Les désirs d'Oliver - Tina Folsom - E-Book

Les désirs d'Oliver E-Book

Tina Folsom

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Beschreibung

Récemment transformé en vampire, Oliver, garde du corps employé chez Scanguards, éprouve des difficultés à contrôler sa soif de sang. Chaque nuit se traduit par une lutte contre la tentation mais, lorsqu'Ursula, la beauté asiatique, lui tombe littéralement dans les bras, il craint de perdre la bataille face à ses démons intérieurs et donc, de succomber à son désir d'hémoglobine. Réduite à l'esclavage par des vampires pour la singularité de son sang, Ursula vient juste d'échapper à ses ravisseurs. Lorsqu'un bel étranger vient à sa rescousse, elle réalise qu'il est également de leur espèce. Il prétend vouloir l'aider, mais peut-elle faire confiance à un vampire qui convoite, non seulement son corps, mais également le liquide qui coule dans ses veines ? Sa promesse de sauver les prostituées dont le sang présente les mêmes spécificités que le sien la contraint à s'allier à Oliver et à ses collègues de Scanguards. Son choix la mènera-t-il à son salut ou à sa perte ? À PROPOS DE LA SÉRIE La série Scanguards Vampires est pleine d'action rapide, de scènes d'amour torrides, de dialogues pleins d'esprit et de héros et héroïnes forts. Le vampire Samson Woodford vit à San Francisco et possède une société de sécurité et de garde du corps, Scanguards, qui emploie à la fois des vampires et des humains. Et éventuellement des sorcières. Ajoutez quelques gardiens immortels et quelques démons plus tard dans la série, et vous aurez compris ! Chaque livre peut être lu seul et est toujours centré sur un nouveau couple qui trouve l'amour, mais la série est plus agréable lorsqu'elle est lue dans l'ordre. Et bien sûr, il y a toujours quelques blagues - vous comprendrez quand vous rencontrerez Wesley, un aspirant sorcier. Bonne lecture ! ⭐️ ⭐️ ⭐️ ⭐️ Lara Adrian, auteure de la série Midnight Breed, vendue dans le New York Times : "Je suis accro aux livres de Tina Folsom ! La série des Scanguards® est l'une des choses les plus chaudes qui soient arrivées à la romance vampirique. Si vous aimez les lectures torrides et rapides, ne manquez pas cette série palpitante !" Les Vampires Scanguards La belle mortelle de Samson (#1) La provocatrice d'Amaury (#2) La partenaire de Gabriel (#3) L'enchantement d'Yvette (#4) La rédemption de Zane (#5) L'éternel amour de Quinn (#6) Les désirs d'Oliver (#7) Le choix de Thomas (#8) Discrète morsure (#8 ½) L'identité de Cain (#9) Le retour de Luther (#10) La promesse de Blake (#11) Fatidiques Retrouvailles (#11 ½) L'espoir de John (#12) La tempête de Ryder (#13) La conquête de Damian (#14) Le défi de Grayson (#15) L'amour interdit d'Isabelle (#16) La passion de Cooper (#17) Le courage de Vanessa (#18) Gardiens de la Nuit Amant Révélé (#1) Maître Affranchi (#2) Guerrier Bouleversé (#3) Gardien Rebelle (#4) Immortel Dévoilé (#5) Protecteur Sans Égal (#6) Démon Libéré (#7) Le club des éternels célibataires Séduisant (#1) Attirant (#2) Envoûtant (#3) Torride (#4) Attrayant (#5) Passionné (#6) Hors d'Olympe Une Touche de Grec (#1) Un Parfum de Grec (#2) Un Goût de Grec (#3) Un Souffle de Grec (#4) Les Vampires de Venise Nouvelle 1 : Raphael & Isabella Nouvelle 2 : Dante & Viola Nouvelle 3 : Lorenzo & Bianca Nouvelle 4 : Nico & Oriana Nouvelle 5 : Marcello & Jane Nom de Code Stargate Ace en Fuite (#1) Fox en Vue (#2) Yankee dans le Vent (#3) Tiger à l'Affût (#4) Hawk en Chasse (#5) La Quête du Temps Changement de Sort (#1) Présage du Destin (#2) Thriller Témoin Oculaire La série des vampires Scanguards a tout pour plaire : coup de foudre, ennemis à amants, rencontre mignonne, instalove, héros alpha, compagnons de destin, garde du corps, bande de frères, demoiselle en détresse, femme en péril, la beauté et la bête, identité cachée

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Seitenzahl: 468

Veröffentlichungsjahr: 2025

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LES DÉSIRS D’OLIVER

VAMPIRES SCANGUARDS - TOME 7

TINA FOLSOM

TABLE DES MATIÈRES

Chapitre 1

Chapitre 2

Chapitre 3

Chapitre 4

Chapitre 5

Chapitre 6

Chapitre 7

Chapitre 8

Chapitre 9

Chapitre 10

Chapitre 11

Chapitre 12

Chapitre 13

Chapitre 14

Chapitre 15

Chapitre 16

Chapitre 17

Chapitre 18

Chapitre 19

Chapitre 20

Chapitre 21

Chapitre 22

Chapitre 23

Chapitre 24

Chapitre 25

Chapitre 26

Chapitre 27

Chapitre 28

Chapitre 29

Chapitre 30

Chapitre 31

Chapitre 32

Chapitre 33

Chapitre 34

Chapitre 35

Chapitre 36

Chapitre 37

Chapitre 38

Chapitre 39

Ordre de Lecture

Autres livres de Tina

À propos de l’auteur

RÉSUMÉ

Récemment transformé en vampire, Oliver, garde du corps employé chez Scanguards, éprouve des difficultés à contrôler sa soif de sang. Chaque nuit se traduit par une lutte contre la tentation mais, lorsqu’Ursula, la beauté asiatique, lui tombe littéralement dans les bras, il craint de perdre la bataille face à ses démons intérieurs et donc, de succomber à son désir d’hémoglobine.

Réduite à l’esclavage par des vampires pour la singularité de son sang, Ursula vient juste d’échapper à ses ravisseurs. Lorsqu’un bel étranger vient à sa rescousse, elle réalise qu’il est également de leur espèce. Il prétend vouloir l’aider, mais peut-elle faire confiance à un vampire qui convoite, non seulement son corps, mais également le liquide qui coule dans ses veines ?

Sa promesse de sauver les prostituées dont le sang présente les mêmes spécificités que le sien la contraint à s'allier à Oliver et à ses collègues de Scanguards. Son choix la mènera-t-il à son salut ou à sa perte ?

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© 2015 Tina Folsom

Scanguards est une marque déposée.

1

Il était en proie à son désir de sang. Il combattait cette envie irrépressible qui le contrôlait, ce besoin qui le faisait trembler comme un drogué en état de manque. Il n’avait jamais imaginé que cela aurait été si pénible, qu’il aurait été si difficile d’y résister. Pourtant, lorsqu’il était éveillé, la seule pensée du sang le consumait à chaque minute. Et même durant son sommeil, il ne rêvait qu’à des veines palpitantes, à du sang chaud toujours empreint de la force vitale de l’humain et à ses canines enfoncées dans le cou d’un être vivant. Mais le pire de tout, c’était qu’il rêvait du pouvoir que cela lui conférait, le pouvoir sur la vie et sur la mort.

Oliver se secoua violemment, afin de se débarrasser de ces pensées. Mais, comme la plupart des autres nuits, il fut incapable de se délivrer de cette envie, de cet insatiable appétit. Quinn, son père créateur, lui avait dit que cela s’atténuerait avec le temps mais, bien qu’il eût été transformé deux mois auparavant, il se sentait tout aussi avide de sang frais que lors de la première nuit suivant sa renaissance.

Tout en se faufilant dans son long manteau noir, il fourra un mouchoir propre dans sa poche et jeta un œil par-dessus son épaule. Il n’avait jamais vécu aussi confortablement que maintenant. Et ceci, il le devait à son père créateur. Après avoir fait l’acquisition d’une grande maison sur Russian Hill, un quartier de San Francisco qui empestait le vieil argent, Quinn et son épouse, Rose, lui avaient demandé d’emménager avec eux.

