Le Journal d'un chat - Alice Besson - E-Book

Le Journal d'un chat E-Book

Alice Besson

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Beschreibung

Un beau matin de septembre 2016, Colette et Jacques, heureux retraités, ont la surprise de découvrir un chaton dans leur sous-sol. Comment est-il arrivé là ? Mystère… La petite bête déploie alors tous ses charmes pour les séduire et se faire adopter. Ils ne le regretteront pas ; elle va leur rendre leur affection et leurs soins au centuple, par ses facéties, mais, surtout, par son journal qui relate la vie dans et en dehors de son foyer. Et elle en a des choses à raconter, cette boule de poils !


À PROPOS DE L'AUTEURE


Alice Besson aime lire, et écrire ! Elle en a même fait ses métiers, journaliste d'abord, libraire ensuite, mais l'envie de devenir écrivaine fut la plus forte. Elle a publié un premier roman, épistolaire, en 2021, "Lettres à une inconnue", tout en délicatesse, qui a séduit les amoureux de belles lettres. Elle récidive avec une nouvelle atypique, "Le Journal d'un chat".

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Alice Besson

Le journal d’un chat

Article

I

Nouvelle

Cet ouvrage a été composé et imprimé en France par les

Éditions La Grande Vague

Site : www.editions-lagrandevague.fr

3 Allée des Coteaux, 64340 Boucau

Tous droits de reproduction, d’adaptation et de traduction intégrale ou partielle réservés pour tous pays.

ISBN numérique :978-238460-023-6

Dépôt légal : Mai 2022

Les Éditions La Grande Vague, 2022

Toute ressemblance avec des personnages fictifs, des personnes ou événements existants ou ayant existé est purement fortuite.

Journal premier

À tous les chats qui, avant moi, ont reçu l’affection de mes maîtres : César, Voyou, Suzie, Julie

Préface

La jeune Margot nous livre ici son journal avec une plume vive et stylée comme un chat.

En fait, Margot est une chatte et elle nous raconte son atterrissage dans une famille qui a pris autant de bonheur à l’adopter qu’elle en a eu à les séduire.

Puis la vie commune se construit et nous observons le comportement d’un jeune chat à la campagne et son observation des mondes humain et animal à travers les livres, la télévision et Internet.

Nous cueillons ainsi des histoires, des données chiffrées et des notions qui dessinent une petite sociologie des chats tout en vivant la vie bucolique de Margot.

En tant que médecin, je sais qu’elle n’apprécie pas beaucoup mon intérêt pour elle, mais qu’importe, je continuerai à la suivre médicalement et littérairement, car Margot pourrait être une petite cousine du XXIème siècle du chat Kiki-la-Doucette et de Toby-Chien, les compagnons que Colette fait parler dans Dialogues de bêtes.

Merci à Alice Besson pour ce livre et pour sa confiance.

Agnès, docteur vétérinaire

Naissance du chaton

Tarzan ou Jane ?

Mercredi 7 septembre 2016

⸺ Tu entends ?

⸺ Tu sais bien que j’entends mal, répondit Jacques qui, dans son agacement, en avait brisé sa biscotte.
⸺ J’ai pourtant entendu quelque chose au sous-sol, persista son épouse.

Pour en avoir le cœur net, elle descendit avec précaution le raide escalier.

Non, elle n’avait pas rêvé ; elle avait bien perçu des miaulements. Elle appela son mari. Devant elle, dans le bric-à-brac du garage, elle se trouva face à un chaton chétif qui lui criait famine. L’effet de surprise passé, Jacques la rejoignit et le vieux couple se posa la même question : comment cette petite bête s’était-elle retrouvée au milieu de leurs affaires ? Il y avait les fenêtres, bien sûr, qui donnaient au ras du sol, dans le jardin, et étaient grandes ouvertes à cette période de l’année. Mais comment un animal d’environ trois mois à vue d’œil avait-il pu franchir la clôture qui entourait la propriété ? Mystère.

Colette prit les choses en main. Elle alla chercher une assiette creuse et y versa du lait, bio s’il vous plaît. La maîtresse de maison n’avait pas attendu la mode des produits issus de l’agriculture biologique pour acheter des denrées de qualité. En tout cas, bio ou pas, l’intrus lampa le contenu jusqu’à ce qu’il n’en reste plus une goutte tout en émettant des ronronnements de plus en plus sonores.

