humilité et à la paix, est la qualité de ceux qui vivent une maîtrise parfaite de leurs émotions et qui répugnent toute forme de violence, qu’elle soit verbale ou physique. Par contre, il faut bien se demander comment ceux-là peuvent obtenir la terre promise (quelle terre promise ?) sans violence. Il s’agit d’une stratégie pour éviter d’embraser le monde des humains dans un cycle de luttes meurtrières où les semblables deviennent des prédateurs pour les autres. Il est vrai, la lutte de survie des espèces est mue par cette même loi qui se vérifie chez les vivants à des degrés variés et divers. Toutefois, cette béatitude traduit aussi une forme de mystique du vivant et de la création qui veut que l’espèce plus violente qui crée le déséquilibre dans la création finisse par ne pas prospérer ou souvent par disparaître. Les doux obtiendront pas seulement la terre promise, mais celle-ci aussi, parce qu’ils sont la garantie de la continuité du créé. La création laissée aux mains des violents tombe dans le chaos. Les doux sont aussi des artisans de paix. Ils sont appelés fils de Dieu parce qu’ils œuvrent pour la sérénité, la tranquillité, l’équilibre dans les relations entre êtres et le salut de tous.

Bienheureux les affamés de justice : des maux qui font souffrir abondamment l’humanité on cite l’injustice. Dans les sociétés humaines, la création des classes, les idéologies hégémoniques, les diverses formes d’exploitation de l’homme par l’homme et bien d’autres vices sont des catalyseurs d’injustices multiformes. En même temps que les victimes luttent pour établir la justice, elles doivent faire attention à ne pas oublier de rester dans le principe lorsque survient le changement. Car la tentation de vengeance est le risque à craindre. En affamé, ils sont ceux qui voient ce qui ne va pas. La promesse du rassasiement se limite à la résolution satisfaisante du problème tenant compte de l’équité à rétablir.

Heureux les cœurs purs : la vocation de l’humanité est de tendre à une qualité de vie qui reflète son essence divine. C’est ainsi que le même Matthieu dit : « soyez saints comme votre Père céleste est Saint ». Dieu qui est Esprit pur se fait voir si notre esprit est pur. Tout le parcours vers la sainteté est destiné à nous aider à cette fin dernière. La pureté elle-même signifie enlever toute tache peccamineuse de notre âme. Toutes les autres béatitudes concourent alors à la réalisation de cette pureté du cœur…

4e dimanche du temps ordinaire – Année B

Textes : Dt 18, 15-20 ; Ps 94/95 ; 1Co 7, 32-35 ; Mc 1, 21-28

Pour parler aux hommes, Dieu suscite parmi eux des personnes capables de comprendre, d’écouter, de découvrir, de décoder et de transmettre sa parole, sa volonté. Les prophètes, les prêtres sont les médias de Dieu. Il faut élargir cette médiumnité à tous ceux qui font cette volonté et qui l’enseignent aux autres. Par conséquent, tous les hommes sont des potentiels canaux de communication que Dieu utilise pour parler à ses créatures. Les difficultés majeures résident dans la certification de l’authenticité et la véracité du message à transmettre et dans la légitimité et la légalité du médium. Ces deux grands axes de la problématique du message et du porteur sont le socle sur lequel est construit le système religieux. De fait, un regard sur l’histoire montre un parcours chaotique de querelles, de disputes, de crises, et des divisions issues de ces axes. Il y en a qui surgissant du sein d’un ordre déjà établi ont su imposer une nouvelle manière de comprendre, d’interpréter et même de transmettre la parole de Dieu. Le débat de la légitimité et l’authenticité et du message et du porteur nous a légué la multitude des religions et des religiosités. Le nœud gordien de l’affaire se tranche dans la véracité des enseignements. Car c’est la vérité qui rend mieux la volonté de Dieu. Cependant, comment faire le discernement entre ce qui est vérité subjective et vérité objective ? Selon le Deutéronome, le prophète ou l’homme de Dieu transmet la Parole, la volonté de Dieu, il ne parle pas de lui, il ne transmet pas ses opinions. Ceci suppose qu’il est à l’écoute de Dieu, qu’il aime Dieu, qu’il est au milieu du peuple comme celui qui représente Dieu. Dans le domaine du religieux et du spirituel, la Vérité est Jésus, le prophète qu’annonce Moïse dans la première lecture. Il nous dévoile les mystères cachés de la création et de la vie. Pour nous chrétiens, il est la lumière qui éclaire nos ignorances. Il faut cependant être capable de confronter son enseignement à la réalité pour en déceler la pertinence, la cohérence, la permanence et l’utilité. C’est ce travail que les prêtres apprennent en formation et qu’ils s’efforcent chacun à sa manière de transmettre.

