Le coeur a ses raisons - Karolyne C - E-Book

Le coeur a ses raisons E-Book

Karolyne C

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Beschreibung

Il existe un amour qu'on ne peut contrôler. Personne ne peut se défiler contre les sentiments. Peu importe le passé sombre et les conséquences d'une enfance tragique.
Noah et Liv vont vite découvrir que leurs vies sont liées à tout jamais. L'amour va se mêler à leur histoire et chambouler tout ce en quoi ils croient.
Venez découvrir leur univers et partager ensemble une relation unique et spéciale.
Entre doutes, attirances, passion, danger et amour, Le coeur a ses raisons...
Rien n'est plus fort que ça.


À PROPOS DE L'AUTRICE


Karolyne C a 27 ans. Elle habite Marseille, où elle est née. Elle est en couple depuis bientôt 13 ans et est pacsée depuis presque deux ans. Elle possède un diplôme de travailleur social, mais malheureusement, elle ne travaille pas dans ce domaine. Elle exerce la profession de secrétaire médicale dans un hôpital, où elle gère les admissions et les interventions des patients. Elle est une personne très passionnée, ayant des intérêts variés. Elle a été une dévoreuse de livres depuis son enfance. Elle aime également cuisiner et consacre son temps libre à regarder de nombreuses séries télévisées ou à lire. Elle partage sa passion de la lecture avec sa maman, qui est son premier fan et qui la relit depuis qu'elle s'est lancée dans l'écriture. Karolyne a deux amies avec lesquelles elle partage sa passion pour l'écriture, et cette entraide la pousse à continuer. Elle se décrit comme une personne très nerveuse et soucieuse du bien-être de ses proches. Elle entretient des relations étroites avec sa famille et espère fonder la sienne très bientôt.

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Le cœur

a ses raisons

Intégral

Karolyne C

Romance

Image : Adobe Stock

Cover : Graph’L

Éditions Art en mots

Partie 1

Risquer de vivre

Chapitre 1

— Liv.... LIV.... LIV lève-toi, bordel ! Tu vas être en retard !

— Hum, grogné-je.

— LIV ! Bordel de merde. Tu te lèves maintenant. Ce n’est pas le jour pour être en retard.

Du bruit, c’est tout ce que j’entends. Du bruit et du fracas dans ma chambre. Des volets qui s’ouvrent et une couette qui s’arrache à moi.

NON !

La super voix désagréable de bon matin c’est mon frère, Zach. Il a cinq ans de plus que moi donc vingt-trois ans. Moi, je m’appelle Liv, enfin normalement c’est Olivia, mais je déteste mon prénom. J’interdis tout le monde de m’appeler comme ça, enfin tout le monde est un bien grand mot, car mis à part Zach et Harper, ma meilleure amie, personne ne m’appelle tout court.

Je me lève avant que mon frère ne décide de m’asperger d’eau glacée. Il le fait assez souvent. Il faut dire que je suis assez feignante et dormir est mon plus grand plaisir. Je pose donc mes deux pieds à terre, le sol est chaud. Les rayons du soleil se posent sur ma peau. On est en septembre et aujourd’hui je fais ma rentrée à l’université.

Au début je ne voulais pas faire d’études. Mon frère et moi avions assez galéré ces dernières années, pour en plus rajouter les frais d’université, mais bien évidemment, Zach m’a gonflée toute mon année de terminale pour que j’accepte d’aller dans la fac du coin.

Direction la douche, j’ai besoin de me réveiller. En me déshabillant, mon regard tombe sur mon corps nu devant le miroir. Je vois alors toutes mes cicatrices. Malgré mes dix-huit ans, j’en ai connu des galères.

Mon corps les garde en souvenir on dirait. Des plus vieilles de mon enfance, de mes quatre cents coups avec Harper, jusqu’à faire plaisir à Zach en lui rendant des petits services comme il les appelait à l’époque. Les dernières, vestiges d’un accident de voiture meurtrier qui a coûté la vie à mes parents. J’avais douze ans lorsqu’ils sont morts. Je me rappelle encore du choc de l’impact et cette petite virée dans la rivière qui nous a privés de nos parents.

Faut que j’arrête de ressasser les mauvais souvenirs, je l’ai trop longtemps fait. Ça m’a valu deux mois de coma, des cicatrices et un frère surprotecteur. Zach n’a pas toujours été comme ça.

Quand nous étions enfants, nous nous disputions tout le temps. Il ne supportait pas que je traîne dans ses pattes. Alors il a su se servir de moi, dès qu’il a eu quinze ans il a commencé à traîner avec des mecs plutôt bizarres. Moi, étant plus jeune, je ne comprenais pas ce qu’ils faisaient. Comme j’étais mignonne, il a commencé à me faire venir avec lui pour l’aider dans ses petits trafics. Moi évidemment, je ne comprenais rien à ce que je faisais. J’avais à peine dix ans à l’époque, et il m’emmenait avec lui voir ses copains, prétextant à mes parents qu’il m’emmenait jouer dans le parc après l’école. Nous allions dans des quartiers pas très bien fréquentés, avec des jeunes défoncés au pied des immeubles. Il disait que ça passerait tout seul, et que j’avais juste à donner mon sac aux jeunes devant le bloc, pendant que lui m’attendait dans la voiture. Je devais récupérer un gros sac marron. Zach m’a toujours interdit de les ouvrir. Il disait que c’était secret et que j’aurais droit à un cadeau si je ne disais rien aux parents. Je n’ai jamais rien dit, j’ai gardé le secret. Même la fois où cela a mal tourné et que j’ai eu une belle entaille au niveau des côtes.

Ce jour-là, je me rappelle, mon frère a couru vers moi. Il était vert de rage, je ne l’avais jamais vu comme ça. Il a défoncé le mec avec qui j’étais. Il lui a hurlé de plus jamais s’approcher de moi, que j’étais qu’une enfant, ce à quoi le mec à rétorquer « faut pas se servir d’une jolie petite fille comme ça, mon pote ».

J’avais onze ans, quelle horreur ! Le mec devait au moins en avoir dix-huit. Après ça, il m’a emmenée moins souvent, et quand j’ai eu l’accident avec mes parents et que je me suis retrouvée dans le coma, je pense qu’il a dû avoir la peur de sa vie. Se retrouvant orphelin et s’occuper de moi aussi jeune. Quand nos parents sont décédés j’avais presque douze ans et lui dix-sept. Nous avons été placés chez une tante éloignée jusqu’à ce que Zach ait atteint la majorité et qu’il puisse devenir mon tuteur légal.

Depuis, nous vivons toujours dans notre maison, et Zach est devenu mécanicien. Il gagne plutôt bien sa vie, mais je le soupçonne de continuer ses trafics tout seul. Après l’accident, je me suis renfermée sur moi-même. J’ai refusé de sortir avec Zach pour l’accompagner, puis nous nous sommes éloignés. Il a veillé sur moi de loin, enfin je n’avais pas le choix, il est mon tuteur.

Depuis quelques mois il essaie de se rapprocher, mais mon côté rebelle ressort trop souvent et je l’envoie balader plus qu’autre chose.

Au fond, je sais qu’il fait tout ça pour moi, alors j’ai accepté d’aller à la fac. J’ai eu le droit à une belle bourse et je n’ai pratiquement rien payé pour l’année. C’est comme ça que je rentre en première année de fac, en littérature.

Pendant mes années de recluse, je me suis passionnée pour la lecture, et j’ai bien envie de continuer dans cette voie et de faire des études dans la littérature. Pourquoi ne pas bosser dans une maison d’édition.

