Le choix de Thomas - Tina Folsom - E-Book

Le choix de Thomas E-Book

Tina Folsom

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Beschreibung

Vampire employé chez Scanguards et maître dans le domaine du contrôle de l'esprit, Thomas est le mentor d'Eddie, le petit nouveau, depuis plus d'un an et en est amoureux depuis tout aussi longtemps. Mais il croit que cet amour ne sera jamais partagé. Tout en patrouillant à travers San Francisco à la recherche de vampires diaboliques, Eddie embrasse Thomas lors d'une tactique de diversion et se retrouve ébranlé par sa propre réaction. Son attirance sexuelle envers son mentor le terrifie, et il craint qu'aller de l'avant et s'abandonner à ses désirs ne puisse détruire leur relation. Tandis que le mal et la déception engendrés par l'incapacité d'Eddie à s'engager amènent Thomas à glisser sur la mauvaise pente jusqu'à détruire tous ceux qu'il aime, seul Eddie peut l'empêcher de sombrer dans les ténèbres pour l'éternité. Mais Eddie aura-t-il le courage d'affronter, à temps, ses réels sentiments de sorte à sauver l'homme qui lui est destiné ? À PROPOS DE LA SÉRIE La série Scanguards Vampires est pleine d'action rapide, de scènes d'amour torrides, de dialogues pleins d'esprit et de héros et héroïnes forts. Le vampire Samson Woodford vit à San Francisco et possède une société de sécurité et de garde du corps, Scanguards, qui emploie à la fois des vampires et des humains. Et éventuellement des sorcières. Ajoutez quelques gardiens immortels et quelques démons plus tard dans la série, et vous aurez compris ! Chaque livre peut être lu seul et est toujours centré sur un nouveau couple qui trouve l'amour, mais la série est plus agréable lorsqu'elle est lue dans l'ordre. Et bien sûr, il y a toujours quelques blagues - vous comprendrez quand vous rencontrerez Wesley, un aspirant sorcier. Bonne lecture ! ⭐️ ⭐️ ⭐️ ⭐️ Lara Adrian, auteure de la série Midnight Breed, vendue dans le New York Times : "Je suis accro aux livres de Tina Folsom ! La série des Scanguards® est l'une des choses les plus chaudes qui soient arrivées à la romance vampirique. Si vous aimez les lectures torrides et rapides, ne manquez pas cette série palpitante !" Les Vampires Scanguards La belle mortelle de Samson (#1) La provocatrice d'Amaury (#2) La partenaire de Gabriel (#3) L'enchantement d'Yvette (#4) La rédemption de Zane (#5) L'éternel amour de Quinn (#6) Les désirs d'Oliver (#7) Le choix de Thomas (#8) Discrète morsure (#8 ½) L'identité de Cain (#9) Le retour de Luther (#10) La promesse de Blake (#11) Fatidiques Retrouvailles (#11 ½) L'espoir de John (#12) La tempête de Ryder (#13) La conquête de Damian (#14) Le défi de Grayson (#15) L'amour interdit d'Isabelle (#16) La passion de Cooper (#17) Le courage de Vanessa (#18) Gardiens de la Nuit Amant Révélé (#1) Maître Affranchi (#2) Guerrier Bouleversé (#3) Gardien Rebelle (#4) Immortel Dévoilé (#5) Protecteur Sans Égal (#6) Démon Libéré (#7) Le club des éternels célibataires Séduisant (#1) Attirant (#2) Envoûtant (#3) Torride (#4) Attrayant (#5) Passionné (#6) Hors d'Olympe Une Touche de Grec (#1) Un Parfum de Grec (#2) Un Goût de Grec (#3) Un Souffle de Grec (#4) Les Vampires de Venise Nouvelle 1 : Raphael & Isabella Nouvelle 2 : Dante & Viola Nouvelle 3 : Lorenzo & Bianca Nouvelle 4 : Nico & Oriana Nouvelle 5 : Marcello & Jane Nom de Code Stargate Ace en Fuite (#1) Fox en Vue (#2) Yankee dans le Vent (#3) Tiger à l'Affût (#4) Hawk en Chasse (#5) La Quête du Temps Changement de Sort (#1) Présage du Destin (#2) Thriller Témoin Oculaire La série des vampires Scanguards a tout pour plaire : coup de foudre, ennemis à amants, rencontre mignonne, instalove, héros alpha, compagnons de destin, garde du corps, bande de frères, demoiselle en détresse, femme en péril, la beauté et la bête, identité cachée, âmes sœurs, premier amour

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Seitenzahl: 447

Veröffentlichungsjahr: 2025

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LE CHOIX DE THOMAS

VAMPIRE SCANGUARDS - TOME 8

TINA FOLSOM

TABLE DES MATIÈRES

Chapitre 1

Chapitre 2

Chapitre 3

Chapitre 4

Chapitre 5

Chapitre 6

Chapitre 7

Chapitre 8

Chapitre 9

Chapitre 10

Chapitre 11

Chapitre 12

Chapitre 13

Chapitre 14

Chapitre 15

Chapitre 16

Chapitre 17

Chapitre 18

Chapitre 19

Chapitre 20

Chapitre 21

Chapitre 22

Chapitre 23

Chapitre 24

Chapitre 25

Chapitre 26

Chapitre 27

Chapitre 28

Chapitre 29

Chapitre 30

Chapitre 31

Chapitre 32

Chapitre 33

Chapitre 34

Chapitre 35

Chapitre 36

Chapitre 37

Chapitre 38

Chapitre 39

Chapitre 40

Chapitre 41

Chapitre 42

Chapitre 43

Ordre de Lecture

Autres livres de Tina

À propos de l’auteur

RÉSUMÉ

Vampire employé chez Scanguards et maître dans le domaine du contrôle de l’esprit, Thomas est le mentor d’Eddie, le petit nouveau, depuis plus d’un an et en est amoureux depuis tout aussi longtemps. Mais il croit que cet amour ne sera jamais partagé.

Tout en patrouillant à travers San Francisco à la recherche de vampires diaboliques, Eddie embrasse Thomas lors d’une tactique de diversion et se retrouve ébranlé par sa propre réaction. Son attirance sexuelle envers son mentor le terrifie, et il craint qu’aller de l’avant et s’abandonner à ses désirs ne puisse détruire leur relation.

Tandis que le mal et la déception engendrés par l’incapacité d’Eddie à s’engager amènent Thomas à glisser sur la mauvaise pente jusqu’à détruire tous ceux qu’il aime, seul Eddie peut l’empêcher de sombrer dans les ténèbres pour l’éternité. Mais Eddie aura-t-il le courage d’affronter, à temps, ses réels sentiments de sorte à sauver l’homme qui lui est destiné ?

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2015 Tina Folsom

Scanguards est une marque déposée.

1

Eddie déboula dans le studio, la fille s’étant présentée comme Jessica dans les bras. Elle l’avait dragué dans la boîte de nuit où il était allé patrouiller un peu plus tôt. Aidée par la main de Jessica, la porte se referma derrière eux en claquant. La chaude bouche de la jeune femme recouvrait les lèvres de son partenaire, tandis qu’elle l’embrassait passionnément et que ses mains erraient sur son corps, glissant sous son t-shirt, de sorte à caresser la peau nue de sa poitrine.

Tout ce temps, elle pressa son corps bien roulé contre le sien, écrasant ses seins opulents contre lui. L’odeur de son excitation emplit la petite pièce, laquelle était meublée d’un lit, d’une commode et d’une petite table avec deux chaises. Une porte ouverte menait à une cuisine de la taille d’un timbre-poste, et une autre indiquait la présence d’une salle de bains probablement aussi petite que la cuisine. La sœur d’Eddie, Nina, avait vécu dans un endroit semblable avant de rencontrer son compagnon.

