Les Portes Démoniaques - May Freighter - E-Book

Les Portes Démoniaques E-Book

May Freighter

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Beschreibung

Il vaut mieux ne pas dévoiler certains secrets. En raison du lien d'âme qui l'unit à Lucious, Helena ne sait pas si les sentiments qu'elle éprouve pour lui sont sincères ou non. Il est impitoyable et cruel. Son cœur est fermé. De temps en temps, elle entrevoit l'espoir qu'ils puissent s'entendre. Peut-elle trouver un moyen de briser sa carapace et de survivre lorsque le passé sombre de sa famille vient la hanter ?

”Les Portes Démoniaques est une suite éblouissante avec des vampires dangereux, un esprit vif, de l'humour, de la trahison et de la romance.” - Readers Favourite Review.
Incertaine d'être humaine ou non, Helena est forcée de subir de nouveaux cauchemars alors que son combat mental se poursuit avec un démon appelé ”Lazarus”. Sans son ange gardien pour la protéger, elle doit s'en remettre aux vampires qui agissent selon leurs propres raisons. L'attirance entre Lucious et elle grandit, qu'il s'agisse d'un effet secondaire du lien d'âme qu'ils partagent ou de leur propre volonté. Mais comment en être certaine ? Avec l'aide de ses nouveaux amis, ils doivent trouver une Porte Démoniaque et pénétrer dans le royaume des démons pour empêcher Lazarus de s'emparer de leurs âmes respectives. Mais réussiront-ils ou périront-ils car la seule arme capable de tuer un démon a été perdue il y a des siècles.

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Seitenzahl: 644

Veröffentlichungsjahr: 2025

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LES PORTES DÉMONIAQUES

Série Helena Hawthorn Vol. 2

MAY FREIGHTER

Traduit par Christelle Wu 

Table des Matières

1 UN PAS SI JOYEUX ANNIVERSAIRE

2 DES SOUVENIRS MITIGÉS

3 DES DONNEUSES PAS DES PROSTITUÉES

4 UNE SIMPLE MENACE

5 CONFESSIONS

6 AMI OU ENNEMI ?

7 VOULOIR ÊTRE À LUI

8 FRANGINE

9 LES ÉTAPES DE LA FOLIE

10 UN OISEAU EN CAGE

11 FAIS-MOI TIENNE

12 LUEUR D'ESPOIR EN BERNE

13 STAATSOPER

14 INSTABLE

15 UN VRAI PARTENARIAT

16 LES QUINN

17 UNE THÉORIE À TESTER

18 SIMILITUDES

19 LA RECHERCHE DU DANGER

20 ATTENTION À CETTE DATE

21 LA PAIX NE DURE JAMAIS

22 L’IMPORTANCE DE LA FAMILLE

23 TRAVAILLER ENSEMBLE

24 LA PORTE DU SANG

25 LES TERRES DÉSOLÉES DES DÉMONS

26 TROP DE PERTE

ÉPILOGUE

À PROPOS DE L’AUTEURE

DÉDICACE

REMERCIEMENTS

Copyright © May Freighter, 2025.

May Freighter détient les droits d’auteur de ce travail en vertu de la loi 2000, l'amendement du droit d'auteur (droits moraux).

Cette œuvre est protégée par des droits d'auteur. À l'exception d’une utilisation autorisée par la Loi de Copyright, Designs and Patents Act 1988, aucune partie ne peut être reproduite, copiée, numérisée, stockée dans un système de recherche, enregistrée ou transmise, sous quelque forme ou par quelque moyen que ce soit, sans l'autorisation écrite de l'auteur.

Ce livre est une œuvre de fiction. Les noms, les personnages, les lieux et les incidents sont le produit de l’imagination de l’auteur, soit, s'ils sont réels, sont utilisés de manière fictive. Toutes les déclarations, descriptions, informations et documents de toute autre nature contenus dans le présent document sont uniquement inclus à des fins de divertissement. Toute ressemblance avec des personnes réelles, vivantes ou décédées, des événements ou des lieux est entièrement fortuite.

Tous les droits sont réservés.

www.authormayfreighter.com

1UN PAS SI JOYEUX ANNIVERSAIRE

Helena fixait le plafond blanc de sa chambre. Elle souleva les draps avec précaution et remonta son débardeur. Des bandages rouge sang s'étendaient de sa cage thoracique à son bas-ventre. Lazarus était allé trop loin.

— Je suppose que ce n'était pas un rêve.

Elle baissa les couvertures et balaya la pièce du regard. La personne qui s'occupait d'elle avait eu la gentillesse de laisser son téléphone sur la table de nuit. Elle l'attrapa et marmonna une série de jurons lorsque le mouvement tirailla sa blessure à vif. Au lieu de donner suite à son idée, elle se détendit et jeta un coup d'œil à la fenêtre. La lumière filtrait à travers les interstices des rideaux. Elle n'était pas certaine du temps écoulé, mais elle devait savoir quel jour on était et si elle avait manqué le dîner avec ses parents.

La porte s'ouvrit et Perri jeta un coup d'œil à l'intérieur. Elle sourit à Helena et s'approcha en traînant les pieds. Ses yeux bruns brillaient de ce qu'Helena devinait être des larmes non versées. Les cheveux blonds et courts de Perri étaient attachés en une courte queue de cheval et quelques mèches lâches étaient placées derrière ses oreilles et s'enroulaient autour d'elles.

— Tu es enfin réveillée, dit Perri.

— Combien de temps ai-je dormi ?

Perri s'assit à côté d'elle sur le lit, son sourire s'estompant.

— Depuis hier. J'ai essayé de convaincre Hans et cette étrange femme de t'emmener à l'hôpital, mais ils m'ont assuré que tu irais bien quand ton organisme aurait absorbé leur sang.

Helena pâlit.

— Qu'est-ce que tu veux dire ?

— Je sais ce qu'ils sont. Je préfère ne pas en parler au cas où cela causerait des ennuis à Maître Vincent.

Helena acquiesça.

— Tu m'as bien eue. Je ne sais pas combien de fois les mots ont failli sortir de ma bouche. Hans m'a prévenue de ne pas le dire…. Attends. Il est au courant ?

— Oui, depuis un certain temps.

— Et Laura ? Où est-elle ?

— Elle a appelé hier soir pour dire qu'elle ne pouvait pas venir. Elle sera de retour ce soir pour te féliciter.

Helena essaya de se remémorer les souvenirs de la nuit précédente. Après le départ de Lazarus, Michael était devenu étrange. Elle fronça les sourcils en se rappelant ses dernières paroles.

— Hans a-t-il remarqué quelque chose d'étrange chez moi ?

Perri semblait avoir du mal à garder son sérieux.

— À part le trou béant dans ton estomac ?

— Très drôle.

— Je vous dérange ? la voix grave de Lucious se fit entendre depuis l'embrasure de la porte.

— Qu'est-ce que tu fais là ? demanda Helena.

Il s'approcha et plissa les yeux en direction de Perri.

— Laisse-nous.

Helena saisit le poignet de Perri.

— Ne lui dis pas ce qu'elle doit faire !

— Je ne sais pas si je dois m'en mêler, dit Perri.

— Tu ne dois pas, en effet. Maintenant, sors d'ici.

Helena tenta de se redresser. Une douleur atroce explosa dans son abdomen et elle poussa un cri.

Il fut immédiatement à ses côtés, la plaquant contre le matelas.

— Ne bouge pas. Tu pourrais rouvrir ta blessure.

— Ne me touche pas, murmura-t-elle en serrant les dents.

— Détends-toi, dit-il doucement, et le lien d'âme entre eux s’apaisa. Le calme l'envahit, relâchant ses muscles.

— Je vais te chercher quelque chose à manger, marmonna Perri en se levant.

Helena lui lança un regard suppliant.

— Tu n'es pas obligée.

— Occupe-toi d'elle jusqu'à mon retour. Perri se précipita hors de la pièce.

Lucious prit le siège où Perri s'était assise avant lui et écarta les draps du corps d’Helena.

Elle voulut les remettre mais manqua son coup.

— Qu'est-ce que tu fais ?

Il la maintint immobile d'une main autour de son épaule et souleva son débardeur de l'autre.