Devant sa maigreur et sa faim, Colette lui redonna une seconde assiettée, aussitôt vidée goulûment, et se tourna vers son époux.

⸺ Tout à l’heure, tu iras lui chercher des croquettes, pour juniors, et une litière.

Les deux retraités regardèrent le chat qui, fatigué et repu, battit des paupières et se pelotonna pour s’endormir.

Pour l’heure, il avait plutôt l’air d’une créature tout droit sortie d’un film de Spielberg avec ses oreilles trop grandes pour sa tête minuscule et son petit corps, dont on entrevoyait les côtes, soutenu par des pattes trop hautes. Pourtant, il était beau avec sa fourrure châtain, zébrée de beige, qui en faisait un vrai fauve miniature. Jacques et Colette étaient déjà sous le charme, et il n’était pas dans leur maison depuis une heure.

Que fallait-il faire ? À qui appartenait-il ? Comment était-il arrivé jusqu’à eux ?

Ils furent d’avis de le laisser dormir, de vaquer à leurs occupations et de s’enquérir si un voisin n’avait pas perdu un félin. Mais, au fond, sans se le dire, il était évident qu’ils allaient le garder, que ce chat avait trouvé son foyer.

L’idée de la SPA ne leur avait même pas effleuré l’esprit, et encore moins celle de le relâcher. Pour aller où ?

Dans un endroit hostile où sa jeune vie aurait été menacée.

Les dangers ne manquaient pas par ici. Le souvenir de leur petite Suzy, percutée par un chauffard, était encore vivace. Et pas plus tard qu’en janvier dernier, le 21 pour être précis, la chatte de leur voisine s’était volatilisée, envolée, disparue. Qu’était-il arrivé à cette magnifique pelote blanche aux yeux vairons, l’œil droit jaune doré et le gauche évoquant un ciel de montagne par beau temps.

Jacques avait déjà sauvé l’animal l’été précédent en éloignant un renard famélique qui lui tournait autour. Il l’avait cherché en vain pendant une semaine et avait dû se rendre à l’évidence lorsqu’en fermant les volets, il avait aperçu,à la lueur du lampadaire, une queue touffue qui, dans la nuit d’hiver, cherchait à pénétrer dans la ferme en face de chez eux pour accéder au poulailler. La campagne était faite d’attraits et de cruauté.

Pourtant, à cet instant, ils se sentaient déjà responsables de cette petite boule de poils qui ne pesait pas un kilo, bien qu’ils s’étaient jurés de ne plus avoir de chat chez eux. Depuis deux ans et deux mois exactement, quand Jacques s’était fait des ampoules à chaque phalange à force de creuser une terre desséchée pour y déposer Julie, 16 ans, vaincue par le diabète. C’était le 26 juillet 2014. Une chaude journée de moisson, mais un samedi triste et sombre pour eux. Ils avaient eu le cœur lourd bien des jours. Certains de leurs proches avaient haussé les épaules : quelle idée de s’en faire pour un chat, c’est vraiment tomber dans la sensiblerie.

Ah oui, avaient-ils eu envie de rétorquer, quand un être vivant et cher disparaît, cela ne vous fait rien. C’est un objet, un meuble au rebut ? Vous passez à autre chose ? Il y a des bêtes avec qui l’on tisse des liens plus profonds qu’avec des hommes.

Et l’été s’en était allé après un mois de septembre splendide. La vie avait repris son cours et n’était pas toujours un long fleuve tranquille. Elle avait parfois des soubresauts terribles. Pourtant, le printemps suivant se présentait sous les meilleurs auspices.

En avril, la campagne dévoilait les charmes de ses pommiers en fleur, de son ciel bleu azur et de ses champs de colza au faîte de leur floraison.

Deux mois plus tard, la France était accablée de chaleur.

Colette avait calé un thermomètre sur un muret du perron et avait relevé 52° au soleil, 40° à l’ombre, le mercredi 1er juillet 2015.

En plus de 70 ans d’existence, elle n’avait jamais vu ça. Tel un pompier, l’agriculteur voisin avait sorti du pré ses deux enrouleurs, raccordé les énormes tuyaux et ouvert grand les vannes des points de puisage pour éviter que les plantes ne dessèchent sur pied. Peine perdue, le blé manquerait de protéines et le cours des céréales serait encore revu à la baisse.