Jessica était jolie : longues boucles blondes, lèvres pulpeuses, yeux bleus à l’air innocent. Tout ce qu’un type pouvait souhaiter. Et par-dessus le marché, elle était disposée à coucher. Remarquable. Aucune coercition n’était nécessaire. Pas plus que de la séduction. En fait, elle était plus qu’enthousiaste, et c’était elle qui menait la barque, se passant à présent le t-shirt par-dessus la tête avant de le lancer sur la chaise voisine. De ce qu’Eddie en savait, ceci était une de ses pratiques courantes : lever un gars dans une boîte de nuit et l’emmener chez elle pour s’adonner à du sexe sans tabous. Hé, il n’était pas en train de se plaindre !

Jessica lui prit les mains, lesquelles étaient demeurées tout ce temps derrière son dos et lui fit enrober ses seins revêtus d’un soutien-gorge. Peut-être que revêtus était un mot trop fort, ce qu’elle portait pouvant difficilement s’appeler un soutien-gorge. C’était un simple ensemble de tissus spécifiques et de ficelles assemblés par une armature. Ses mamelons n’étaient même pas cachés. Ses seins étaient plutôt rehaussés, comme s’ils étaient présentés sur un plateau d’argent. Tel un festin auquel il allait se livrer.

Il jeta un coup d’œil à l’endroit où ses mains compressaient la générosité de cette chair d’une manière presque mécanique, comme s’il n’était pas celui qui était en train de la toucher. Il avait l’impression de regarder un film porno médiocre, certes explicite, mais à peine excitant.

Les yeux fermés, elle jeta la tête en arrière.

— Oh, ouais, bébé ! cria-t-elle en posant les mains sur celle d’Eddie, de sorte à ce qu’il serrât plus fortement.

Il s’y conforma, davantage parce qu’il pensait que c’était ce qu’il avait à faire plutôt que par envie. S’il l’embrassait à nouveau, peut-être s’investirait-il un peu plus. Après tout, il manquait de pratique. En fait, depuis sa transformation, l’année précédente, il n’avait pas couché avec une femme. Marrant qu’il ne le remarquât que maintenant. Enfin, cela ne signifiait pas qu’il n’avait trouvé aucune satisfaction sexuelle ; après tout, quel mec ne se masturbait pas dans la douche après le réveil ? Ou avant d’aller dormir ? Il était juste comme les autres types : il trouvait le soulagement grâce à sa propre main, à chaque fois qu’il en avait besoin.

Eddie glissa la main sur la nuque de Jessica et l’attira à lui, pressant les lèvres sur sa bouche en attente et l’embrassa. Sa langue fit irruption à l’intérieur pour l’explorer sans, toutefois, que l’excitation qu’il s’attendait à voir jaillir dans ses veines ne se matérialisât. Son cœur battait tout aussi régulièrement que précédemment, quoique presque deux fois plus vite qu’un cœur humain. Mais cela était normal pour un vampire.

S’évertuant à faire avancer les choses, il tira sur le soutien-gorge et l’arracha, permettant ainsi aux seins de déborder de cette cage inappropriée. Ils semblaient presque rigides, ce qui l’amena à se demander s’ils étaient naturels ou pas. Une fille de son âge, et elle ne pouvait avoir plus de vingt-deux ans, pouvait-elle porter des implants en silicone ? Pourquoi les gens mettaient-ils des corps étrangers en eux ? Il les examina en s’interrogeant toujours à ce propos.

La main de Jessica sur son entrecuisse, les doigts courant le long de la tirette de son pantalon cargo, le tira hors de ses pensées et le ramena sur la tâche en cours.

— Oh !

Le soupir de déception qu’elle laissa échapper lorsqu’elle l’empoigna lui dit que quelque chose ne tournait pas rond.

À nouveau, elle le frotta, mais Eddie lui saisit la main, l’empêchant ainsi de le toucher à nouveau.

— Quelque chose ne va pas ? demanda-t-elle en faisant la moue.

Tout allait mal. Il ne bandait pas. Alors qu’il devrait déjà avoir une violente érection. Tout homme de vingt-cinq ans l’aurait, dans les mêmes circonstances. Lorsqu’il était humain, un baiser passionné pompait suffisamment de sang dans son membre pour qu’il pût se mettre au travail. Et maintenant, alors qu’il avait une fille à moitié nue désireuse de le satisfaire, son sexe pendait là, telle une vieille poupée de chiffon, molle et indifférente. Comme si c’était l’appendice de quelqu’un d’autre.

Pourquoi, bordel, ne bandait-il pas ? Pourquoi son engin dormait-il ? Putain, mais qu’est-ce qui n’allait pas chez lui ?

Il ferma les yeux, tentant de faire apparaître des images susceptibles d’exciter n’importe quel homme : des femmes nues penchées sur un meuble, des femmes en train de se déshabiller et même des femmes en train de le faire avec d’autres femmes. Et pourtant, son membre demeura comme mort, la moindre cellule sanguine s’abstenant de le stimuler.

De nulle part, des souvenirs vieux de quelques semaines firent à nouveau intrusion, des souvenirs qu’il avait essayé de refouler à chaque fois qu’ils avaient pointé leurs sales têtes. Sauf que, cette fois, il ne pouvait les réprimer plus longuement. Il devait les affronter de plein fouet.

Plusieurs semaines plus tôt

Eddie longeait le couloir et se dirigeait vers la salle de conférence située à l’étage exécutif des quartiers généraux de Scanguards dans la Mission. Un problème majeur était en train de se produire, et il n’allait pas manquer cette action juteuse. Il aimait ce boulot, la camaraderie entre ses collègues vampires, l’amitié avec son mentor et l’admiration de sa sœur. Nina était enfin fière de lui, de tout ce qu’il avait réalisé après avoir pris le risque de devenir un vampire. Finalement, tout le monde était heureux : Nina était liée par le sang à Amaury, un important protagoniste au sein de Scanguards et, de ce qu’Eddie pouvait en voir, son beau-frère était totalement gaga d’elle. Il n’avait jamais vu un homme aussi amoureux d’une femme. Ce fait avait effacé tous les doutes d’Eddie à propos du succès de la longévité d’une relation humain-vampire. Nina et Amaury donnaient l’impression que ce fût facile. Ils semblaient faits l’un pour l’autre.

Tout en longeant le couloir, ses narines se mirent soudain à frémir. Un humain se trouvait quelque part, à cet étage. Et ceci constituait une brèche dans le système de sécurité.

— Qui d’autre est au courant ?

Eddie reconnut la voix de Blake. Quoique Blake eût été le petit-fils de Quinn, directeur au sein de Scanguards, cela n’expliquait pas pourquoi on avait autorisé la présence de l’humain à cet étage. Il lui incombait de vérifier et de garder la situation sous contrôle.

— Thomas. Mais il ne parle pas. J’ai déjà essayé. Malheureusement, il ne te dira rien non plus, répondit Oliver, dont la voix provenait de l’alcôve qui abritait un réfrigérateur et quelques étagères.

— Mais il pourrait le dire à Eddie.

En entendant son nom, Eddie fut coupé dans son élan. Qu’est-ce que Thomas lui dirait ? De quels secrets ces deux-là parlaient-ils ? Il ne put s’empêcher de demeurer à un endroit d’où ils ne pouvaient le voir et écouta leur conversation. Il savait que c’était impoli, mais quelque chose était louche, et il découvrirait ce que c’était.

— Eddie ? Mon dieu, tu as raison. Pourquoi n’y ai-je pas pensé ? Thomas dirait n’importe quoi à Eddie. Tout le monde sait qu’il craque pour lui.