— Rien de sexuel, je t’assure. Je suis simplement curieux de connaître les dégâts que tu as subis. Tes boucliers sont devenus si faibles que ta douleur et tes émotions s'infiltrent à travers le lien.

Ses joues s'échauffèrent et elle détourna le visage.

— Je suis désolée que ce soit devenu un inconvénient pour toi.

Les doigts de Lucious tracèrent le contour des bandages, faisant frissonner son corps. Elle ne comprenait pas pourquoi son toucher était chaud alors que celui de tous les autres vampires restait froid. Notre lien pouvait-il l'affecter à ce point ?

Il trouva les attaches des bandages et les détacha, une par une.

Helena le regarda la soulever du matelas avec beaucoup de précautions et commencer à défaire son pansement.

— Essaie de ne pas bouger. Si quelque chose te fait mal, dis-le-moi, dit-il.

Elle baissa les bras le long du corps, se soutenant suffisamment pour ne pas avoir besoin de son aide pour rester droite.

— Lucious, commença-t-elle d'une voix tremblante, peux-tu sentir quelque chose de différent chez moi ?

Il s'arrêta sur la dernière partie de ses bandages.

— Quelque chose en particulier que je devrais surveiller ?

— Mon lien. Michael a dit qu'il était gris. Sa voix tremblait, mais elle continua. Il ne peut plus être mon gardien à cause de ça.

Lucious défit les derniers bandages et enleva la gaze ensanglantée, révélant une nouvelle couche de peau rose à l'endroit où se trouvait la blessure la nuit dernière. Combien de sang les vampires m'ont-ils donné ?

— Tu guéris bien. Dans un jour ou deux, tu pourras sortir du lit.

Elle lui prit la main.

— Il faut que je sorte ce soir. J'ai des projets.

— Les projets peuvent attendre. Ton bien-être est plus important.

— Ma mère me tuera si je manque le dîner. Elle serra les dents en appuyant son dos contre la tête de lit. La surface froide du chêne lui procura un frisson désagréable. Demande à Perri de me donner des analgésiques.

Il appuya sa paume sur sa blessure et elle poussa un cri d'agonie. Les larmes montèrent à la surface et se déversèrent lorsque son estomac commença à brûler et que sa tête se mit à pulser.

— Tu ne partiras pas tant que tu ne seras pas guérie ! Il retira sa main.

Sa vision se brouilla sous l'effet des larmes qui tombaient.

— Sors et ne t’approche pas de moi !

Perri fit irruption dans la pièce. Ses yeux allaient d'Helena à Lucious.

— Tu vas bien ?

— S'il te plaît, donne-moi des calmants. Je dois me préparer, supplia Helena.

Lucious se leva.

— Tu n'iras nulle part sans surveillance.

L'ignorant, elle déplaça ses jambes vers le bord du lit jusqu'à ce qu'elles ne soient plus sur le matelas.

— Il serait étrange que je me rende à ma fête d'anniversaire avec un étranger à mes côtés.

— Je peux influencer tes parents et faire en sorte qu'ils croient que ta fête aura lieu demain.

La voix d'Helena s'éleva en même temps que les battements de son cœur dans sa tête.

— Tu ne feras pas un lavage de cerveau à mes parents. Tu m'entends ?

— Helena, tu ne peux pas y aller seule dans cet état, dit Perri.

— Perri, je t'en supplie. Donne-moi des calmants, s'il te plaît….

Perri n'attendit pas longtemps et se précipita hors de la pièce.

S'asseoir lui faisait mal. Son corps ne suivait pas sa volonté. La douleur passa de vive à sourde, mais elle ne s'arrêta pas. Son estomac se serra et la nausée s'empara d'elle. Elle déglutit plusieurs fois pour tenter d'étouffer la sensation de malaise.

Lucious s'agenouilla devant elle.

— Je peux sentir ta lutte, ta douleur, et pourtant tu persistes dans cette voie. Pourquoi ?

Elle posa ses mains fermement de chaque côté d'elle pour se soutenir.

— Je ne sais pas combien de temps il me reste avec eux. Lazarus peut apparaître à tout moment et finir ce qu'il a commencé. Je ne veux pas avoir de regrets dans ma vie. Je ne veux pas.

Il lui saisit les épaules, la forçant à regarder ses hypnotisants yeux bleu-brun qui cachaient trop de secrets.

— Si je te nourris de mon sang maintenant, je suis certain que tu iras mieux. Mais, quand on a consommé beaucoup de sang de vampire, il y a des effets secondaires, je le crains.

— Quel genre d’effets secondaires ?

— Comme je l'ai entendu, Zafira et l'espion du Conseil t’ont donné leur sang. En rajouter en si peu de temps pourrait te tuer.

— C'est un effet secondaire ? Je croyais que c’était censé guérir les gens.

— Comme pour tout médicament, la quantité est un point important. C'est pourquoi ils ne t'ont pas donné assez pour que tu sois complètement guérie. Ils ne pouvaient tout simplement pas. Et si tu mourais avec leur sang dans ton organisme, tu deviendrais une goule.

— Quelques calmants me suffiront. Elle posa ses pieds sur le sol et se leva lentement. La pièce se mit à tanguer autour d'elle.

Les doigts de Lucious s'enfonçaient dans ses épaules. Ses bras puissants étaient les seules choses qui la maintenaient à la verticale. Lorsque la vague de vertige se dissipa, elle le repoussa.

— Je vais bien, murmura-t-elle.

— Ce soir, j'irai avec toi.

Elle jeta un coup d'œil à son visage sévère qui lui indiquait que la moindre de ses plaintes serait rejetée. Baissant la tête, elle se dirigea en titubant vers la porte. À chaque pas qu'elle faisait, Lucious suivait. Passé son malaise, un léger sourire parvint à lui échapper. Ce vampire était vraiment têtu.

*****

Les analgésiques réussirent à atténuer la douleur et à faire disparaître les nausées, mais pas suffisamment pour lui donner le courage de prétendre qu'elle allait bien pendant toute la soirée. Ses doigts se crispaient autour de ses bras. Il était déjà plus de vingt heures. L'air devenait frais alors qu'ils se tenaient devant la maison de ses parents.

Lucious la regardait avec un mélange d'amusement et d'inquiétude. Elle n'aurait su dire ce qui était le plus flagrant. Ses yeux suivaient chacun de ses mouvements et ses lèvres se retroussaient.

— Tu veux que je sonne ? demanda-t-il.

— Non ! Non. Je vais le faire. Je le ferai. Quand j'aurai assez de courage.

— Ton courage viendra-t-il ce soir ou devrons-nous attendre la fin de l'année ?

Elle lui donna un coup de poing dans le bras, et il gloussa.

— Je suis heureux de voir que tu as retrouvé le moral. Lucious appuya sur la petite sonnette en laiton.

Le gazouillis bruyant d'un oiseau de l'autre côté de la porte donna à Helena l'envie de se disperser avec la brise du soir. Sa mère allait mal interpréter leur relation. Elle secoua mentalement la tête. Il n'y avait pas de relation.

Helena entendit sa mère de l'autre côté dire à Richard qu'elle répondait à la porte lorsqu'elle s'ouvrit. Sasha portait une robe rose qui lui arrivait au genou et enveloppait sa peau pâle. Elle sourit à Helena, mais comme un faucon, elle fixa immédiatement Lucious qui inclina la tête en guise de salut.

— Mme Hawthorn, c'est un plaisir de vous rencontrer. Votre fille parle de vous avec beaucoup d'affection, dit Lucious d'une voix soyeuse.

Helena retint l'envie de lui donner un coup de pied. Elle se força à sourire, en espérant qu'une partie de son sourire soit authentique.

Il prit la main de sa mère et la porta à ses lèvres, les effleurant sur sa peau. Helena n'avait jamais vu Sasha Hawthorn rougir sous son maquillage jusqu'à présent.

— Oh là là, n'êtes-vous pas un gentleman ? Ma fille a oublié de mentionner qu'elle amenait son…

— Ami ! termina Helena à sa place.

— Je suis Lucious, ravi de faire votre connaissance.

— Eh bien, alors. Sasha lui sourit. Ne restez pas là dans le froid. Entrez.

Le regard de sa mère se posa sur Helena lorsqu'ils entrèrent dans la maison.

Richard jeta un coup d'œil en coin et s'approcha, ne s'arrêtant que pour étudier l'homme à côté d'elle avant d'envelopper Helena d'une chaleureuse étreinte.