Mon frère est toujours en train de hurler et je suis encore nue devant mon miroir en train de regarder mes superbes cicatrices. Je file donc sous la douche, me prépare aussi vite. Jean slim taille haute, noir et troué sur toute la longueur des jambes, un petit top gris sans manches qui descend bien sur le jean. Je me coiffe aussi rapidement, c’est-à-dire une queue de cheval très haute. Mes cheveux sont épais, bruns et très raides. Je ne peux rien en tirer, mais maman m’a toujours dit qu’ils étaient magnifiques. Je finis souvent par les attacher. J’en profite pour me maquiller légèrement, un trait d’eye-liner et du mascara, ça suffira amplement. Avant de descendre, je prends mon sac, mon portable et mes chaussures. Mon téléphone vibre dans ma poche.

« Trop excitée ! Ça y est ma cocotte, c’est le grand jour. À nous la fac et les beaux mecs !!! »

Je rigole bien avec Harper. Elle a toujours été là pour moi, et elle est la seule à qui je me confie depuis que j’ai quatre ans. Elle a tout vécu avec nous, et elle supporte mon caractère de cochon. Elle est la seule à qui je ne m’en prends jamais, et je suis heureuse de pouvoir affronter cette première année avec elle.

Malheureusement, elle a pris une tout autre filière et madame se dirige vers des études de psychologie. Je prends le temps de lui répondre avant de rejoindre mon frère dans la cuisine.

« Pas de soucis poulette, on se rejoint devant la fac, je serai là d’ici 30 min, à toute, bisous. »

Arrivée dans la cuisine, je suis surprise de voir que Zach a tout préparé. Mon jus d’orange et deux belles tartines de confiture m’attendent sur la table.

— Zach, je n’ai pas le temps, commencé-je. Comme tu l’as dit, il ne faut pas arriver en retard aujourd’hui.

— Tu t’assois et tu manges ! m’ordonne mon frère.

— Bien mon commandant ! souris-je.

Pendant que je savoure mon petit-déjeuner, Zach fait les cent pas dans la cuisine, il a l’air stressé.

— Oh Zach, me lamenté-je. Arrête de marcher tu me donnes le tournis.

— Mange !

— Ça ne va pas ? demandé-je. C’est moi qui rentre à la fac pas toi, alors déstresse et assieds-toi tu vas me rendre chèvre.

— Oui ça va, allez mange. Tu vas être en retard et j’ai du boulot au garage.

— Oui, je me bouge, soufflé-je. De toute manière Harper m’attend devant la fac, j’y vais.

— Harper ? Euh… Oui allez vas-y, on se voit cet aprèm. Fais attention, crapule.

— Arrête de m’appeler comme ça, boulette ! grogné-je.

Je l’entends rire à l’évocation de son surnom. J’adore l’appeler comme ça, parce qu’étant plus petit il était plus gros. Depuis, il s’est bien rattrapé. Il a été, ou il est d’ailleurs, dealer, mais il n’a jamais touché à la drogue. Avec les années, il a fait beaucoup de musculation, et a développé une bonne corpulence. Je ne regarde pas trop mon frère, mais j’en déduis ça au regard baveux des filles dans la rue, ou celui d’Harper quand elle vient à la maison.

Elle en pince pour lui, beurk ! Mon frère, beau gosse, très grand, taillé comme un rugbyman, des muscles bien dessinés et placés où il faut. Les mêmes yeux bleus que papa et les cheveux d’un brun ténébreux. Il a tout pour plaire, mais je ne l’ai jamais vu avec une fille, enfin, pas ma présence en tout cas.

Bref, trêve de bavardage, la fac m’attend, enfin surtout Harper.

Chapitre 2

Je suis enfin arrivée devant l’université. Nous habitons Loveland, dans l’état du Colorado. Je dois faire environ trente minutes de trajet en bus pour rejoindre l’université à Fort Collins. Je n’ai même pas eu le temps de voir quoique ce soit, qu’une tornade rousse me saute dessus.

— LIV ! hurle-t-elle.

— Harper, bien le bonjour à toi aussi.

— Oh fais pas ta tête de cochon à neuf heures du mat’, s’il te plaît, grimace-t-elle. Tu as toute l’année pour faire ça. Viens on y va !

— Doucement, on n’est pas pressées.

— SI, insiste-t-elle. Je veux voir un peu la fac avant d’entrer dans l’amphi.

Elle me tire par la main, et je râle comme à mon habitude. Harper et moi n’avons rien à voir l’une avec l’autre. Elle est pétillante, rigole tout le temps. C’est une fille très jolie, rousse avec les cheveux bouclés, coiffée impeccablement. Ses yeux sont verts et son visage porte d’innombrables taches de rousseur.

Aujourd’hui, elle porte une robe jaune poussin. Cintrée jusqu’au milieu de la taille et évasée par la suite. Elle lui arrive juste au-dessus des genoux. Pour finir le look, elle porte des talons compensés beiges. Harper a toujours su mettre son corps en valeur sans que ça ne devienne vulgaire. À côté, je dois ressembler à un mec. Je n’ai jamais aimé mettre des robes, même petite. Je me contente de mes éternels jeans et de mes bottines en cuir. L’hiver j’accessoirise de ma veste en cuir. Je dois sûrement ressembler à un garçon manqué, mais mes cheveux rendent le tout plutôt pas mal. J’ai un look de Bad Girl, mon caractère n’arrange rien, alors je ne m’étonne pas de ne pas avoir plus d’amis. Je fuis le monde comme la peste, et Harper est la seule à tenir bon. Mon Dieu, elle a plein d’amis. Elle va en soirées, dans lesquelles je refuse catégoriquement d’aller. Elle a eu plusieurs copains, alors que moi, personne n’ose s’approcher. Je dois faire peur, et ça me convient parfaitement. Je ne suis pas faite pour avoir des amis ni pour m’afficher dans des soirées. Si bien qu’à dix-huit ans, je ne suis jamais sortie en boîte, allée à une fête lycéenne, été embrassée, et je ne parle même pas de la suite.

Je continue de suivre ma meilleure amie dans les longs couloirs de la fac. Nous nous arrêtons prendre des cafés et continuons notre tour d’horizon. Il y a énormément de monde et ce n’est vraiment pas pareil que le lycée. Le tout me rend un peu nostalgique et mal à l’aise. Je n’aime pas la foule, et alors, les jours de rentrées sont un supplice. Je déteste repenser à mes années de lycée, et j’appréhende énormément la fac. Je vais sûrement me mettre dans un coin de l’amphi et faire mon truc tranquillement. C’est sans compter sur mon amie, cette tornade, pour me supplier de l’accompagner n’importe où alors que j’ai qu’une envie c’est de ne pas bouger.

— Liv, tu m’écoutes ? s’impatiente Harper.

— Pardon, j’étais dans la lune. Tu disais ?

— Ce soir, recommence-t-elle. Il y a la soirée d’accueil des premières années, on y va ?

— Non merci, affirmé-je. Tu sais très bien que les fêtes et moi ce n’est pas la folie. Mais vas-y, tu me raconteras !

— Allez, Liv, me supplie-t-elle. C’est notre première année. Il faut qu’on fasse des connaissances, qu’on voie la chair fraîche du campus. On va mettre le grappin sur les beaux mecs et te trouver de quoi grignoter ! dit-elle en pinçant ses lèvres.

— Grignoter ? demandé-je, en arquant un sourcil. Tu m’as prise pour un hamster ?

— Allez, viens ! dit-elle en me regardant toute triste.

— On verra.

Cette phrase fonctionne toujours très bien. Ça a le mérite de la faire taire et lui donner un grand sourire de satisfaction. Elle sait très bien que je n’irai pas au final. Après notre petit tour du campus, nous nous quittons devant l’entrée de mon amphi. Elle me fait une bise, avant de déguerpir. Je déteste qu’elle fasse ça et elle le sait. En fait, je ne supporte pas trop les contacts physiques. Elle me fait signe pour qu’on se rejoigne à la pause de midi devant la cafétéria. Je prends alors mon courage à deux mains et entre dans l’amphi.