S’il avait eu son mot à dire, il aurait choisi le jeune et dynamique secteur au sud de Market Street. Au cours des deux derniers mois, ce quartier était devenu son terrain de chasse. Lorsqu’il voulait se nourrir, il y recherchait une victime opportune parmi les fêtards. Ou encore dans la Mission. Mais, souvent, il n’avait même pas besoin de se déplacer aussi loin.

À ces occasions, lorsqu’il laissait sa soif s’intensifier, lorsqu’il retardait le moment de se nourrir pour prouver qu’il était plus fort que l’ennemi invisible qui se trouvait en lui, il se limitait à faire quelques pas devant la porte d’entrée avant d’attaquer un résident peu soupçonneux.

Il avait fait de son mieux pour cacher son affliction aux yeux de tous, mais ils étaient au courant. À chaque fois qu’un de ses amis ou collègues le regardait, il pouvait le voir dans ses yeux : il pensait qu’il ne tentait même pas de résister à ce besoin irrépressible de puiser le sang à même l’humain. Il pensait qu’il empruntait un itinéraire facile, alors qu’en vérité, il luttait chaque nuit contre lui-même. Personne ne distinguait cette turbulente tempête qui faisait rage en lui, les batailles féroces qu’il se livrait.

Personne ne le voyait perdre ces batailles et céder à la demande implacable du diable en lui. Lorsque cela se produisait, il était seul. Perdu. Désorienté.

Sachant qu’il ne pourrait postposer plus longuement la chasse, Oliver descendit l’escalier de la vieille demeure edwardienne à grandes enjambées. En dépit de son âge, la maison n’était pas démodée. Quinn et Rose s’étaient attelés à la pourvoir tant de meubles d’époque que de meubles contemporains et l’avaient transformée en un endroit chaleureux et accueillant. Un vrai foyer. Quelque chose qu’il n’avait jamais possédé auparavant.

À présent, rien qu’à penser qu’il agissait contre les souhaits de son créateur, il se sentait ingrat. Quinn lui avait procuré tout ce qu’il avait bien pu désirer : une maison sûre, le soutien émotionnel, une famille. Après sa transformation, il avait changé d’activité au sein de Scanguards, société pour laquelle il avait travaillé en tant qu’assistant personnel du propriétaire pendant plusieurs années. Et ce changement lui profitait : quoiqu’il eût adoré travailler directement au service de Samson, le puissant vampire empreint de moralité qui avait fait de Scanguards une compagnie chargée de la sécurité à échelle nationale, Oliver préférait son nouveau job de garde du corps.

Même s’il avait déjà suivi cette formation au sein de la compagnie lorsqu’il était encore humain, il avait presque dû tout recommencer car, en tant que vampire, il avait été placé dans une unité totalement différente, laquelle était en charge des missions les plus dangereuses. Il s’y épanouissait, en aimait chaque seconde. Ce qui rendait sa culpabilité encore plus dure à supporter. Comment pourrait-il jamais devenir un aussi bon garde du corps que ses collègues s’il ne pouvait même pas contrôler ses propres envies ? Comment pourrait-il battre un ennemi s’il ne pouvait même pas maîtriser le démon qui le contrôlait de l’intérieur ?

Il se dégoûtait. Il bifurqua au pied de l’escalier et observa longuement le couloir qui menait à la cuisine. Là, un garde-manger rempli de sang en bouteille l’y attendait. Chaque groupe sanguin imaginable y était stocké, même le plus cher d’entre eux de par son extraordinaire douceur : le 0 négatif. Il serait si aisé d’entrer dans la cuisine, d’ouvrir le placard et de prendre une bouteille de ce sang offert que Scanguards se procurait par l’intermédiaire d’une société factice de fournitures médicales créée par Samson, des années auparavant. Si facile de simplement dévisser le bouchon et d’en prendre une gorgée. Mais la perspective de se gaver du groupe sanguin le plus savoureux ne parvenait même pas à réprimer son irrésistible envie de chasser.

Il préférait plutôt enfoncer ses canines dans le cou d’un sans-abri, boire du sang qui avait un goût aussi putride que l’odeur de cette personne, car tout ceci n’avait rien à voir avec le goût du sang, mais bien avec la sensation que cela lui procurait. Il se sentait plus fort, plus puissant, invincible. De toute sa vie, il ne s’était jamais mieux senti qu’après s’être nourri à même une personne vivante. Car le sang qui provenait directement de la veine était toujours empreint de la force vitale de l’humain, le rendant, dès lors, plus puissant. Il agissait comme une drogue sur lui, le défonçait incroyablement plus que tout ce qu’il avait pu expérimenter par le passé, lorsqu’en tant qu’humain, il avait goûté aux stupéfiants. À présent, le sang provenant directement d’un humain en vie était sa drogue. Une drogue dangereuse dont il devrait se tenir à distance.

Il n’en connaissait que trop bien les dangers : dans sa vie antérieure, il avait pris cette mauvaise pente mais, grâce à Samson, il avait rebroussé chemin et était sorti de cet enfer vers lequel il se dirigeait. Il avait conquis les démons du passé. Et il était déterminé à le refaire. Mais, cette fois, cela semblait plus difficile.

Abandonner les sensations qui submergeaient son corps lorsqu’il se nourrissait d’un humain se révélait un exploit impossible. N’était-ce pas ce que cela signifiait d’être un vampire ? Après tout, il se nourrissait pour survivre. Avant lui, des générations de vampires avaient fait de même. Avaient-ils également dû lutter contre eux-mêmes, chaque nuit, avant de sortir chasser du sang frais ?

Car chaque nuit, de nombreux vampires se sustentaient encore à la source. La plupart des hommes au sein de Scanguards semblaient faire exception, mais cela voulait-il dire que c’était mal de sa part de vouloir quelque chose de différent ?

— Dieu, pourquoi ? jura-t-il dans sa barbe, sachant que, pour ce soir, il avait perdu la bataille.

Il fonçait vers la porte d’entrée lorsque, soudain, il entendit des pas en provenance du salon.

— Tu sors ? trancha la voix de Blake dans le silence de la maison.

Conscient que ses yeux avaient déjà viré au rouge, signe qu’il était sur le point de perdre le contrôle, Oliver ne se retourna même pas pour lui faire face, même lorsque Blake fit un pas dans le couloir. Il n’était absolument pas d’humeur à discuter avec son soi-disant demi-frère.

— À quoi ça ressemble, selon toi ?

— Regarde-moi ! le commanda Blake.

— Ne pense pas que tu es subitement devenu mon gardien, parce que Quinn et Rose t’ont demandé de garder un œil sur moi.

Les deux tourtereaux étaient partis en lune de miel tardive et s’étaient rendus en Angleterre, au vieux château de Quinn. Mais, malheureusement, ils s’étaient assurés que Blake demeurât là.

— Je ne suis pas aveugle, Oliver. Je peux voir ce qui se passe.

Oliver fit un autre pas en direction de la porte.

— Ne te mêle pas de choses que tu ne comprends pas !

— Tu penses que je ne comprends pas ? Bon sang, je traîne avec des vampires depuis assez longtemps pour savoir ce qui se passe.

Il sentit Blake s’approcher et se tendit. Une seconde plus tard, Blake posa une main sur son épaule. Oliver fit volte-face et, au quart de seconde, claqua Blake contre le mur le plus proche et l’y maintint.

— Tu penses que deux mois avec nous font de toi un expert ?

Oliver devait le lui concéder : même s’il pouvait écraser Blake à mains nues, le jeune humain ne se dérobait pas.

— Non, mais nous vivons ici en famille. Je serais totalement stupide si je ne voyais pas ce que tu es en train de subir.

Oliver grogna férocement.

— Je t’aimais mieux quand tu étais stupide et naïf. Avant que tu ne découvres qui nous sommes.

Indigné, Blake se vexa.

— Je n’ai jamais été stupide et naïf ! Alors, enlève tes sales pattes, car je sais que tu ne peux pas me faire de mal.

— Vraiment ? le nargua-t-il, quoiqu’il sût que Blake avait raison.

Quinn aurait sa peau. Cela ne signifiait pas pour autant qu’il dût en avertir Blake.

— Quinn te punira.

— Tu penses que tu es plus proche de lui que moi ? Tu penses que, s’il le fallait vraiment, il prendrait ton parti ?

Pour dire la vérité, Oliver doutait que Quinn prît parti, tout court. Durant cette courte période durant laquelle ils avaient vécu tous les quatre, Quinn avait essayé d’être impartial et de ne pas interférer dans les discussions qu’il avait fréquemment avec Blake. Même Rose les avait ignorées, stipulant qu’il y avait juste un trop plein de testostérone dans la maison et que, dès lors, les querelles étaient inévitables.

Blake plissa les yeux.

— Je suis sa chair et son sang. Tout comme de Rose.

Oliver laissa échapper un rire amer.

— Son sang ne coule pratiquement plus dans tes veines. Tu es son putain d’arrière-petit-fils au quatrième degré ! Son sang est déjà si dilué que je ne peux même plus le sentir sur toi. Mais le sang qui coule dans les miennes, celui qui a fait de moi ce que je suis, il est encore puissant. Et il le sait. Je suis son fils—

Blake se mit soudain à rire sous cape.

— Putain ! En fait, tu es en compétition avec moi.

Oliver recula, relâchant sa prise sur Blake.

— Ce n’est pas de la compétition, quand on est pratiquement certain de l’identité du vainqueur.

— Je n’en serais pas si sûr, petit frère. Bien que tu sois un vampire, ne te crois pas plus fort que moi.

Oliver ne put s’empêcher de remettre un peu Blake à sa place avant que ce dernier ne devînt trop sûr de lui.

— Tu ne parlais pas comme ça quand je t’ai mordu.

Instantanément, le visage de Blake rougit aussi fort qu’une tomate mûre, et sa poitrine se gonfla. Oui, Oliver pouvait toujours faire démarrer cet idiot au quart de tour.

Avec plus de force qu’il ne s’en était cru capable, Blake le repoussa et se libéra. Il pressa alors son index sur la poitrine d’Oliver.

— Je te le promets, un de ces jours, tu paieras pour ça. Tes putains de canines ne s’approcheront plus jamais de moi, ou tu seras un putain d’homme mort.

Blake bougea la main cachée derrière son dos, mais Oliver l’agrippa et saisit ce que son demi-frère avait placé à l’arrière de sa ceinture.

Inspectant l’objet incriminé, il secoua la tête et agita ensuite, de manière significative, le pieu qu’il venait de subtiliser à Blake.

— Et tu n’as toujours pas compris que j’étais plus rapide que toi.

Il rangea alors le pieu dans la poche de son manteau et s’adressa de nouveau à Blake.

— Tu devrais faire attention à ce que tu amènes dans cette maison. Si Quinn et Rose découvrent jamais que tu es armé, ils auront les boules.

— Ils détiennent également des pieux dans la maison. Et d’autres armes qui peuvent tuer des vampires, se défendit Blake.

— Oui, mais ces armes sont sous clé. Comme il se doit.

— Hypocrite !

Oliver ne prit pas ombrage, ce mot n’ayant aucun effet sur lui.

— Je suggère que tu retournes à tes occupations et que tu me laisses.

— Ou alors ? le défia son demi-frère en soulevant le menton.

Stupide !

Si seulement Blake savait à quel point il était en train de le provoquer. Si seulement cet humain savait à quel point il était prêt à craquer.

— J’ai très faim, répondit Oliver, les dents serrées. Très faim. Et si tu continues à être insolent, je vais oublier ma promesse à Quinn et me nourrirai juste ici. Une fois que j’en aurai fini avec toi, tu ne t’en souviendras même pas.

Blake s’écarta d’un pas, lequel fit écho dans le couloir vide.

— Tu n’oserais pas !

Mais en dépit des mots, ses yeux démontrèrent qu’il n’était pas totalement convaincu de son affirmation. Le doute s’était immiscé dans son esprit.

— Vraiment ?

Tel qu’il se sentait en ce moment précis, Oliver aurait enfoncé ses canines dans n’importe quoi doté de battements de cœur. La stupide tentative de Blake de l’empêcher de sortir n’avait que trop exacerbé son besoin. La faim montait en flèche. Lorsque celle-ci fut à son paroxysme, Oliver sentit une douleur aux gencives. Il ne put empêcher ses canines de descendre et d’atteindre leur longueur maximale en un clin d’œil.

Un grognement féroce lui déchira la gorge.

Ses mains se transformèrent en griffes, le bout des doigts à présent pourvu de barbillons pointus capables de déchirer la gorge d’un humain en un rien de temps.

Blake recula un peu plus.

— Bordel !

— Cours, chuchota Oliver.

Mais il se destinait ce mot plutôt qu’à Blake.

— Cours, répéta-t-il.

Son corps finit par réagir. Oliver pivota sur les talons et se précipita vers la porte qui menait au garage. Il tomba plus qu’il ne courut dans les escaliers et atteignit son mini-van, tandis qu’une autre vague de douleur liée à la faim le déchira dans tout son corps.

Merde !

Il devait partir d’ici. Loin, ou il ferait du mal à Blake, et il savait qu’il ne pouvait se permettre de tomber si bas. Quoique Blake et lui ne pussent s’empêcher de se chamailler à la moindre occasion, ils formaient une famille. Et blesser Blake signifierait décevoir Quinn. En dépit de ce que tout le monde pensait quant à son incapacité à contrôler sa faim, perdre le soutien de Quinn était une chose qu’il ne souhaitait pas.

Oliver sauta dans la voiture. Lorsque le moteur brailla, il sortit en trombe du garage et dévala la rue.

Les jointures de ses doigts devinrent toutes blanches tant il serrait le volant. À nouveau, il s’en était fallu de peu. Une de ces nuits, il ne pourrait s’éloigner du bord du gouffre et accomplirait l’inévitable : tuer quelqu’un.

2

Ursula entendit l’écho émis par des pas décidés dans le couloir et sut ce que cela signifiait. Le garde venait la chercher. À chaque fois, elle le redoutait. Après trois longues années en captivité, on aurait pu penser qu’elle y était habituée mais, à chaque fois, le dégoût qu’elle éprouvait pour ce qu’ils lui faisaient endurer augmentait. Tout comme la peur, la peur d’en arriver à abandonner le combat, de finalement succomber et se perdre, de devenir un simple récipient uniquement destiné à assouvir leurs besoins.

Deux fois par nuit, parfois trois, ils faisaient appel à elle. Elle s’affaiblissait, elle pouvait le sentir. Non seulement physiquement, mais également mentalement. Et elle n’était pas la seule. Les autres filles se trouvaient dans la même situation. Elles étaient toutes chinoises, comme elle. Certaines étaient jeunes, d’autres plus âgées. Cela ne semblait pas revêtir la moindre importance à leurs yeux, car ce n’était pas la beauté des femmes qu’ils convoitaient.

Elle avait à peine vingt et un ans lorsqu’ils l’avaient capturée à New York, en fin de soirée, après qu’elle eût assisté à une conférence à l’Université. C’était son dernier semestre, mais elle ne le finirait jamais. Elle avait tellement redouté les examens finaux tant elle était désireuse de satisfaire ses parents ! Si seulement, en ce moment, elle pouvait n’avoir à faire face qu’à ce genre de petits problèmes ! Ils semblaient à présent si insignifiants, si faciles à résoudre.

En se levant, elle saisit le cadre du lit et le poussa davantage contre le mur, cachant ainsi ce qu’elle avait sculpté dans l’apparente poutre en bois située derrière celui-ci : le nom et l’adresse de ses parents ainsi qu’un message indiquant qu’elle était toujours en vie. Chaque jour auquel elle survivait, elle ajoutait une date à la liste, ses inscriptions recouvrant à présent pratiquement toute la surface cachée par la tête de lit.

Elle n’avait commencé à graver le bois que dans ce bâtiment, lorsqu’ils l’y avaient emmenée trois mois plus tôt, selon ses propres calculs. Dans sa précédente prison, elle n’avait pas eu la moindre possibilité d’agir de la sorte, les murs étant faits de béton. Elle n’avait aucune idée de la raison pour laquelle ils l’avaient déplacée à cet endroit. Mais, une nuit, ils avaient simplement chargé tout le monde et toutes leurs affaires dans plusieurs camions et avaient déserté le building depuis lequel ils avaient dirigé leur commerce de sang.

Lorsque la clé tourna dans la serrure, Ursula regarda la porte. Elle s’ouvrit, laissant entrevoir le garde qui était venu pour la conduire dans une pièce où le prochain client salivait déjà. Elle reconnut Dirk et, de tous les gardes, c’était celui qu’elle détestait le plus. Il prenait un plaisir évident à la voir souffrir, à la voir se faire humilier, nuit après nuit.

Il y avait toujours quatre gardes en service pour les treize et quelques prisonnières, si elle avait calculé correctement, quoiqu’il y eût davantage de vampires dans les locaux. Mais elle ne pouvait être sûre du nombre de filles qu’elle avait comptées ; récemment, ils en avaient ramené deux nouvelles, et elle n’avait plus vu une certaine Lanfen depuis un moment. Était-elle morte ? Avaient-ils finalement trop abusé de son corps fragile ? Ursula frissonna à cette pensée. Non, elle ne pouvait pas abandonner. Elle devait continuer à se battre et espérer qu’on vînt à sa rescousse, d’une manière ou d’une autre.

— À ton tour, ordonna Dirk en soulignant ses paroles d’un mouvement de la tête.

Comme toujours, elle obéit, posant un pied devant l’autre, sachant qu’il emploierait tous les moyens nécessaires pour qu’elle s’y conformât. Et des moyens, il en débordait. Elle avait fait les frais de chacun d’entre eux et pouvait dire, avec certitude, qu’elle n’aimait aucune de ses méthodes.

Elle le sentit bouger lorsque, la tête haute, elle passa à côté de lui. La bouche du gardien s’approcha alors de son oreille.

— C’est toi que je préfère regarder. Tu as plus d’esprit que toutes les autres rassemblées. Ça rend tout cela tellement plus passionnant. T’ai-je jamais dit à quel point ça m’excite ?

De dégoût, un frisson glacial courut le long de sa colonne vertébrale.

— Je dois toujours me masturber juste après, ajouta-t-il.

Ursula ferma les yeux et refoula la bile qui lui montait en réaction à ces paroles. Dirk savait qu’elle n’avait aucune emprise sur tout cela, tout comme toutes les autres femmes qu’ils avaient kidnappées. Alors, comment osait-il se moquer d’elle à ce propos ?

Lorsqu’elle se retourna pour le regarder, il se mit à rire.

— Oh, j’ai oublié, c’est vrai, tu es incapable de prendre ton pied, n’est-ce pas ? Malgré toute cette excitation que nous t’autorisons à ressentir, tu n’arriveras jamais à atteindre l’orgasme. Quelle pitié !

Sans réfléchir, elle lui cracha au visage.

— Espèce de salaud !

Lentement, il essuya le crachat de son visage, lui lançant un regard furieux avec ses yeux rouges. Il ne fallut qu’une seconde pour que ses canines descendissent. Le revers de sa main vint alors la frapper contre la joue, fouettant si vivement sa tête, qu’elle craignit qu’elle ne fît arrachée de ses épaules.

La douleur l’envahit, une sensation qu’elle avait appris à tolérer dans une plus large mesure qu’elle ne l’avait cru possible. Quoiqu’il la défiât toujours du regard, elle était consciente qu’il ne lui ferait plus aucun mal. Elle était trop précieuse à leurs yeux. Il ne pouvait pas tuer la poule aux œufs d’or. Son chef le poignarderait sans se poser de question.

Dirk se maintint sous contrôle avec la dernière once de force qu’il possédait. Elle pouvait le voir dans la lueur de ses iris rouges et à la manière dont les muscles de son cou enflaient. Un court instant, un sentiment de fierté la sublima. Elle avait touché un point sensible.

1-0 pour l’humain.

— Fais attention, Ursula, un jour, tu paieras pour ça.

— Pas ce soir, vampire.

Car ce soir, un client l’attendait. Et il voulait sa marchandise intacte. Après tout, il la payait cher.

Ursula avait surpris les gardes en train de parler des sommes d’argent qui étaient échangées, et elle en avait été choquée. En même temps, cela l’avait conscientisée quant à la valeur de chaque femme qu’ils retenaient. Ils ne pouvaient se permettre d’en perdre une seule. Cela lui conférait un certain atout.

Ursula se retourna et passa devant lui, s’abstenant de se toucher la joue pour apaiser la douleur. Elle ne lui donnerait pas la satisfaction de constater que sa chair piquait toujours sous l’effet de cette violente gifle qu’il lui avait assénée. Elle avait trop de fierté pour cela. Oui, même après trois ans, cette vertu l’habitait encore. C’était cette fierté qui lui permettait de continuer, qui alimentait son mépris.

— La chambre bleue, ordonna Dirk, derrière elle.

Elle bifurqua et se dirigea vers la chambre du bout. Elle passa devant une petite fenêtre qui aurait pu procurer un peu de lumière durant la journée si elle n’avait pas été peinte en noir de l’intérieur. Dès qu’elle entra dans cette pièce si familière, elle autorisa ses yeux à vagabonder. C’était une chambre de coin. Il y avait deux fenêtres : l’une surplombant la route principale et l’autre donnant sur l’allée latérale qui se terminait en cul-de-sac. Toutes deux étaient petites et étaient recouvertes de lourdes tentures de velours.

Contrairement à la chambre dégarnie dans laquelle elle vivait, cette pièce était plutôt somptueusement équipée. Deux grands sofas recouverts du même velours que les tentures dominaient la pièce. Un petit lavabo était caché dans un coin, agrémenté d’une pile de draps de bain et de savons. Une étagère occupant un des murs intérieurs proposait un système multimédia, au cas où les clients souhaiteraient se distraire. Beaucoup d’entre eux ne le souhaitaient pas.

Lorsqu’elle entendit la porte se refermer derrière elle et la clé tourner dans la serrure, elle regarda, à contrecœur, l’homme assis sur un des canapés.

— Monsieur, dit Dirk, derrière elle. Laissez-moi vous présenter votre dîner et votre divertissement de ce soir.

Le garde la poussa alors en direction de l’autre vampire et lui murmura quelques mots.

— Sois gentille, Ursula. Tu sais que j’observe.

Comme si elle pouvait jamais l’oublier.

De la paume de la main, l’étranger tapota la place à côté de lui.

— Puisque c’est votre première fois, je voudrais réitérer les règles, interrompit Dirk.

Le client haussa un sourcil, mais ne dit rien. Il continua simplement à laisser courir ses yeux sur le corps d’Ursula. Les canines de l’étranger pointaient entre ses lèvres, et Ursula comprit qu’elles étaient allongées au maximum. Il tentait de se comporter poliment mais, sous ce calme apparent, Ursula pouvait ressentir son impatience, son désir pour ce festin spécial dont seuls quelques-uns étaient au courant.

— Vous pouvez choisir l’endroit d’où vous désirez vous abreuver d’elle. Mais vous ne pouvez pas avoir de relations sexuelles avec elle.

— Mais—

Dirk coupa immédiatement court à la protestation du client.

— J’ai dit : pas de sexe. Vous êtes ici pour goûter à son sang, pas à sa chatte.

Après lui avoir lancé un regard sévère, Dirk poursuivit.

— Vous vous arrêterez quand je vous le dirai. Aucune exception. Son sang est efficace. Si vous en prenez trop, nul ne peut dire ce qui se produira.