La douleur dans son abdomen refit surface comme un coup de poignard dans le ventre, et elle se mordit la lèvre assez fort pour goûter le sang. Elle s'éloigna de son beau-père, gardant le visage bas.

Lucious la tira sur le côté et l'aida à enlever son manteau.

S'éclaircissant la gorge, Sasha attira l'attention de tout le monde.

— Nous allons attendre dans le salon. Helena peut vous montrer le chemin. Elle entraîna son mari à sa suite.

Lucious chuchota à l'oreille d'Helena.

— Tu vas bien ? Je sens l'odeur du sang.

— Ça va. Je vais bien.

Il enleva sa veste et accrocha leurs vêtements sur les cintres.

— Ta lèvre saigne. Il tendit la main, mais elle la repoussa.

— Tu es mon ami, tu te souviens ? Ne les laisse pas remettre en question ta présence.

— Serait-ce si grave qu'ils croient que nous avons une relation amoureuse ? Cela me permettrait de prendre soin de toi quand tu souffres.

— Je ne veux pas mentir à mes parents plus qu'il ne faut. Elle enleva ses chaussures et tourna les talons. Allons-y.

Helena marcha le long du couloir, suivie de près par Lucious. Elle jeta un coup d'œil dans le coin du salon pour voir sa mère et Richard en train de préparer des couverts et une assiette pour Lucious.

— Entrez et asseyez-vous, dit Richard.

Lucious et Helena s'exécutèrent. Les nerfs d'Helena semblaient s'accumuler comme des pierres au fond de son estomac à chaque regard d’évaluation que sa mère lui lançait lorsqu'elle pensait que Lucious ne faisait pas attention.

Richard s'assit sur une chaise et Sasha fit signe à Helena de la suivre.

À contrecœur, celle-ci quitta son siège et suivit sa mère dans la cuisine.

Sasha la saisit par les épaules et la fit se tourner vers elle. Ses grands yeux bruns cherchèrent quelque chose sur son visage. Sasha fronça les sourcils et parla à voix basse, mais Helena savait que Lucious l'entendrait de toute façon.

— Pourquoi tu ne m'as pas dit que tu avais un petit ami ? demanda sa mère. Pendant tout ce temps, j'ai cru que tu allais te mettre avec Andrew, et tu rentres à la maison avec un mannequin.

Un sentiment de culpabilité traversa la poitrine d'Helena à la mention du nom d'Andrew. Il ne lui avait pas envoyé une seule lettre ou un seul e-mail depuis qu'il avait été transformé. Et, il y a cinq mois, Lucious avait dit à Helena qu'Andrew lui reprochait d'être devenu un vampire.

— Lucious n'est pas mon petit ami. Ce n'est qu'un ami, maman.

Sa mère haussa un sourcil.

— Hmm hmm, et je suis Mary Poppins. Mais il n'est pas un peu vieux pour toi ? Je veux dire que j'aimais les hommes plus âgés quand j'avais ton âge, mais il a au moins sept ans de plus que toi.

Plutôt cent vingt. Elle jeta un coup d'œil sur les plats posés sur le comptoir.

— Je vais apporter la nourriture.

Sans attendre la réponse de sa mère, elle dépassa Sasha pour attraper les assiettes et sortit précipitamment de la cuisine.

Dans la salle à manger, Lucious et Richard étaient assis à la table, riant de quelque chose. Helena soupira presque de soulagement devant l'atmosphère détendue que Lucious parvenait à créer avec son beau-père. Elle posa les plats sur la table et se concentra sur leur connexion. Tu n'as pas fait de lavage de cerveau à Richard, j’espère ?

Lucious lui sourit agréablement alors qu'elle finissait de poser le dernier plat sur la table. Sa voix lui donna des frissons en se répercutant dans son esprit. Non, je ne l'ai pas fait. Nous avons simplement trouvé quelques intérêts communs.

Helena s'assit à côté de lui, ne sachant pas si elle devait le croire ou non. Elle étudia son beau-père. Il avait l’air comme d'habitude.

Richard posa ses coudes sur la table et se pencha.

— Lucious m'a dit que vous vous étiez rencontrés à l'université. Je suis content que tu te sois enfin fait de nouveaux amis dans ton cours.

— Oui, il sait pratiquement tout sur les mythes. Elle se retint d'ajouter : parce qu'il en est un.

— Je me suis fait beaucoup d'amis pour la vie lorsque j'étais à l'université, dit Richard en souriant. Tu devrais essayer d'être plus ouverte d'esprit avec les gens.

Helena haussa un sourcil. Quelle ouverture d'esprit pouvait-elle avoir quand elle était entourée de morts-vivants, d'anges et d'êtres démoniaques qui n'appartenaient pas à leur monde ?

Lucious intervint.

— Vous ne le savez peut-être pas, mais elle s'est fait un certain nombre d'amis au cours de l'année écoulée. Nos camarades de classe se battent généralement pour avoir son attention.

Sasha s'assit à côté de Richard.

— Elle ne m'a jamais rien dit de tout cela.

— Je suppose qu'elle est timide à ce sujet, expliqua Lucious.

Helena lui donna un coup de pied sous la table et siffla à travers leur lien : Arrête ça.

Lucious sourit et sa voix résonna dans son esprit. Tes joues ont retrouvé leur couleur. Es-tu gênée, ma chère ?

Sasha se racla la gorge et Helena réalisa qu'elle fixait Lucious sans tenir compte des autres personnes présentes dans la pièce.

— Je suis désolée. Qu'est-ce que tu disais ?

— Nous devrions manger, dit Sasha.

Helena prit son couteau et sa fourchette et regarda son assiette. Elle était vide. Elle reposa ses couverts et baissa la tête, la chaleur grimpant le long de son cou.

Lucious choisit des pommes de terre bouillies et les empila dans son assiette.

La mère d'Helena lui tendit avec empressement de la salade maison et son rôti tranché qui embaumait l'air d'un parfum de pomme.

— Je dois m'excuser, je ne suis pas un grand mangeur. Lucious repoussa la nourriture offerte.

— Tu devrais manger de la viande si tu veux avoir de la force, gronda Sasha.

Helena secoua la tête et attrapa le saladier. Il faut une explication à son manque d'appétit.

— Il est végétarien, maman.

— Ah oui ? Lucious lui renvoya la balle.

La tête de Richard oscilla en signe de reconnaissance de la nouvelle information. Lorsque Sasha fut sur le point de parler, il lui tapota l'épaule et elle s'installa sur son siège, le mécontentement se lisant sur son visage.

Ils passèrent l'heure suivante à parler joyeusement de voyages autour du monde. Lucious avait bien assez d'histoires pour occuper ses parents, et Helena trouva enfin la position dans laquelle son corps ne souffrait pas trop. Alors que le dîner touchait à sa fin, ses parents se sourirent.

— Il y a quelque chose que nous aimerions te dire, commença sa mère.

Helena repoussa son assiette à moitié vide et écouta. Son appétit était coupé par la douleur constante de son estomac.

Sasha jouait nerveusement avec sa serviette. Elle inspira profondément, ce qui sembla chasser l'air de la pièce.

— Nous allons avoir un bébé !

Helena regarda sa mère avec incrédulité.

— Vous allez quoi ?

— Dans sept mois, tu auras un frère ou une sœur, dit sa mère avec un enthousiasme renouvelé.

Helena souhaitait que le sol s'ouvre sous elle et qu'elle se retrouve dans une autre dimension où sa vie n'était pas menacée par un démon. Qui sait ce que Lazarus ferait s'il apprenait cela ? Se servirait-il de ma famille contre moi ? Son visage se vida de son sang et ses doigts se refroidirent.

— Tu n'es pas contente ? demanda Sasha, dont l'excitation avait disparu.

Lucious prit la main d'Helena sous la table. Ce simple geste l'aida à contenir sa panique.

— Félicitations ! Elle parvint à maîtriser son sourire et se dirigea vers l'autre côté de la table. En se penchant, elle serra sa mère dans ses bras en retenant un cri de douleur et ses larmes.

Richard se leva et les serra toutes les deux dans ses bras.

Helena lutta pour rester debout. Ses jambes tremblaient sous leur poids combiné. Elle jeta un coup d'œil à Lucious, qui se mit à applaudir gracieusement en se levant.

