Revue de psychanalyse et clinique médicale - N°52 - RPH École de psychanalyse - E-Book

Revue de psychanalyse et clinique médicale - N°52 E-Book

RPH École de psychanalyse

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Beschreibung

"La Revue de Psychanalyse et Clinique Médicale" est une publication semestrielle assurée par le RPH-École de psychanalyse. Elle rassemble les actes des colloques et journées d’étude organisés par le RPH, ainsi que des articles aux contenus variés : articles théoriques, articulations théorico-cliniques, études de cas cliniques, articles de recherche.

Le "52e numéro" de la revue aborde les questions soulevées au colloque du printemps 2023 "Devenir père : entre Imaginaire, Symbolique et Réel". Qu’implique de devenir père au regard des registres Imaginaire, Symbolique et Réel développés par Jacques Lacan ? Quels en sont les enjeux ? Devenir père ne se réduit pas à l’acte biologique de reproduction, cela concerne la position qu’occupe l’homme auprès de son enfant et de la mère. L’enseignement freudo-lacanien nous apprend combien cette position de tiers possède une fonction séparatrice fondamentale pour la structuration psychique de l’enfant. Le discours des patients et psychanalysants engagés à devenir père témoigne combien leur tâche éducative et sociale est d’envergure.

Depuis cette détresse que ces moments peuvent susciter, comment la psychanalyse permet-elle à l’être de sexe masculin d’accueillir l’expérience de manière apaisée ? Qu’est-ce que la clinique psychanalytique enseigne à ce propos ? Les interventions et articles de ce numéro proposent d’étudier, d’élaborer, enfin de théoriser le devenir père.






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Actes du XLIVe colloque duRPH

Devenir père : entre Imaginaire, Symbolique etRéel

Salle Vinci – 75002ParisSamedi 26 novembre2022

Ouverture

Marine Bontemps, psychothérapeute, doctorante à l’Université Sorbonne – Paris Nord, membre du RPH-École de psychanalyse, 93, rue de Maubeuge, Paris Xe, 06.32.24.89.50, [email protected]

Une dame, reçue à ma consultation, a pu déplier de cette manière le marasme dont elle peine à se dégager : à 42 ans, cette dame veut un enfant. Elle a, dit-elle,« fait le deuil de rencontrer un homme qui pourrait être le père… »mais pas le deuil d’avoir un enfant. La loi ne vient-elle pas de ratifier qu’il lui est possible de faire un enfant seule ? Un parcours de Procréation Médicalement Assistée (PMA) est d’ailleurs débuté, mais elle trouve cela laborieux et peu romantique. Une demande d’adoption est aussi en cours. L’homme avec qui elle est en relation amoureuse ne veut pas d’enfant, sans pour autant s’opposer à ces démarches. Un ancien compagnon, quant à lui, se propose gentiment d’être donneur, mais pas père pour autant, de cet enfant à qui elle aurait alors, tout de même, une histoire à raconter… Des hommes donc mais pas de père, c’est bien ça ? « Exactement ». Cette femme qui, au seuil de cette décision, a fait le choix de venir rencontrer un clinicien pour dénouer l’angoisse qui maintenant la saisit amène avec elle la question qui nous réunit aujourd’hui : après tout, qu’est-ce qu’un père ? Faire un enfant sans faire un père n’est pas sans comporter une franche contradiction que l’angoisse de madame met en relief. Mais cela reste néanmoins un des possibles que notre modernité, et notre pays, autorisent. Nous pouvons y voir une confirmation d’un inéluctable déclin du père, de sa dissolution même, ou nous pouvons nous saisir de ces questions, peut-être pas si nouvelles, pour réfléchir ensemble à cette fonction paternelle ainsi qu’à l’expérience que les pères – ceux bien vivants comme le dit l’argument de notre journée – traversent aujourd’hui, dans cette modernité. C’est ce que notre colloque propose de discuter : comment les hommes deviennent-ils père ? À quelle fonction sont-ils appelés et comment occupent-ils cette fonction qui convoque les registres lacaniens de l’Imaginaire, du Symbolique et du Réel ?

