Prier 15 jours avec Olivier Clément - Franck Damour - E-Book

Prier 15 jours avec Olivier Clément E-Book

Franck Damour

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Beschreibung

Lorsqu'on le présentait comme « théologien », Olivier Clément (1921-2009) riait un peu, disant qu'il faisait de la théologie en amateur, non comme un professionnel… puis il ajoutait que dans « amateur », il y a « aimer » !
Ce petit livre se veut une initiation à une oeuvre paradoxale, pleine de lumières et d'ombres, une oeuvre qui n'a jamais prétendu apporter des prêts-à-penser, des dogmatiques bien faites et closes qui aiment à parler du mystère comme si c'était une chose bien délimitée et circonscrite.
La spiritualité d'Olivier Clément, figure de l'orthodoxie en France, est théologienne, car elle est tout entière informée par le souci de dire Dieu, par la narration de Dieu, par l'attestation subtile, sereine et claire de sa présence, par l'élucidation de notre dialogue avec Lui dans l'histoire. Une invitation à entrer dans l'amitié mystérieuse de Dieu .


À PROPOS DE L'AUTEUR

Franck Damour, historien des idées et bon connaisseur de la pensée religieuse russe, a bien connu Olivier Clément. Il est chercheur associé au sein de la Chaire « Ethique, technologie et Humanités » de l'Université Catholique de Lille.

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Olivier Clément

COLLECTION PRIER 15 JOURS

• Des livres sources

– pour passer quinze jours en compagnie d’un maître spirituel à la manière de ces temps de retraite qui ouvrent une brèche dans notre univers quotidien.

• Des livres pratiques

– un rappel biographique en début de volume ;

– un itinéraire balisé en introduction ;

– une entrée dans la prière répartie sur les quinze chapitres de l’ouvrage ;

– pour aller plus loin, une bibliographie expliquée.

• Des livres accessibles

– un ressourcement qui va à l’essentiel pour des chrétiens actifs ;

– une information donnée de l’intérieur pour un public plus large.

DU MÊME AUTEUR

Olivier Clément, un passeur : son itinéraire spirituel et théo- logique, Anne Sigier, Québec, 2003.

Qu’avons-nous fait de l’au-delà ?, Bayard, 2011.

Le Pape noir : genèse d’un mythe, Lessius, 2013.

La Tentation transhumaniste, Salvator, 2015.

Heureux les mortels, De Corlevour, 2016.

Transhumanisme : quel avenir pour l’humanité ? (avec David Doat), Le Cavalier Bleu, 2018.

Prier 15 jours avec

OLIVIERCLÉMENT

Théologien dans le mystère

Franck DAMOUR

nouvelle cité

Composition : Nord CompoCouverture : Richard Garcia.

Illustrations de couverture :1, Olivier Clément en mars 2004.4, portrait de l’auteur, D. R.© AELF pour les citations bibliques.© Avec l’aimable autorisation des éditions Salvator.

Tous droits de traduction, d’adaptationet de reproduction réservés pour tous pays.

© 2024, Groupe ElidiaÉditions Nouvelle Cité10 rue Mercœur – 75011 Pariswww.nouvellecite.fr

ISBN : 978-2-37582-576-1ISSN : 1150-3521

BIOGRAPHIE

Historien et théologien, Olivier Clément a été une grande figure, à la fois de l’orthodoxie dans ses différentes sphères, et du monde intellectuel français. Il a marqué de son empreinte la seconde moitié du XXe siècle par son œuvre écrite et son activité d’intellectuel engagé. Son parcours de vie a joué un rôle majeur dans ce rayonnement, puisque rien ou presque ne l’y prédestinait.