— C'est une nouvelle merveilleuse, se réjouit Lucious. Vous apportez simplement plus de beauté dans ce monde.

Sasha rougit et Richard rompit l'étreinte familiale.

Quoi qu'il en soit, ma chère, tu devrais cacher ta déception avant qu'ils ne la remarquent. Lucious parlait dans son esprit.

Helena ne s'était pas rendu compte que ses sentiments transparaissaient. Elle força encore un sourire.

Lucious serra la main de ses parents et reprit sa place tandis qu'elle retournait à la sienne en titubant.

— Helena, tu vas bien ? demanda Sasha.

Elle s'assit, soulageant ses jambes.

— Je suis juste bouleversée.

— J'étais pareil, dit Richard. Je vais te faire du café pour faire remonter ta tension artérielle, car tu es vraiment pâle.

— Et je vais commencer à faire de la place pour le dessert, ajouta sa mère.

Lucious lui tapota la cuisse sous la table, faisant passer le calme à travers le lien. Il jeta un coup d'œil à sa montre et se leva dans le bruit strident de la chaise traînée sur le parquet.

Ses parents jetèrent un coup d'œil par-dessus leur épaule.

— Je dois m'excuser d'interrompre un événement aussi joyeux, mais je crois que je dois partir, annonça Lucious avec une vraie tristesse dans la voix.

Helena se leva à son tour.

— Je devrais rentrer. Laura voulait aussi me donner son cadeau ce soir.

— Quoi ? Et le gâteau ? protesta Sasha.

— Nous sommes désolés que ce ne soit pas le meilleur anniversaire de tous les temps, Helena, ajouta Richard. Je sais que tu aurais été plus heureuse de passer cette journée avec tes amis plutôt qu'avec nous.

Helena leva les mains.

— Non, je me suis bien amusée. Je le jure.

— Tant mieux. Maintenant, avant que tu ne partes, nous avons un cadeau pour toi. Richard disparut dans la cuisine et revint avec une petite boîte de velours rouge.

Helena la prit et ouvrit lentement le couvercle. À l'intérieur se trouvait une grosse bague en argent avec une topaze en forme de fleur au centre.

— C'était à ta grand-mère, expliqua Sasha. C'est le dernier souvenir que j'aie d'elle. Elle t'aimait beaucoup et je pense qu'elle aimerait que tu l'aies.

Helena fit glisser la bague sur son majeur. Elle était plus lourde que ce à quoi elle s'attendait. Au bord des larmes, son cœur se serra.

— Merci.

— Je suis contente qu'elle te plaise, dit sa mère. Sois prudente sur le chemin du retour.

*****

Ils se promenèrent dans les rues peu éclairées de Dublin. Helena ne voulait pas retourner à l'appartement. Il y avait trop de choses à prendre en considération. Tellement qu'elle commençait à avoir la migraine.

Sans rien dire, Lucious suivait parfaitement son rythme. De l'autre côté de la route, il y avait un parc où sa mère et Richard l'emmenaient jouer quand elle était petite. Elle ne s'était pas rendu compte qu'elle avait cessé d'avancer jusqu'à ce que Lucious pose sa main dans le bas de son dos.

— Quel est le problème ?

Elle ignora sa question et traversa la route en quelques grandes enjambées. S'il devait jouer le rôle de garde du corps, il devrait la suivre. Même s'il ne le faisait pas, elle n'était pas inquiète. Elle connaissait cette zone jusqu'au dernier grain du bac à sable.

Bien qu'elle ait mis de la distance entre eux, en une seconde, il était à ses côtés.

— Helena, nous devrions rentrer.

— J'ai besoin de m'éloigner de l'appartement. Il est plein de gens, et pour l'instant, j'ai envie d'être seule.

Ils passèrent par une entrée latérale et l'odeur de l'herbe fraîchement coupée assaillit ses sens. Elle se promena sur le chemin pavé, ses souvenirs d'enfance lui revenant en mémoire.

*****

L'automne était arrivé, recouvrant le monde de brun et d'orange. Le soleil s’était couché et les lampadaires s'allumèrent. Richard l'avait emmenée sur un terrain de jeu après son travail à l'université. Elle ne voulait pas lui parler. Sa mère accordait plus d'attention à cet étranger qu'à sa fille. Et quand sa maman lui avait dit que papa ne reviendrait pas, Helena avait eu du mal à comprendre le concept.

Quatre enfants jouaient sur les balançoires. Leurs rires bruyants gâchaient la tranquillité, le vent ne faisant aucun effort pour produire un murmure. Ils s'échangèrent les places sur les balançoires, les filles s'asseyant sur les sièges et les garçons les poussant. Leurs mères étaient assises sur un banc, jetant de temps en temps un coup d'œil dans leur direction.

Helena s'émerveilla. L'accepteraient-ils dans leur groupe ? Elle courut vers eux, le cœur gonflé d'excitation.

Elle essaya de communiquer, mais ses mots étaient en russe. Les rires s'éteignirent et les regards interrogateurs l'évaluèrent comme s'il s'agissait d'une sorte de monstre sous leur lit. Comme si elle n'appartenait pas à leur groupe.

Deux grandes mains la saisirent à la taille et elle se retrouva en apesanteur. En une fraction de seconde, elle était assise sur les épaules de Richard et regardait les enfants. Il se dirigea vers le manège et la fit descendre sur la plate-forme colorée. Richard s'agenouilla devant elle.

— Tu apprendras la langue bien assez tôt, lui dit-il dans un russe tendu.

Helena jeta un coup d'œil en direction des autres enfants. Ils se remirent à se relayer sur les balançoires, comme si son existence n'avait pas d'importance. Pour eux, elle était invisible, comme le souvenir d'un mouvement ou d'une phrase sans importance.

*****

Son cœur se serra à ce souvenir doux-amer. Elle secoua les vestiges du passé et jeta un coup d'œil par-dessus son épaule à Lucious qui étudiait leur environnement.

— Pourquoi es-tu revenu ?

— Pour te protéger, répondit-il.

— D'une certaine manière, je doute que ce soit la vraie raison. Tu es venu ici pour me surveiller parce que tu ne me fais pas confiance pour m'occuper de moi-même. Comme tout le monde ici. Elle s'agrippa au tissu de son manteau, le serrant contre elle. Pourquoi faisait-il si froid en mai ?

Lucious accéléra le pas et se retrouva bientôt à côté d'elle.

— C'est peut-être la moitié de la vérité.

— Et quelle est l'autre moitié ?

Il lui saisit le coude, la forçant à s'arrêter et à le regarder.

— Je voulais voir par moi-même si tu étais en sécurité.

Helena détourna le regard. Les balançoires étaient toujours là. La seule chose qui avait changé était la nouvelle couche de peinture qui les recouvrait.

— Quand j'ai appris l'anglais pour la première fois, j'avais environ huit ans. Richard m'amenait ici pour jouer avec les autres enfants. Même si je venais souvent ici, ils ne me laissaient pas me joindre à eux. Je croyais presque que j'avais une maladie. Je rentrais chez moi et je pleurais jusqu'à ce que je m'endorme. Je me demandais toujours ce qu'il y avait de si mauvais en moi pour qu'ils ne jouent pas avec moi. Elle avait la gorge nouée et les yeux larmoyants. C'est alors que Michael est apparu pour la première fois.

Elle s'assit sur le siège en plastique de la balançoire, les yeux fixés sur le sable sous ses baskets.

— Depuis, je n'ai qu'un seul véritable ami. Elle donna un coup de pied et laissa son corps se déplacer avec la balançoire. Et maintenant, il n'est plus là. Il y a ce vide à l'intérieur de moi que je ne peux pas comprendre. C'est comme si une partie de moi avait été enlevée sans que je le sache.

Lucious se glissa sur le siège de la deuxième balançoire, à deux mètres de là.

— Dis-moi ce qui s'est passé.

— Alexander t'a déjà tout raconté, tout comme la femme vampire qui était là.

— Je veux l'entendre de ta bouche.

Elle appuya le côté de sa tête sur la chaîne métallique. Son attention se porta sur le ciel clair de la nuit au-dessus d'eux. Il faisait déjà nuit et la pollution lumineuse noyait l'éclat des étoiles.