Depuis qu’elle existe, la psychanalyse n’a pu faire autrement que de s’intéresser au rôle du père, à son poids dans la structuration psychique d’un être, aux effets de ses expressions comme de ses manquements. La question du père parcourt l’œuvre de Sigmund Freud. En vérité, nous la trouvons partout : que ce soit dans l’élaboration du complexe d’Œdipe et dans la formation de l’appareil psychique qui en découle ; dans la lecture des cas cliniques, et notamment des cinq principaux que Freud a légués1 ; dans l’édification mythique qu’il propose, depuis le père de Totem et Tabou2, celui de la horde, jusqu’à la figure du père dans un de ses derniers écrits, ceux de l’exil, L’homme Moïse et la religion monothéiste3.

L’inventeur de la psychanalyse a fait de la question du père et de sa loi un pivot de sa théorie en lui reconnaissant le rôle de séparateur, d’opérateur de l’intervention fondamentale qu’est la castration. Le père est celui qui interdit à l’enfant la fusion, la jouissance, le désir à l’endroit de la mère.

Est-ce là le tout de sa fonction ?

Jacques Lacan, à la suite, a enrichi l’édification freudienne en spécifiant en quoi la fonction paternelle ne visait pas tant l’enfant expressément…que sa mère : « (…) la fonction paternelle a ceci de décisif qu’elle pose la barre de la négativation de la jouissance sur la mère, ce qui aura des conséquences sur l’enfant »4.

Lacan a pu, pour travailler la complexité de la question du père, se servir de la tripartition Imaginaire, Symbolique, Réel qu’il a introduite dans son enseignement à l’aube des années 505 et qui sera dépliée aujourd’hui. En s’émancipant d’une thèse décliniste somme toute accablante pour le père – thèse qu’il avait pu soutenir encore dans les années 306 – il a remanié ses vues pour ne plus faire de la carence ou de l’absence du père, l’élément pathogène des conditions de souffrances rencontrées dans la clinique et a replacé notre attention sur la fonction – signifiante – en jeu, plutôt que sur la seule personne censée l’incarner.

Cette fonction paternelle, que désigne-t-elle ? Le terme même de fonction désigne une « activité déterminée dévolue à un élément d’un ensemble ou à l’ensemble lui-même »7. Nous repérons là, déjà, qu’il va être question de structure. Et que nul ne peut prétendre avoir de fonction d’être seul. Cela vient très justement dire la fonction paternelle : le père n’est jamais père seul, il lui faut la reconnaissance de la mère. Ce qui ne vaut pas à l’inverse8. Et le père n’est jamais père seul car sa fonction s’inscrit dans un ensemble, un registre – symbolique – auquel lui-même, en tant qu’être parlant, est assujetti.

Pour saisir ce que recouvre la fonction paternelle, j’emprunterai au psychanalyste Joël Dor la métaphore qu’il formulait à partir de l’enseignement de Lacan. Le père réel, le père concret, le père de la réalité familiale est tel un ambassadeur. En cette qualité, il représente un gouvernement, celui du père symbolique, et a à « assumer la délégation de cette autorité auprès de la communauté étrangère mère-enfant »9. Le père n’est donc ni détenteur ni fondateur de la fonction symbolique : il en est le vecteur10. De ce père il est attendu beaucoup, il est attendu qu’il fasse valoir la loi, l’interdit – celui de l’inceste –, qu’il prescrive la castration, nécessaire à mettre de l’ordre dans le champ de la jouissance comme dans celui du désir de l’être, un ordre qui tienne compte de la reconnaissance de la différence des sexes et des générations. En somme il est attendu, je cite Lacan, que le père assume et représente « dans toute sa plénitude la valeur symbolique, incarnée, cristallisée dans sa fonction »11 là où pourtant, concrètement,

« (…) ce recouvrement du symbolique et du réel est absolument insaisissable, et qu’au moins dans une structure sociale telle que la nôtre le père est toujours, par quelque côté, un père discordant par rapport à sa fonction, un père carrent, un père humilié comme dirait monsieur Claudel, et il y a toujours une discordance extrêmement nette entre ce qui est perçu par le sujet sur le plan du réel et cette fonction symbolique »12.

C’est ce que nous montre et nous démontre, au quotidien, la clinique : nous y entendons les achoppements, les embuches et les désertions dans l’opération. