Ma vie parfaite - Camille Trolliet - E-Book

Ma vie parfaite E-Book

Camille Trolliet

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Beschreibung

Et puis un jour, je me retourne et je vois ce nuage. Cet énorme nuage. Et je me dis, « Wow, en fait, j’étais là dedans jusqu'à maintenant. Et je n’ai rien vu. »

Ce livre est un partage, un recueil d’expériences et de tranches de vie très intimes d’une maman qui passe  notamment par la dépression post-partum et le burnout parental sans s’en rendre compte, pour en sortir 4 ans plus  tard, seule.

C'est un témoignage touchant et poignant de la réalité de la maternité, de prises de conscience et de réflexions  profondément personnelles.

Mais c’est aussi une voix qui s'élève, une preuve que « quand on veut, on peut », une histoire de maman, de femme, mais aussi d’entrepreneure multi passionnée. 

Un récit drôle, parfois ironique, teinté de drame dans une écriture sincère et authentique.







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Les bêta-lectrices ont aimé

« Le récit sincère et émouvant d’une femme multi-facettes qui nous livre son parcours pour retrouver un équilibre après être devenue mère et avoir connu des moments sombres.

De l’empathie, de la compassion. Le sentiment parfois étouffant d’être responsable et liée à un bébé, de ne plus avoir d’espace pour soi.

Des pistes pour prendre du recul, la certitude qu’il est nécessaire de s’accorder du temps et d’être indulgent envers soi-même, trouver sa voie, un côté rassurant de savoir que l’on est nombreuses à vivre des émotions ambivalentes en devenant maman.

Un témoignage sincère, poignant et sensible sur la réalité de devenir maman tout en restant femme. »

Coralie Cottier

 

« Un récit de vie vrai et simple qui montre la réalité de la vie de gens normaux loin des m’as-tu-vu que l’on découvre normalement. Beaucoup de vérité et des partages très riches qui apportent leurs petites touches de bonheur.

Beaucoup de légèreté, de la joie, et ce sentiment de me dire que quoi qu’il arrive, je ne serai pas seule.

En tant que future maman, cette lecture m’a apporté beaucoup moins de culpabilité. »

Élodie

 

« Comme je suis maman en devenir, les sentiments qui m’ont traversée ont été nombreux car il y a encore pleins d’expériences que je n’ai pas faites. Cette lecture m’a apporté des clés, outils et questionnements que je pense pouvoir mettre en pratique ou reprendre dès que j’en aurai besoin. C’est un livre reflétant la pensée d’une maman pouvant servir à toutes les autres, par endroits, par moments et surtout permettre de déculpabiliser et de ne pas se sentir seule. »

Kim

Camille Trolliet

Ma vie parfaite de maman entrepreneure en dépression post-partum

Témoignage

© 2023, Camille Trolliet.

Illustrations : QueenMama

Reproduction et traduction, même partielles, interdites. Tous droits réservés pour tous les pays.

ISBN 9782889820122

À vous toutes, chères mamans.

Avec force et douceur.

 

Et à vous, mes bébés d’amour.

Préface

Ce témoignage a pour but de mettre du baume au cœur de celles qui empruntent ce chemin de la dépression post-partum (mais pas que) et de leur montrer qu’elles ne sont pas seules, leur donner le courage et la force d’écarter les sentiments de culpabilité, d’incompétence et les doutes. C’est une manière de dire que nous sommes humaines, toutes différentes et que c’est normal.

Outre cela, c’est une preuve de courage et de volonté. Un don à moi-même, la preuve que j’avance, que l’on peut, et que l’on doit, aller de l’avant pour suivre ses rêves quels qu’ils soient. La promesse de faire les choses qui nous tiennent à cœur. De réaliser que tout est possible, et même d’écrire un livre.

C’est également prendre le risque de ne pas plaire, de l’assumer et d’accepter les critiques. Assumer mes maux et mes mots dans tous les sens du terme, pour faire ce qui est important pour moi, et non pas, ce que je pense que l’on attende de moi.

Et, bien sûr, devenir le modèle que je souhaite être pour mes enfants, mes bébés d’amour qui ont fait de moi ce que je suis aujourd’hui et qui me forcent à devenir celle que je dois être. Je veux leur montrer qu’il faut se faire confiance, suivre son instinct, croire en soi et ne jamais lâcher.