Olivier Clément naît au milieu de l’automne de l’année 1921 à Aniane, un village languedocien au pied des Cévennes, entre montagnes, garrigues et mer. Il grandit dans une famille de la plaine plus que des Cévennes, une famille socialiste depuis deux générations, faite de maîtres d’école et de paysans. Il ne reçoit pas d’éducation religieuse. Adolescent, il entame un long cheminement qui le conduit d’abord à se rapprocher des mouvements politiques socialistes, dans la France des années 1930. Mais cela ne parvient pas à combler sa soif d’absolu. La poésie, les grands romanciers ont pu le satisfaire un peu, mais pas totalement. Il explore aussi les cosmologies anciennes et orientales : soufisme, hindouisme, kabbale juive, ésotérismes divers. Olivier Clément est en quête de l’Esprit, et il ne l’a pas trouvé dans les Églises occidentales, telles qu’il les connaissait alors.

La guerre est un tournant décisif. Étudiant l’histoire à l’université de Montpellier, il a pour professeurs d’illustres maîtres – Henri-Irénée Marrou, Marc Bloch, Alphonse Dupront surtout. Après avoir passé l’agrégation en pleine guerre, il part dans le maquis, puis rejoint le réseau de résistance animé par Dupront, entre l’Armagnac et le Languedoc. C’est lors de ces voyages qu’il découvre dans les livres de Nicolas Berdiaev et de Vladimir Lossky une autre forme de christianisme. Il se marie, mais le couple se sépare bientôt, malgré deux enfants. Après la guerre, il part travailler à Paris, où il devient professeur au lycée Condorcet, puis à Louis-le-Grand. Marié une deuxième fois, le couple a deux enfants. Clément connaît encore des années d’errance intérieure, faite d’explorations des Orients spirituels, de la tradition alchimique, d’interrogations sur la figure du Christ qui sans cesse revient le questionner. Clément se confronte aussi à la tentation du suicide, avant de vivre une conversion : À un moment donné, Dieu est venu me chercher et je l’ai suivi. J’ai mis entre parenthèses tout ce que je savais sur les religions. Je lui ai fait confiance (AS 125). Il est baptisé en 1952, à l’âge de 30 ans, au sein de l’Église orthodoxe. Il rencontre alors Monique Jouanne, qui devient sa troisième épouse et l’accompagnera toute sa vie. Ensemble, ils auront deux enfants.

Il est accueilli dans l’orthodoxie par des figures majeures de l’émigration russe, Vladimir Lossky, Paul Evdokimov ou le père Sophrony. Il se lie d’amitié avec les deux premiers qui, sous des modes différents, incarnent la rencontre vivante entre la tradition russe orthodoxe et la culture occidentale. Il sera leur héritier sur ce point, consacrant un assez grand nombre de livres au monde russe (Soljenitsyne, Berdiaev, Dostoïevski et d’autres) et dirigeant chez Desclée de Brouwer la collection « Théophanie », où est publié, des années 1970 aux années 1990, le meilleur de la pensée religieuse russe. L’archimandrite Sophrony, ancien moine du mont Athos, est son père spirituel.

Peu à peu, par ses qualités de synthèse, de clarté, par son charisme d’écrivain et d’orateur, Olivier Clément s’impose comme une des figures de l’orthodoxie en Occident, capable de faire la synthèse de ses courants, respectée dans les divers patriarcats d’Europe occidentale et orientale, ou du Proche-Orient. En France, Olivier Clément devient un acteur important de l’orthodoxie, faisant rayonner la revue de théologie Contacts, enseignant la théologie à l’institut Saint-Serge pendant quarante ans, mais aussi au Centre Sèvres ou à l’Institut catholique de Paris. Il s’investit dans la préparation d’un concile orthodoxe au début des années 1970, aux côtés de Paul Evdokimov. À l’initiative du père Lev Gillet, il est également l’un des fondateurs et animateurs de la Fraternité orthodoxe en Europe occidentale. L’idée a germé dans un groupe d’amitié spirituelle, qui s’est tissé autour de la revue Contacts, avec diverses personnalités, telles que le métropolite Antoine Bloom, Boris Bobrinskoy, Cyrille Argenti, Élisabeth Behr-Sigel, Lev Gillet, Paul Evdokimov. En 1971, pour la première fois, un congrès de la jeunesse orthodoxe rassemble plus de trois cents orthodoxes de diverses origines, issus de juridictions différentes. La Fraternité en est née en 1975.