Le vampire plissa les yeux.

— Que voulez-vous dire ?

Dirk fit un pas vers lui.

— Je veux dire que vous délirerez si vous en prenez trop. Comme une overdose. Compris ?

Le client hocha la tête en guise de réponse.

— Avance, ordonna Dirk en lançant un regard oblique à Ursula.

Celle -ci s’arma de courage en vue de ce qui allait se passer et fit quelques pas en direction du sofa avant de s’arrêter devant l’homme. Des sangsues, comme elle les nommait. Car c’était la raison pour laquelle ils venaient. Pour se nourrir des filles emprisonnées dans ce bled perdu.

Soulevant les paupières, l’étrange vampire la regarda dans les yeux. Il y avait une telle froideur dans son regard qu’Ursula en frémit. Mais elle réprima ce frisson qui lui parcourait la colonne vertébrale. Cependant, elle ne put prévenir la chair de poule sur sa peau. Un sourire lascif recourba les lèvres de l’homme lorsqu’il le remarqua.

— Je prends le cou, dit-il.

Bien vu ! La plupart d’entre eux choisissaient le cou. Ils aimaient enfoncer leurs canines dans son cou tout en l’attirant contre leur corps abjectes, pressant leur membre durci contre elle, tels des animaux en rut. Peu d’entre eux s’abreuvaient au poignet, et ceux qui le faisaient se déplaçaient finalement sur d’autres parties de son corps, perdant le contrôle de leurs agissements lorsque le sang les dopait.

C’était la raison pour laquelle un garde demeurait constamment dans la chambre, afin de forcer la sangsue à déloger ses canines s’il devenait évident que les choses n’étaient plus sous contrôle. Les gardes étaient là pour la sécurité des filles mais, dans le cas de Dirk, Ursula savait qu’il prenait un certain plaisir à l’observer.

Une ferme traction sur sa main lui fit perdre l’équilibre, et elle atterrit sur le canapé. Elle n’eut pas le temps de se redresser que la sangsue était déjà sur elle, la maintenant dans cette position, tandis que le sofa l’accueillait en retour.

Du coin de l’œil, elle remarqua que Dirk avait pris place sur le divan d’en face, les jambes grandes écartées, une main reposant déjà sur son entrejambe. De l’autre main, il décrocha le talkie-walkie de sa ceinture et le déposa à côté de lui, sur le canapé. Apparemment, il allait commencer par se caresser pendant le show qu’il était venu voir pour, ensuite, se masturber et jouir.

Dégoûtée, elle ferma les yeux et serra les mâchoires. Elle surmonterait ceci, exactement comme toutes les autres nuits. Elle devait simplement faire abstraction de tout ce qui se trouvait autour d’elle. Penser à un meilleur endroit, un endroit plus sûr.

Une main rêche balaya ses longs cheveux noirs de son cou et, d’un geste brusque, bascula sa tête sur le côté. Le souffle chaud du client envahit ses sens, tandis que la tête se rapprochait et que la bouche entrait en contact avec sa peau délicate. Instinctivement, elle frissonna. Les lèvres du vampire laissèrent échapper un grognement, juste avant qu’il ne perçât la peau en enfonçant ses canines en elle.

La douleur n’était que momentanée. L’humiliation, par contre, durait plus longtemps. Ce n’était que le commencement. Tandis qu’il se nourrissait d’elle, buvant avidement son sang, l’engloutissant comme un homme qui venait juste de courir un marathon, elle en sentit à nouveau les répercussions dans tout son corps. Lentement, elles démarraient de son cou pour descendre vers son torse et ramper vers ses seins. Ses mamelons entraient déjà en friction avec son tee-shirt, et la tirette de la veste en cuir du vampire s’enfonçait péniblement dans sa chair sensible. Lorsque la sensation de picotement atteignit ses seins et se mêla à la douleur, une flamme brûlante la transperça.

Elle cria, incapable de garder plus longuement sa mâchoire serrée. La sangsue y répondit par un grognement avant de laisser une main s’égarer sur la partie supérieure de son corps, la caressant, l’empoignant, la pressant. Elle savait que Dirk n’arrêterait pas le client tant que celui-ci n’essayait pas de fourrer son engin en elle, car il prenait plaisir à observer son malaise. Presque comme s’il pouvait voir la honte qui la submergeait.

La honte, parce que les agissements du vampire l’excitaient.

Elle savait que ce n’était pas naturel, simplement un effet secondaire de l’alimentation. Et il n’y avait rien qu’elle pût y faire. Elle était néanmoins honteuse de la manière dont son corps réagissait. De la manière dont son bassin s’inclinait vers lui, dont son sexe se frottait contre le membre en érection, dont ses seins cherchaient les dents de la fermeture éclair de la veste pour y trouver le soulagement. Le soulagement que ses ravisseurs lui avaient refusé durant trois années.

À chaque traction sur sa veine, davantage de sensations inondaient son corps, déclenchant en elle un besoin qui prenait des proportions phénoménales. C’était comme ça, à chaque fois. Cela la faisait frémir sous les mains de chaque sangsue qu’elle rencontrait, se frotter contre les étrangers qui violaient son corps de cette manière, qui lui dérobaient ce qu’elle n’était pas disposée à offrir.

Mais, même si elle avait l’habitude de lutter, tout comme elle le faisait à présent, en le cognant des poings, tandis que le reste de son corps se pressait contre lui dans un but totalement différent, elle sut qu’elle ne gagnerait pas la bataille de cette nuit. Les vampires étaient toujours plus forts ; leurs corps étaient plus durs, plus lourds, et l’emprise qu’ils avaient sur elle était inébranlable. Leurs canines se logeaient si profondément dans son cou qu’elle n’osait tourner la tête de peur d’être égorgée.

Alors même que les larmes jaillissaient dans ses yeux, elle haleta comme une chienne en chaleur, ses gémissements se mélangeant à ceux du vampire occupé à se nourrir d’elle.

Cher Dieu, faites que ça se termine, pria-t-elle.

Mais, tout comme les autres nuits, personne ne vint à sa rescousse. À l’instar des autres filles qui partageaient son sort. Même maintenant, elle pouvait entendre des bruits similaires provenant de la chambre d’à côté, quoiqu’ils fussent, apparemment, plus bruyants et plus violents. Elle se sentait l’âme sœur de ces autres femmes, car elle savait ce qu’elles traversaient, et son cœur pleurait pour elles. Parce qu’il était incapable de pleurer pour elle-même. Non, elle ne pouvait se permettre de s’apitoyer sur elle-même, ou elle perdrait sa résolution et sa force.

Les mains de la sangsue devinrent moins déterminées, déviant de leur but, tels les mouvements d’un ivrogne qui, finalement, perdaient toute coordination. Bientôt, il lâcherait prise. Bientôt, son calvaire serait terminé.

Un crépitement dans le talkie-walkie perça son état de conscience. Une voix s’en échappa.

— Chambre rouge, j’ai besoin d’aide. Maintenant ! Le client pète un câble sur la fille ! Vite, des renforts !

Dirk sauta du canapé en jurant.

— Merde ! J’arrive.

Il courut vers la porte et la déverrouilla, lorsqu’un cri se fit entendre à l’autre bout du couloir, là où se trouvait la chambre rouge.

— Bordel !

La porte se referma alors derrière lui. Il était parti.

Ursula attendit quelques secondes et écouta attentivement. Mais aucun autre bruit ne provint de derrière la porte ; Dirk ne l’avait pas verrouillée en sortant.

Était-ce sa chance ?

3

Ursula tenta de se mouvoir le plus prudemment possible sous le grand vampire et, par la même occasion, examina l’ampleur de ses réactions. Elle lui souleva un bras et remarqua la manière dont il se laissait volontairement guider par elle.

— Oh, ouais, gémit-elle. Encore, prends-en encore.

Il devait encore lui prendre plus de sang si elle voulait le terrasser. Elle avait vu les effets de son sang sur plusieurs autres sangsues. Lorsque le garde n’intervenait pas à temps ou, plus fréquemment, lorsque le vampire était nouveau et inaccoutumé à son sang, il s’évanouissait tel un ivrogne. Ursula espéra faire succomber sa victime de la même manière.