 

« Non, je n’ai rien fait, je suis restée pendue à un clou toute la journée, je n’ai pas habillé les enfants, je ne les ai pas changés. Je ne leur ai pas donné à manger ni brossé les dents. Nous ne sommes pas sortis, le chien non plus d’ailleurs. Et, bien sûr, je n’ai pu avancer sur rien puisque j’étais pendue à un clou. »

 

C’est parfois l’impression que j’avais et, très souvent, ce que j’avais envie de répondre lorsque l’on me demandait, le soir : « Comment s’est passée ta journée ? »

 

Bienvenue dans le livre d’une femme qui a, entre autres, fait une dépression post-partum, sans s’en rendre compte. Bienvenue dans sa réalité de maman au foyer, hyperactive et multi-passionnée.

Partie 1

Qui suis-je ?

Ces questions que je me pose sans cesse depuis plusieurs mois. Ces grossesses, idéalisées et mises en avant comme la plus belle chose, m’ont fait me perdre. Par le passé, je n’ai jamais douté de moi, je n’ai jamais douté de mes capacités, de qui j’étais. J’étais forte, j’avais une volonté de fer, je faisais les choses, parfois sans réfléchir, mais je les faisais et j’allais de l’avant.

Et tout à coup…

Qui suis-je ? Qui suis-je sans enfants ? Et si j’avais eu des frères et sœurs ? Et si j’avais choisi moi-même mon parcours ? Avec ce que je sais aujourd’hui, qu’aurais-je choisi ? Et si j’étais restée à Moscou pour parfaire mon russe ? Et si je n’avais pas géré mes émotions lorsque notre couple était au bord de la faillite ? Et si j’étais restée dans mon dernier job ? Et si nous n’avions pas eu d’enfant ? Et si j’avais baissé les bras lorsque ça devenait difficile ? Tout cela serait-il quand même arrivé sans le deuxièmeenfant ? Pourquoi je n’arrive pas à dire non ?

Spectatrice de ma vie

Nous sommes en février 2023 et je commence à réaliser des choses. Maintenant que je suis sortie du gros nuage – je crois –, je me rends compte que j’étais dans un état de fatigue extrême, avec un moral à ras les pâquerettes et un sentiment d’incapacité profonde, de déception et de frustration quotidienne. J’avais perdu mes fous rires, mes rêves et je m’étais perdue moi-même. Les questionnements et le travail que j’ai faits sur moi durant les derniers mois, m’ont fait prendre conscience que je n’étais plus alignée avec mes rêves, que j’avais des pensées plus sombres et que je n’étais pas (plus) celle que j’avais envie d’être.

 

Je parle tout d’abord de grosse déprime, de baisse de moral. Et puis, un jour, je réalise que c’est plus. Je réalise que cela a un nom. Ou plusieurs. Parce que je ne sais pas vraiment lequel il faut lui donner. C’est alors que, sans avoir consulté de professionnel, sans avoir mis un nom dessus de manière officielle, je prends conscience que j’ai fait une dépression. Une dépression qui est complètement passée inaperçue.

Sérieux ? Moi, une dépression ?

À force de vouloir faire bien pour tout le monde, je me suis oubliée. Pourtant, on nous le dit toujours dans chaque avion : mets ton propre masque à oxygène avant de t’occuper des autres ! C’est si logique.

Tout cela, j’en prends conscience en écrivant. En allant chercher au fond de moi-même ce qui est important, ce qui me motive, ce que j’aime. En faisant l’exercice de me questionner sur ce qui est important pour moi, je me rends compte que je ne fais (plus) rien de tout ça. J’ai complètement mis tout ce que j’aime sur pause. En réalité, je ne sais même plus ce que j’aime. Je ne sais même plus rire, d’ailleurs. Tout ce qui faisait que celle que j’étais pouvait être fière d’elle, tout cela a disparu.

Et puis, je commence à en parler autour de moi, de manière très prudente. Sans clairement nommer la dépression mais en évoquant certaines choses, certaines pensées que j’ai eues ces derniers mois. Simplement en mettant des mots sur mes attitudes, sur mon état d’esprit.

Et finalement, la personne la plus proche de moi, mon chéri, Chris, mon conjoint, le papa de mes enfants, me regarde un jour, les yeux écarquillés, et me demande : « Tu as fait une dépression ? » Il n’a rien vu. Pris dans les vagues du quotidien, il a sans doute dû penser que la maternité me faisait devenir une vieille ronchonne, une vieille rombière. Bref, une emmerdeuse quoi.