Il y a tellement de monde. Beaucoup de filles, des pouffes comme je les appelle. Toutes agglutinées devant, comme les bonnes petites filles à papa. Maquillées comme des pots de peinture, habillées avec les plus grandes marques de la terre et perchées sur des talons de plus de quinze centimètres. Sur ma droite, un groupe de gothiques. Il y a aussi des gens normaux, heureusement, et quelques garçons, dont un groupe assis au milieu de l’amphi sur le côté gauche. Je prends place au fond de la salle, sur une rangée vide, bien évidemment.

À peine assise, un des mecs se tourne vers moi, me fait un sourire auquel je ne réponds pas. Il est charmant, je dois l’avouer, mais c’est le genre de garçon à le savoir parfaitement et à en jouer plus que de raison. Tout ce que je vois, c’est que ses yeux sont d’un vert profond. Il est plutôt bien habillé, encore un gosse de riche. Ses amis, tous agglutinés sur plusieurs rangées parlent plus ou moins fort. Je baisse la tête et regarde ailleurs. Je ne supporte pas que l’on me fixe, et du coin de l’œil, lui est toujours en train de me regarder.

Le professeur fait son entrée, se présente et nous donne les grandes lignes de notre année, les cours, les modules à valider, les partiels de chaque semestre. On va avoir des cours en petit comité et on sera divisés en plusieurs groupes.

Super ! À coup sûr, je vais me retrouver avec les pouffes du devant. L’année me semble déjà très longue. À l’appel de nos noms, on doit retenir la lettre de notre groupe, et attendre la suite. J’écoute à peine, en sachant qu’on est déjà au « V », je sais que je vais être dans le dernier groupe....

— Vallberry Amber, Vandenberg Alexandra, Vastly Stella, Whitehead Luke, Winston John, Wesley Bryan, West Noah et… Wilson Olivia, dans le groupe F aussi.

Je relève la tête à l’entente de mon nom et la lettre de mon groupe. C’est à ce moment-là que je croise à nouveau son regard. Il me fait un grand sourire, auquel je ne réponds toujours pas. Je ne sais pas dans quel groupe il est, mais je n’espère pas dans le mien. Je sens qu’il va vite devenir insupportable.

À la fin des trois heures de présentation, je me dirige vers la sortie pour retrouver Harper, quand je me fais rattraper par le bras. Je n’ai même pas le temps de me retourner, que je tombe nez à nez, ou plutôt nez à torse, avec lui…

— Salut ! dit-il, tout sourire.

— Pas intéressée ! dis-je rapidement.

Cela semble radical, mais au moins aucune conversation ne peut être engagée. Je suis un peu sauvage, non ? Oui, c’est tout moi ça. Au moins, je maintiens ma réputation de mauvaise graine et de fille intouchable. Je me débats et réussis à m’arracher à sa main. Je prends vite la direction de la cafétéria en me perdant au moins deux fois. Harper m’attend déjà devant l’entrée, toujours affublée de son sourire. À croire que rien ne peut le lui enlever.

— Alors ? Cette rentrée, raconte ! demande-t-elle, excitée.

— Rien, l’année va être longue, soufflé-je. Il y a des gens bizarre dans ma section.

— Oh, tu as toujours le don de voir la vie en noire, ma chérie, souris ! Ça va être une année de folie, s’exclame-t-elle.

— La vie est noire, Harp'. Je ne vois pas pourquoi ça devrait changer.

— Non, Liv, regarde-moi ! dit-elle sérieusement. On va arrêter de suite. Tu as vécu des trucs horribles, tu les as surmontés, maintenant c’est bon. On change de vie ! Tu vas afficher ton magnifique sourire et hop, tu vas profiter de cette année. En attendant, on va bouffer, j’ai trop faim !

Je lui rends mon plus grand faux sourire et la suis sans broncher. Je regarde autour de moi, en pensant que ce n’est pas si différent du lycée. Plusieurs tables, bien catégorisées. Des sportifs, des pouffes, des intellos, des gothiques, des filles, des mecs. On dirait des petites boîtes où chaque personne est cataloguée dès le début. Après avoir pris de quoi manger, nous nous installons dehors. Il y a plein de tables libres, nous prenons place et commençons à manger, quand un petit groupe de filles s’avance vers nous.

— Hé, Harper, on peut venir manger avec vous ? interpelle une fille.

— Oh oui, Liv ça ne te dérange pas ? me demande-t-elle, gênée.

Je la regarde de travers, mais hoche la tête.

— Salut, moi c’est Wendy et toi ?

— Salut, Liv, réponds-je.

Elle a sûrement compris que je n’engagerai pas la conversation. Elle s’assoit à côté de Harper et me présente ses deux copines.

— Voici Brooke et Erika, présente Wendy.

— Salut les filles.

Je suis sauvage, mais polie, donc je souris faiblement. Les filles commencent à parler de leur prérentrée. Je comprends vaguement qu’elles sont libres cet après-midi. J’écoute leur conversation, tout en triturant ma nourriture. Ça ne donne pas trop envie ce semblant repas scolaire. Harper voit que je suis dans mes pensées et me donne un coup de coude, avec son habituel sourire.

— Ça va, ma Liv ?

— Oui, t’inquiète, la rassuré-je. Je n’ai pas très faim. Je vais aller faire un tour avant les deux dernières heures.

Je me lève, prends mon plateau pour le déposer près des poubelles et fais un signe aux filles. Harper me regarde avec un air triste et me fait un bisou avec sa main, accompagné d’un petit sourire que je prends pour de la pitié. J’emprunte le chemin menant à l’entrée principale. Il y a de grands espaces verts où plein d’étudiants sont assis dans l’herbe. Je ne dois pas être normale, déjà que je ne ressemble pas à toutes les filles de mon âge. Je suis solitaire, rebelle et je n’aime pas le monde, à croire que la vie a tout fait contre moi. Je m’assois dans un coin près d’un grand chêne, à l’ombre, et sors les écouteurs de mon sac. La musique a toujours été un très bon remède à mes douleurs. Quand j’en écoute, je ne pense plus, je ne vis que pour les douces mélodies qui sortent de mon téléphone. Je m’adosse à l’arbre et tends les jambes devant moi. Fermant les yeux, je me laisse aller aux mélodies rythmées qui envahissent mes oreilles. Je ne sais pas combien de temps, ni même si je me suis endormie, en tout cas j’ouvre les yeux cachés derrière mes lunettes de soleil, et regarde l’heure.

Merde ! Je suis à la bourre.

Je me lève et cours pour trouver la salle où je suis cet après-midi. Le prof va sûrement nous gonfler avec le déroulement de l’année et ce que l’on va devoir faire pour valider le semestre. Arrivée devant la salle, je respire. Le prof n’est pas encore là, ce qui me laisse le temps de trouver une place éloignée du reste de la classe. Sans faire attention, quelqu’un s’assoit à côté de moi. Je ne lève pas les yeux, juste pour faire comprendre à cette personne qu’elle n’a pas intérêt à me parler. Quand le prof arrive, je me sens obligée de lever la tête et me sens attirer par mon voisin de table. Je le vois, affalé, les jambes tendues sous la table et un bras sur le dossier de sa chaise. C’est lui, le mec de ce midi qui m’a empêchée de sortir. Il ne manquait plus que ça, devoir me le taper pendant toute l’année. Il fait semblant de ne pas me regarder. Apparemment, c’est un cours où nous allons travailler en binôme, GÉNIAL ! On va devoir faire des dissertations, des exposés et des recherches pendant toute l’année. Autant vous dire que je préfère bosser seule, alors celui qui va avoir la malchance de tomber sur moi, va falloir qu’il s’accroche.

— On est plus au lycée, continue le professeur Clarkson. Je vais vous laisser faire vos propres binômes, soyez intelligents. Prenez quelqu’un que vous ne connaissez pas, ça ne sera que mieux pour vous.