Mais ce devait être rapide. Dirk ne demeurerait pas au loin pour toujours et, quoi qu’il se passât dans la chambre rouge, cela finirait par se résoudre. Le garde reviendrait alors, et l’occasion de s’échapper disparaîtrait en un éclair.

S’évertuant à inviter le vampire à puiser davantage de son sang, elle pressa son bassin contre lui et, d’une main, lui agrippa le derrière et le serra fort. Elle connaissait, à présent, suffisamment les vampires pour savoir que leur libido était intimement liée à leur instinct alimentaire. Plus elle l’exciterait, plus il s’acharnerait sur sa veine, et plus il boirait de sang. Elle pourrait ainsi le droguer.

Elle n’avait aucune idée de la raison pour laquelle son sang et celui des autres filles provoquaient cela. Et, en ce moment précis, elle s’en moquait. Dans l’immédiat, la rapidité avec laquelle elle pourrait le neutraliser était tout ce qui comptait à ses yeux.

— C’est bien, encore ! l’encouragea-t-elle.

Il gémit en guise de réponse et souleva une main, comme s’il voulait lui caresser le visage. En lieu et place, celle-ci tomba mollement sur le coussin du canapé.

Tout le corps d’Ursula fut ensuite ébranlé par un autre cri perçant en provenance du fond du couloir. Des pas se firent ensuite entendre. Non !

S’il vous plaît, faites que ce ne soit pas Dirk !

Elle retint sa respiration mais, à son grand soulagement, les pas dépassèrent sa porte et s’affaiblirent à nouveau. C’était maintenant ou jamais. Dès qu’un autre garde accourrait à l’aide dans la chambre rouge, Dirk ne serait plus nécessaire et s’en reviendrait.

Soudain, elle sentit le vampire se ramollir. Aussi prudemment que possible, elle lui attrapa la tête et l’éloigna calmement d’elle en prenant soin de ne pas se blesser avec les canines. Mais il n’était nullement nécessaire de s’inquiéter : les dents s’étaient déjà rétractées. Néanmoins, il s’était évanoui avant d’avoir pu lui lécher la plaie, laquelle continuait de saigner. S’il l’avait fait, sa salive aurait guéri la blessure en stoppant le saignement.

Ressentant déjà les effets de la perte de sang, elle fit appel au peu de force qu’il lui restait et fit rouler le corps sur le côté afin de se glisser sous lui. Hors d’haleine, elle se redressa sur son siège, mais n’eut pas le temps de reprendre sa respiration. Dirk serait là d’une seconde à l’autre.

Lorsqu’elle se releva, ses genoux cédèrent mais, par sa seule volonté, elle persévéra dans l’effort, une main pressée sur les incisions ensanglantées causées par les canines du vampire, l’autre étendue devant elle en vue de se conférer un certain équilibre. Sachant qu’il était impossible de s’évader par les deux fenêtres au risque de se briser le cou en sautant du quatrième étage, elle tituba jusqu’à la porte et l’ouvrit d’un coup sec.

Le couloir était vide. Après avoir refermé la porte derrière elle, elle se mit à courir dans le couloir, dans le sens opposé à celui qu’elle avait emprunté un peu plus tôt. Sortir depuis cet étage était la seule possibilité qui s’offrait à elle, car elle n’y parviendrait jamais depuis les étages inférieurs, lesquels semblaient accueillir la réception, de même que les quartiers des vampires qui dirigeaient cette opération.

Il y avait un escalier de secours. Elle l’avait remarqué, une nuit, lorsqu’un des vampires avait ouvert la fenêtre peinte en noir au bout du couloir, dans le tournant qui menait vers la droite. C’était sa seule chance.

Elle courut pour la rejoindre, trébuchant plusieurs fois sur le parcours. Elle essaya ensuite frénétiquement de soulever la partie inférieure de la fenêtre à guillotine, mais celle-ci ne bougea pas. Un sentiment de panique la submergea. L’avaient-ils clouée ? Elle tira à nouveau dessus, cette fois plus violemment. Son souffle l’abandonna, et elle laissa tomber la tête en avant.

Pourquoi ?Pourquoi ? pesta-t-elle intérieurement tout en claquant le poing contre le châssis.

Son regard atterrit alors sur le mécanisme en métal situé au-dessus de la fenêtre. Elle était verrouillée. C’était un de ces verrous vieux de plusieurs décennies qui maintenait simplement la fenêtre fermée au moyen d’un petit levier que l’on tournait d’un côté à l’autre : aucune clé n’était nécessaire.

Jetant un regard par-dessus son épaule, Ursula déverrouilla rapidement la fenêtre et la souleva. L’air frais de la nuit s’infiltra dans ce poisseux couloir, la faisant immédiatement frissonner. Son regard s’abattit sur la plate-forme métallique construite de l’autre côté de la petite fenêtre. L’escalier de secours y était accroché.

Elle se glissa hâtivement sous la fenêtre et posa les pieds sur la plate-forme afin de tester si celle-ci pouvait la supporter. Tandis que le métal ployait sous son poids, Ursula jeta un œil aux boulons qui la fixaient au bâtiment. Il faisait trop sombre pour en voir davantage, mais Ursula était prête à parier que le métal était rouillé.

Saisissant la balustrade, elle osa un premier pas hésitant, puis un autre. Elle s’arrêta alors au deuxième étage. L’échelle ne descendait pas plus bas. Paniquée, elle examina la plate-forme et distingua une armature métallique qui semblait être une échelle dont les différentes parties étaient assemblées. Elle la cogna du pied, mais rien ne bougea. L’échelle n’était-elle pas censée se déployer jusqu’au sol ?

Délicatement, elle posa un pied dessus, lestant davantage ce qui semblait être la marche inférieure. Sa main saisit la rambarde et, sous ses doigts, elle sentit un crochet sur lequel elle tira.

L’enfer se déchaîna. L’échelle se déploya immédiatement et provoqua un énorme bruit sourd, l’emportant avec elle. L’adrénaline courut dans ses veines durant la chute libre, laquelle stoppa net quelques secondes plus tard, tandis que son corps était projeté en avant. Une tige en métal se cassa et la coupa sur le haut du bras. La douleur irradiant tout son corps, elle claqua une main sur sa blessure pour essayer d’apaiser la douleur.

Mais, à présent, il n’y avait plus de temps à perdre. Les vampires devaient avoir entendu le bruit et, dès lors, commenceraient à investiguer.

À l’aveuglette, elle sortit de l’allée en courant et s’engagea dans la rue suivante. Elle ne savait pas où elle allait. Il faisait nuit lorsqu’on les avait emmenées dans cet endroit, elle et les filles. Le sombre camion qui les avait transportées comme du bétail était dépourvu de fenêtres et ne leur avait donc pas donné la moindre occasion de voir les environs. Elle ignorait même le nom de la ville dans laquelle elle se trouvait.

Passant devant un panneau désignant une société d’import/export, elle se précipita dans la rue suivante en courant aussi vite qu’elle le pouvait. Les rues étaient désertes, comme si le secteur n’était pas fréquenté par des humains. Quelque part, au loin, elle entendit des voitures, mais ne vit toujours personne.

Tout en courant, elle tenta de s’imprégner des environs et de mémoriser les plaques des rues et des buildings qu’elle dépassait.

Peinant à charrier suffisamment d'oxygène, ses poumons s’asphyxiaient, son bras lui faisait mal, et elle pouvait toujours sentir le sang couler dans son cou, goutte à goutte. Si elle ne refermait pas rapidement ces blessures, elle perdrait tout son sang. Elle devait trouver de l’aide. En même temps, il lui incombait de s’enfuir le plus loin possible de ses ravisseurs, car ils étaient de fins limiers. Ils percevraient l’odeur de son sang et seraient capables de la pister.