D’autres personnes, amis, parents, s’étaient rendu compte que quelque chose ne tournait pas rond. Certains étaient étonnés, d’autres pas du tout. Je crois que c’est cela qui m’a le plus surprise !

Et plus j’avance sur ce terrain, plus je me rends compte que ce n’est que la pointe de l’iceberg que je vois. Je parle d’une dépression, mais, en réalité, il y en a eu plusieurs. En réalité, je n’ai pas tiré sur la corde, j’ai tiré sur toutes les cordes que j’avais. J’ai mitraillé dans tous les sens. Comme si c’était la dernière chance. Je voulais me débattre à tout prix mais je faisais n’importe quoi.

Pas une dépression, mais plusieurs

Toute seule, c’est difficile de se rendre compte. C’est pour cela que j’ai mis si longtemps à réaliser que je n’allais pas bien, que mon état n’était pas normal. Je n’ai pas tilté qu’il y avait un problème et je ne me suis pas posée de question. J’ai pensé que c’était normal.

Alors avoir des enfants, c’était donc ça ? Être fatiguée tout le temps, se mettre de côté, ainsi que tout ce qu’on aimerait faire, ne plus être vraiment soi, ne plus avoir de cartes à jouer.

Aujourd’hui, je me rends compte que je n’ai pas réussi à porter ce regard sur moi, je ne me suis pas rendu compte que j’allais mal. Je n’ai pas l’impression que mon entourage m’ait questionnée quant à mon état. Je pense que tout le monde s’est dit, comme moi, « c’est normal avec des enfants en bas âge ».

Mais non, en réalité, ce n’est PAS normal. Quelle aurait été ma réaction si l’on m’avait dit que je faisais une dépression ? Peut-être l’aurais-je nié ? Je me serais fâchée ? Peut-être. Mais peut-être pas. Et cela m’aurait peut-être permis de gagner du temps. Ou d’en perdre moins.

Dans le peu de documentation, de podcasts1 et d’interviews que j’ai trouvés et lus, plusieurs professionnels parlent de l’effet de mode de la dépression post-partum. Alors, je me suis questionnée si j’étais légitime d’utiliser ce terme. La dépression. Car, non, il n’a pas été validé cliniquement. Mais le fait est que je n’en trouve pas de meilleur. Et dire que c’était une « déprime » est absolument absurde.

J’ai réalisé que de nommer la dépression post-partum est une chose importante. Cela aide beaucoup de se rendre compte que l’on a effectivement quelque chose et que c’est une maladie qui existe et qui n’est pas nouvelle. Je ne l’ai pas inventée et, surtout, elle peut passer. Il y a des aides et des solutions et elle ne va pas rester tout le temps. Réaliser cela m’a permis de ne plus devoir me dire chaque jour « mon Dieu, dans quoi me suis-je lancée ? Est-ce que ce sera tout le temps comme ça ? ».

Alors, Mesdames qui n’osez pas, s’il vous plaît, pensez au temps que vous perdez. Car, seule, on va moins loin et, surtout, on va moins vite.

Parce que même si avoir des enfants est un choix et même si c’est un rêve, nous ne sommes pas toujours toutes armées de la même manière pour faire face à tout ce que nous allons ou pourrions traverser dans la maternité. Et c’est OK. On a le droit.

Le regret maternel

L’année dernière, j’ai découvert ce vaste sujet. D’abord, je ne l’ai pas compris. Il ne s’agit pas de regretter l’enfant né, ou de ne pas l’aimer, mais il s’agit de regretter ce qui « n’est plus », à la suite de la naissance. De ne pas aimer une partie ou tout ce que représente la maternité. Or l’amour pour son enfant, quoique bien présent, ne suffit pas à compenser le vide.

Regretter le temps qu’on n’a plus, regretter la liberté disparue, la flexibilité, la spontanéité, les grasses matinées, les repas et week-ends en amoureux, les moments de glande sur le canapé à se demander quoi faire et zapper. Pour moi, c’est aussi regretter la moto, la natation, les cours de pilates, les soirées entre copines, les moments en amoureux. Regretter mon corps, ma forme, mon énergie, ma taille de jeans. Regretter ma confiance en moi, mon estime de moi, ma force. Tant de choses, futiles pour certaines et si importantes pour d’autres.