Et cette année, dame nature avait inversé la tendance. Des pluies diluviennes s’étaient abattues sur la région, noyant le printemps sous des trombes d’eau. Près de chez eux, le Loing était sorti de son lit et avait englouti tout ce qui se trouvait autour. Nemours et Moret-sur-Loing avaient pris des allures de Venise au grand dam des habitants qui, pour certains, avaient 1,50 m d’eau chez eux. Dans leur village, Colette et Jacques étaient plus chanceux. Ils vivaient sur les hauteurs, mais il avait tout de même fallu qu’il vide le puisard des heures durant à grands coups de seaux. Ce printemps pluvieux et sans soleil avait eu de graves répercussions sur les fruits et les plantes. Cette fois, la production agricole serait la plus mauvaise de l’après-guerre : jusqu’à 60 % de récolte en moins.

Et s’il n’y avait que cela ! Les excès du climat n’étaient qu’une calamité parmi d’autres : le chômage, le terrorisme les frappaient via le petit écran.

Ils avaient été particulièrement choqués par le 14 juillet meurtrier sur la Promenade des Anglais à Nice et par l’assassinat barbare du vieux prêtre, Jacques Hamel, à Saint-Étienne-du-Rouvray.

Ce mercredi 7 septembre s’annonçait, malgré cette actualité déprimante, comme une journée paisible et ensoleillée pour le couple de retraités. Jacques irait comme de coutume faire sa partie de boules à l’autre bout du village, laissant Colette à ses tâches ménagères et à ses lectures pendant que le chaton dormait.

Le soir venu, ils le prirent avec eux dans leur logis et lui donnèrent une nourriture plus consistante. Le petit explora son nouveau territoire sur la pointe de ses coussinets noirs.

Personne ne l’avait réclamé. Il finit par se rouler en boule sur les genoux de l’un, puis de l’autre, et par passer la nuit, bien calé entre les deux.

Jeudi 8 septembre 2016

Le jeudi était jour de marché au village. Comme chaque semaine, Jacques y emmenait Colette sur les coups de 9 heures et demie, ni trop tôt, ni trop tard, pour éviter la cohue et avoir plus de choix.

Ils croisaient régulièrement voisins et personnes de connaissance avec qui ils échangeaient les dernières nouvelles, en l’occurrence, l’arrivée d’un nouveau pensionnaire sur quatre pattes la veille. Pierrette, agricultrice en retraite, leur suggéra avec réalisme que le précédent propriétaire s’en était débarrassé en le balançant par-dessus le grillage, ce qui était, selon elle, une pratique, hélas, courante.

L’idée avait fait son chemin une partie de la journée dans la tête de Colette. Elle s’était alors souvenue avoir entendu une voiture vers les 6 heures. Ce n’était pas le livreur de journaux, car le véhicule était reparti aussitôt, une fois l’édition du jour déposée dans la boîte. Non. Cette auto-là était demeurée à l’arrêt bien plus longtemps, moteur en marche, et cela l’avait intriguée. Pierrette, qui avait l’habitude des animaux, avait sans doute dit vrai.

La personne avait attendu que le chat pénètre dans le sous-sol. Pourquoi les avoir choisis, eux ? À cause de la configuration des lieux ? Parce que celui ou celle qui l’avait abandonné les connaissait, et savait qu’ils pourraient s’en occuper, sachant qu’il n’y avait plus de bête à la maison ?

Colette fit un rapide calcul. Si le chaton avait effectivement trois mois, il était né en mai ou juin, au moment des pluies. Peut-être dans une famille avec des enfants et la portée avait fait leur bonheur le temps des vacances. Mais elles s’étaient achevées, c’était la rentrée. Tout le monde était reparti travailler, qui au bureau, qui à l’atelier, qui à l’école. Et qui allait garder de jeunes félins avides de jeu et, ce faisant, se mettant en danger ou détériorant le mobilier ?

Personne. Il y avait cette solution, simple et lâche : les relâcher dans la nature en catimini. C’était la loterie, certains s’en sortiraient, d’autres mourraient. On pourrait objecter que c’était mieux que de les noyer ou les chloroformer à la naissance, à défaut de stériliser la mère ou de castrer le père.