La manière d’annoncer le message contribue à sa façon à asseoir la notoriété du messager. Dans l’Évangile, saint Marc souligne le fait que la présence de Jésus dans le temple fait réagir le mauvais esprit. Une manière de dire que la présence du Divin influence et agite le malin. Ceux qui ont la responsabilité de dévoiler les mystères du royaume, comme Jésus, devraient eux aussi être capables d’influencer et de provoquer la manifestation des forces occultes tapies dans le cœur des hommes. Il ne serait pas exagéré de dire que certaines personnes réagissent souvent négativement ou violemment face à la véracité de l’annonce de la Parole qui leur est faite. Mais comme le dit Marc, l’homme de Dieu prêche avec autorité pour commander aux petits esprits agités et gênés par la puissance de la Parole qui libère les âmes de l’emprise du mensonge, de la façade de l’hypocrisie, de la haine et des divisions… Les avertissements au sujet des messagers sont clairs. Pas de pacte ni de consensus avec les forces du mal, il faut libérer l’homme, il faut le sauver de leur emprise. Au sein de son peuple, Dieu suscite des hommes de vérité, de justice, des hommes honnêtes, de courageux hommes et femmes capables de montrer la voie à suivre. Résister aux forces corruptrices qui peuvent soit dissuader, soit altérer la puissance libératrice du message est un défi permanent.

4e dimanche du temps ordinaire – Année C

Textes : Jr 1, 4-5.17-19 ; Ps 70/71 ; 1Co 12, 31 – 13, 13 ; Lc 4, 21 – 30

Dieu appelle tous les hommes et les choisit depuis le sein maternel. La vocation ne se limite pas au service prophétique ou clérical. Tout ce que l’homme fait est une vocation. L’homme répond donc d’une manière ou d’une autre à cet appel que Dieu lui adresse depuis sa conception. Est-ce que cela signifie la prédestination et le fatalisme ? Non, dans la mesure où Dieu qui donne à l’homme le libre arbitre lui laisse la possibilité de répondre favorablement ou défavorablement. Cependant, il serait toujours mieux de répondre favorablement, car Dieu sait mieux que nous-mêmes ce qui est bon pour nous. La réponse à sa propre vocation passe par la connaissance de soi. Quand on se connaît, on sait dans quel domaine on peut s’en sortir sans difficulté, on connaît ses aptitudes, ses capacités. Des fois, on se découvre quelques talents ou charismes innés. C’est aussi dans ce sens qu’on pourrait comprendre le verset 5 de la première lecture.

Les sociétés de la science et la culture ont rendu classiques et professionnelles des choses qui étaient interprétées autrefois comme don de Dieu. Le prêtre et le prophète de nos jours doivent passer par une scolarisation à outrance, une professionnalisation et l’exigence de la compétence. Les techniques de recrutement naviguent de plus en plus entre bricolage, trafic d’influence, lobbying, corruption et favoritisme. Tout cela court le risque d’écarter Dieu pour privilégier les processus humains et leur fonctionnalisme. Cela a d’ailleurs fait naître l’expression fonctionnaires de Dieu pour parler des hommes de Dieu. Ce qui est dit des vocations religieuses peut également se vérifier sur les vocations civiles ou professionnelles. En principe, il faut sortir de ces ornières dégradantes pour appliquer le plus possible de lois objectives permettant de déterminer véritablement qui peut exercer quel rôle avec efficacité pour le bien de tous. Cela signifie aussi tenir compte du lieu où s’exercera la profession ou service. C’est d’ailleurs l’un des thèmes des Écritures de ce dimanche.

En effet, Jésus dans l’évangile du jour fait comprendre que le prophète n’est jamais bien accueilli chez lui. Les raisons qui justifient cet échec sont multiples. Quelle que soit la vocation à laquelle l’homme répond, le lieu où il rencontre ou peut rencontrer plus de difficultés est dans sa propre maison, dans son groupe d’appartenance, dans sa communauté, sa cité, son pays. Souvent, ceux qui sont vos familiers, vos amis pensent qu’ils vous connaissent mieux que tout le monde, parce que vous avez grandi ensemble, ils connaissent vos défauts, probablement vos qualités. Ils réclament le privilège d’être vos proches et veulent vous trimballer dans les méandres de la familiarité, du mépris, du favoritisme. Souvent, certains savent aussi quel type de discours vous tenir pour vous affaiblir et vous dérouter. Comme Jésus, le prophète doit rester lucide et savoir discerner où se situent les enjeux. L’homme qui répond à son appel doit garder en mémoire qu’il ne se choisit pas, il ne sert pas en son nom, il ne se sert pas, il est l’instrument que Dieu utilise pour aider son peuple à accomplir son dessein. Tout ce que l’homme fait doit concourir à manifester la volonté de Dieu ; une volonté qui se traduit par les trois vertus que Saint Paul évoque dans la lettre aux corinthiens. Il s’agit de la foi, de l’espérance et de la charité, tout en gardant en mémoire que la charité est plus forte et éternelle, parce qu’elle est la semence, l’attribut de Dieu dans le cœur des hommes. Les convictions changent et finissent ; tout comme l’espoir, mais la charité est ce qui engendre et entretient la vie et l’être. Si on veut approfondir la connaissance sur le thème de l’amour, il suffit de lire Deus caritas est/Dieu est amour du Pape émérite Benoît XVI.

5e dimanche du temps ordinaire – Année A

Textes : Is 58, 7-10 ; Ps 11/112 ; 1Co 2, 1-5 ; Mt 5, 13-16