Retrouver l’animal en soi - Béatrice Meilhoc - E-Book

Retrouver l’animal en soi E-Book

Béatrice Meilhoc

0,0

Beschreibung

Lors d’une pratique en Qi gong, Béatrice Meilhoc contacte un animal symbolique. Habitée par son énergie et son mouvement, son corps réagit intensément et des souvenirs perturbants se dissipent.
Forte de cette expérience, elle décide, à l’aide des potentialités de son animal et de l’alliance qui se crée, d’établir un protocole afin de traiter des traumatismes du passé. Dans son exploration, elle revisite des concepts de la psychothérapie, dont il est en grande partie question dans cet ouvrage. Ce dernier témoigne de l’animalité résidant en chacun de nous et de notre capacité à nous réintroduire dans ce lien primitif pour réveiller nos forces enfouies et notre potentiel de transformation.

À PROPOS DE L'AUTEURE

Formée à la psychothérapie APO, EMDR et ICV, Béatrice Meilhoc a enseigné le Qi gong pendant 10 ans. Ses formations et lectures s’y référant nourrissent son développement personnel. En écrivant le présent ouvrage, elle rappelle qu’en tissant des liens avec ce qui nous habite et nous entoure nous pouvons en extraire une vraie ressource.

Sie lesen das E-Book in den Legimi-Apps auf:

Android
iOS
von Legimi
zertifizierten E-Readern
Kindle™-E-Readern
(für ausgewählte Pakete)

Seitenzahl: 123

Das E-Book (TTS) können Sie hören im Abo „Legimi Premium” in Legimi-Apps auf:

Android
iOS
Bewertungen
0,0
0
0
0
0
0
Mehr Informationen
Mehr Informationen
Legimi prüft nicht, ob Rezensionen von Nutzern stammen, die den betreffenden Titel tatsächlich gekauft oder gelesen/gehört haben. Wir entfernen aber gefälschte Rezensionen.



Béatrice Meilhoc

Retrouver l’animal en soi

Essai

© Lys Bleu Éditions – Béatrice Meilhoc

ISBN : 979-10-377-7154-4

Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L.122-5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L.122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L.335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.

Préface

Par cet écrit, Béatrice Meilhoc a décidé de partager avec d’autres ce qui fut d’abord un chemin intime, une quête d’évolution et de transformation par divers processus d’expériences encadrées particulièrement par le Qi gong et la psychothérapie.

Là où l’on aurait pu s’attendre à une approche complémentaire : d’un côté, le corps et de l’autre, la psyché et le logos, c’est au contraire un chemin, une perspective d’intégration psycho-organique qu’elle vit et élabore. Ceci n’est pas tout à fait surprenant quand on sait que Béatrice Meilhoc est analyste psycho-organique.

Dans la préface à notre livre1 consacré à l’Analyse Psycho-Organique, les premiers mots écrits par Robert Neuburger sont : « Le corps pense. » Ce que vous lirez dans le livre de Béatrice complète de façon originale et singulière cet aphorisme en vous donnant accès à la description fine et précise de son aventure transformationnelle, faisant apparaître une entité clé « l’animal ».

Cette apparition ne fut pas magique pour l’auteur. Mais faisant confiance à ce qui émergeait d’elle, c’est peu à peu que s’est dessiné, en elle et avec elle, non pas un mouton mais un tigre dans toutes ses composantes sensorielles, charnelles, pulsionnelles et sa sagesse. Acceptant de se laisser agir et bousculée par ce phénomène, apprenant à l’explorer et le rencontrer, une voie libératrice s’est ouverte qui lui a permis peu à peu selon ses mots « de retrouver la confiance première, essentielle, sacrée dans la vie ».

Mais l’auteure ne s’arrête pas là. Habitée par les potentialités de son animal, elle affronte, revisite les impasses de ses expériences traumatiques trouvant alors des voies de dégagement à ces situations pathogènes.

Forte de cela, elle revisite certains concepts clé de la psychothérapie, l’inconscient, le soi, le self, le moi corporel et certains éléments de la dissociation traumatique.