Les poumons d’Eddie expulsèrent de l’air. Sa vision se brouilla, et son cœur s’arrêta de battre. Il ne put ni bouger ni réagir. Il avait néanmoins dû faire un bruit, car Oliver fit soudain un pas hors de l’alcôve et tourna sèchement la tête vers lui.

— Oh merde ! jura Oliver.

Bouleversé, Blake souffla fortement en le dévisageant.

— Thomas… il… dit Eddie en secouant la tête.

Non, ceci ne pouvait être vrai ! Thomas ne pouvait pas être attiré par lui. Ceci ne pouvait se produire ! Son mentor depuis plus d’une année, l’homme avec qui il partageait la maison, voulait le sauter ? Non, putain !

Naturellement, Eddie avait toujours su que Thomas était homosexuel. Bon sang, tout le monde le savait. Personne ne l’avait jamais gardé secret. Et tout le monde acceptait Thomas tel qu’il était : un homme généreux doté d’un grand cœur et d’un esprit brillant. Personne ne le traitait jamais différemment des autres. Pas plus qu’Eddie. Il s’était instantanément senti à l’aise avec lui lorsqu’il l’avait rencontré la première fois et qu’on lui avait dit que Thomas serait son mentor, qu’il l’aiderait à se familiariser à sa nouvelle condition de vampire.

— Écoute, Eddie, oublie ce que tu as entendu, dit Oliver en vue de le calmer.

Les muscles du cou d’Eddie se bombèrent.

— Bordel, comment crois-tu que je puisse simplement oublier ça ?

Personne ne pouvait faire abstraction de mots de cette façon, des mots qui faisaient voler en éclats sa vie si douillette avec Thomas. À Twin Peaks, dans le manoir de Thomas offrant une vue sur la cité, ils avaient vécu comme des colocataires idéaux, partageant leur amour pour les motos et bricolant tout ce qui était électronique.

— Crois-moi, Thomas est un homme honorable. Il n’agira jamais sur base de ses sentiments, puisqu’il sait qu’ils ne sont pas réciproques.

Il adressa un regard furieux à Oliver.

— Dieu, j’aurais préféré ne jamais le découvrir.

L’ignorance était une bénédiction ; Eddie le réalisait, à présent.

— Je suis désolé, dit Oliver en mettant une main sur son épaule.

Ce contact l’exaspéra davantage, et il repoussa Oliver. Il ne voulait pas être touché, par aucun homme !

— Ne me touche pas !

Eddie tourna sur les talons et courut vers la sortie la plus proche.

Il avait toujours admiré Thomas, son intelligence, sa familiarité avec la rue, de même que sa loyauté absolue envers Scanguards. Pas une seule fois, il n’avait mis en doute les motifs de Thomas de l’avoir recueilli, d’avoir réarrangé sa propre vie pour montrer les ficelles du métier à un nouveau vampire. Mais, maintenant, tout cela était différent. Thomas avait-il simplement accepté la mission que Samson, le propriétaire de Scanguards, lui avait confiée, parce qu’à l’époque déjà, il avait voulu coucher avec lui ? Ses motifs n’avaient-ils pas été aussi altruistes qu’Eddie l’avait supposé ?

Il ne pouvait s’empêcher de s’interroger sur tous les incidents où il avait vu Thomas seulement à moitié-vêtu. Son mentor l’avait-il fait exprès de sorte à l’inciter à changer de camp ? Thomas avait-il essayé de le séduire, et Eddie avait-il juste été trop bête pour le voir ?

Eddie ne se remémorait que trop bien un incident. Il avait passé la journée chez Holly, l’ex-petite amie de Ricky car, de sortie trop tard dans la nuit, il n’avait pu rentrer avant le lever du soleil. Lorsqu’il était revenu à la maison, Thomas se tenait dans le salon, uniquement vêtu d’une serviette, en train de parler à Gabriel, lequel avait eu besoin d’aide afin de surveiller la femme qui, plus tard, allait devenir sa compagne.

Recouverte de l’eau de la douche qu’il venait de prendre, la peau de Thomas scintillait et, lorsqu’il avait étiré les bras au-dessus de sa tête dans ce qui semblait être un geste désinvolte, Eddie avait admiré les muscles bien saillants de son torse et de son abdomen. Et cela avait remué quelque chose en lui, quelque chose qu’il avait écarté immédiatement. Thomas avait-il déjà tenté à ce moment de l’allécher ? Avait-il délibérément exposé son magnifique corps parce qu’il se réjouissait d’être observé ?

Et que dire de toutes ces fois où il avait vu Thomas se rendre vers le réfrigérateur, vêtu de son boxer-short, le peignoir ouvert sur le devant ? Thomas s’était-il comporté de la sorte parce qu’il était chez lui ou parce qu’il voulait qu’Eddie le regardât ?

Que ferait-il, maintenant ? Comment pourrait-il continuer à vivre avec Thomas, sachant ce qu’il savait ? Dorénavant, dès qu’il regarderait son mentor, ce serait en sachant que ce dernier craquait pour lui, qu’il voulait le dépouiller de ses vêtements, le toucher, l’embrasser et lui faire l’amour.

— Là, tu vois, je savais que ça fonctionnerait, lui dit une voix féminine, laquelle le sortit de ses pensées et le ramena au présent.

Eddie ouvrit les yeux et regarda Jessica. Elle lui avait ouvert la fermeture éclair et avait sorti son engin, son engin en pleine érection, et l’avait enveloppé dans sa main. Il était aussi dur qu’une tige en fer, mais Eddie savait que ce n’était pas bien, car il ne bandait pas pour elle. Il avait bandé en pensant à Thomas. En pensant à un homme.

Se dégoûtant, il saisit la main de la jeune fille et l’enleva d’un coup sec.

— Je ne peux pas faire ça.

— Bien sûr que tu le peux, répliqua-t-elle en ronronnant et en frottant ses seins nus contre lui, un geste qui le laissa totalement impassible, alors qu’il aurait dû laisser tomber la tête et téter ces durs mamelons.

Pourquoi ne faisait-il pas ce qu’elle voulait ? Pourquoi ne la baisait-il pas ? Au moins pourrait-il alors se prouver qu’il n’y avait rien de mal chez lui, qu’il était toujours la même personne qu’il avait toujours été : un hétéro qui désirait les femmes.

Jessica glissa les mains sur son derrière et l’attira plus près.

— Allez, Eddie, je sais que tu le veux.

Oui, il le voulait, mais pas avec elle. Il était plus excité qu’il ne l’avait jamais été, mais il savait d’instinct que son membre se flétrirait telle une fleur séchée s’il tentait d’avoir des relations sexuelles avec Jessica. Et il n’allait pas ajouter ce genre d’humiliation à sa psyché déjà assez meurtrie.

Non, il devait repousser tout ceci, faire comme si rien ne s’était jamais produit et continuer comme d’ordinaire. Ces dernières semaines, il avait agi de la sorte. Il pouvait donc continuer ainsi, en évitant, autant qu’il le pourrait, d’être seul avec Thomas et en essayant d’oublier ce qu’il avait entendu dire.

Après tout, peut-être qu’Oliver et Blake avaient tort. Peut-être n’imaginaient-ils que des choses. D’ailleurs, que savaient-ils de Thomas ? Ce n’était pas eux qui vivaient avec lui. Ils ne passaient pas du temps en dehors du travail avec lui. Et même au boulot, ils le voyaient à peine, puisque Thomas ne s’adonnait que rarement à du travail sur le terrain. La plupart du temps, il travaillait sur des projets informatiques, tandis qu’Oliver et Blake patrouillaient ou assuraient la protection des clients.

Eddie regarda Jessica dans les yeux.

— Écoute attentivement, commença-t-il, avant de lui envoyer ses pensées et d’effacer le moindre souvenir qu’elle avait de lui.