En plus d’être en binôme, je vais sûrement me taper un mec, parce qu’il n’y a pratiquement que de ça dans ce groupe. Je vois son regard à côté de moi, et me dis qu’à tous les coups c’est lui que je vais avoir.

— Ça te dit qu’on travaille ensemble ? me demande mon voisin.

Sa voix est douce et assez calme. Jamais je n’ai pensé ça d’un mec, et encore moins un comme lui. Quand je dis comme lui, c’est celui qui sait qu’il est beau, exactement ce que je disais ce matin.

— Apparemment je n’ai pas trop le choix, donc bon…

Oui, sens-le. Je ne vais pas être gentille, monsieur le bourge.

— Ce matin, tu ne m’as pas laissé le temps, alors je me présente : Noah.

Tout en me tendant la main, il m’offre un grand sourire, auquel, à mon habitude je ne réponds pas.

— Liv... réponds-je, sans une once de sympathie.

— Liv ? s’étonne-t-il. Je ne pense pas que tes parents t’aient appelée comme ça, non ?

— Olivia, grogné-je.

J’ai tellement murmuré que je ne suis pas sûre qu’il ait entendu.

— Pardon ?

— O-LI-VIA, articulé-je, plus fort.

— Enchanté, Olivia, me sourit-il. C’est un très joli prénom.

Je ne trouve rien à répondre à ce compliment.

— Tu n’as pas trop envie de faire connaissance à ce que je vois.

— Exactement, champion, ironisé-je. Tu as tout compris.

— Bon écoute Olivia, s’agace-t-il. On va devoir bosser ensemble toute l’année. J’ai bien compris que tu ne veux pas parler, mais tu vas devoir faire un petit effort. Je ne t’ai rien fait.

— Ouais, soufflé-je.

Vu ma réponse, il ne répond plus rien et se tourne face au prof. Je sens que l’année va être longue.

Chapitre 3

Première journée finie. Cette année va être interminable et je me languis déjà les vacances. Je suis quand même rassurée en sachant qu’Harper affrontera ça avec moi. Le truc qui me perturbe le plus c’est quand même cette histoire de binôme. Il est déjà lourd de base alors me le farcir pendant toute l’année sur des travaux communs. Quoiqu’il faille reconnaître qu’il est charmant.

NON !

Aucun mec, pas de problèmes, pas d’attachement, pas d’amis. Je reste dans mon coin au moins il n’y aura aucun sentiment en jeu. Pas cette année, jamais !

À peine rentrée chez moi, je me jette sur le frigo pour assouvir ma faim et ma soif. Je prends un verre de lait et une pomme. Je pose mes fesses sur le comptoir de la cuisine quand mon cher et tendre frère fait son apparition. Il a l’air crevé et préoccupé.

— Ça va frérot ? m’inquiété-je.

— Fatigué, et toi ? Ta rentrée ?

— Lourde ! grimacé-je. Merci de m’avoir forcée, je vais passer une super année !

J’espère qu’il a compris l’ironie dans ma voix, je vais lui faire payer.

— Oh ça va Liv, persifle-t-il. Tu ne vas pas mourir quand même. C’est pour toi que je fais tout ça. Tu serais allée à la fac si les parents avaient été là, alors on ne change rien. Tu y vas et fais en sorte de t’en sortir. Ne finis pas comme moi.

— Comment ça finir comme toi ? demandé-je.

— Tu sais ce que je veux dire…

— Non Zach, explique-moi ? C’est quoi ? La drogue ? Tu as recommencé ? m’emporté-je.

— Tais-toi Liv, répond-il brusquement. Tu ne sais rien. Va faire tes devoirs.

— Je suis plus une enfant ! On a plus de devoirs. Pourquoi tu ne me dis rien ? demandé-je à nouveau. Qu’est-ce qu’il se passe ? Tu es préoccupé depuis hier. Un truc au boulot ?

— Y a rien Liv, me gonfle pas, insiste mon frère.

Il quitte la pièce et se dirige vers les escaliers. Il cache un truc. Je ne sais pas ce que c’est, mais à être sur les nerfs comme ça, ce n’est pas normal. Je décide de poser mes affaires dans ma chambre tout en mangeant ma pomme. En passant devant la salle de bain, j’entends mon frère au téléphone. Curieuse comme je suis, je me colle plus près pour entendre la conversation.

— Non, chuchote-t-il. Elle ne sait rien. Elle ne doit rien savoir, tu entends ? Ne la mêle pas à ça. La dernière fois ça s’est mal passé.

Je n’entends pas la réponse de son interlocuteur, mais Zach n’a pas l’air très content.

— Non je m’en fous que ce soit plus facile, s’énerve-t-il. Tu ne mêles pas ma sœur à tes conneries et ne t’approches pas d’elle, tu m’entends ?

Je le savais, mon frère recommence. A-t-il vraiment arrêté un jour ? Pourquoi je suis encore dans la merde avec ces conneries ? Je pensais que tout était terminé après mon coup de couteau d’il y a quelques années. Les dernières fois où j’ai été mêlée aux deals de mon frère, c’était plutôt calme. Rien de particulier, mais comme je devenais une ado en rébellion, j’attirais aussi le regard de mecs assez bizarre.

En entrant dans ma chambre, je jette mon sac à côté de l’entrée, enlève ou plutôt balance mes chaussures dans la chambre et m’allonge sur mon lit en prenant mon téléphone. Deux messages.

« Poulette, ça va la journée ? Alors comment s’annonce l’année ? »

« Longue, très longue… J’ai un binôme attitré pour l’année et toi ? »

« AH comment il est ? Beau ? Gentil ? Raconteeeeee »

« Y a rien à dire, il est lourd ! Sinon Zach est trop bizarre. Je crois qu’il fait encore ses trafics. »

« Tu veux que je m’occupe de lui ? Non parce que je suis ton amie dévouée et l’occuper à autre chose ne me dérange pas, tu sais : D »

« BEURK !!! Je vais trouver ce qu’il fabrique et après je le défonce !!! »

« Allez, t'inquiète pas. Il va bien, j’en suis sûre. Demain, tu me montres ton super binôme ! Bisous ma belle »

Mon dieu cette fille va me rendre folle, mais sans elle, mes journées seraient bien longues. Je me rappelle alors que j’ai un deuxième message, qui c’est ? Un numéro que je ne connais pas.

« Coucou Olivia. On va devoir se voir à un moment donné pour bosser sur le travail en commun. N’oublie pas. Noah »

Comment a-t-il eu mon numéro !?

« On peut savoir comment tu as eu mon numéro ? Harceleur !!! »

Je n’ai pas le temps de me relever et poser mon téléphone que la réponse arrive.

« J’ai joué mon numéro à la secrétaire en lui disant que je l’avais perdu, et comme c’était pour les cours, elle me l’a donné. Tu m’en veux ? »

« Ne me harcèle pas. Je ne suis pas du genre à copiner avec les gens et encore moins avec les mecs, donc on va bosser et stop ! »

« On verra ça ma belle Olivia… »

Je ne réponds pas, il m’énerve ce mec. Maintenant il a un moyen pour me joindre quand il veut. Il va se calmer sinon il va comprendre qui je suis.

Bordel !

Après ces échanges, je reste allongée sur mon lit pendant un moment. On frappe à ma porte.

— Oui, entre.

— Liv, commence Zach.

Mon regard se tourne vers lui, attendant qu’il continue.

— Écoute, je suis désolé, commence-t-il. Oui j’ai des trucs en tête et je m’inquiète pour toi. C’est une nouvelle année, tu vas faire des rencontres et je m’inquiète de ne pas pouvoir te protéger. Tu es tout ce qu’il me reste.