— J'étais à la maison avec Perri et Hans, attendant l'arrivée de Laura. Quand j'ai ouvert la porte, la personne qui se tenait là, c'était toi. Enfin, il te ressemblait. Lazarus s'est débarrassé de ta forme et a essayé de prendre mon âme, ou peut-être que son but était de changer la couleur de mon lien. Je ne sais pas.

Lucious prit l'une de ses mains dans la sienne et ses doigts se mirent à picoter de chaleur.

— J'ai senti ta douleur à travers le lien. C'était comme s'il s'infiltrait dans mon corps et détruisait tout ce qui faisait de moi ce que je suis.

— Oui. Puis ton ami est arrivé, et Lazarus a disparu.

— C'est tout ?

Helena secoua la tête.

— Michael a dit que je n'étais plus considérée comme humaine. C'est la raison pour laquelle il m'a quittée. La raison pour laquelle je suis à nouveau seule. Elle laissa échapper un rire amer. C'est assez drôle.

Lucious se déplaça pour se placer devant elle. L'une de ses mains saisit les chaînes de sa balançoire, limitant ses mouvements. L'expression qu'il arborait était indéchiffrable.

— Nous sommes tous fondamentalement seuls dans ce monde.

Elle toucha l'endroit où se serait trouvé son lien si elle pouvait le voir.

— Je suppose que nous ne sommes pas seuls. Nos âmes sont liées.

— Pour l'instant. Quand nous aurons trouvé le moyen de le briser, nous reprendrons nos vies séparément. Lucious repoussa sa main. Retournons à l'appartement. Je crois que ton amie voulait te féliciter.

— Tu n'as pas répondu à ma question, dit-elle.

— Quelle question ?

— Y a-t-il quelque chose de différent chez moi ? Peux-tu me dire pourquoi Michael a dit que je n'étais plus humaine ?

— Ne t'inquiète pas pour des choses insignifiantes. Si tu devenais un être surnaturel, je le saurais parce qu'ils émettent des énergies différentes. Depuis qu'il t'a quitté, ton pouvoir est moindre et tes boucliers sont faibles. C'est la seule différence que je puisse percevoir.

— Qu'est-ce que tu essaies de dire ?

— J'essaie de dire que tu es plus humaine que tu ne l'as jamais été, ma chère. Maintenant, allons-y.

*****

Helena trouva Perri et Hans en train de jouer aux cartes dans le salon lorsqu'ils rentrèrent. Elle se débarrassa de son manteau et Lucious le prit sans un mot.

— Qui gagne ? demanda Helena.

Perri tourna la tête et sourit. À voir le visage détendu de Hans, il faisait exprès de perdre.

Helena sourit, réchauffée par l'idée que Hans avait toujours voulu faire plaisir à Perri. Elle s'approcha d'eux et s'assit à côté de son amie sur le canapé.

Perri posa les cartes sur la table basse en verre, son sourire s'estompant peu à peu.

— Comment te sens-tu ?

— Je m'en sors, je crois. J'ai besoin de plus d'analgésiques, cependant.

— Maître Vincent pense qu'il serait sage de rester à tes côtés jusqu'à ce que le danger soit passé, dit Hans en croisant les bras.

Les yeux de Perri cherchèrent une réaction sur le visage d'Helena.

— Eliza est-elle au courant ? Lucious intervint, tenant un verre d'eau et deux pilules. Il les tendit à Helena, qui les prit après l’avoir remercié.

— Maître Vincent a dit que c'était une affaire personnelle et que ça n'avait rien à voir avec les vampires. Par conséquent, il n'est pas nécessaire de l'informer de ce développement, déclara Hans.

Helena était reconnaissante que ce soit Vincent qui s'occupe d'elle et non Xi Yi ou Eliza. Ils auraient été ravis de la voir enfermée dans un donjon souterrain.

— Vous n'avez pas besoin de rester ici. Je vais m'occuper d'elle, dit Lucious.

Hans regarda Helena comme s'il lui demandait silencieusement sa permission. Rester seule avec Lucious serait une erreur. Qui sait ce qui se passerait s'ils étaient ensemble sans chaperon ? L'effet de la proximité l'avait déjà mise sur les nerfs. Elle devait s'abstenir de chercher son réconfort, car un simple frôlement de leur peau faisait palpiter son cœur. Et cette interaction au parc lui avait donné envie de plus de contact physique.

Elle avala ses pilules et but une gorgée d'eau avant de poser le verre sur la table basse.

— Ils restent. Toi, en revanche, tu ne restes pas. Elle se dirigea vers la cuisine et se prépara un thé.

Lucious se plaça derrière elle.

— Je ne pars pas.

Helena était fatiguée. Il fallait qu'elle prenne de la caféine, sinon elle s'effondrerait devant tout le monde. Il y avait trop de choses à craindre. Ce qu'elle voulait, c'était se cacher sous ses couvertures et ignorer le monde extérieur, mais ce n'était pas une option.

— Je n'ai pas le temps de discuter avec toi. J'ai bien assez de gardes du corps.

Malgré son expression impassible, le lien tremblait sous l'effet de sa colère. Il perdait le contrôle de ses boucliers et laissait échapper ses émotions dans le lien. Ses yeux se resserrèrent sur les bords tandis qu'il forçait les mots à sortir de sa bouche.

— Ces deux-là ne suffiront peut-être pas.

Elle croisa les bras sur sa poitrine. S'apercevant qu'elle avait frôlé sa plaie, elle les laissa tomber tout de suite.

— Je me débrouillerai. Pars.

Instantanément, Hans se tint à côté d'elle, la main posée sur l'épaule de Lucious.

— La dame a pris sa décision.

Lucious se dégagea de son emprise.

— Je pars. Si quoi que ce soit sent mauvais, contactez-moi immédiatement.

*****

Helena se tenait au milieu d'un terrain vague. Le ciel au-dessus d'elle se couvrait de nuages inquiétants, tourbillonnant de façon imprévisible. La seule lumière provenait d'un énorme dôme situé à plus d'une douzaine de kilomètres devant elle. Il englobait de grands gratte-ciel dorés qu'elle n'avait jamais vus sur Terre.

Ici, il n'y avait pas de vent pour effleurer ses cheveux et aucune vie ne jaillissait du sol poussiéreux. L'endroit entier lui paraissait anormal, comme si quelqu'un avait pris tout ce qui donnait la vie et l'avait éliminé.

Le malaise grandit en elle. L'air qui l'entourait était différent de celui qu'elle respirait chez elle. Il était poisseux et humide alors qu'elle marchait sur la terre craquelée et sans vie. À chaque pas, l'air s'épaississait.

Au loin, des montagnes s'élevaient, répandant leur ombre sur le sol. Des cris de douleur parvenaient à ses oreilles. L'agonie de nombreux hommes et femmes envahissait ses sens. Elle porta les mains à ses oreilles pour les bloquer, mais ils augmentaient comme si quelqu'un jouait avec le bouton de volume de sa chaîne stéréo.

Elle s'effondra sur le sol. Serrant ses genoux contre sa poitrine, elle se balança d'avant en arrière, priant pour que les cris et les supplications s'arrêtent. Une fois qu'ils s’arrêtèrent, elle leva les yeux vers le silence soudain. Elle n'était plus seule.

Des créatures horribles l'entouraient. Certaines avaient des formes humanoïdes et des griffes qui leur arrivaient aux chevilles. D'autres étaient plus proches de gros chiens. Leurs corps d'ébène difformes étaient couverts de fourrure, d'écailles et même de piques que l'on trouverait sur un hérisson. Les yeux de chaque créature brillaient d'un rouge vif d'anticipation.

Helena sursauta et trébucha en arrière, projetant de la poussière dans l'air avec ses pieds. Son cœur battait la chamade dans sa cage thoracique. Elle lutta pour se contrôler, pour arrêter son esprit paniqué et retrouver une pensée rationnelle.

— Respire ! Elle aspira une bouffée d'air et la relâcha lentement. Ces créatures ressemblaient trop à celles que Nadine lui avait montrées.

Leurs griffes l'atteignaient.

Elle se concentra sur la silhouette qui se trouvait derrière les monstruosités.

— Lazarus…

Son corps était presque humain, à part les ongles allongés et les cornes d'ivoire qui dépassaient de son crâne recouvert de longs cheveux bleu-noir. Ses yeux rouges, semblables à ceux d'un prédateur, se fixèrent sur elle et il sourit.