S’ils se rencontraient à nouveau, elle ne saurait jamais ce qui s’était passé entre eux. Personne ne saurait jamais qu’il n’avait pu être capable de s’exécuter ; personne, sauf lui. Et il pourrait toujours se mentir et prétendre que tout allait bien.

2

À une distance de cinquante mètres, Thomas appuya sur la télécommande et vit la porte du garage se lever. Il y pénétra, ne ralentissant que légèrement la vitesse de sa moto, puis coupa le moteur dans ce garage surdimensionné qui abritait, non seulement plusieurs bécanes, mais également un grand SUV aux vitres teintées. Préférant conduire ses motos, il l’utilisait rarement. Sentir le moteur de sa machine vrombir entre ses jambes et le vent souffler dans ses courts cheveux blonds lui procurait un sentiment de liberté, l’impression d’une vie sans contraintes. Même si ce n’était qu’une illusion, car il n’était ni libre ni sans obligations.

Il était satisfait de ce qu’il avait réalisé, quoique pas heureux. Mais, d’ailleurs, qui était réellement heureux de sa situation ? Il secoua la tête à cette pensée et descendit de sa Ducati. Il avait passé la majeure partie de la nuit dans son bureau des quartiers généraux de Scanguards situés dans le district de la Mission et avait à peine parlé à quiconque durant tout ce temps. À présent, il avait hâte de boire une bouteille de sang froid et d’échanger quelques mots avec Eddie, avant d’aller se coucher.

Ses conversations avec le jeune homme étaient une chose à laquelle il aspirait chaque fois qu’il rentrait à la maison. Mais la maison n’était pas le seul endroit où il voyait Eddie. Étant toujours son mentor, il l’emmenait souvent avec lui en formation. En d’autres occasions, ils faisaient équipe et étaient envoyés ensemble en mission en vue de mettre en pratique ce qu’Eddie avait assimilé. Thomas ne vivait que pour ces missions.

La fierté l’emplissait à chaque fois qu’Eddie prouvait qu’il apprenait rapidement. Cela lui réchauffait le cœur de voir son protégé s’affranchir et devenir un remarquable garde du corps doté d’un esprit vif et d’une main ferme. Mais son cœur n’était pas le seul à y être sensible ; son sexe s’en trouvait tout aussi impliqué. Le fait de simplement regarder le jeune vampire dont le sourire marquait de profondes fossettes au niveau de ses joues le faisait bander en un instant. Et Eddie souriait souvent. Il était du genre insouciant et décontracté.

Depuis plus d’une année maintenant, Thomas avait tenté, en vain, de refouler ses sentiments. Il était irrévocablement et désespérément amoureux d’Eddie. Et il n’y avait rien qu’il pût y faire.

Il grimpa les escaliers menant au rez-de-chaussée de la maison, laissant derrière lui le garage et ses inestimables motos, beaucoup d’entre elles étant des antiquités restaurées. Lorsqu’il pénétra dans la grande pièce qui alliait une cuisine à plan ouvert à un grand salon, il la trouva vide. Il écouta, mais la maison était dépourvue de tout bruit. Eddie n’était pas encore de retour du boulot.

Déçu, il jeta un coup d’œil à l’horloge suspendue au manteau de la cheminée. Dans moins d’une heure, le soleil se lèverait, et les portes fenêtres qui dominaient tout un pan de mur de la grande pièce exhiberaient la ville en plein réveil. En ce moment, l’horizon de San Francisco scintillait dans l’obscurité. Les fenêtres n’étaient toutefois pas réelles : il s’agissait de moniteurs affichant des images tournées en direct par les caméras suspendues tout autour du périmètre de sa maison. Une belle et réaliste illusion, et l’unique moyen de pouvoir regarder à l’extérieur durant la journée sans que les UV ne pussent pénétrer chez lui et le carboniser.

Néanmoins, c’était un leurre, un de ceux qui l’aidaient à prétendre qu’il menait une vie normale, alors que rien dans sa vie ne l’était. Il était un vampire. Il était gay. Et il aimait un homme qu’il n’avait pas le droit de désirer. Et par-dessus tout, son sombre pouvoir, cette bête qui sommeillait en lui, le menaçait de se réveiller à tout moment, à moins d’être tenue sous contrôle. Chaque année, cette tâche devenait plus difficile. C’était presque comme s’il était un volcan endormi, et que le pouvoir qu’il avait en lui était semblable à de la lave qui s’accumulait jusqu’à devoir jaillir à la surface tant la pression était forte.

Thomas ouvrit le réfrigérateur et prit une bouteille de sang. Lentement, il fit sauter le bouchon et porta le contenant à ses lèvres, engloutissant le liquide froid en l’autorisant à napper sa gorge sèche. Il ferma les yeux, laissant son cœur évoquer des images qui accéléraient son pouls et faisaient gonfler son membre. Ses canines s’allongèrent involontairement, tandis que les images s’intensifiaient et se brouillaient en un seul tableau : Eddie allongé sous lui, la tête inclinée sur le côté, lui offrant une veine destinée à la morsure. Et plus bas, deux verges palpitant de concert et se frottant l’une contre l’autre en prévision de ce qui allait se passer ensuite.

Il se débarrassa de cette pensée ; cela ne se produirait jamais, et il valait mieux qu’il arrêtât de fantasmer à ce propos. Cela ne faisait qu’accroître le désir. La frustration l’envahit.

Thomas engloutit le reste du sang et jeta la bouteille. Elle résonna contre les autres récipients vides, et cela lui fit penser qu’il devrait bientôt se débarrasser de la poubelle. Il se dirigea ensuite vers le grand canapé d’angle en cuir et s’y laissa tomber en attrapant la télécommande sur la table basse. Tandis qu’il la pointait vers l’écran plat et allumait le téléviseur, il perçut quelque chose de blanc dans sa vision périphérique. Sa tête pivota brusquement vers la porte d’entrée, celle qu’il utilisait rarement étant donné qu’il rentrait presque toujours chez lui par le garage.

Sa vision de vampire se concentra sur l’objet qui dépassait de sous la porte : une enveloppe blanche était posée sur le sombre parquet.

Il se leva dans un mouvement fluide et s’en approcha. Il renifla près de la porte, mais celui qui avait poussé le document était parti depuis longtemps. Aucune odeur résiduelle ne persistait. Thomas se pencha et ramassa l’enveloppe, l’examinant sous tous les angles. Elle n’était adressée à personne.

Curieux, il l’ouvrit et en tira une simple feuille de papier. Seuls quelques mots y figuraient dans une écriture soignée, quoique désuète : Tu ne pourras te cacher éternellement. Un jour, tu devras admettre qui tu es.

La lettre n’était pas signée.

Le papier tomba de ses mains tremblantes. Ils l’avaient finalement retrouvé. Comment, il ne le savait pas. Il avait changé son nom de famille, son identité et avait même déménagé dans un autre pays en prenant soin de ne laisser aucune trace. Mais, cependant, il ne pouvait se cacher éternellement. Il avait toujours su, qu’un jour, cela arriverait. Mais c’était trop tôt. Il n’était pas encore préparé à affronter la vérité. La réalité de ce qu’il était, de ce qu’il serait toujours, malgré qu’il l’eût si longtemps et si fortement combattu.

Il s’écroula sur les genoux et laissa tomber la tête entre ses mains. Combien de temps lui restait-il avant qu’ils ne vinssent le chercher ? Et lorsque cela se produirait, leur succomberait-il ainsi qu’au sombre pouvoir qu’il possédait en lui ? Ou lui restait-il suffisamment de forces pour les combattre ?