— Zach ! Regarde-moi, dis-je en lui relevant le menton. Ne t’inquiète pas, tu vas avoir des rides avant l’âge. Rien ne m’arrivera. Tu me connais, je suis sauvage ! À part Harper, je ne parle à personne.

— Ça viendra, Liv, m’assure-t-il. Tu es jeune, tu n’as pas eu une vie facile, donc ça viendra. Surtout avec les mecs… dit-il avec un rictus de dégoût.

Je me mets à rire à en avoir mal au ventre.

— Ah non, ça ne risque pas ! m’esclaffé-je.

— Comment ça ? Tu es… euh… hésite-t-il. Tu préfères les filles peut-être ?

Mon fou rire vient de grimper en flèche.

— Ah non Zach, rigolé-je. Je ne suis pas lesbienne, mais les mecs ne sont pas ma priorité. Je vais déjà devoir me farcir un binôme pour l’année, et autant te dire qu’il m’a déjà gonflé, alors il va vite être mis au pli.

— Hum, fait-il. Enfin, je suis là. Viens me parler s’il te fait chier.

— Je sais me débrouiller toute seule, mais merci, dis-je en l’embrassant sur la joue

— Bon allez, j’ai quelques bricoles à faire sur la voiture. Je te laisse. Tu prépares à manger ? me demande-t-il.

— Comme d’hab. Et Zach ?

— Ouais.

— Toi aussi tu peux me parler si tu as besoin, tu le sais hein ? lui dis-je.

— Ne t’inquiète pas pour moi, petite sœur.

En sortant, Zach me regarde une dernière fois avec un sourire en coin. En quittant la chambre, je me rallonge sur mon lit. Ça fait un bien fou de rire, ça faisait longtemps. Nous nous sommes éloignés avec Zach, je le regrette. Depuis la mort des parents, je n’avais plus ri autant. Il me manque. Il faut absolument que je sache ce qu’il cache. Nous nous en sortons bien financièrement, il ne faut pas qu’il replonge. J’ai accepté de faire des études pour avoir un boulot qui paie. Comme ça, je pourrai aider mon frère et lui rendre tout ce qu’il m’a donné, tout ce qu’il a sacrifié pour moi. Son adolescence, à devoir s’occuper d’une gamine ingrate et rebelle.

Sale caractère !

Pour me changer les idées, je décide d’aller prendre une douche bien chaude. Mon rituel devant le miroir de la salle de bain, c’est de regarder encore et toujours mes cicatrices. Celles qui me rappellent de ne rien lâcher, de me battre jusqu’au bout, et surtout, celles qui me rappellent que mes parents ne sont plus là. J’ai besoin de ma mère pour avoir ses conseils, qu’elle me guide vers l’âge adulte ou tout simplement qu’elle me prenne dans ses bras. J’ai aussi besoin de mon papa, de son regard bienveillant, de son autorité et de nos moments père/fille. Je sais que c’est aussi dur pour mon frère. La présence d’un père, pouvoir grandir en ayant un modèle. C’est fou ce que je peux réfléchir dans cette salle de bain. Mes pensées se tournent vers Noah.

Pourquoi ? Pourquoi je pense à lui ? Et encore pire, maintenant. Je secoue la tête pour effacer son image de l’esprit. Il ne manque plus que ça, me faire pourrir le cerveau par un mec. Un jour je serai obnubilée par un mec. Je serai tellement amoureuse que j’en aurai mal au ventre, tellement accro que j’en serai malade. Mais pas aujourd’hui, je ne suis pas encore prête. L’amour fait mal, les mecs font mal. Les seuls mecs que j’ai connus étaient de vraies brutes, ou des amis à mon frère. Ils sont tous hyper protecteurs avec moi, surtout Chad. Alors j’ai peur, peur de m’attacher à un garçon et qu’il parte du jour au lendemain. Comme mes parents…

La douche me fait un bien fou. Je ferme les yeux et laisse couler l’eau chaude sur mon visage. Je ne pense plus à rien. C’est dans ce moment-là que je me prends encore pour une fille normale, avec qui la vie a été douce. Sans horreur, sans drogue, sans deal, sans accident et avec des parents toujours présents. Ce moment où j’oublie tout, où j’oublie ce que j’ai vécu. Combien je souffre encore de leur absence. J’en veux au chauffard ivre qui nous a foncés dessus. Tout ce que je sais sur cette histoire c’est que le chauffeur est mort sur le coup. Il était complètement ivre. De cet accident, il ne reste que moi. Moi pour me rappeler sans cesse cet accident. À cause de lui j’ai tout perdu. Je lui en voudrai jusqu’à la fin de ma vie. Il paraît qu’il habitait le quartier et qu’il avait une famille. Je n’en sais pas plus. Zach, lui, est au courant de tout mais pour me protéger, il ne veut rien me dire en détail. Je sais juste que le mec habitait notre quartier. Je ne connais même pas son nom.

En sortant de la douche, je me sèche les cheveux et m’habille. Je fonce dans ma chambre pour poser mes affaires de toilette et décide de descendre à la cuisine en voyant l’heure. J’ai dû traîner plus que d’habitude, car il est déjà dix-neuf heures passé. Je commence à faire à manger quand Zach arrive accompagné de Chad. Ce dernier s’approche de moi et m’embrasse sur la tempe. Il est l’un des seuls amis de Zach à être aussi protecteur que lui. J’ai deux grands frères pour le prix d’un.

— Tu manges avec nous Chad ? lui demandé-je.

— Bien sûr, Princesse ! me répond-il tendrement.

— Ok, super ! C’est presque prêt.

Pendant le repas, Chad me demande comment s’est passée ma rentrée. Je lui parle de mon binôme, des gens bizarres de ma classe et que la rentrée d’Harper s’est très bien passée. J’écoute les mecs parler de voiture, de la journée de boulot qu’ils ont eue. Chad et mon frère bossent ensemble dans le garage de la ville. Le meilleur et surtout, celui qui ramène le plus de monde. Chad est arrivé dans notre vie quand j’avais environ quatorze ans. Mon frère et lui se sont rencontrés au lycée.

À l’époque où mon frère y allait encore d’ailleurs. Ils ont fait toutes leurs conneries ensemble. Et quand je parle de conneries, je veux bien entendu parler de leurs deals pourris. Chad un jeune homme assez charismatique avec beaucoup de charme. Il a vingt-quatre ans, grand, blond, les cheveux en bataille et des yeux dans lesquels on pourrait se noyer. Il a un corps à damner un saint, et fait beaucoup de musculation avec Zach. Il porte toujours des vêtements près du corps, de quoi apercevoir ses muscles à travers ses tee-shirts. Je le considère comme mon frère, donc ça s’arrête là, il en fait de même avec moi. Chad est aussi casse-pied que Zach. Autant vous dire que deux gardes du corps comme ça, je ne peux pas faire grand-chose.

— Ok, bon moi je vais y aller, annonce Chad. Zach à demain. Princesse à bientôt, dit-il en m’embrassant le front.

— Ciao, mon pote, à demain, répond mon frère.

Zach se lève et commence à débarrasser, je l’aide et commence à faire la vaisselle. Il est toujours préoccupé, et n’a presque pas parlé de tout le repas.

— Zach, tu vas enfin me dire ce qu’il y a ? lui demandé-je. Tu n’as presque rien dit pendant le dîner.

— Ça va, des petits soucis, me rassure-t-il. Ne t’inquiète pas, je m’en occupe.

— C’est l’argent ? La maison ? Tu n’es pas malade au moins ? m’inquiété-je.

— Non, Liv, je vais bien, s’agace-t-il. Ne t’en fais pas. Concentre-toi sur la fac et laisse-moi gérer ça.

— Mais « ça » c’est quoi ? m’énervé-je. Merde Zach. Je m’inquiète, t’es mon frère. Si tu as un problème, je veux savoir !