— Je peux sentir ta peur, ma fleur. Bientôt, tu te noieras dedans. Il éclata de rire, faisant trembler le monde autour d'elle. La douleur dans son épaule s'estompa et sa vision se brouilla.

*****

Elle se redressa dans son lit, les vêtements trempés de sueur froide. Lazarus revenait pour elle, et plus tôt qu'elle ne le pensait.

2DES SOUVENIRS MITIGÉS

Lucious entra en trombe à la « Roulette Russe ». Tanya, l’infante d'Alexander, dit quelque chose quand il la frôla, mais il ne s’en soucia pas. La rage qui l'habitait ne voulait pas s'éteindre. Comment pouvait-ellelui dire de partir ? Il était venu ici pour la protéger, et elle prétendait que la protection des laquais du Conseil lui suffisait.

Il fit irruption dans le bureau d'Alexander.

Ce dernier ne leva pas les yeux de sa paperasse et lui dit.

— Moi aussi je suis contente de te revoir, Lucious. La prochaine fois, frappe à la porte. On ne sait jamais ce que je peux être en train de faire ici.

— Cela fait un moment, mon amour, ajouta Zafira. Elle se tenait derrière Alexander, la main posée sur son épaule.

Lucious l'observa.

— Dois-je croire que la vraie raison de ton retour était de sauver Helena du démon ?

Elle fit la moue.

— Oh, c'est Helena maintenant ? Tu te rapproches terriblement de ton humaine.

— Tu sais que nous sommes liés l'un à l'autre. Je n'ai pas le choix.

— Tu avais le choix avant de te lier, Lucious. Sa voix s'éleva. Pourquoi l'as-tu fait ? Pourquoi laisser une fille humaine devenir une partie de toi alors que tu ne laisses entrer aucune autre femme ?

Lucious était perplexe. C'était la première fois qu'il entendait que Zafira avait un intérêt romantique pour lui. Leur relation avait toujours été physique. Les émotions n'avaient jamais compté pour elle.

— Les enfants, arrêtez. Si c’est une dispute conjugale, réglez-la ailleurs. J'ai de la paperasse à traiter, dit Alexander, ses yeux gris brûlant d'irritation.

Zafira lui fit une bise sur la joue, jeta un regard noir à Lucious et sortit en trombe de la pièce.

Vidé, Lucious s'effondra sur le siège en face d'Alexander. Il inspira profondément, ce qui ne l'aida pas à se calmer. Cela lui donnait au contraire envie d'avoir quelqu'un à étrangler.

Alexander laissa tomber sa paperasse à côté de son ordinateur portable et haussa un sourcil.

— Zafira mise à part, j'en déduis que tu as rencontré ton humaine ?

— Pourquoi poser la question quand on connaît déjà la réponse ?

Alexander gloussa. Il ouvrit le tiroir où il rangeait son alcool et en sortit deux verres en cristal ainsi qu'une bouteille de vieux scotch. Il versa d'une main experte leurs boissons, ce qu'ils partageaient à chaque fois qu'ils étaient ensemble.

— Tu as quitté ta Dame pour être avec elle. N'importe quelle humaine normale aurait trouvé ça romantique ou se serait laissée influencer par ton désir de la protéger. Je suppose que ça ne s'est pas passé comme ça pour toi.

— Pas exactement, non.

— Et si on la droguait et qu'on la gardait endormie ? Elle sera inoffensive le temps qu'on trouve comment faire avec le lien.

Lucious but une gorgée de son verre. Il ne pouvait pas s'opposer à l'idée originale d'Alexander, pas quand elle insistait pour qu'il la quitte. Il secoua la tête. Il ne pouvait pas être cruel avec elle. Cela affaiblirait ses défenses quasi inexistantes contre le démon. Depuis cet après-midi, il ne sentait plus l'étrange pouvoir qui bourdonnait autour d'elle. Son gardien avait vraiment disparu, de même que sa protection.

— J'ai d'autres idées si celle-là est trop radicale, proposa Alexander.

Une longue gorgée suffit pour finir son verre. Lucious avala le scotch, réchauffant sa gorge desséchée tandis qu'il repoussait les pensées qui se bousculaient.

— Anna m'a dit qu'Helena devait rester forte si elle voulait tenir le démon à distance assez longtemps pour que nous puissions trouver une solution.

Alexander fit tourner son verre, l'air pensif.

— Je ne suis pas un expert en démonologie. Une poignée de nos semblables s'intéresse à ceux qui viennent d'autres royaumes. Le fait qu'un démon puisse passer dans le nôtre et avoir une forme solide me laisse perplexe. Je te suggère de la marquer en attendant.

Marquer un humain est une affaire dangereuse. Cela rend l'humain obéissant, mais le processus exigeait au départ que les deux parties soient consentantes. Elle ne pourrait pas ignorer ses ordres. Pourtant, les humains marqués finissaient toujours par haïr leur propriétaire. Beaucoup se suicidaient si le vampire n'était pas assez prudent.

— Je ne pense pas que ce soit nécessaire.

— Tu es trop indulgent avec elle. Elle est un aimant à danger imprévisible. Un peu de contrôle ne serait pas une mauvaise chose. Elle te remerciera peut-être un jour.

Lucious se déplaça sur son siège. Leur conversation devenait inconfortable.

— Et mon infant ? Où est-il ?

Alexander termina son verre et leur en servit un deuxième.

— J'ai envoyé le gamin en Amérique pour étudier le management. Je dois dire qu'Andrew est à part. Non seulement il a réussi à s'habituer aux humains durant ces six derniers mois sans le moindre incident, mais en plus il a la tête sur les épaules. Tu peux être fier de ton infant.

— Il a réussi à contrôler la soif en moins de six mois ? Impossible…

Alexander sourit.

— Improbable, mais pas impossible. J’attends avec impatience ce qu'il nous montrera ensuite.

Tambourinant ses doigts sur l'accoudoir, Lucious réfléchit à ce que cela signifiait. Andrew ne pouvait pas être un infant normal. Peu de vampires dans l'histoire avaient surmonté la soif en un temps aussi court. Mais encore une fois, ceux qui étaient rassemblés autour d'Helena n'étaient jamais normaux. Il se leva brusquement.

— Garde un œil sur lui et éloigne-le le plus longtemps possible.

— Il doit revenir dans deux semaines, Lucious. Je ne peux pas le faire rester plus longtemps, et je n'ai pas l'intention de le tourmenter à cause de ton indécision. Décide-toi concernant ton infant et l'humaine, le plus tôt sera le mieux.

— Tu l'aimes tant que ça ?

— Comme je l'ai dit – Alexander noua ses doigts sur son bureau – c'est un garçon intelligent et très sérieux dans son travail. Je dis qu'il faut le laisser en contact avec ton humaine et améliorer votre relation au lieu de les séparer.

— Je vais y réfléchir. Merci pour le verre.

Lucious quitta le bureau. Sa colère s'était dissipée et des doutes et des inquiétudes avaient pris sa place. Il sortit de sa poche un sac de velours contenant un petit collier que Vincent lui avait donné avant son départ pour l'Irlande. Le conseiller avait dit qu'il appartenait à Helena. Lucious fixa le motif complexe de vignes enroulées autour d'une pierre d'ambre. Plus il l'étudiait, plus il remarquait la barrière protectrice qui entourait l'objet.

Il lui irait bien. Il s'appuya contre le mur. Le lien était-il la seule raison pour laquelle il voulait être avec elle ? Pouvait-il vraiment faire naître en lui une telle possessivité ?

L'offre d'Alexander lui revint en mémoire. S'il la marquait, il pourrait la garder près de lui. Elle n'aurait d'autre choix que de l'écouter. Pourtant, elle ne lui pardonnerait jamais de l'avoir privée de son libre arbitre. Il passa ses doigts dans ses cheveux. Ils avaient poussé pendant le temps qu'il avait passé loin d'elle, et elle ne semblait pas l'avoir remarqué. Il marqua une pause. Qu'importait ce qu'elle pensait de lui ?

C'est une humaine. C’est de la nourriture ! Il psalmodia ces mots dans son esprit, espérant qu'ils finiraient par ressembler à la vérité.