Londres, Angleterre, printemps 1895

Thomas était assis dans la galerie de la Old Bailey, la Haute Cour criminelle de Londres, observant attentivement le procès qui s’y déroulait. Il était venu y assister presque tous les jours, pas par curiosité morbide comme la plupart des autres spectateurs, mais parce l’issue de celui-ci le concernait. Même s’il ne connaissait pas personnellement l’accusé, Oscar Wilde, la détresse de ce dernier lui importait.

Oscar Wilde, le célèbre dramaturge, était un homosexuel accusé d’outrage à la pudeur et, quoi qu’il pût arriver à un homme aussi célèbre que lui pouvait avoir un impact durable sur la communauté homosexuelle de Londres. Une communauté à laquelle Thomas appartenait, qu’il le voulût ou pas.

Il avait toujours su qu’il était différent mais, durant sa première année à Oxford, cela s’était confirmé : il aimait les hommes, pas les femmes. Il avait d’abord essayé de le nier mais, quoiqu’il eût essayé de se duper par le biais de mensonges divers, il avait échoué. Il était ce qu’il était : un homosexuel. Un pédé, une tapette, une tantouze. Pas un vrai homme, mais un de ceux qui avilissaient tant les autres qu’eux-mêmes en s’adonnant à la sodomie.

Cependant, ce n’était pas quelque chose qu’il pouvait arrêter de plein gré. Ses expériences avec un jeune homme à Oxford lui avaient ouvert les yeux quant aux joies de l’amour physique et lui avaient dévoilé les plaisirs de la chair. Après avoir goûté à ce fruit défendu, il lui avait été impossible de faire marche arrière, impossible de nier ce qu’il voulait : l’amour d’un homme, que cela eût été interdit ou pas.

Il le cachait du mieux qu’il le pouvait, ne s’habillant jamais de manière aussi flamboyante que les autres pédés, participant toujours aux sports et aux divertissements les plus masculins de sorte à compenser son affliction. Il courtisait même les femmes des cercles aristocratiques d’Angleterre et en était devenu un des plus beaux partis, non seulement à cause de son éducation et de sa position dans la société, mais également en raison de son esprit et de son charme qu’il n’avait aucun scrupule à libérer sur n’importe quelle débutante innocente. Elles tombaient en pâmoison devant lui. Si seulement elles avaient su que leurs sourires provocants, leurs joues rougissantes et leurs éventails qu’elles ondulaient rapidement le laissaient aussi froid que s’il avait pris un bain matinal dans un ruisseau glacé en plein hiver !

Malgré toute cette supercherie, il trouvait le temps de rencontrer d’autres hommes qui avaient son penchant et laissaient libre cours à ses désirs charnels. C’était durant ces heures qu’il se sentait le plus en paix avec lui-même. Et le plus en conflit, en même temps. Des sentiments de culpabilité et de honte n’étaient jamais très loin ; et pourtant, à chaque fois qu’il faisait l’amour à un homme, il savait qu’il ne pouvait renier qui il était. Il n’avait d’autre choix que de continuer.

— Que le prévenu se lève, dit une voix dans la salle d’audience.

Thomas se pencha vers l’avant, impatient d’entendre la décision de la Cour. Tout comme lui, d’autres agissaient de même, attendant la décision du juge en retenant leur souffle. Celle-ci tomba tel un marteau sur une enclume, aussi bruyante et aussi dévastatrice. Wilde n’était pas poursuivi pour sodomie, mais c’eût pu tout aussi bien être le cas.

— Oscar Wilde, vous êtes déclaré coupable des chefs d’accusation d’attentat à la pudeur et de complot en vue de commettre des outrages aux bonnes mœurs.

Un tollé ébranla la foule. Des voix provenant du dessous et de la galerie firent écho contre les murs de la salle d’audience, amplifiant ainsi les bruits. Quoique le juge exigeât l’ordre, les bavardages ne cessèrent pas.

— Honteux ! cria un jeune homme à côté de Thomas.

Mais, derrière lui, d’autres exprimèrent leur approbation du verdict.

— Bien fait pour le pédé ! proclama un homme en poussant le jeune homme sur le côté. Tu es l’un d’eux, n’est-ce pas ?

Le jeune homme heurta Thomas lorsque ce dernier tenta de se lever. Lorsqu’il lui saisit les épaules afin de se stabiliser, des yeux effrayés le fixaient. Pendant un instant, Thomas ne bougea pas. C’était ce qui leur arriverait à tous : des gens les critiqueraient pour être des homosexuels. Tant lui-même que le jeune homme qui le regardait le savaient.

— Oui, vous deux ! dit l’homme derrière eux, poursuivant ainsi sa tirade.

Au vu de l’expression choquée de Thomas, d’autres personnes aux côtés de l’homme se joignirent à lui en les pointant du doigt, lui et le type auquel il était toujours agrippé. Leurs yeux étaient empreints de dégoût, leurs bouches souriant avec mépris.

Thomas relâcha les épaules de l’autre homme et le repoussa. Mais il était trop tard. Ils avaient tous vu le flash de compassion qu’il avait ressenti pour le jeune pédé qui avait exprimé son opinion à propos du verdict. Ils avaient tous vu que Thomas ressentait la même chose. Car il était le même. Il ne valait pas mieux qu’Oscar Wilde ou les innombrables autres qui, quelque part, se livraient à la sodomie, chaque nuit. La seule différence résidait dans le fait qu’il s’était montré plus prudent lors de ses rendez-vous, et qu’il avait, mieux que les autres, dissimulé sa vraie nature à la société.

Thomas courut vers la sortie, prêt à tout pour échapper au regard de la foule. Quelqu’un l’avait-il reconnu ? Il regarda tout autour de lui, observant les visages peu familiers devant lesquels il passait. Non, personne appartenant à l’aristocratie n’aurait été présent dans la salle d’audience. Ils trouvaient ce genre d’événements déplaisants. C’était là sa seule consolation.

Tandis qu’il se précipitait vers l’extérieur, il ne put faire abstraction des cris qui le suivaient à la trace.

— Tapette !

— Pédale !

Ses poumons brûlaient sous l’effort, alors qu’il se dépêchait de dévaler le large escalier et traversait le hall du tribunal. Dans un sprint, il dépassa les colonnes de marbre qui encadraient l’entrée et sortit. La nuit était déjà tombée, et il en fut ravi. Il pourrait ainsi disparaître dans la foule qui traînait sur les marches du bâtiment en attendant des nouvelles du verdict.

Il garda la tête baissée, ne désirant pas attirer davantage l’attention sur lui. Des visages inconnus défilèrent devant lui, et des voix dérivèrent. Mais il continua de marcher sans engager la moindre conversation, sans ralentir le pas. Il feignit de ne pas être concerné par les événements qui se déroulaient autour de lui. Bien qu’il le fût. Le verdict avait tout changé. Dorénavant, les homosexuels comme lui seraient traités avec moins de tolérance qu’auparavant. Les gens ne regarderaient plus de l’autre côté s’ils suspectaient un homme d’avoir une relation intime avec un autre homme. Dès à présent, il se devait d’être encore plus prudent, ou il finirait comme Wilde, en prison.

— Attendez ! dit quelqu’un derrière lui.

Mais Thomas continua à marcher sans se retourner.

Encore quelques pas, et il pourrait traverser la rue Fleet et disparaître dans une des sombres allées de Londres. Il pourrait ensuite faire appel à un taxi et regagner ses appartements près du parc St James. Ni vu ni connu, et personne ne saurait ce qui s’était passé aujourd’hui.

— Jeune homme !

Une voix étrangement insistante le suivait.

Il se sentit forcé de tourner la tête, mais ne put distinguer la personne qui avait parlé. Personne ne le regardait directement. Confus, il secoua la tête et, en se retournant, heurta quelqu’un.