Il n’est pas étonnant alors que pour certaines personnes, immobiles et dévitalisées du fait de traumatismes passés, elle leur suggère, de façon très éthique, la rencontre avec leur « animal » puis, dans un deuxième temps, un cheminement avec celui-ci, pour aborder de façon vivante et dynamique les situations traumatiques passées, en appui cette fois sur une souveraineté de soi retrouvée.

Bref, cet ouvrage, singulier et riche, ne manquera pas d’interpeler chacun en le projetant à l’intérieur de lui-même vers des lieux abandonnés de lui avec la question : « Quel est mon animal pour m’accompagner là ? »

Il est aussi une invitation à s’écouter, à se faire confiance dans les voies thérapeutiques que l’on choisit d’emprunter.

Il amène des propositions intéressantes concernant la clinique des traumatismes.

Enfin, je signalerai la posture éthique de l’auteure qui est dans une démarche de partage, d’enrichissement et de recherche sans prétendre à la découverte d’une énième méthode thérapeutique.

Éric Champ

On ne rencontre pas soi-même avant d’avoir rencontré son reflet dans un œil autre qu’humain.

Loren Eiseley, Le voyage immense

Introduction

Le monde animal est un monde qui nous est à la fois proche et lointain, inconnu et familier. Il nous renvoie au temps de notre état primitif, instinctif et sauvage, enfoui en nous, presque oublié.

Nous partageons avec les animaux un héritage biologique et comportemental. Ce sont eux qui à l’origine nous ont inspirés dans la manière de chasser, de pêcher, d’organiser la cueillette. Nous avons observé chez eux leurs stratégies de survie, leurs stratagèmes de défense et d’attaque pour capturer leurs proies.

Afin d’améliorer nos conditions de vie, nous avons lutté pour nous extraire de notre vie primitive en nous arrachant à notre condition animale. Toutefois, malgré nos tentatives de renier nos origines, le monde des animaux est toujours resté présent.

Les animaux ont fait l’objet de nombreux symboles, nourri nos croyances et nos contes. Ils ont été largement représentés dans la peinture, la calligraphie, l’architecture… Ils tiennent une place importante dans notre imaginaire et notre symbolique.

Nous portons dans notre corps des traces de ce que nous avons été. La mémoire animale est dans notre chair, au plus profond de nos cellules, dans la puissance de l’incarnation.

Renouer avec ces composantes originelles de notre âme que constituent les matières, les embryons de la vie, et réanimer ces dimensions de notre être cellulaire est fondamental et thérapeutique.

Retrouver l’animal en soi, c’est se réintroduire au cœur d’un lien primitif et réveiller un corps enfoui de puissance animale pour mieux se réinscrire dans le vivant.

La naissance

Arghhh ! Encore endormie, mon bassin s’élève d’un coup à la verticale retenu par les draps bordés qui viennent de se tendre encore davantage. Il retombe aussitôt lourdement sur le matelas. L’image d’un tigre bondissant vient d’apparaître dans mon rêve, et ce tigre, c’est moi ! Dans un demi-sommeil, je reste encore quelques instants avec cette expérience que je tente de retenir avant que cette enveloppe animale qui m’habite ne m’échappe. Je ne bouge plus pour mieux la prolonger mais progressivement la sensation se dissipe jusqu’à faire disparaître l’image. Je reste immobile, interpellée par ce contact avec cet être primitif, et très vite je reprends conscience que je partage ma chambre avec une autre personne ; je crains alors que mon râle ne l’ait réveillée. Je souris de cette expérience furtive et intense car le lit est si étroit que le mouvement vertical ascendant et descendant de mon corps a été bien calculé : à quelques centimètres près, je me retrouvais sur le sol !

Ce fut mon premier contact avec le tigre.