Olivier Clément est très engagé dans les dialogues tant œcuméniques qu’interreligieux, ainsi qu’en témoignent ses nombreux écrits et ses conférences, en France et à l’étranger (La Liberté du Christ, 1974 ; Un respect têtu, 1989). Il mène de longs entretiens avec les patriarches œcuméniques de Constantinople, Athénagoras Ier et Bartholomée Ier, dont il tire des ouvrages importants, et rencontre le pape Jean-Paul II, qui lui demande une méditation sur le chemin de croix en 1998. Il répond à son appel à réfléchir aux moyens de relancer le dialogue œcuménique avec un ouvrage dense et singulier, Rome autrement : une réflexion orthodoxe sur la papauté. Toute sa vie, Olivier Clément s’est fait passeur entre les divers mondes de l’orthodoxie et de la modernité, mais aussi entre les diverses Églises, puisant dans ces traditions chrétiennes des ressources pour relever les défis contemporains : l’athéisme, le communisme, la crise écologique (qu’Olivier Clément appelait « crise du cosmos »), les questions de bioéthique, les crises anthropologiques et culturelles. Peu auront autant fait pour traduire en mots compréhensibles par l’Occident les richesses de l’orthodoxie et amené les orthodoxes à comprendre les constructions occidentales. Proche du frère Roger, il publie un petit livre lumineux sur l’expérience spirituelle et humaine de Taizé. Dans les années 1980, il a tissé de fortes amitiés en Italie, notamment avec Andrea Riccardi, le fondateur de la communauté Sant’Egidio. Figure respectée, Olivier Clément a aussi été l’objet de critiques parfois virulentes de la part de milieux conservateurs, notamment lorsqu’il dénonce certaines dérives nationalistes dans les Églises orthodoxes russes ou d’Europe orientale.

Car Olivier Clément n’était pas un homme de chapelle. Il exerce comme professeur d’histoire au lycée Louis-le-Grand, un enseignement qu’il juge aussi important que ses travaux intellectuels. Il est l’auteur d’une trentaine d’ouvrages, à la fois poétiques, spirituels et historiques, écrits dans une langue souvent lyrique. Ce sont des essais sur le christianisme occidental, des livres d’entretiens avec des figures chrétiennes, des essais sur des enjeux contemporains. Le théologien Clément n’a pas fait œuvre de théologie systématique. La plupart de ses écrits étaient des réponses à des demandes et des interpellations. Loin d’être une faiblesse, la forme circonstancielle de son œuvre est liée à la nature de sa spiritualité : nourrie d’une compréhension de la théologie comme ouverture sur le Royaume, sa vie spirituelle a été traversée par le désir de partager cette ouverture.

Ami des poètes, il aime aussi les débats intellectuels dans les journaux, à la radio. Président de l’Association des écrivains croyants, qui regroupe des écrivains chrétiens, juifs et musulmans, très actif au sein de l’Association des chrétiens pour l’abolition de la torture (ACAT), travaillant à faire la lumière sur la situation des chrétiens en URSS aux côtés du poète Pierre Emmanuel, il est l’un des principaux intellectuels chrétiens en France, reçu comme tel dans tous les milieux. Il a dialogué avec les intellectuels marxistes dans les années 1960 et avec les penseurs musulmans dans les années 1980. Il intervient volontiers dans le débat public sur des sujets comme la question de la technique et de l’écologie, lors d’événements comme Mai 68 ou la guerre en ex-Yougoslavie. Sans doute certaines des grandes causes qu’il a défendues, comme l’œcuménisme ou l’unité des orthodoxes, semblent d’un autre temps pour notre époque marquée par les replis identitaires. Mais l’héritage d’Olivier Clément traverse son temps et conserve sa portée prophétique.

Cette lumière prophétique émanait encore du vieil homme, attirant à lui nombre de visiteurs dans son appartement parisien les dernières années de sa vie, immobile voyageur de l’esprit, sous la veille de son épouse Monique. Reclus du monde, Olivier Clément est retourné à Dieu le 15 janvier 2009.