De fortes mains lui agrippèrent les épaules. Thomas jeta un regard en direction de celui qui l’avait arrêté. La panique déferla en lui et se manifesta sous une forme de soupir. Des yeux marron le pénétrèrent. Le visage d’un homme, rasé de près, devint plus net lorsqu’il recula légèrement la tête.

— Là, là, dit l’étranger bien habillé dans une voix étonnement douce, une voix qui filtra dans le corps de Thomas tel un vin riche ou la rassurante odeur d’une pipe.

Son corps se détendit lorsque les mains de l’étranger glissèrent de ses épaules, le caressant presque, comme s’il essayait de le masser en vue d’apaiser l’anxiété présente dans son corps. Un agréable picotement courut le long de ses bras, répandant de la chaleur dans tout son être en dépit de la fraîcheur de cette soirée de printemps.

— Pas besoin d’avoir peur de cette populace, poursuivit l’homme en jetant un coup d’œil par-dessus l’épaule de Thomas.

Durant tout ce temps, ses mains le caressèrent, et, quoiqu’il eût dû le repousser, Thomas y agréa. Ils étaient en public. Toutefois, l’étranger se mit à l’attirer dans l’entrée d’un magasin fermé depuis longtemps. Ils se tenaient dans la pénombre mais, en y regardant de plus près, n’importe quel passant aurait pu les voir. En dépit de cela, Thomas ne trouvait pas la force de résister au toucher de l’homme. Pas plus qu’à la pression de ses cuisses, tandis que ce dernier se rapprochait.

— Tellement beau, roucoula-t-il, examinant avec soin le visage et le corps de Thomas. Ce serait dommage qu’ils vous enferment pour ce que vous êtes.

Thomas cessa de respirer durant un court instant. Cet homme le narguait-il ? Était-il un Charley ? Un policier déguisé en gentleman de sorte à fouiner dans la société pour y trouver des pédés ? La chasse aux sorcières avait-elle déjà commencé ?

Thomas se redressa et tenta de repousser les mains de l’homme.

— Monsieur, je dois vous demander de me lâcher. Vous me confondez avec quelqu’un d’autre.

Le visage de l’homme se rapprocha, ses yeux le captivèrent.

— Pas la moindre erreur.

Ses lèvres s’écartèrent, et l’odeur de cette pure masculinité fut soufflée sur le visage de Thomas. Cet effet lui affaiblit les jambes.

Son estomac se noua et, plus bas, son membre se contracta en prévision. D’un sourire, l’étranger lui confirma qu’il se rendait tout à fait compte de sa grandissante excitation.

— Oui, vraiment aucune erreur.

Une main abandonna l’épaule de Thomas et, lentement et méticuleusement, glissa sur son torse.

Il ne connaissait que trop bien la destination de la main de l’étranger, mais ne pouvait l’arrêter. Non, il ne pouvait pas : il ne le voulait pas. Pour quelque raison perverse, Thomas désirait ardemment être touché. Il avait besoin d’affirmer qui il était, un homme qui aimait les hommes, que cela faisait du bien, quoiqu’en pensât la foule en face du tribunal.

Lorsqu’une main chaude glissa par-dessus son sexe à présent en pleine érection, Thomas gémit et se pressa contre celle-ci.

— Christ !

L’homme gloussa doucement.

— Ce n’est pas mon nom, mais je peux vivre avec.

Il pressa alors encore plus fort.

Le cœur de Thomas s’emballa, sa poitrine se donnant du mal pour amener l’air nécessaire à son corps, et ses mains agrippèrent les revers du manteau de l’étranger de sorte à l’attirer plus près. À chaque caresse, il haletait de manière plus incontrôlable. Et à chaque seconde, son propre contrôle lui échappait un peu plus.

— Mais je n’ai même pas encore commencé, dit l’homme.

Comme pour prouver ses dires, l’étranger déboutonna le rabat du pantalon de Thomas, poussa ses sous-vêtements sur le côté et saisit le membre dans sa main. Cette poigne ferme, le contact de la chair contre la chair, le réduisirent presque à néant. Sa tête retomba contre le mur derrière lui. Il ferma les yeux et s’abandonna à cette caresse aguichante, sachant que combattre ses propres désirs lui était, à présent, devenu impossible.

Des mots tendres dérivèrent à ses oreilles, lui procurant une illusion de flottement. Il n’avait jamais rien éprouvé de tel, pas même lors de ses plus puissants orgasmes. Mais la façon dont cet étranger lui caressait le sexe et lui murmurait de doux mots à l’oreille tout en l’embrassant dans le cou l’amenèrent à faire fi de toute prudence.

Que quiconque passant par-là eût pu les voir engagés dans cet acte indécent fut oublié ; un acte qui pouvait les conduire tous deux en prison. Tout comme fut oublié le fait qu’il ne connaissait même pas le nom de l’homme. Plus rien n’avait d’importance. Plus rien sauf ce plaisir immédiat que cet homme lui promettait sans rien demander en retour.

— Encore, le pria Thomas. Plus fort !

Son compagnon s’y conforma sans protester, le caressant d’une main plus ferme, plus rapide, le serrant plus fort et l’amenant toujours plus près de l’aboutissement.

— Oui, oui, c’est ça.

Des lèvres le caressèrent dans le creux du cou, des dents lui éraflant doucement sa peau échauffée. De quelque part, une voix le pénétra.

— Oui, viens, mon jeune ami. Éjacule pour moi. Abandonne-toi.

S’abandonner. Oui, c’était tout ce qu’il voulait. S’abandonner au toucher de cet homme, se laisser aller au plaisir, baigner dans la luxure du moment. Sans réfléchir, sans regret. Simplement ressentir.

Ses testicules se contractèrent, et son sexe tressaillit. Thomas ressentit alors la montée de son sperme, tandis que celui-ci parcourait son membre comme s’il était tiré au pistolet. Des vagues de plaisir l’inondèrent et le soulevèrent comme s’il était en train de flotter. Au même moment, une douleur cuisante lui transperça le cou. Elle fut fugace, trop fugace pour être réelle. Il devait être en train d’halluciner, car le plaisir que cet étranger lui procurait le rendait ivre, ivre de luxure, de désir, de sexe. Ivre de la sensation des lèvres de cet homme accrochées à son cou, l’embrassant d’une manière qui semblait irréelle.

Comme si le baiser était une morsure.

3

Thomas ouvrit les yeux et regarda tout autour de lui. Surpris, il s’assit sur un divan. Il n’était plus dans l’allée. En lieu et place, il se trouvait dans un salon somptueusement meublé. Et il n’était pas seul. Loin de là.

Il tenta de s’imprégner de ce qu’il voyait, mais son esprit mit quelques secondes à réaliser ce qui se déroulait devant ses yeux. Il y avait près d’une douzaine de personnes dans la pièce, certains partiellement vêtus, des hommes pour la plupart, mais il y avait également plusieurs femmes parmi eux. S’il avait été prude, il aurait trouvé tout ce scénario scandaleux, mais il ne pouvait vraiment évoquer un tel sentiment. Au lieu de cela, il regarda tout autour avec intérêt. Un homme avait ses pantalons retroussés jusqu’aux genoux, son postérieur dénudé exposé, agrippant les hanches d’un autre homme, poussant d’avant en arrière. Thomas n’eut pas à se rapprocher pour réaliser qu’il sodomisait l’autre type.