Elle tourna dans la rue suivante sans ralentir sa folle course. Elle était à bout de force et le savait. Mais elle n’abandonnerait pas. Elle était arrivée jusqu’ici, et la liberté se trouvait juste au prochain tournant. Elle ne pouvait la laisser glisser entre ses doigts. Alors qu’elle en était si proche.

Devant ses yeux, tout devint flou, et elle réalisa immédiatement que la perte de sang était en train de la priver du reliquat de force qu’il lui restait. Elle trébucha, puis se rattrapa, ses doigts saisissant au passage quelque chose de doux. Du tissu épais. Ses doigts s’y agrippèrent et, à l’aide de ses mains, elle se redressa.

— C’est quoi ce bordel ? jura une voix masculine.

— Aidez-moi, le pria-t-elle. Ils sont après moi. Ils me poursuivent.

— Fous-moi la paix ! lui ordonna l’étranger en la maintenant à une distance d’une longueur de bras.

Elle souleva la tête et le regarda pour la première fois. Il était jeune, à peine plus vieux qu’elle. Également attrayant, si tant était qu’elle pût en juger dans l’état d’esprit très flou dans lequel elle se trouvait. Il avait les cheveux foncés et légèrement hérissés, les yeux perçants, les lèvres pleines et rouges.

En dépit de ses mots, il ne lui avait pas relâché les bras et la soutenait. À défaut de ce faire, les genoux de la jeune femme auraient cédé.

Le fixant dans le bleu éblouissant de ses yeux, elle le supplia à nouveau.

— Aide-moi, s’il te plaît. Je te donnerai tout ce que tu veux. Aide-moi juste à partir d’ici. Vers le prochain poste de police. S’il te plaît !

Elle avait besoin d’aide. Pas uniquement pour elle-même, mais également pour les autres filles. Elles s’étaient toutes promis d’envoyer du secours aux autres si l’une d’elles parvenait à s’échapper.

Pendant une fraction de seconde, il plissa le front, et les yeux, par la même occasion. Ses narines se dilatèrent.

— Que se passe-t-il ? 

— Ils me pourchassent. Tu dois m’aider.

Soudain, les mains du jeune homme lui serrèrent davantage le haut du bras, et la douleur provoquée par la blessure s’intensifia.

— Qui te pourchasse ? demanda-t-il.

Elle ne pouvait lui dire la vérité, car celle-ci était trop rocambolesque. Il ne la croirait pas et penserait qu’elle était une droguée complètement folle si elle lui parlait des vampires. Et pourtant, elle avait besoin de son aide.

— S’il te plaît, aide-moi ! Je ferai n’importe quoi.

Il la regarda intensément, ses yeux la transperçant comme s’il tentait de déterminer si elle était ivre ou folle, ou les deux.

— S’il te plaît. As-tu une voiture ?

Elle remarqua que ses yeux s’égaraient brièvement en direction d’un mini-van parqué au bord de la route.

— Pourquoi ?

— Parce que je dois partir d’ici. Ou ils me trouveront.

Nerveusement, elle lançait des regards par-dessus son épaule. Jusqu’à présent, les vampires ne l’avaient pas encore rattrapée, mais ils ne devaient pas être loin derrière. Elle remarqua également que cet homme était toujours le seul dans les parages. S’il ne l’aidait pas, elle n’y arriverait pas. Elle ne pouvait plus courir.

— Écoute, tes ennuis ne m’intéressent pas. J’ai les miens.

Il lui relâcha les bras et, si elle ne lui avait pas saisi les revers du manteau, elle serait tombée.

Il la regarda d’un air furieux.

— J’ai dit—

Le désespoir incita Ursula à prononcer des mots qu’elle ne se serait jamais crue capable de prononcer.

— Je coucherai avec toi si tu m’aides.

Il stoppa net son mouvement, laissant soudain ses yeux voyager sur le corps de la jeune femme, ses narines se dilatant une fois de plus. Effrayée à l’idée qu’il pût découvrir quelque chose qu’il n’aimait pas, elle enroula les bras autour de son cou et tira sa tête vers la sienne. Leurs lèvres se rencontrèrent un instant plus tard.

4

Oliver sentit les lèvres chaudes de cette étrange fille asiatique sur sa bouche. Tandis qu’elle l’embrassait, l’odeur de sang l’enveloppa. Était-il en train de délirer ? Forcément. Rien d’autre ne pouvait expliquer cette situation. Si tel n’était pas le cas, pourquoi une belle jeune femme se jetterait-elle sur lui en lui offrant de coucher avec lui en échange d’un tour en dehors de ce minable secteur ? Et pourquoi une si tentante odeur de sang émanerait-elle d’elle, alors qu’il savait qu’il s’était rassasié quelques minutes plus tôt ?

Sans y penser plus longuement, il prit la jeune fille dans ses bras et l’attira plus près. Ses lèvres étaient douces et propres. Cela lui indiquait qu’elle ne vivait pas dans la rue. Son corps sentait le frais, en dépit de cette odeur de sang qui lui collait à la peau. S’était-elle battue, ou les sens d’Oliver étaient-ils, ce soir, si aiguisés qu’il pouvait humer son sang comme si celui-ci suintait de son corps ?

Lorsqu’il balaya la langue sur les lèvres de la jeune femme, celle-ci les écarta immédiatement, l’autorisant à entrer et à l’explorer. Quoiqu’il fût un étranger pour elle, elle l’invitait à jouer, à emmêler sa langue à la sienne, à lui lécher les dents, à l’embrasser plus passionnément que n’importe quelle autre femme qu’il eût embrassée depuis longtemps. Était-ce une avant-première de la façon dont elle se comporterait au lit ? Passionnée, sensuelle, sauvage ? Lui avait-elle réellement proposé de coucher avec lui ?

À cette pensée, son membre commença à gonfler.

En feu, en réaction à la façon dont elle se pressait contre lui et l’embrassait en s’abandonnant, il intensifia son baiser, attestant ainsi qu’il acceptait son offre, qu’il l’emmènerait avec lui dans sa voiture pour sortir de ce quartier et, ensuite, qu’il lui ferait faire le tour de sa vie. Une fois qu’ils auraient quitté le quartier de Bayview, il garerait le fourgon et la prendrait sur la banquette arrière.

Devenant plus chaud de seconde en seconde, il glissa une main le long de son dos et, de la paume, enroba son postérieur moulé dans son jeans. Un gémissement s’échappa des lèvres de la jeune femme, et il l’attira plus près. Mais son épais manteau l’empêcha de frotter son engin durcissant contre elle.

Avant qu’il n’eût l’occasion d’ouvrir ce manteau, de sorte à sentir plus étroitement le corps de la fille, celle-ci se laissa aller dans ses bras. Elle cessa tout mouvement.

Choqué, Oliver abandonna ses lèvres et la regarda fixement. Elle était inconsciente.

Bordel, qu’avait-il fait, maintenant ?

La tête de l’humaine tomba en arrière, ses longs cheveux noirs dévoilant ainsi son cou. Ce fut alors qu’il les vit : les deux petites blessures qui ne pouvaient avoir été causées que par un seul type d’arme. Les canines d’un vampire.

Du sang s’en écoulait encore, goutte par goutte. Instinctivement, il y apposa les doigts et fit pression dessus afin de stopper le flux sanguin. Pas étonnant qu’il eût perçu une odeur de sang. Deux choses devinrent immédiatement claires : il y avait un vampire dans les environs, et celui-ci n’avait ni effacé la mémoire de la fille après s’être nourri d’elle ni terminé son repas, car il n’avait pas léché les blessures. Pas étonnant qu’elle lui eût dit que quelqu’un la pourchassait.

Merde !

Oliver laissa ses yeux parcourir le secteur. Au loin, il entendit des pas précipités, quelqu’un qui courait, mais il ne pouvait encore voir personne. Qui que ce fût, il ne pouvait tout simplement pas rester là avec la fille dans ses bras. Qui que ce fût qui s’approchait, un humain ou un vampire, il ne pouvait le trouver là. Dans ce quartier, il était plus que probable qu’un humain fût un criminel, et Oliver n’était pas d’humeur à se battre dans l’immédiat. Et si c’était le vampire qui s’était nourri d’elle qui approchait, il aurait vraiment les boules qu’elle lui eût échappé. Et Oliver avait encore moins envie d’un combat avec un de ses pairs, de surcroît énervé.