Nous étions en stage de Qi gong dans une résidence avec mon maître chinois et à notre arrivée il nous avait annoncé le programme de la semaine en évoquant « le Qi gong du tigre » et la force que procure cet animal dans la pratique. Peu loquace, mais au regard plein de malice, il avait terminé son propos en lançant « le tigre, c’est spécial ! ». J’étais amusée par ces mots car il signifiait là qu’il détenait un trésor qu’il gardait un peu caché, un secret qu’il avait l’intention de révéler partiellement à ceux qui feraient le chemin pour le mériter. Il nous avait d’ailleurs rappelé : « Je vous montre le chemin mais c’est vous qui le faites. » Par cette promesse, il attisait ma curiosité et éveillait déjà une énergie joyeuse en moi.

La veille de ce matin-là, nous avions été initiés à quelques mouvements du tigre et déjà je sentais que cette énergie primitive me convoquait quelque part. Le soir à table, après la découverte de cette nouvelle pratique, ma faim était décuplée et nous riions avec deux autres débutants en Qi gong à l’idée que ce tigre avait déjà commencé à m’habiter. À cet art interne tissé d’animalité, quelque chose d’important me reliait.

Dans la poursuite de mon développement personnel dans le cadre d’une formation en psychothérapie, je fis une autre expérience qui allait devenir le point de départ de mon cheminement avec le tigre.

Lors d’un séminaire, une intervenante thérapeute nous présente son travail avec un champ d’argile. Il s’agit d’un cadre en bois rectangulaire rempli d’argile souple et malléable. La thérapeute propose un expérientiel selon la modalité suivante : une personne face au groupe travaille la matière de l’argile pendant une heure les yeux fermés tandis qu’elle l’accompagne dans ce processus.

Ce jour-là, je me sens angoissée, mes jambes sont faibles. Je suis venue à vélo pour être davantage portée sur le chemin et mieux sentir mon assise. En voyant la terre que l’intervenante vient d’apporter, qu’elle touche par petites pressions tout en continuant sa présentation, je sens un besoin intense de toucher à mon tour cette matière. Je décide de me porter volontaire.

J’enfile un tablier et je m’installe face au groupe, assise sur une chaise devant une table sur laquelle est posé le champ d’argile. Je me concentre afin de bien me contacter dans cet espace où les participants se sont positionnés de part et d’autre de la pièce. Leur regard est tourné vers moi. Quelques échanges entre nous, accompagnés de rires qui meublent l’attente, me permettent de planter mes repères avant que mon regard se porte sur l’argile. Je suis maintenant invitée par cette thérapeute à fermer les yeux, à sentir mon corps, et lorsque je suis prête, à poser mes mains sur ce cadre.

Je suis présente à moi-même dans une légère appréhension car je ressens un profond respect pour cette matière, mais confiante car je sens que l’argile n’attend que mes mains pour me guider.

Sans intention particulière, je laisse agir mes mains qui sont dans un premier temps attirées par le cadre avant d’oser toucher l’argile. J’ai le sentiment de retenir ce moment précieux comme un préliminaire à une belle rencontre. J’ai la sensation du bois sous mes paumes, je parcours le périmètre du cadre, ses limites, ses angles pointus, ses côtés lisses. Puis mon corps se relâche, mes mains se détendent. Je les fais glisser jusqu’aux angles extérieurs et en relâchant encore davantage, mes paumes maintenant creusées permettent aux angles pointus de venir épouser le lieu des Lao Gong2. Ici, je respire pleinement.

Enfin, je décide de contacter l’argile. Je pose mes mains plates sur la surface froide et lisse de cette nouvelle matière. C’est une première rencontre et pourtant j’ai le sentiment immédiat de la connaître ; c’est si bon de la retrouver. Cette matière m’invite à l’explorer. Au contact de cette terre, mes doigts commencent timidement à sentir l’envie de bouger puis de la pénétrer doucement. Je creuse dans la terre jusqu’à toucher le fond du cadre, je reviens en surface, je pétris, et la matière entoure mes gestes et m’accompagne. Elle me donne un contenant, je me remplis. Mes mains savent et me guident là où j’ai besoin d’aller, je suis mon mouvement instinctuel. Je laisse faire l’intelligence des mains, le corps qui se mobilise aussi. Je sens que je pétris inconsciemment, l’inconscient est entre mes mains. Je touche et je suis touchée.