Personne ne semblait les remarquer, clairement trop occupés à s’adonner à des actes charnels similaires. Le regard de Thomas fut attiré par un jeune homme qui était allongé sur plusieurs oreillers éparpillés devant la cheminée. Sa chemise était ouverte, et un homme plus âgé embrassait sa poitrine et lui pinçait les mamelons tout en se frottant le bas-ventre contre lui. Tandis qu’il continuait d’observer, Thomas sentit son propre membre se soulever à la vue de cette scène érotique. Il banda même plus fort en voyant le jeune homme ouvrir son pantalon et le baisser sous les hanches de sorte à laisser jaillir son dur engin. L’homme au-dessus de lui gémit et baissa la tête vers le sexe de l’autre, le mit dans sa bouche et suça.

Involontairement, la main de Thomas se dirigea vers la protubérance qui s’était formée sous son pantalon.

— Ah, tu es éveillé.

Au son de la voix, Thomas tourna brusquement la tête sur le côté. Il ne lui fallut qu’une fraction de seconde pour retrouver l’homme qui, manifestement, l’avait amené ici : l’étranger qui lui avait caressé le sexe avec une telle habileté qu’il avait failli s’évanouir de jouissance.

Les yeux écarquillés, Thomas le dévisagea. Il était assis dans un grand fauteuil, la chemise ouverte, exposant ainsi son imposant torse et ses poils noirs, dépourvu de son pantalon. Entre ses jambes, une femme à moitié-nue était agenouillée, agitant la tête de haut en bas. Elle le suçait.

Il posa la main sur l’arrière de sa tête et la tira par les cheveux avant de proférer un ordre, les dents serrées.

— Fais-le avec conviction !

Il orienta ensuite son regard vers Thomas et, d’un geste de la main, l’invita à s’approcher. Fasciné, Thomas se leva et traversa la pièce pour le rejoindre.

— Je suis Kasper, se présenta l’homme.

— Thomas.

Il dévisagea la femme. Pourquoi avait-il supposé que Kasper fût pédé, comme lui ? L’homme aimait visiblement les femmes.

L’expression sur le visage de Thomas le trahit sans doute, car Kasper se mit à glousser.

— Oh, ça ? dit-il en désignant la femme qui s’appliquait sur lui. Je ne fais aucune discrimination, pas plus que je ne juge. Je prends tout ce qui me procure du plaisir.

Il marqua une pause et baissa le regard vers l’entrejambe de Thomas.

— Tout à l’heure, tu m’as donné du plaisir, mon jeune ami. Je peux t’appeler mon ami, n’est-ce pas ?

Thomas hocha automatiquement la tête.

— Et ça me procure également du plaisir d’observer les autres.

D’un geste de la main, il désigna les autres couples en train de se livrer à des actes similaires. Des hommes s’ébattant avec des hommes, et même deux femmes en train de se toucher, faisant glisser leurs corps nus l’un contre l’autre.

— Qui es-tu ? demanda Thomas. Et où sommes-nous ?

Il ne s’était jamais retrouvé dans un endroit tel que celui-ci, là où les gens se comportaient comme des êtres dépourvus d’inhibitions, sans crainte d’être remarqués. Cela ressemblait à une oasis. Au paradis.

— En sécurité, répondit Kasper. Ici, personne ne nous trouvera. Nous pouvons faire ce que nous voulons. Nous adonner à nos fantasmes les plus sauvages. N’est-ce pas ce que tu veux ? Tout ce dont tu as toujours rêvé ?

Le regard pénétrant de Kasper le captura. Thomas se sentit emprisonné par ses yeux, comme s’ils étaient des chaînes qui le maintenaient attaché à une barrière depuis laquelle il était forcé d’observer tout ce qui se passait autour de lui.

Thomas fut parcouru par un sentiment de méfiance.

— Comment le sais-tu ?

— Je peux le voir dans tes yeux. Tout le monde peut le voir, si seulement ils prenaient la peine de regarder. Je t’observe depuis quelques jours, maintenant. Il y a quelque chose chez toi qui me fascine. Tant de passion, tant de douleur qui sont enfouies en toi et qui ne veulent qu’éclater à la surface. Tout comme ce fut le cas tout à l’heure, en début de soirée.

Kasper gémit et fourra son membre plus profondément dans la bouche de la femme.

— Lorsque je te tenais dans ma main, j’ai pu ressentir ton besoin. Si pure, si intact.

Il jeta un œil dans la pièce.

— Pas comme tous ces hommes présents ici. Il y a longtemps qu’ils ont perdu cette innocence. Mais toi, tu l’as toujours. C’est très attachant.

Il souleva les hanches et poussa plus fort.

— Et plus que juste excitant. Quel homme ne voudrait goûter à cela ?

Son regard suggestif foudroya de désir le corps de Thomas. Son sentiment de méfiance initial s’estompa. Il devait admettre qu’il se sentait flatté. De même qu’excité ; non seulement par son environnement, mais également par les mots de Kasper. Être désiré par un homme doté d’une position et d’un pouvoir évident était excitant. Il se lécha les lèvres, désireux de goûter à ce que cet homme promettait.

— Je peux t’offrir beaucoup, si seulement tu le désires, proposa Kasper en baissant le regard sur son propre entrejambe. Je peux t’en donner un peu, immédiatement.

Il n’y avait aucun doute quant à ce qu’il voulait dire par cela.

Et puis zut ! C’était exactement ce que Thomas désirait. Sans la moindre hésitation, il posa la main sur l’épaule de la femme et l’écarta.

— Fais une pause. Je me charge de ceci.

Kasper lui sourit, tandis que la femme se dépêchait de partir et que Thomas prenait sa place.

— Je ne vais pas te sucer comme une femme. Ce sera bien mieux que ça, lui promit Thomas en laissant courir ses mains des genoux de Kasper jusqu’au sommet de ses cuisses, là où un magnifique engin se tenait en érection, scintillant d’humidité. Celui-ci se contracta, comme s’il avait capté les mots.

— Oh, je n’en doute pas.

Thomas se pencha au-dessus du sexe de Kasper et lécha la tête de son érection. Un frisson transperça son partenaire, et Thomas sourit. Il réduirait cet homme à lui manger dans les mains. Une sensation similaire à du pouvoir le secoua. C’était nouveau pour lui ; et pourtant, il aimait cette sensation de savoir qu’il pouvait mettre cet homme à genoux. C’était un défi qu’il n’esquiverait pas.

— Mais pendant que je fais ça, tu feras quelque chose pour moi. Tu me parleras de toi. Et à la moindre information que tu me donneras sur toi, je te sucerai plus fort.

Thomas posa les lèvres autour de la tête du membre de Kasper et glissa tout le long, l’engloutissant jusqu’à la base.

Kasper trembla sous lui avant de se retirer.

— Commence maintenant, exigea Thomas en enrobant les testicules, caressant la ferme bourse de son ongle. Un frisson le parcourut lorsque Kasper frémit et qu’une goutte d’humidité coula de son sexe.

Kasper haleta fortement.

— Je suis le chef d’un groupe d’hommes qui ont certains… penchants.

Thomas plongea à nouveau la bouche sur la chair engorgée, referma les lèvres tout autour et suça.

Kasper gémit et poussa les hanches vers le haut.

— Nous avons nos planques, des endroits sûrs où nous nous rencontrons. Où nous nous livrons à nos fantasmes.

Thomas enroula la main autour de la base et suça encore, laissant l’érection de Kasper glisser hors de sa bouche pour mieux la capturer à nouveau, une fraction de seconde plus tard, en augmentant le tempo. Il la serra dans sa main, tandis que, de l’autre, il jouait doucement avec les testicules. Il n’avait pas encore rencontré d’homme qui eût pu résister à son toucher intime, un toucher qu’il savait plus émoustillant que celui d’une femme. Car il savait, mieux que n’importe quelle femme, ce qu’un homme voulait.

— Personne ne peut nous atteindre. Nous sommes forts. Ils ne nous attraperont jamais, dit Kasper en haletant fortement, ses hanches se mouvant frénétiquement de sorte à augmenter la friction, pompant plus fort et plus vite dans la bouche de Thomas.