 

« Un rôle ingrat, trop lourd à porter, des frustrations, mais aussi la charge mentale, les sacrifices, le don de soi, le manque de soutien, l’anxiété décuplée, le manque de liberté et de confiance en soi et un certain renoncement. »

Astrid Hurault

 

« Le regret maternel, à la différence de la dépression post-partum, n’est pas une maladie mais un ressenti. Il s’agit plutôt d’un mal-être que l’on ne soigne pas, mais que l’on soulage progressivement, jusqu’à l’adoucir avec le temps. »

Ehlee

 

Or, toutes ces choses que je regrette, finalement, ce sont des choses que je peux changer, adapter, organiser. En réalité, ce n’est autre qu’une hiérarchisation de priorités. En revanche, je comprends ces femmes qui ne veulent pas prendre le risque de perdre cette liberté, de faire un enfant qu’elles regretteront, de changer leurs vies. Car lorsqu’on sait (ou qu’on croit savoir) ce qu’on risque de perdre et qu’on se focalise dessus, le choix ressemble toujours plus à une sentence. Pourtant, une chose est sûre, c’est que si on savait toujours ce qui nous attend, la vie n’aurait aucune saveur et, sans doute, qu’elle se résumerait à éviter de « vivre » de peur de mourir, éviter d’aimer de peur de souffrir. Et puis encore, ce risque de regretter de ne pas avoir eu le courage d’y aller et s’en vouloir, une fois que c’est trop tard.

C’est tellement difficile de faire un choix conscient. Pression sociale, idéalisation, injonctions à la maternité, instinct maternel, épanouissement de la femme, de la maman. Il me semble tellement important de faire sauter les schémas et briser les tabous. Et c’est pour cela que je n’ai aucun doute sur le fait qu’en parler est libérateur. C’est aussi permettre à d’autres femmes de se questionner et de se libérer également de ce poids, ne serait-ce qu’en partie.

Regretter, c’est aussi croire que, sans enfant, cela aurait été différent et mieux, sans doute. C’est croire que la vie aurait été plus clémente avec le temps, avec nos rides, notre silhouette, notre poids, nos relations, nos amours… Croire que tout aurait pu rester et persister dans le temps, sans influences extérieures. C’est l’illusion de croire que tout aurait continué comme avant. Parce que, au final, il y a peu de chance que tout reste identique, que les mêmes personnes restent dans notre même environnement, dans le même bar, à jouer au même baby-foot, toujours, sans évoluer ni changer.

Alors, pour moi, et dans mon cas, regretter tout ça est un peu utopique, finalement. Aussi et surtout, comme le dit souvent David Laroche : « Parce que je ne sais pas ce que je ne sais pas. »

 

« Quand on ne peut plus revenir en arrière, on ne doit se préoccuper que de la meilleure manière d’aller de l’avant »

Paulo Coelho

 

Mais, finalement, lorsqu’il faut payer l’addition de sa vie, quel regret sera le plus important ? Ou quel remord ? C’est comme de jouer à la Bourse : que dit la balance entre l’importance de l’expérience et le risque encouru ? Est-ce que, le dernier jour de ma vie, je serai OK avec le fait de ne pas avoir tenté ce qui était important pour moi ? Est-ce que je ne vais pas regretter de ne pas avoir essayé, de ne pas avoir eu le courage ? Simplement le courage d’être honnête avec moi-même.

Un saut dans le temps

Faisons ensemble un saut en arrière. Mais ne cherchons pas à tout prix le fil rouge de l’histoire, car il est dans ma tête. C’est un réel enchaînement d’événements et de réflexions qui ont chacun eu leur importance et leur raison d’être.

À l’époque, je suis au-devant de beaucoup de changements, de questionnements et d’émotions. Mais tout cela est encore derrière le rideau et, heureusement, que nous ne savons pas tout à l’avance, n’est-ce pas ?

Rien n’arrive par hasard

En 2012, je pars à Bâle pour intégrer un nouveau poste. C’est vraiment une chouette ville, mais je n’y trouve pas ma place. Je suis très seule et n’attends finalement que le week-end, pour revenir « chez moi ». Si la deuxième année est moins extrême parce que mon chéri m’y rejoint, je « remplis » quand même littéralement mes deux années là-bas par du shopping et des dépenses. Je n’ai jamais acheté autant de choses de ma vie. Parfois utile, souvent non. Mais, surtout, je me rendrai compte bien plus tard que ces choses étaient là pour remplir un vide au fond de moi. Remplir une solitude, une tristesse.