— Liv, me dit-il en me prenant le visage dans ses mains. Je vais bien. Je m’occupe de tout, comme je l’ai toujours fait. Ne t’en fais pas.

— Merde, dis-je en lui arrachant les mains de mes joues. Je ne suis plus un bébé, Zach. Si tu as des problèmes avec des dealers, je suis en droit de savoir. J’en ai payé les frais de tes conneries, tu te rappelles ? On a déjà assez perdu. Il est HORS DE QUESTION que je perde mon frère pour ça, tu entends ? m’énervé-je.

Sans lui laisser le temps de répondre, je prends la direction de ma chambre en courant dans les escaliers. Je m’enferme et me jette sur mon lit. Les larmes montent seules sans que je ne les retienne. La peur prend le dessus, j’ai la tête dans mon coussin, pour ne pas que Zach entende. J’ai les nerfs contre lui, mais je ne veux pas qu’il voie à quel point je m’inquiète. À quel point la peur de le perdre me paralyse. Je dois tout faire pour qu’il arrête ses conneries. Il faut que je cesse de verser toutes ces larmes. Mes parents voudraient que je sois forte. Mais comment faire avec un frère aussi stupide ? Qu’il prenne le risque de tout perdre pour ça. Il ne pense pas à moi. Je deviens quoi s’il lui arrive quelque chose ?

Je me relève doucement, avec les yeux rougis par les larmes. Je mets mon réveil et retourne me remettre dans mon lit. Quelque chose vibre… Mon téléphone… Où est-il ? Où je l’ai foutu encore, ce n’est pas possible. En regardant ma chambre, je me dis qu’il va falloir que j’y mette de l’ordre. Je retrouve enfin mon téléphone, caché sous la pile de coussins de mon lit. Un message de Noah, encore.

« Bonne nuit belle Olivia… rêve pas trop de moi. »

« Y a pas de risques, Champion !!! »

En posant le téléphone sur ma table de nuit, je souris comme une idiote. Ce mec va me rendre cinglée avant la fin de l’année. Il va falloir éclaircir les choses, mon pote !

Chapitre 4

Quand le réveil sonne, je le tape de toutes mes forces, la nuit a été rude. Je me lève comme un zombie et vais directement dans la salle de bain. Quand je me regarde dans le miroir, le reflet me renvoie des yeux rougis, des traces d’oreillers et des cheveux indescriptibles. J’ai pleuré une bonne partie de la nuit, pensé à Noah aussi. Ça va vite se régler d’ailleurs. Je n’ai pas à penser à lui, je le connais même pas d’ailleurs. Après une bonne douche et m’être habillée avec ce qui me tombait sous la main, je prends mes affaires et descends à la cuisine. Personne. Seulement un mot sur le comptoir de la cuisine.

« Ne m’attends pas ce soir, j’ai des trucs à régler. Ferme bien la porte, j’ai pris mes clés. »

Tant mieux, je n’aurais pas su quoi lui dire ce matin après notre dispute. Je me prépare un petit-déjeuner que je déguste devant la télévision avant de tout mettre dans l’évier de la cuisine.

Ça attendra ce soir !

Je prends mes affaires et ferme la porte. Je me dirige vers l’arrêt de bus quand je reçois un appel d’Harper.

— Tu arrives dans combien de temps poulette ? me demande-t-elle.

— Je suis là d’ici vingt minutes, lui réponds-je. Tu m’attends ?

— Ouais c’est bon à de suite !

Appel court et clair, j’adore cette fille. Je prends mon bus, musique dans les oreilles. Je m’installe toujours au fond, histoire d’être tranquille. Le paysage défile sous mes yeux, et la musique m’emporte loin de la civilisation. Un écouteur m’est violemment arraché quand quelqu’un s’assoit à côté de moi.

— Eh ! Ah c’est toi ! dis-je, agacée. Putain tu m’as fait peur espèce d’idiot, dis-je en me relevant sur mon siège.

— Bonjour à toi aussi, belle Olivia, dit-il avec un sourire qui se veut charmeur.

— Qu’est-ce que tu fais là ? lui demandé-je. Tu n’as pas de chauffeur pour te conduire à la fac ?

— Non je lui ai donné congé ! dit-il en rigolant.

— Et tu vas me dire que tu n’as pas de voiture ? le taquiné-je. Pour venir prendre le bus et qui plus est te coller à moi.

— Non j’avais envie de te voir, susurre-t-il. Alors j’ai décidé de me soumettre au supplice du bus pour une fois.

— Me voir ? m’exclamé-je. Ah c’est la meilleure, tu ne pouvais pas attendre d’être en cours ? À croire que tu ne vas pas assez me voir durant l’année.

— Je ne te verrai jamais assez, Honey !

— Oh champion, on se calme, dis-je en levant la main vers lui. Tu m’appelles pas comme ça de un, et de deux je t’ai déjà dit que je n’étais pas intéressée. Maintenant si tu veux bien, j’ai autre chose à faire que t’écouter parler. Tu me rends mon écouteur, s’il te plaît ?

— Tu veux faire quoi d’autre dans un bus à part attendre ? sourit-il. Ce n’est pas mieux qu’on fasse connaissance ?

— Non je n’ai pas envie de te connaître, dis-je fermement.

J’y suis peut-être allé un peu fort, non ?

Mais il est lourd ce n’est pas possible. Qu’est-ce qu’il ne comprend pas dans « PAS INTÉRESSÉE » ?

— Ouch c’est fort ça, Olivia, dit-il, blessé.

— Arrête de m’appeler Olivia, grogné-je. Je ne supporte pas ça.

— Moi je trouve que ça te va bien. C’est ton prénom après tout, justifie-t-il.

— Ouais c’est ça. C’est bon tu as fini de me faire chier ? dis-je, agacée. Tu n’as personne d’autre à embêter ? Pourquoi moi d’ailleurs ?

— Parce que tu n’es pas comme les autres, chuchote-t-il à mon oreille avant de se lever.

Sans me laisser le temps de répondre quoi que ce soit, il se place à l’avant du bus. Ce mec m’intrigue, il est super collant, chiant, mais il s’acharne à me parler. Il ne veut pas lâcher l’affaire. Pour autant, jamais un mec ne m’avait fait cet effet ; me mettre en rage en deux secondes. D’habitude je suis même indifférente aux regards des autres, mais quand c’est lui qui me parle, je m’énerve. Je le regarde de ma place quand il tourne légèrement la tête vers moi me faisant baisser la tête aussi vite. Je me replonge dans ma musique en lançant des regards furtifs vers l’avant. Je le soupçonne de faire pareil.

Arrivée devant la fac, je sors du bus suivie de Noah. Harper m’attend devant l’arrêt, en sautillant sur place.

— Liv, enfin tu es là, se presse-t-elle. Vite on va prendre un café avant d’aller en cours.

— J’arrive.

En lui disant ça, je tourne la tête et me retrouve collée au torse de Noah. Je recule en quatrième vitesse, quand il se penche près de mon oreille.

— À tout à l’heure, ma belle… chuchote-t-il.

Encore une fois je n’ai pas le temps de répondre qu’il prend déjà la direction de l’entrée.

— Euh, tu m’expliques ? me demande Harper.

— Hein, quoi ? dis-je en revenant à la réalité.

— Quoi ? Qui c’est ? Qu’est-ce qu’il t’a dit ? s’impatiente-t-elle. Allez, balance ma vieille !

— Oh lui ? dis-je, innocemment. C’est Noah, mon binôme. Tu sais je t’en ai parlé hier.

— C’est LUI ton binôme ? s’exclame-t-elle. Et bah ma vieille on se gêne plus ! Il est trop canon ton pote.

— C’n’est pas mon pote et il n’est pas canon, dis-je en me renfrognant.

— Oh que si, il est super canon, affirme-t-elle. Et en plus tu lui plais !

— N’importe quoi ! fulminé-je.