Sans cérémonie, il prit la fille dans ses bras et déverrouilla la portière de la voiture avant de la poser sur la banquette arrière et de se glisser sur le siège conducteur. Un instant plus tard, il emballa le moteur et quitta le quartier à toute vitesse, comme si une meute de loups le pourchassait.

L’odeur du sang de la jeune fille s’étant intensifiée, il fut content de s’être nourri juste avant. Dans le cas inverse, il aurait été incapable de résister à la tentation qu’elle représentait et aurait poursuivi là où les autres vampires s’étaient arrêtés.

À la pensée du repas qu’il venait de prendre, il trembla de dégoût. Il avait été si avide et dans un état de tristesse tel qu’il avait attaqué le délinquant juvénile sans la moindre finesse, sans se soucier que le gamin eût pu déterminer ce qu’il était. Ce ne fut qu’après qu’il eut la présence d’esprit d’effacer cet événement terrifiant de la mémoire du gosse. Il s’était senti si mal d’avoir fait ce qu’il avait fait, de la quantité de sang qu’il avait prise, qu’il avait fourré une poignée de billets de vingt dollars dans la poche de la veste de sa victime. Mais, quand bien même, cela n’avait pas effacé sa culpabilité.

Il se dégoûtait toujours d’avoir, à nouveau, succombé à sa soif, de ne pas avoir été assez fort pour résister et combattre son démon intérieur. Finirait-il, un jour, comme un de ces junkies qui vivaient dans la rue, lorsque Quinn et Scanguards l’auraient abandonné ? Lorsqu’ils auraient décidé qu’il représentait une trop grande responsabilité pour eux ? Il ne pouvait le permettre. Il devait leur prouver, tout comme à lui-même, qu’il était plus fort, qu’on pouvait lui faire confiance, qu’il pouvait être responsable.

Serrant plus fortement le volant, il bifurqua au prochain tournant, abandonnant finalement le quartier de Bayview derrière lui pour pénétrer dans celui de South Market. Normalement, c’était ici qu’il se nourrissait mais, ce soir, pour une raison inexplicable, il avait été attiré par les quartiers les plus minables. Quelqu’un essayait-il de lui dire quelque chose ? Son subconscient tentait-il de lui montrer comment il finirait s’il ne se ressaisissait pas ?

Oliver mit cette pensée de côté pour laisser place à un problème plus pressant : la fille sur sa banquette arrière. Tout d’abord, il devait s’assurer qu’elle allait bien. Ensuite, il devait découvrir ce qui s’était passé et, éventuellement, lui effacer la mémoire si elle venait à découvrir la nature de celui qui l’avait pourchassée : un vampire. Qui qu’il fût, qu’Oliver le connût ou pas, cela n’avait aucune importance, car préserver l’identité d’un vampire à tout moment était une règle tacite. On ne pouvait tolérer que les humains pussent découvrir l’existence de ces créatures immortelles parmi eux.

Oliver jeta un regard par-dessus son épaule, mais la fille ne remuait pas. Il se remémora la manière dont elle l’avait regardé, avec ses beaux yeux en forme d’amandes, lesquels étaient aussi noirs que la nuit ; la manière dont elle l’avait supplié de l’aider. Il avait déjà décidé de ne pas s’impliquer dans son problème, quel qu’il fût mais, par la suite, son offre l’avait surpris.

L’avait-elle réellement pensé ? Elle avait dû mourir de peur en offrant du sexe à un étranger, uniquement pour qu’il la sauvât. Et, par Dieu, il ne l’aurait pas refusé mais, maintenant ? Il dodelina de la tête. Il ne pouvait plus accepter son offre. Ce serait contraire à l’éthique.

Contraire à l’éthique ? demanda le petit diable assis sur son épaule. Qu’est-ce qui est contraire à l’éthique en couchant avec une nana en chaleur ?

Et elle était en chaleur. De longs cheveux noirs, une silhouette délicate et élancée, de petits seins, quoique bien formés et, ensuite, ces yeux : bridés et pourtant grands, leur iris aussi sombre que la nuit, aux reflets pourtant si brillants. Il supposa qu’elle fût chinoise, mais il avait à peine capté un accent lorsqu’elle avait parlé. Elle était donc probablement une immigrée de la seconde génération et appartenait à la grande communauté chinoise de San Francisco. Et elle était plus belle que n’importe quelle autre femme qu’il eût jamais rencontrée. Lorsqu’elle lui avait proposé de coucher avec elle, son cœur s’était arrêté pendant un instant tant il ne pouvait croire en sa chance. Cette belle fille était disposée à coucher avec lui ?

Oliver grinça des dents. C’était mal de tirer profit d’une femme effrayée, quoique son membre ne semblât pas s’en soucier. Non, cet appendice particulier était plus que désireux d’amener cette fille à tenir sa promesse dès qu’elle reviendrait à elle.

— Ah, merde, se dit-il tout bas.

Pour une fois, il aurait dû écouter Blake et rester à la maison, afin de plutôt boire le sang en bouteille qui se trouvait dans le garde-manger. Il s’en trouverait, dès lors, moins inquiété : premièrement, il ne culpabiliserait pas de s’être nourri d’un innocent et, deuxièmement, il n’aurait pas, à l’arrière de son fourgon, une jeune femme inconsciente qu’il baiserait dans toutes les positions dès qu’elle se réveillerait.

Oliver bifurqua dans sa rue et jeta un coup d’œil au manoir qu’il appelait maison. Seules les lampes de l’entrée étaient allumées. À défaut, la maison aurait baigné dans l’obscurité. Apparemment, Blake était sorti. Il était encore trop tôt pour qu’il fût au lit. Depuis qu’il les avait rejoints après avoir découvert que Quinn et Rose étaient ses arrière-grands-parents au quatrième degré, Blake s’était plus ou moins conformé au même horaire que les vampires. Il dormait jusqu’au début de l’après-midi et restait debout jusqu’aux petites heures du matin. Il s’y serait bientôt presque complètement adapté et resterait éveillé toute la nuit

Oliver actionna l’ouverture automatique de la porte de garage, entra et gara la voiture sur son emplacement habituel, près des escaliers qui menaient à l’étage. Lorsqu’il coupa le moteur, le calme l’envahit soudainement. Il ouvrit la portière et sortit du véhicule. Aucun bruit ne provenait d’en haut. C’était aussi bien. Il ne voulait pas avoir à expliquer à Blake ce qui s’était produit, alors qu’il ne savait pas lui-même dans quoi il avait mis les pieds. Avec un peu de chance, tout reviendrait à la normale avant que Blake ne fût de retour, et son fouineur de demi-frère n’en saurait rien.

Se dirigeant vers la portière coulissante du mini-van, il l’ouvrit et regarda sa passagère. Elle était toujours étendue, inerte. Il se pencha vers elle, afin de vérifier si elle vivait toujours : elle respirait, effectivement. Il la prit dans ses bras et la porta à l’étage.

Du coude, il alluma les lampes du couloir et se dirigea vers le salon. Il fit de même. Il la déposa délicatement sur le grand canapé modulable et la recouvra de la couverture en laine qui était posée sur l’accoudoir.

Ensuite, il demeura là, à la regarder. Humain, il s’était assez souvent occupé de ses collègues blessés, mais son aide s’était en grande partie résumée à les nourrir de son sang dans le but de guérir leurs corps de vampires. Quoiqu’il sût que le sang de cette espèce possédait également des vertus curatives, il ne savait trop que faire dans l’immédiat. Ne sachant pas de quoi la femme souffrait, il ne voulait prendre aucune mesure radicale en lui donnant son sang. Et si elle se réveillait pendant qu’il la nourrissait ? Cela ne ferait qu’empirer les choses.