Puis mes mains se font plus fortes dans un mouvement plus intense, l’énergie en moi se réveille soudainement plus sauvage. Alors je me lève, je saisis l’argile et je la force à se modeler différemment, à se transformer. Je prends l’argile, je prends ma vie en main. La résistance avec la matière me confronte. Aux coups portés à la surface, je laisse une empreinte, elle résiste mais elle ne fait pas mal, elle reste bienveillante. J’accompagne chaque mouvement de ma respiration et j’incarne encore un peu plus au fond de mes cellules ; je suis en contact avec mon organique profond3.

J’ai besoin maintenant de me lever. Debout, mon corps explore davantage l’espace, il se fait plus aérien. Cette fois, ce sont mes poings qui s’enfoncent fermement dans l’argile et soutiennent mes pieds qui soudain se soulèvent. Le contenant que je sens me donne un appui et permet à mon centre de gravité de se déplacer dans une autre polarité. Puis à nouveau les pieds à terre, je tente des chemins, j’avance, je recule. La tension retenue, longue, fait maintenant monter la colère à travers les images qui me traversent, je suis déterminée à en découdre, il faut que je transforme ! Je saisis le cadre que je tiens maintenant en l’air par mes mains enfoncées dans la terre. Je ne sens pas son poids initial de 20 kilos. Il est bon de penser que je peux en faire ce que je veux, j’ai le choix. Je décide de le reposer, le cadre se plaque avec empressement sur la table, et je me bats alors avec l’argile qui rompt sous la force de ma détermination, l’énergie au bout de mes doigts je fais exploser la matière ! Elle s’effrite, se dégage de mes mains par morceaux. Dans ce mouvement interne, je me vis de plus en plus compétente, je m’approprie ce que je crée et je me nourris.

Puis l’éruption s’apaise, je relâche. Je m’assois à nouveau. Un petit récipient a été posé sur la table en début de séance, il contient de l’eau, je le sais, elle m’est proposée, mais dans mon expérience c’est moi qui la trouve. Toucher l’eau me fait percevoir d’autres possibles, d’autres chemins plus fluides, plus sereins. La sensation de l’eau sur ma peau m’apporte du doux et je décide de lisser la terre. Dans la douceur, j’explore la possibilité d’un nouveau paysage sous mes doigts, je tente des formes, je creuse plus facilement. Je joue avec l’eau qui fait des petits clapotis quand elle se mêle à la matière. Je construis un semblant de pont, une grotte, j’y entre une main, ça se réchauffe à l’intérieur, j’y suis bien, je me répare.

Puis suffisamment nourrie de cette terre, je reviens vers le cadre en bois du début et j’apporte de l’eau aux côtés pointus et arides. Je lisse le cadre et j’arrondis les angles. Symboliquement, je crée mon propre cadre, plus doux, plus flexible, plus accessible, porteur d’un sens qui est le mien.

À présent, je suis invitée par la thérapeute à revenir dans l’espace du groupe et à ouvrir les yeux. Je découvre alors une réalité différente. L’image de l’argile à l’aspect plat et lisse du début a disparu. J’ai devant moi des creux, des fragments d’argile, des traces de luttes. Sur le sol, çà et là des morceaux de terre jonchent un peu partout et témoignent de la puissance de mon expérience. Je vois un paysage volcanique. Je suis impressionnée par ce que j’ai créé : le chaos. Je me laisse prendre conscience de ma force intérieure qui s’est exprimée là en acte, de ma puissance féminine qui m’appartient. Je suis émue car de ce chaos naît la forme et il me vient plus précisément l’image d’un paysage lunaire.

C’est un processus inconscient que je viens de vivre dans une régression immédiate. J’ai le sentiment d’une naissance qui ne pouvait avoir lieu que par cette déconstruction constructive. Par la médiation de cette matière, je sens une assimilation charnelle du monde comme la venue au monde peut l’être. La forme naît de l’informe. Cela me renvoie à un endroit très lointain de mon être. Et bien au-delà, j’ai le sentiment que je contacte avec cette terre un monde qui précède le primitif, une mémoire… bien avant la genèse de l’humanité ?