Du shopping irréfléchi, sans raison ni sens. Parce que je peux me le permettre et parce que je n’ai rien d’autre à faire. J’achète des choses qui ne servent à rien, des vêtements que je ne vais, pour certains, jamais porter et que je vais revendre par la suite. J’achète autant de choses qu’il est nécessaire pour en être dégoûtée. Je fais une overdose de shopping. Mais je ne m’en rends pas compte, car, parmi tous les événements rebondissants que je vis, certains en masquent d’autres.

Et puis, je deviens intolérante au shopping, à la consommation, au plastique, à toute cette effusion dans les magasins. Je deviens intolérante à ce que j’ai consommé de manière irraisonnée pendant ces deux dernières années.

Début 2014, mon employeur déplace le siège social et s’attend à ce que je le suive. Je refuse, on me licencie et je quitte Bâle pour revenir en Suisse romande. Revenir dans la maison familiale à 31 ans est aussi un pas difficile à faire. Une sorte d’échec.

Je prépare le gros de notre déménagement seule et je fais beaucoup d’allers et retours. Je me mets une pression inutile et cette situation me stresse énormément. En parallèle, j’organise également le déménagement de mon grand-oncle à l’EMS, avec tout l’administratif qui va avec, ainsi que celui de ma grand-tante vers un autre appartement. De gros travaux dans la maison de mes parents commencent et je gère le côté administratif avec la banque. J’intègre l’entreprise familiale et en reprends tout l’administratif.

À cette même période, je commence aussi un emploi à 60 % à Lausanne, dans l’organisation d’événements et de cours dans une association d’entreprises électriques. Le job est sympa et j’ai des tâches très variées. La raison principale est que le poste est très moyennement bien organisé et que je reprends les tâches au vol, quasi sans passage de témoin, sans supérieur et où je dois me débrouiller seule. Je fais le lien avec la Suisse allemande. J’adore ça. J’ai l’impression de (re)créer un lien entre la Suisse allemande et la Suisse romande. J’aime cette « bipolarité ». Je m’intègre facilement. Je gère mon job, mes objectifs, mes tâches, ma liberté. Je fais bien plus que ce qui est sur mon cahier des charges. On ne me demande rien, car je fais du bon travail, on me fait confiance et ça roule. Ça arrange tout le monde. Et pourtant, au fil du temps, si je dois être contente de ce que j’ai, mon enthousiasme s’estompe par manque de perspectives.

À la maison, je fais l’avocat du diable lorsque mon chéri intègre l’entreprise à son tour et qu’il faut gérer les avis divergents. Rien n’a été planifié. Je fais le tampon de tous les côtés pour que cette nouvelle cohabitation se passe au mieux.

Aussi, mes problèmes de hanches, présents depuis 2008, sont toujours là et montent en intensité. Je me fais finalement diagnostiquer et opérer en mars 2015. Ce sera une année de convalescence. C’est ce qu’on me dit. Et ce sera vrai : trois mois sur un seul pied, quatre mois avec deux cannes puis trois mois avec une seule. Lentement mais sûrement, je retrouve la capacité à marcher normalement sur deux jambes. Malgré quelques faiblesses et inconforts, quatorze mois plus tard, je peux dire que c’est derrière.

Et puis des interrogations, des problèmes de couple, des discussions sans fin et des remises en question. Comme tout le monde.

Entre 2014 et 2016, c’est une période très intense. Intense en termes d’émotions mais aussi en termes de charge mentale et de charge tout court. Hormis la reprise de l’entreprise familiale, pas du tout planifiée ni organisée, je suis très touchée par les décès de ma grand-maman, de mon grand-oncle et de son épouse dans une même et courte période.

On dit souvent qu’un déclic se produit avec le départ de proches. Comme un électrochoc. Pour ma part, en entendant certains récits de ces deux dames de mon cœur, je me jure que je ne regretterai jamais. Je ne regretterai jamais de ne pas avoir fait quelque chose qui me tenait à cœur. Arriver le dernier jour de ma vie et regretter devient alors inacceptable. Je me questionne sur mes rêves et sur ce qui est important pour moi et faire à tout prix ce qui me tient à cœur devient une sorte d’hommage que je leur rends.