— Non, crois-moi ma belle, confirme Harper. Quand ça parle de mec, je m’y connais. D’ailleurs en parlant de ça, comment va Zach ?

— Zach ? Pourquoi tu me parles de mon frère ? paniqué-je. Ne me dis pas que t’as encore des vues sur lui ? Tu m’avais dit que tu l’avais oublié ?

— Euh… hésite-t-elle.

— Harper ? Merde c’est mon frère ! dis-je, dégoûté.

— Et alors ? s’emporte-t-elle. Ça fait des années, je n’arrive pas à l’oublier. Je me dis qu’un jour il verra que j’existe autrement que pour être ta meilleure amie !

— Ouais, bon on va se le prendre ce café ? dis-je pour changer de sujet.

En nous dirigeant vers la cafétéria, nous passons devant un groupe de mecs. Évidemment, c’est le groupe de Noah. Je reconnais certains mecs et surtout lui. Il me regarde intensément et me fait un sourire discret mais qui en dit long. Quand il voit mon sourire, le sien s’accentue. Cela me surprend, mais je n’arrête pas pour autant. Il faudrait que j’arrête un peu la rébellion. En prenant notre café, Harper me raconte qu’hier soir elle s’est disputée avec ses parents à cause de la soirée de bienvenue prévue ce week-end. Apparemment, ils ne veulent pas qu’elle y aille parce qu’elle est seule, donc elle me supplie de l’accompagner.

— Allez Liv, s’il te plaît ? dit-elle avec un air de chien battu.

— Putain, je n’ai pas envie, Harper, me lamenté-je. Tu m’as déjà vue aller à une soirée avant ? Non et bien je n’ai pas envie de commencer.

— S’il te plaît, je ferai tout ce que tu veux, me supplie-t-elle. Peut-être même que Noah sera là. Tu pourras lui parler et en profiter pour faire plus ample connaissance !

— Je verrai, tu es chiante quand même, dis-je, agacée. J’en parle avec Zach et je te dirai.

Voilà je suis énervée. Cette fête. Je n’ai vraiment pas envie d’y aller d’ailleurs, on est jeudi. Ce qui fait que j’ai deux jours pour trouver un moyen de refuser ou alors d’affronter ça et Harper me lâchera. Harper m’accompagne devant ma salle de cours. Elle me fait un baiser sur la joue et part en courant avant que je n’aie le temps de lui crier dessus. Je décide de rentrer dans la salle. J’ai dix minutes d’avance, et vois la place libre au fond de la salle. Je regarde dehors, cette pièce donne sur le devant de la fac, où s’alignent de grands espaces verts. Des bancs et des centaines d’étudiants à la recherche de leur prochaine salle. Ici, nous sommes libres. Personne ne peut nous faire chier. Si nous n’allons pas en cours, qui va s’en apercevoir ? Quand on est une fille comme moi, solitaire, on apprécie que personne ne s’occupe de nous. Mis à part mon super binôme, qui s’assoit à côté de moi.

— Salut Beauté, je t’ai manqué ? dit-il en me souriant à pleines dents.

— Tu ne peux pas imaginer à quel point, Champion, ironisé-je.

— Ouh on fait des progrès, dis-moi, plaisante-t-il.

— Ouais ne rêve pas trop, clamé-je. J’ai juste décidé d’arrêter de m’en prendre à toi.

Un petit sourire se dessine sur son visage. Il se rapproche de moi, pose la main derrière le dossier de ma chaise, et me glisse à l’oreille un « Merci » qui me donne des frissons. À peine ai-je le temps de le regarder qu’il a déjà repris sa place initiale, toujours aussi proche de moi.

— Bien le bonjour jeunes gens, commence le prof. Aujourd’hui, je vais vous parler de votre premier devoir à me rendre d’ici deux semaines. Comme c’est le premier, je vais vous demander, avec votre partenaire, d’apprendre à vous connaître. Vous allez vous parler de votre vie, et me faire une biographie de cinq mille mots. Bien entendu, vous êtes en littérature, donc j’attends de vous de la profondeur, de la perspicacité. Que l’on comprenne à travers vos mots, l’essence même de la personne.

— Bon ma belle, finalement on va apprendre à se connaître, me dit Noah.

— Ouais, tu dois être heureux, chuchoté-je. Tu vas savoir qui je suis.

— Allez, ne fait pas la tête, dit-il avec un demi-sourire. Hormis moi et le prof, personne ne saura rien de ta vie. Fais-moi confiance.

— Je ne fais pas confiance, Champion, affirmé-je. Ça n’apporte que des problèmes.

— Olivia, on va faire une bonne équipe ne t’inquiète pas, me dit-il à l’oreille.

— C’est la fin du cours, dis-je, rapidement. J’y vais, à plus.

— Olivia, attends, m’appelle-t-il.

Je sors en courant. Bordel, ce n’est pas vrai ! Je vais devoir lui raconter ma vie, mes parents et Zach.

Non, il ne peut pas savoir.

Je commence à paniquer. Je pars en courant à travers les couloirs de la fac pour débouler derrière le campus. À bout de souffle, je me retiens à un mur en expirant un bon coup, et voilà que je me mets à pleurer.

Crise de panique bonjour !

Je vais devoir me mettre à nue, lui dévoiler mes secrets les plus profonds, ma souffrance. Je ne vais jamais m’en sortir. Je ne vais pas y arriver et c’est la raison pour laquelle je n’ai pas beaucoup d’amis. Je n’aime pas parler de moi, et encore moins de ma famille. Enfin ce qu’il en reste. Les secrets, l’accident, la drogue, qui voudrait être ami avec quelqu’un comme moi ? Je m’assois par terre, la tête entre les jambes. J’ai encore trente minutes avant de rejoindre Harper à la cafétéria.

— Liv, mais bon sang tu étais où ? Clame Harper.

Je rejoins les filles en voyant qu’elles ont pris mon plateau.

— Désolée, je suis allée prendre l’air derrière le campus, m’excusé-je. Je suis en retard ?

— Non mais quand même, souffle Harper. Préviens-moi, je me suis inquiétée.

— Désolée Harp', merci pour le plateau.

— Ça va, Liv ? Tu as l’air ailleurs, s’inquiète-t-elle.

— Mouais, le prof nous a donné notre premier devoir, soufflé-je. On va devoir faire une biographie sur notre partenaire. Qui dit biographie dit…

— Raconter ta vie, termine-t-elle pour moi. Je suis désolée ma puce, ça va aller ?

— Pas trop le choix. Bon, ça te dit de venir à la maison ce soir ? lui demandé-je.

— Oui avec plaisir, me répond-elle. Je vais prévenir ma mère.

Le reste du repas se passe bien. J’écoute les filles parler, mais je ne me mêle pas trop à la conversation. Histoires de mecs, de vernis et de mode, très peu pour moi. Je n’ai jamais été très féminine. Petite, je passais mon temps à suivre Zach, donc je suis plus calée en mécanique et football qu’en trucs de filles. Je peux même vous dire que pour le bal de promo, Harper m’a traînée de force faire les magasins pour dénicher LA robe. Autant vous dire que ce fut la pire journée de l’année et que j’ai dû acheter une tenue, qui maintenant demeure dans mon armoire.

Après le repas du midi, je file en cours. Les quatre heures passent assez vite, et sont très intéressantes. J’ai pris options écriture, ce qui me permet d’en savoir plus sur les différentes techniques et méthodes. Je ne sais pas encore vers quelle branche je vais me diriger, mais l’écriture est une échappatoire. Peu de temps après l’accident, lorsque je me suis réveillée, j’avais du mal à parler, alors je me suis mise à écrire. J’écris des poèmes, des phrases, des histoires. Tout ce qui peut me passer par la tête. C’est un moment de bonheur pour moi.

Bref !