Le lien entre eux tremblait anxieusement. Elle avait peur. Lucious poussa un juron. Il n'allait pas s'asseoir et attendre qu'elle le laisse rester à ses côtés.

— Qu'elle aille au diable, grogna-t-il et il se dirigea vers l'appartement.

*****

Helena faisait les cent pas dans son salon depuis son réveil. Le soleil emplissait déjà la pièce de son éclat, mais il ne lui apportait aucun réconfort.

Perri, en pyjama rose et jaune, était assise sur le canapé, regardant Helena user le parquet. Elle étouffa un bâillement.

— Qu'est-ce qui te tracasse ? Tu es comme ça depuis des heures.

Elle s'arrêta au milieu d'un pas.

— Je réfléchis, ou j'espère que c'est le cas.

Fronçant les sourcils, Perri serra ses genoux contre sa poitrine.

— Il s'est passé quelque chose ? Dois-je appeler Hans ?

— Non. Je dois aller voir quelqu'un.

— Tu veux que je t'accompagne ?

Elle se laissa tomber sur le canapé et enfouit son visage dans ses mains.

— Oh, je ne sais pas.

Perri s’approcha et serra Helena dans ses bras.

— Ça va aller. Nous trouverons un moyen de résoudre le problème, quel qu'il soit.

Aucun mot n'allait arranger sa situation. Lazarus n'arrêterait pas, même si elle le suppliait. Qu'elle le veuille ou non, elle avait besoin d'aide. Mais tous les gens autour d'elle étaient soit des humains, soit des vampires, et aucun d'entre eux ne connaissait grand-chose aux démons. Pour une raison ou une autre, Nadine lui vint à l'esprit. Elle était certaine que les créatures de son rêve étaient les mêmes que celles que Nadine lui avait montrées en vision à l'université.

Les coups frappés à la porte d'entrée la firent sursauter. Elle s'écarta de Perri dont les yeux fourmillaient de questions non posées.

Elles se regardèrent toutes les deux dans une panique silencieuse.

— Helena, ouvre ! J'ai encore oublié mes clés, cria Laura.

Elles expirèrent et Helena s'extirpa du canapé. Elle ouvrit prudemment la porte et découvrit Laura et Nadine. Nadine tenait un panda en peluche de taille moyenne avec un nœud rose placé de façon décorative sur la tête du jouet.

Laura sourit.

— Je l'ai trouvée devant l'immeuble. Elle n'a pas voulu monter jusqu'à ce que je la traîne jusqu'ici. Joyeux anniversaire en retard ! Elle dévoila une boîte carrée blanche qu'elle cachait dans son dos.

— J'ai apporté du gâteau.

Stupéfaite, Helena ne savait pas quoi faire ni que dire. Heureusement, Perri vint à son secours et les poussa dans l'appartement.

— Je vais nous faire du thé, annonça Perri.

Après avoir jeté un regard interrogateur à Helena, Nadine lui tendit le jouet et suivit tout le monde dans le salon. Un sourire gêné se dessina sur les lèvres de Nadine alors qu'elle prenait place sur le canapé, à côté de Laura. Elles ne pouvaient pas être plus différentes. Laura avait ses longs cheveux blonds vénitiens attachés en une queue de cheval haute. Son maquillage était très soigné et, bien qu'elle ne portait qu'une chemise en jean sans manches et un jean, elle était superbe. Nadine était à l'opposé. Elle portait une robe d'été blanche qui lui arrivait aux genoux et qui couvrait la plus grande partie de son corps. Ses cheveux brun foncé étaient coiffés d'un petit nœud blanc sur le côté de la tête, la faisant ressembler à un lutin.

— Qui veut quoi ? demanda Perri, qui s'affairait dans la cuisine.

— Du café au lait, dit Laura.

— Du thé vert, s'il te plaît, ou n'importe quel thé, répondit Nadine en inclinant légèrement la tête.

Perri regarda Helena dans l'expectative.

— Café noir, dit-elle en essayant de paraître joyeuse. Elle s'assit en face de Laura qui bavardait déjà avec animation de ses voyages familiaux à Hawaï et en Amérique du Sud dont elle revenait.

Nadine se préparait déjà pour la rentrée prochaine en lisant à l'avance des sujets qui semblaient sans intérêt.

Helena était reconnaissante d'avoir pu terminer son année à l'université grâce à l'aide de Hans. Il avait aidé à convaincre les professeurs d'Helena de lui accorder la pause hivernale pour qu'elle puisse étudier pour ses examens de rattrapage, car elle avait manqué la plus grande partie de son premier semestre.

Une fois qu'elles eurent terminé chacune une part de gâteau, son lien trembla à cause de la proximité de Lucious. Au milieu de leurs bavardages enthousiastes, elle n'avait pas vu le temps passer. Elle jeta un coup d'œil à Perri, qui acquiesça.

Lorsqu'elle se leva de son siège, tout le monde avait les yeux rivés sur elle. Helena déglutit.

— Je reviens tout de suite. Elle essuya ses paumes moites sur son jean gris.

Perri l'étudia avec circonspection. Les restes de panique de l'attaque du démon subsistaient. Elle aussi craignait que Lazarus ne vienne frapper à leur porte une seconde fois. Néanmoins, Helena se précipita vers la porte d'entrée et l'ouvrit. La surprise sur le visage de Lucious lui apporta une lueur de satisfaction.

— Je m'attendais à voir le chien du Conseil, pas toi, dit-il sans ambages.

— Je savais que tu te rapprochais, alors j'ai ouvert la porte.

— C'est ton petit ami ? Je crois que je me souviens de lui… Laura poussait un cri derrière elle.

Helena agita les mains en l'air.

— Non, bien sûr que non ! C'est un…

— Un monstre, dit Nadine.

Tout le monde jeta un coup d'œil à Nadine. Ses yeux bruns, habituellement chauds, étaient plus froids que l'Arctique. Elle fixait Lucious. Son petit corps s'avança vers eux avec des mouvements rigides. Nadine saisit Helena par le poignet et l'entraîna devant Lucious, en direction de l'ascenseur.

Helena jeta un coup d'œil par-dessus son épaule pour voir Lucious lui emboîter le pas.

Laura et Perri les dévisagèrent depuis l'embrasure de la porte, leurs expressions mêlant choc et confusion.

— Où allons-nous ? demanda Helena.

Nadine ne dit rien et Helena retira sa main de l'emprise de la jeune fille.

— Qu'est-ce qui ne va pas ?

Cette fois, les yeux froids de Nadine se fixèrent au-delà de l'épaule d'Helena.

— Nous devons en parler. En privé.

— Elle n'ira nulle part sans moi, ajouta Lucious.

Nadine l'ignora et reprit la main d'Helena. Son contact était plus doux qu'auparavant.

— Y a-t-il un endroit où nous ne dérangerons pas tes amies ?

— Le toit fera l'affaire, suggéra Helena et appuya sur le bouton métallique pour appeler l'ascenseur. Lorsqu'elle entra, elle sélectionna le toit. Son corps frissonna au souvenir de l'attaque.

Au dernier étage de l’immeuble, ils sortirent dans la brise fraîche. Le soleil était maintenant caché derrière de gros nuages gris qui promettaient de la pluie.

Nadine leur fit face. Ses yeux se tournèrent de temps en temps vers l'endroit où se tenait Lucious.

— Je t'avais prévenue de ne pas t'impliquer avec cette créature. Cette abomination ne devrait pas marcher parmi nous.

— Cela ressemble beaucoup à quelqu'un que nous connaissons, grommela Lucious.

Nadine leva la main, sa paume aplatie dirigée vers lui. L'énergie dans l'air changea comme si Nadine chargeait une sorte d'arme.

— Qu'est-ce que tu fais ? demanda Helena.

— Je vais me débarrasser de cette chose. Un jour, tu me remercieras.

L'air ambiant s'épaissit et Helena jeta un coup d'œil à Lucious. Ses yeux brillaient d'un bleu éclatant et ses crocs étaient sortis.

Il fit un pas menaçant vers la jeune fille.

— Qu'est-ce que tu es ?

— Le pire cauchemar d'un vampire, répondit Nadine.

La brise environnante cessa son assaut. Les tripes d'Helena se serrèrent et elle sauta devant Lucious, les empêchant de faire quelque chose qu'ils regretteraient plus tard. Elle le serra dans ses bras pour l'empêcher de s'approcher de Nadine.