— Oh, putain, tu es bon !

La poitrine de Thomas se gonfla de fierté. Ceci était ce pour quoi il vivait : chercher du plaisir, et le renvoyer.

— Et un jour, nous ne devrons plus nous cacher. Un jour, ils nous accepteront.

Thomas entendit les mots et voulut y croire, mais il ne le put. Personne n’accepterait jamais des pervers comme lui. Il aurait toujours à se cacher. Mais, au moins, si la cachette était comme celle-ci, un lieu de débauche privé où le péché était toujours au menu et l’infamie toujours prévue, il pourrait vivre avec.

Se donnant corps et âme à sa tâche, il lécha et suça jusqu’à ce que Kasper s’abandonnât finalement et frémît. Ce dernier mit plusieurs secondes à se calmer complètement, la tête retombant en arrière sur le fauteuil, presque effondré.

Thomas souleva la tête et le regarda. Ce qu’il vit le fit tomber sur son derrière, tandis que, horrifié, il essayait de détaler. Mais il n’en eut pas l’occasion. Alors qu’il retombait à plat sur le dos, Kasper sauta sur lui, les jambes écartées, le chevauchant. Des poignes de fer saisirent les poignets de Thomas et les clouèrent au sol à côté de sa tête.

Kasper lui exhiba des canines toutes blanches en grognant comme une bête.

— Maintenant, mon cher, tu vas m’écouter. Ta petite tentative de me contrôler était vraiment bonne et subtile, mais ne commets pas d’erreur : je t’ai permis de me maîtriser pour mon propre plaisir. Car, parfois, nous aimons tous être dominés. Parfois, nous apprécions qu’on nous dompte et qu’on joue avec nous. Mais je décide où, quand et comment. Tu comprends ça ?

Hébété, Thomas hocha la tête, incapable de parler, tout l’oxygène s’étant échappé de ses poumons. Qu’était Kasper ? Quel genre de créature était cet homme ? Non, il n’était pas un homme. Il ne pouvait l’être. Il était une bête.

— Je te trouve intéressant.

Il balança son membre toujours en demi-érection contre l’entrejambe de Thomas.

— Et vraiment sexy. Mais je ne me laisse pas contrôler par mes instincts les plus bas. Je suis le maître. Je décide de ce qui se passe, quand ça se passe et comment ça se passe. Et il se trouve justement que j’ai décidé de faire de toi mon compagnon.

Un sourire capricieux se forma sur ses lèvres.

— Et pas seulement parce que tu suces merveilleusement.

Thomas frissonna involontairement. En dépit de la crainte qu’il éprouvait à la vue de ces dents pointues qui dépassaient de la bouche de Kasper, la pensée que cet homme puissant voulût de lui le ravit. Il était suffisamment mature pour se l’admettre : être contrôlé par un autre homme l’excitait. L’excitait et le faisait bander.

Kasper grogna à nouveau et, en réaction, Thomas sentit son membre enfler. Il ferma les yeux, ravalant sa gêne. Car il se devait d’être honteux, à cause de ce qu’il voulait : être dominé par cet homme.

— Tu le sais, n’est-ce pas ? poursuivit Kasper. Tout ce plaisir que nous pouvons retirer de la souffrance, de la honte et même de la peur. C’est pour ça que tu es si parfait. Si parfait pour ce dont j’ai besoin.

Kasper relâcha un des poignets de Thomas et, de la jointure des doigts, lui caressa le cou sur toute sa longueur, lui envoyant des frissons qui parcoururent rapidement toute la surface de sa peau.

La veine de son cou commença à palpiter.

— Oh, oui, tu sais ce que je suis, n’est-ce pas ?

Thomas hocha la tête de gauche à droite, tentant de nier ce que son esprit avait déjà compris. Ce n’était pas possible. Des créatures comme Kasper n’existaient pas. Pas dans la vraie vie, pas à Londres, nulle part ailleurs en Angleterre.

— Dis-le, mon amant, dis ce que je suis.

Un long doigt parcourut la veine palpitante de Thomas sur toute sa longueur.

— Vampire.

Lorsque Thomas eut exprimé ce mot, il libéra un souffle et sentit la pression dans sa poitrine se relâcher. Kasper se retira et, une main derrière la nuque de Thomas, le ramena en position assise.

— Tu vois ? Ce n’était pas si dur, n’est-ce pas ? Il déposa un baiser furtif sur les lèvres de Thomas avant de poser la main sur son érection.

— Bien que d’autres choses soient encore dures, ajouta-t-il.

Surpris, Thomas s’écarta sans toutefois aller loin, la main de Kasper sur sa nuque le maintenant à proximité.

— Tu n’iras nulle part, ne comprends-tu pas ça ? Tout ce dont tu auras toujours besoin est ici. Avec moi. Je peux te protéger.

Il désigna une des fenêtres où pendaient de lourdes tentures en velours et poursuivit.

— Là, dehors, un homme comme toi sera toujours en danger. Mais je peux t’aider. Et, ensemble, nous attendrons l’époque où notre espèce ne sera plus poursuivie. Nous avons du temps devant nous.

Instinctivement, Thomas sut ce que Kasper proposait.

— Je peux te donner la vie éternelle. Ne veux-tu pas vivre à une époque où des pédés comme nous seront acceptés ? Quand plus personne ne se souciera plus de qui nous baisons ? Quand embrasser un homme en public ne te fera pas atterrir en prison ?

Thomas retrouva finalement la voix.

— Tu ne sais pas si une telle époque viendra jamais ! Ils nous regarderont toujours avec dégoût !

Kasper secoua la tête en souriant.

— Comme tu as tort, mon ami. Mon gentil Thomas. Si seulement tu pouvais croire que le futur sera gai.

— Comment le pourrais-je quand tout ce que je vois est de la douleur ? Quand je dois cacher qui je suis à tout le monde ? Quand même mes sœurs me rejetteraient si elles le découvraient ?

Kasper caressa le cou de Thomas. Ce contact l’apaisa plus que ce qu’il n’aimait l’admettre. Son amant pouvait peut-être réellement l’aider. Ne fût-ce que pour oublier ses ennuis.

— Tout ce que je demande, c’est un peu de confiance. Et de patience. Notre temps viendra. Nous nous lèverons ensemble. Et entretemps, nous nous arracherons la moindre goutte de plaisir l’un à l’autre.

— Pourquoi moi ? demanda Thomas en cherchant la réponse dans les yeux de son amant.

— Parce que tu as du potentiel. Tu seras fort. Aussi fort que moi. Et puissant. Ensemble, nous pourrons diriger. Mais tu devras devenir comme moi.

Thomas fixa Kasper dans les yeux, le noir de ceux-ci l’attirant comme s’ils l’hypnotisaient.

— Tu veux dire, devenir un vampire ?

— Oui, je te drainerai de ton sang et te donnerai le mien. Tu feras partie de moi. Fort, puissant, invincible. Tout ce que tu as à dire, c’est « oui ».

Incapable d’arracher son regard des yeux de Kasper, Thomas rapprocha la tête, ses lèvres rôdant à présent à seulement deux centimètres de celles de son amant.

— Crois-tu sincèrement que le temps viendra où nous serons libres d’exprimer nos sentiments sans avoir à craindre d’être punis ?

— Oui. Bientôt, ce temps viendra.

— Oui.

Dans un souffle, il plongea les lèvres sur celles de Kasper et l’embrassa, l’entourant de ses bras et se laissant à nouveau tomber à terre, Kasper au-dessus de lui.

— Fais-le pendant que tu me fais l’amour, afin que je ne le voie pas venir.

— Tout ce que tu veux, mon amant chéri.