Colette et Jacques étaient prêts à assumer un rôle que d’autres refusaient. Maintenant que ce chaton était au monde, autant lui assurer la meilleure vie possible. Et ce n’était pas toujours facile pour des personnes d’un certain âge de se retrouver avec un enfant sur les bras.

Colette consulta l’ouvrage de poche qu’elle possédait sur les chats. Si le petit avait effectivement trois mois, il aurait 4 ans âge humain. Le contraste était saisissant avec Julie qui s’en était allée à… 84 ans. Éternel recommencement.

Une vie s’éteignait, une autre apparaissait, avide d’explorer le monde qui l’entourait.

Le chaton était dans leur maison depuis à peine 24 heures que, déjà, il avait évalué son territoire, reniflé l’orchidée, sauté sur le canapé, mordillé les lacets des chaussures de son nouveau maître. Jacques n’avait pas osé porter la main sur cette minuscule pelote et avait dit en secouant la main : « Tu vas te faire appeler Arthur ».

⸺ Mais oui, avait répondu sa femme. Bien sûr. Il va bien falloir lui donner un nom. Et pourquoi pas celui-là.

Son idée première avait été de l’appeler Reine puisqu’il était apparu le jour où l’on fêtait cette sainte.

Il était si maigre qu’elle avait d’abord conclu qu’il s’agissait d’une chatte avant de se raviser. Elle avait ensuite eu envie de le baptiser Voyou, mais cela lui rappelait un de ses premiers félins, magnifique tigré tombé rapidement malade. Non. Arthur, ce serait très bien. Elle regarda le dictionnaire. Arthur : chef légendaire gallois, Ve - VIe siècle. Il en avait tout l’air, d’un chef, avec ses yeux dorés, ses dégradés de beige et de châtain sur le dos, le ventre, dans le cou et les paupières qui lui donnaient l’air constamment étonné. Évidemment, un nom pareil évoquait la quête du Graal, Lancelot du Lac, les chevaliers de la Table ronde, un imaginaire que n’aurait pas renié leur fille, Amélie.

Arthur semblait doté d’un fort caractère et ne tarda pas à montrer une grande vitalité.

Jeudi 22 septembre 2016

Un mois après une canicule tardive, l’automne fit son entrée sous le soleil. De retour du marché, Jacques aperçut Arthur, comme à son habitude dans le jardin, jouant avec on ne savait quoi. Il s’approcha et lâcha son panier.

⸺ Colette, il a attrapé un oiseau, s’écria-t-il, et pas n’importe lequel : le rouge-gorge. Colette laissa échapper un oh de déception. Tous deux aimaient les oiseaux. L’hiver, il y avait toujours des boules grasses sur les branches de lilas pour les mésanges charbonnières. En mars, ils scrutaient le ciel pour suivre le vol des grues, annonciateur des beaux jours.

Parfois, un pic-vert ou un pic-épeiche faisait escale sur leur pelouse. Ils attendaient, comme tout le monde, le retour des hirondelles qui se faisaient de plus en plus rares, la faute à ces satanés pesticides qui privaient les oiseaux de nourriture dans les champs, à l’abattage des haies et des arbres, à l’ensevelissement des mares, à l’urbanisation galopante.

Ils n’étaient pas écolos, ça non, mais ils se sentaient la fibre naturelle comme bien des gens de leur âge qui avaient vu une campagne plus luxuriante. Ils se consolaient avec le chant mélodieux des merles.

À tout prendre, ils auraient préféré que, pour sa première prise, Arthur capture un moineau anonyme. Il n’était plus temps de le gronder et Jacques se fit un devoir d’enterrer la victime au plumage cuivré.

Depuis deux semaines qu’il vivait avec eux, le chaton n’en n’était pas à un tour près. Toujours personne ne s’était inquiété de sa disparition, preuve qu’il s’agissait bien d’un abandon, confirmé par le fermier voisin qui leur avait dit avoir vu, de son côté, d’autres chats ressemblant au leur. Il ne faisait plus de doute qu’Arthur était né dans le coin et que toute la portée avait été dispersée aux quatre vents.

Il se fichait bien de ce qui avait pu advenir à ses frères et sœurs félins. Pour lui, la vie était belle. Il n’avait pas perdu au change et avait doublé de volume. On ne lui voyait plus les côtes.