— Ne lui fais pas de mal ! hurla Helena.

— Elle est une menace. Ne peux-tu pas sentir la puissance contenue dans cet être ?

Nadine baissa le bras. Ses mots étaient comme des poignards givrés plantés dans le cœur d'Helena.

— Tu protégerais volontiers une créature aussi vile ? C'est ce que je craignais. Il a déjà commencé à contrôler ton esprit.

Helena repoussa Lucious plus loin de Nadine. Elle tournoya sur place et attrapa les bras de Nadine.

— Je ne sais pas ce que tu sais ou ce que tu es, mais il ne peut pas me contrôler. Lui et moi partageons un lien.

Nadine grimaça.

— J'espère que tu ne penses pas à forniquer avec cette chose.

Lucious s'esclaffa.

— Où rencontres-tu de telles personnes ?

Elle aussi voulait connaître la réponse à sa question. Les quelques humains dont elle était proche se comptaient sur les doigts d'une main. La plupart d'entre eux se trouvaient dans son appartement en ce moment même, probablement en train de débattre de ce qui leur était arrivé. Elle rencontra le regard sévère de Nadine.

— Ce n'est pas comme ça. Des choses se sont produites et nos âmes sont maintenant liées. Si tu lui fais du mal, tu me feras du mal à moi aussi puisque je finirai par souffrir de sa douleur.

Nadine pâlit visiblement et trébucha en arrière. Ses yeux devinrent de grandes soucoupes. Au bout d'une seconde, elle tourna la tête sur le côté, comme si elle écoutait quelqu'un qu'elle ne pouvait pas voir.

— Je dois y aller.

Elle essaya de les dépasser, mais Lucious l'attrapa par le bras et la ramena en arrière.

— Pas avant que tu nous aies tout dit, dit-il.

— Enlève tes sales pattes de moi !

L'air s'agita à nouveau et Lucious siffla de douleur. Sa peau commença à fumer à l'endroit où il avait touché Nadine, et il retira sa main.

La paume d'Helena brûlait comme si quelqu'un y avait allumé une allumette. Sifflant de douleur, elle se plia en deux, la serrant contre sa poitrine.

— Ça fait mal !

— Je suis désolée. Nadine se précipita vers l'escalier.

Helena tendit sa main vers celle de Lucious, mais il la cacha derrière son dos.

— Je l'attraperai avant qu'elle ne s'échappe, dit-il.

— Ne le fais pas. Laisse-la tranquille. S'il te plaît.

— Pourquoi la protèges-tu ? Elle pourrait être dangereuse.

— Ça suffit, Lucious, rétorqua-t-elle. Laisse tomber.

— J'attendrai à l'appartement. Il s'éclipsa.

Laissée seule, elle se tenait sur le toit. Elle leva les yeux vers le ciel. Des nuages épais et lourds n'empêchaient pas seulement la vue d'être magnifique, ils semblaient aussi envelopper son esprit. Un soupçon de déception et d'inquiétude l'envahit lorsque la première goutte de pluie tomba sur sa joue. L'orage se préparait et trop de vies étaient en jeu.

Elle retourna à l'appartement et trouva Lucious parti.

— Il n'aurait pas pu… Je reviens tout de suite, dit Helena à tout le monde. Bien qu'elle soit certaine que seule Perri ait prêté attention à ce qu'elle avait dit.

Son cœur s'accélérait comme s'il était sur une piste de course, rivalisant avec sa respiration. Alors qu'elle montait dans l'ascenseur, son esprit était en ébullition. Que ferait-elle si Lucious faisait du mal à Nadine ? Pour se changer les idées, elle se concentra sur les chiffres qui diminuaient au-dessus de sa tête. À la seconde où ils atteignirent zéro, elle sortit en courant.

*****

Lucious rattrapa la connaissance d'Helena en un rien de temps et la suivit. La pluie sifflante tombait autour d'eux. Elle ne pouvait pas être normale. Aucun humain ne pouvait distinguer un vampire d'un mortel d'un seul regard.

Lorsqu'elle tourna au coin de la rue, il attendit qu'elle soit assez proche pour l'attraper par les épaules et la tirer dans l'obscurité. À sa grande surprise, elle ne cria pas et ne se débattit pas.

La jeune fille enroula ses mains autour des siennes. Son contact lui brûla la peau.

Étudiant les brûlures, il trébucha en arrière.

— Qu'est-ce que c'était ?

Nadine releva la tête pour croiser son regard. Avec un air de dégoût, elle se détendit contre le mur. Sa posture décontractée le troubla.

— Je t'ai dit de ne pas me toucher, vampire. Quitte Helena et trouve d'autres proies à traquer.

Lucious n'allait pas commencer à craindre la petite fille qui se trouvait devant lui. Même si cette créature était l'amie d'Helena, elle n'avait pas à savoir ce qu’il en était.

— Je ne lèverai pas la main sur toi si tu réponds à mes questions.

Nadine gloussa.

— Ou bien quoi ? Tu m'attaques ? Tu prendras mon sang comme la sangsue que tu es ?

— Si tu veux aller aussi loin… Ses oreilles perçurent des bruits de pas qui se rapprochaient de leur position. Le lien trembla, l'informant qu'il s'agissait d'Helena. À son grand désarroi, le lien fonctionnait dans les deux sens. Il pouvait la trouver, et elle pouvait le localiser facilement. Il poussa un juron.

La tête de la jeune femme passa le coin de la rue. Il pouvait entendre son cœur battre aussi vite que ses respirations. Lucious resta sur place, même si le lien lui disait de s'approcher, de la toucher.

Helena observa la scène qui se déroulait devant elle et lui lança un regard noir.

— Tu lui as fait du mal ?

— Je n'ai rien fait de tel.

Elle se précipita aux côtés de Nadine, balayant son amie de la tête aux pieds.

— Dieu merci, tu vas bien.

— Si tu veux me parler, viens à cette adresse. Nadine donna à Helena un morceau de papier tiré de son petit sac à main. Nous aurons beaucoup de choses à nous dire quand cette chose ne sera pas là.

Lucious éloigna Helena de Nadine et la serra contre sa poitrine. La chaleur qu'elle dégageait se propagea jusqu'à lui, tandis qu'elle s'inclinait inconsciemment à son contact. La corde entre eux bourdonnait d'excitation. Il lutta contre l'envie de fermer les yeux et de se délecter de la paix que leur proximité lui procurait. Pour faire le vide dans son esprit, il se déplaça de façon à ce que leurs corps soient à un centimètre l'un de l'autre.

— Je l'ai déjà dit, elle n'ira nulle part avec toi seule.

— Je sais que tu ne m'aimes pas, mais je suis d'accord, dit Helena. Il faut qu'on parle.

— Je t'aime bien, Helena. Tu es ma première amie dans ce monde, et je souhaite que cela reste ainsi si je le peux.

Lucious envisagea d'utiliser la force contre cette créature. Finalement, il décida de ne pas le faire. Helena ne lui pardonnerait pas de tels actes, et il avait besoin d'être près d'elle pour la protéger.

— Nadine ? demanda Helena.

— Je vais parler à Horus et voir s'il y a un moyen de te libérer de ton lien.

Helena fronça les sourcils.

— Qui est Horus ?

Nadine lui adressa un sourire triste.

— Tu ne me croiras pas si je te le dis.

— Essaie toujours, lança Lucious.

Le sourire de Nadine s'effaça.

— C'est mon ange gardien.

Lucious éclata de rire.

— Est-ce que tous les humains en ont un de nos jours ?

Nadine pencha la tête sur le côté.

— Qu'est-ce que tu veux dire ?

— J'en avais un jusqu'à récemment, répondit Helena avec un sourire penaud.

— Je ne comprends pas. Un ange ne quitte son poste qu'à la mort du saint. Et il n'y a pas deux saints qui occupent… Nadine se couvrit la bouche. Je dois partir. Je dois rentrer chez moi.

Lucious fit un geste pour l'arrêter, mais Helena attrapa sa manche. S'il l'avait voulu, il aurait pu facilement se libérer de son emprise. Il ne le fit pas.

La mystérieuse femme donna une rapide accolade à Helena et s'éloigna d'eux avec élégance, comme si rien au monde ne l'effrayait.