Fin 2016, nous entreprenons un voyage « en amoureux » à l’autre bout du monde. Un voyage qui met du baume au cœur, qui fait revivre, prendre le temps, qui pose des questions existentielles, qui resserre les liens et clarifie les envies. Ce voyage met aussi fin à une période très intense. En termes de stress et d’émotions, je n’ai jamais connu pareilles situations. Des émotions d’ailleurs pas toujours agréables et un stress pas toujours positif.

À notre retour et par la suite, je commence à beaucoup bricoler, refaire des meubles, je passe du temps avec des vieilleries, dans des brocantes, dans des endroits qui me font du bien.

Et puis l’envie d’enfant. Déjà apparue quatre ans auparavant, cette envie réapparaît tout d’un coup. De fil en aiguille, elle devient une obsession. Je me réveille avec ce souhait, je mange avec cette envie, je respire ce besoin, je survis malgré le désir et je m’essouffle avec la nécessité d’avoir un enfant.

Ces nuits sans sommeil où je pose mes mains sur mon ventre, parlant en pensée, à l’âme de ce bébé que j’espère. On m’a dit de visualiser une fleur qui s’ouvre. Mon ventre se transforme alors, chaque soir, en champs de fleurs. À chaque fois que je me lève la nuit pour aller aux toilettes, je m’arrête vers la fenêtre, les yeux levés, perdus dans les étoiles pour, peut-être, apercevoir une étoile filante qui me permettrait de faire un vœu. Mais rien ne se passe. C’est long et dur émotionnellement, parfois. En fait, je ne me reconnais pas. Moi qui n’ai pas « su depuis toujours » que je voulais des enfants et qui n’ai jamais vraiment eu cette « envie plus que tout », elle est pourtant là et elle me pourrit gentiment la vie. Je n’arrive pas à lâcher prise.

Lorsqu’on espère, les possibles sont ouverts, tous les feux au vert, on est au taquet, motivée et heureuse. Et lorsqu’on désespère, tout s’arrête, on ferme les écoutilles et on broie du noir. On élimine les options, on se sent comme un poisson enfermé dans un fond d’eau dans un bocal de verre.

Ce lâcher-prise est partout. On le connaît, on sait qu’il ne sert à rien de rester si ferme et de penser jour et nuit à ce qui nous obsède. On sait qu’il faut lâcher prise. Et pourtant, dans le concret, c’est bien plus difficile.

Voilà en quelques lignes, tu sais tout, ou presque, de cette partie de ma vie. Mais rien ici n’est inutile. Rien n’a pas de sens. Ces quelques années, c’est comme poser les bases. Tu verras.

Le leadership bienveillant

En septembre 2017, je commence une formation. Ça fait cinq ans que j’ai terminé l’EHL2 et un moment que je pense à faire un master, un CAS3, n’importe quoi à mettre sur mon CV4 « pour montrer que je ne stagne pas dans ma carrière professionnelle ». C’est la conclusion que je ferai plus tard, car, normalement, cela devrait être l’inverse : on fait des choses parce que cela nous intéresse et non pour avoir quelque chose à mettre sur son CV.

Quoi qu’il en soit, mi-2017, je découvre le MicroMBA5 en management entrepreneurial. Le programme, le contenu et l’approche pratique et entrepreneuriale m’intéressent beaucoup. Ce n’est pas comme les autres formations que j’ai regardées jusqu’à maintenant. Elle ne dure pas quatre ans, semble plus concrète, plus large, bref, elle m’interpelle et je décide de suivre mon instinct.

Lors du deuxième module de la formation, « le Leadership bienveillant », j’ai un électrochoc. Une vraie prise de conscience. On est dans la salle d’un hôtel et je me rends compte, enfin, que je ne suis ni épanouie ni à ma place dans mon job, et que les valeurs importantes pour moi ne sont pas présentes dans mon quotidien.

Ça fait bientôt quatre ans que je suis à ce poste, dans cette entreprise. C’est « tranquille », car je sais et je fais ce que j’ai à faire, j’organise mes événements et mes cours. Je fais même bien plus que ce qui est dans mon cahier des charges, car je fais moi-même certaines traductions, je modifie, corrige et crée moi-même certaines présentations Powerpoint. Ce n’est pas du tout mon job, mais ce n’est pas le fort de certains orateurs et, finalement, j’aime bien et le fais bien.