INTRODUCTION

C’est pour répondre à des provocations existentielles – le mystère des visages, l’infini qui transverbère l’histoire humaine, le défi de la mort – qu’Olivier Clément est entré en théologie comme d’autres sont entrés en littérature, en poésie. Lorsqu’on le présentait comme « théologien », il riait un peu, disant qu’il faisait de la théologie en amateur, non comme un professionnel, puis il rajoutait que dans « amateur », il y a « aimer »…

Cette dynamique existentielle et spirituelle apparaît dans la forme même de l’œuvre d’Olivier Clément : une œuvre éclatée, d’une nature fondamentalement contemplative. Éclatée, car Olivier Clément n’a pas produit de grande synthèse théologique, écrivant de courts essais, publiant des recueils d’articles, des livres d’entretiens et, lorsqu’il écrit une large synthèse comme Sources, il le fait en s’effaçant derrière les citations des Pères. Il écrivait pour répondre à des appels, pour nourrir des rencontres, pour relever les défis de son temps – le nihilisme, l’athéisme, les révoltes de cette jeunesse dont il avait constamment le souci, la nature défigurée, le corps instrumentalisé, la désunion des chrétiens. Cela aurait pu donner des livres vite périmés, des livres qui passent. Au contraire, chacun de ces livres était à la fois pleinement en prise avec son temps et pleinement anachronique. On parcourt son œuvre comme on voyage d’île en île à travers un archipel : chacune de ces îles est reliée aux autres de façon vitale et invisible.

Olivier Clément n’a jamais été totalement dans les rails tout tracés des institutions et des généalogies : Méditerranéen exilé à Paris, Occidental en Orient, orthodoxe en Occident, poète au service des institutions. Cet adepte du pas de côté ne l’était que par souci d’appréhender la totalité. Olivier Clément, sans doute par sa formation d’historien, était de ces hommes qui semblent anachroniques par vocation. Se chargeant de son temps avec une telle intensité, un tel désir de le comprendre et d’y reconnaître les pétites dorées du Royaume, il ne pouvait être qu’à contre-temps.

Olivier Clément a développé une « spiritualité théologienne ». Non pas une « théologie spirituelle » comme on dit souvent en Occident. La démarche est inverse : il ne s’agit pas d’une théologie qui viendrait dire (et justifier) une expérience spirituelle, mais d’une spiritualité qui ne trouve son accomplissement que dans l’annonce théologique. La spiritualité d’Olivier Clément est théologienne, car elle est tout entière informée par le souci de dire Dieu, par la narration de Dieu, par l’attestation subtile, sereine et claire de sa présence, par l’élucidation de notre dialogue avec Lui dans l’histoire.

Cette spiritualité théologienne s’exprime à travers une œuvre dont l’unité tient avant tout à l’écriture, au style. Qu’il ait écrit de la poésie n’est pas un hasard, tant il aspirait à trouver les mots les plus ajustés. Les phrases d’Olivier Clément avancent par tâtonnement, ajustant la parole pas à pas avant d’accoucher d’une image – presque un vers, tant la formule se tient en équilibre. Ces formules ne sont pas des « chutes », mais au contraire des tremplins pour ouvrir la pensée à l’imaginal et nourrir l’imaginal du travail de la raison. Ce tâtonnement de la phrase permet aussi de récapituler toutes les étapes intérieures, comme s’il s’agissait de tout prendre en charge, de ne rien laisser de côté de l’expérience que l’on peut faire du dialogue avec Dieu.

Dès lors, lire Olivier Clément requiert de l’attention, une écoute intérieure capable de saisir les nuances car, en héritier spirituel de la pensée religieuse russe, Clément a le souci de toujours tout tenir ensemble. C’est souvent déroutant, le chemin peut sembler se perdre dans les hautes herbes. Pourtant, jamais il ne s’efface totalement, et ce chemin nous conduit là où nous ne nous y attendions pas.