Ce journal étant le sien, il est temps de lui donner la parole. Je vous vois hausser les épaules. Un chat, ça ne parle pas, ça n’écrit pas, ça miaule et ça griffe. Oui, mais il y a des modulations dans les miaulements et d’un simple regard ou d’une patte levée, l’animal sait se faire comprendre.

Je ne vous dirais pas comment je me suis retrouvé chez mes maîtres, c’est mon secret de chat. J’avais une faim de tigre, mais vous le savez, et je l’ai fait savoir. J’ai vu arriver devant moi une dame au cou ridé, en robe de chambre, et, peu de temps après, un monsieur qui n’avait plus beaucoup de cheveux. Ah, de vieux humains. Ils m’ont donné du lait et quand j’ai eu l’estomac plein, je me suis assoupi. Je suis resté tranquille toute la journée. Le soir, ils m’ont pris avec eux et m’ont donné des croquettes. Hum, c’était les meilleures que j’avais jamais mangées. Le repos, la nourriture, ça m’a requinqué.

J’ai fait un peu le tour du propriétaire. J’ai grimpé sur la table basse où il y avait une fleur. Intéressant. Je me suis installé sur eux. Lui a une petite bedaine bien moelleuse et elle, des jambes confortables. Ma foi, j’aurais pu tomber plus mal.

Le lendemain matin, le maître a ouvert les volets de la porte-fenêtre et je me suis précipité dehors. Ils ont un beau jardin agrémenté d’arbres et d’arbustes. Le paradis du chat. Mon préféré, c’est l’acacia boule près de la maison. Hop ! En deux temps, trois mouvements, j’accède en haut du tronc et je me niche au creux des branches. J’ai même ri dans mes vibrisses naissantes car les deux humains m’ont cherché partout et ont mis du temps à trouver ma cachette, d’autant plus que mon poil me camoufle à merveille. Maintenant, s’ils ne me voient pas, ils savent où me trouver.

Au fil des jours, j’ai testé d’autres arbres : le petit cerisier, le pommier miniature, mais c’est quand même l’acacia que je préfère. Quoi que, les thuyas sur le côté de la maison, c’est pas mal non plus. Il y a plein de moineaux là-dedans et je me pends de branche en branche pour les chasser. C’est très amusant et mes maîtres admirent mon sens de l’équilibre. Ils ont même voulu me rebaptiser Tarzan ou Ulysse, tellement j’ai l’air heureux.

Il y a de quoi. Mes nouveaux maîtres sont au petit soin pour moi, c’était pas le cas avant, je peux bien l’avouer.

La nourriture est succulente. Ma maîtresse a retrouvé deux bols identiques parfaitement adaptés à ma morphologie. J’ai de l’eau, filtrée, et des croquettes à volonté. Elle pose à côté des barquettes dans lesquelles elle met une miette du plat du jour : steak le jeudi, poisson le vendredi, jambon le samedi, volaille le dimanche. J’peux pas m’empêcher de grimper sur la table pour renifler un peu leur assiette. Mécontents, ils m’obligent à descendre, mais je suis obstiné. C’est plus fort que moi, je remonte aussitôt. Faut dire que je raffole de la charcuterie. Eux aussi. D’ailleurs, c’était leur métier. J’suis pas sourd. Je les entends à table soupirer sur la qualité du saucisson à l’ail ou du fromage de tête. Il paraît que mon maître était un expert dans la fabrication de ces mets. C’était un artisan à l’ancienne et ça le désole de voir de jeunes collègues acheter des produits tout faits. Autant aller dans les grandes surfaces.

Bref, toutes ces bonnes choses me donnent de l’énergie, comme si je n’en avais pas assez. Alors, je joue, je cours comme un petit fou.

Bon, je m’suis vite lassé des rideaux, mais j’adore mordiller les vêtements, plus particulièrement gilets et chaussettes.

Les lacets, c’est bien aussi. Ça met en colère ma maîtresse qui, depuis que j’ai sectionné la fleur de l’orchidée, a trouvé LE moyen de me faire peur. Ah, je n’aime pas ça du tout quand elle replie son journal et me tape les fesses avec. Ça brise mon élan et je redeviens sage quelques instants. Je suis, ils l’ont bien compris, comme un enfant qui teste l’autorité de ses parents. Jusqu’où puis-je aller avant qu’ils ne disent halte ?

Souvent, je m’