Mais je m’ennuie. Pourtant, je ne veux pas me plaindre et surtout pas en changer, car c’est un poste à temps partiel, avec beaucoup d’avantages, des responsabilités, on me fait confiance et on me laisse diriger mon truc. Et surtout, c’est, ce sera, ce serait un poste idéal avec des enfants. Mais ça, c’est ce que je crois.

Démissionner à tout prix

En décembre 2017, j’ai cette prise de conscience : je veux démissionner. Comme si rien ni personne ne pourra plus me convaincre du contraire, c’est ce qu’il me faut.

Je me suis énormément rapprochée de la deuxième main à la suite des événements passés. Mon overdose de Bâle a fait son travail de fond et les décès de ma grand-maman, mon grand-oncle et ma grand-tante ont donné le coup de grâce. Depuis plusieurs mois maintenant, j’ai un besoin grandissant de sens, de créer quelque chose de mes mains et de redonner une nouvelle vie aux objets. Je refais des meubles, je chine et détourne des objets, je crée des bijoux. Ce besoin de garder des objets, de les faire revivre, de ne pas jeter. À tout prix. Aller à l’encontre de la (sur)consommation.

En parallèle de mon job, je vends mes créations dans mon entourage et sur les réseaux sociaux. Puis, l’idée me vient de me rendre visible en ligne, alors il faut que je crée mon site internet ! Il me faut donc un nom, une marque. Je crée alors By Tessa. Tout s’enchaîne rapidement, sans vraie réflexion. C’est urgent, il faut que j’avance.

Côté privé, cela fait presque un an que « je veux » avoir un enfant. Si j’ai cette envie depuis environ cinq ans, dans mon esprit, ça fait un an qu’on essaie. Et que rien ne se passe. Je suis très troublée et je me sens blessée par toutes ces personnes de mon entourage qui se marient et qui font des enfants. Ces personnes, qui, avancent en somme, alors que, moi, je stagne. Je suis heureuse pour elle, mais triste.

Je réalise que je suis en train de garder un poste (qui ne me plaît plus) dans un environnement (qui ne m’inspire plus) pour un bébé (qui ne viendra peut-être jamais) et que je ne suis pas du tout alignée avec mon monde. Je réalise que je vais peut-être perdre des années à espérer un truc qui ne viendra jamais. Je réalise que je ne veux pas que toute ma vie tourne autour d’un rêve qui ne peut pas être réalisé.

Cela devient, pour moi, inacceptable de m’imaginer dans vingt ou quarante ans et d’avoir passé (perdu ?) x années de ma vie à courir après un rêve qui n’est jamais venu. Et d’avoir donné mon temps à un enfant qui n’existe pas. Je ne veux pas être cette personne qui n’avance pas, qui espère sans rien faire et qui, à la fin, regrette de n’avoir pas su se bouger.

Je réalise que je ne veux pas avoir un enfant à n’importe quel prix. Je réalise que je dois vivre aujourd’hui, pour moi.

Alors en mars 2018, je démissionne.

Certains me disent courageuse, d’autres (beaucoup) ne comprennent pas.

Je me dis « out of the blue » que je vais faire du relooking6 de meubles, de la déco, récupérer des choses. Parce que, à ce moment-là, c’est ça qui est important. En fait, ce que je veux surtout, c’est aller me cacher dans mon atelier, refaire des meubles et ne voir personne. Ne pas voir la vérité en face, ne pas voir cette consommation à outrance partout, ne pas voir ma vie. Je veux me voiler la face.

Je termine mon job en mars 2018, et je fais mon inscription au registre du commerce en mai de la même année. Ce n’est pas nécessaire, mais cela me donne de la contenance et du courage. Je pense, sans doute, y trouver un soutien et me donner de la crédibilité à moi-même !

Je me donne jusqu’à la fin de l’année 2018 pour prendre la température avec By Tessa et voir si j’arrive à faire démarrer quelque chose.

Mais, malheureusement, rien n’est clair dans mon esprit, tout comme rien n’est clair sur le papier.

Le burn out du colibri

C’est flou dans ma mémoire, mais à cette période, je souffre beaucoup de tous les côtés.