La journée finie, j’attends Harper devant le campus. Je m’assois sur le petit muret qui longe la fac, et je l’attends. Je tape mes pieds contre le muret, tête baissée.

— Ça va, Olivia ?

Surprise, je lève directement la tête vers cette voix que je commence à très bien connaître.

— Je vais finir par croire que tu me suis, Champion ! dis-je en souriant.

— Non, mais j’étais en train de partir et je t’ai vue toute seule, dit-il, calmement. Tu veux qu’on rentre ensemble ?

— Non merci, le remercié-je. J’attends ma meilleure amie. Et la voilà d’ailleurs. À plus Noah !

Je rejoins Harper le plus vite possible, l’attrape par le bras avant de partir. Je regarde discrètement derrière moi et le vois. Il reste planté là où je l’ai laissé, il me regarde. Sa tête se baisse, il se tourne avant de partir vers le bus.

Il avait l’air triste, non ?

Arrivée à la maison, on balance nos affaires dans la chambre avant de descendre rejoindre mon frère. Je ne sais pas pourquoi, mais il se passe quelque chose. Je vois certains regards de Zach envers Harper et ça ne me plaît pas du tout. Je sais depuis des années qu’Harper en pince pour lui, mais lui ? Il la regarde différemment quand même ! Discrètement j’engage la conversation dès que Zach va dans le salon.

— Il y a quelque chose entre toi et Zach ? lui demandé-je. Enfin quelque chose dont je ne suis pas encore au courant ?

— Euh… Non pourquoi ? dit-elle en détournant le regard.

— Harp' je te connais, lui dis-je en posant ma main sur la sienne. Je sais quand tu me mens, dis-moi.

— Ne t’énerve pas, s’il te plaît, me demande-t-elle.

— Balance ! grogné-je.

— Bah en fait il m’a envoyé un message la semaine dernière, avoue-t-elle. Il voulait qu’on parle. Tu sais que j’ai craqué pour lui quand on était petites. Je pensais que ce n’était pas réciproque. Je veux dire, on n’a pas le même âge, je suis beaucoup plus jeune. Qui voudrait d’une fille de dix-huit ans ?

— Et ? demandé-je, pressée.

— Bah, on s’est parlé au téléphone en début de semaine, dit-il, stressée. Il m’a dit que je lui plaisais, mais que comme nous sommes amies il n’avait pas envie que ça pose de problèmes. Il avait peur de t’en parler, donc il m’a demandé de te le dire, mais… enfin tu sais Liv, panique-t-elle. J’avais peur, j’aime beaucoup ton frère, et j’aimerais voir où ça peut mener. Ça fait tellement d’années.

Pile au moment où elle arrête de parler, Zach entre dans la cuisine. Il s’immobilise et nous regarde, passe d’une à l’autre et reste bloqué en plein milieu du salon.

— Bon on va être clairs de suite, commencé-je. Vous vous plaisez. Je vous aime, alors sortez ensemble ou faites ce que vous voulez ! Mais je ne veux rien voir.

Je les regarde, ils sourient. Apparemment c’est bon, le feu vert étant donné, je vais devoir m’y faire. Encore un couple, ma meilleure amie et mon frère.

— Bon, allez dans le salon, leur dis-je. Je vais ranger un peu, prendre une douche et commencer à préparer le repas. Je vous appelle quand c’est prêt, profitez-en, enfin pas trop, hein !

Je les entends rire pendant que je remonte les escaliers. En arrivant dans ma chambre, je prends mon téléphone et vois que j’ai deux messages :

« Je suis content de t’avoir parlé aujourd’hui, ma belle. Il va falloir qu’on se voie pour bosser sur le projet. Demain aprèm ça te dit ? On n’a pas cours. Tiens-moi au courant. On peut aller où tu veux. »

« Ok. On fait ça demain comme ça on en parle plus. »

« Tu veux déjà plus me voir, Princesse ? Je suis déçu ».

« Je te l’ai déjà dit, je ne suis pas faite pour avoir des amis, alors on va faire le boulot et après tu me lâches ».

« Jamais Princesse… À demain ».

Après cet échange très bizarre, un sourire stupide naît sur mes lèvres. Je ne souris pas souvent, mais lui, y arrive très bien. Il s’accroche, alors que je fais tout pour le faire fuir. Il ne sait pas dans quoi il s’embarque le pauvre. Je file sous la douche, mon coin de paradis, puis mets un legging et mon habituel tee-shirt.

En descendant, je m’arrête devant l’entrée du salon. Je les regarde, ils sont assis sur le canapé. Zach a pris la main d’Harper et lui chuchote des trucs à l’oreille. Elle rougit, ce qui me fait les envier. Je les envie parce que Zach n’a pas fermé son cœur après l’accident. Il n’a pas peur de souffrir. En fait, il est plus intelligent que moi. C’est lui qui a raison au fond, il vit sa vie, et je ne peux pas l’en empêcher. Je me bloque toute seule avec mes crises d’angoisse. J’ai peur de l’échec, du seul garçon dont je pourrais tomber amoureuse. Peur qu’il s’en aille, qu’il voit les fêlures de mon âme et qu’il prenne la fuite, qu’il m’abandonne comme mes parents. Je leur en veux, putain je leur en veux, pourquoi ? À cause de cet accident, je suis brisée. Eux, sont heureux, ils tombent amoureux, et moi je suis bloquée dans le passé. Je quitte les lieux et file dans la cuisine, le cœur au bord des yeux. Une présence se fait sentir derrière moi, m’obligeant à me retourner.

Harper. Je n’ai même pas besoin de parler, elle me comprend. Elle vient directement vers moi et me prend dans ses bras.

— Je t’aime, Olivia Wilson, chuchote-t-elle. N’en doute jamais. Tu seras heureuse un jour, je te le promets.

— Merci, Harper, soufflé-je. Je ne te le dis pas souvent, mais je t’aime aussi.

— Arrête de te rebeller et va le voir ce Noah, m’intime-t-elle. Je suis sûre que tu lui plais aussi. Ça se voit dans ses yeux, enfin même si je ne l’ai vu que deux fois, dit-elle en rigolant.

— Et… Si… enfin si je ne lui plais pas… paniqué-je. Je n’ai pas envie de souffrir. Je ne le supporterais plus.

— Qui va souffrir ? À qui je casse la gueule ?

Zach entre au même moment dans la cuisine et vient se mettre aux côtés d’Harper. Il met la main autour de sa taille et lui embrasse la tempe. À ce même moment, elle rougit de plus belle comme une gamine.

— Personne, rigolé-je. Mettez la table, je finis de préparer le repas. Ce soir c’est pâtes.

Chapitre 5

Après la soirée, je laisse les deux amoureux dans le salon et vais directement dans ma chambre. Il est près de vingt et une heures trente quand je m’allonge dans mon lit avec un bon livre. C’est mon moment rien qu’à moi. C’est sans compter sur mon téléphone qui sonne depuis cinq bonnes minutes. Encore des messages.

« Olivia, ma douce et tendre Olivia… »

« Qui c’est ? »

« Tu le sauras bien assez vite trésor »

C’est le genre de message qui fait flipper. Est-ce que j’en parle à Zach ? Il vaudrait mieux quand même, avec ses potes bizarres. Je prends mon courage à deux mains et descends au salon. Zach et Harper sont dans les bras l’un de l’autre sur le canapé. Je vais gâcher leur soirée.

— Euh… Excusez-moi, hésité-je.

— Oh, Liv, viens avec nous. Qu’est-ce qu’il y a ? dit Zach soucieux.

— J’ai reçu un message bizarre et comme ça me fait flipper je voulais te le dire.

— Fais voir ? dit-il anxieux.

À peine ai-je donné mon téléphone qu’il se lève en quatrième vitesse et se précipite dans l’entrée pour prendre ses clés de voiture.

— Zach où tu vas ? Tu sais qui c’est ? dis-je totalement paniquée.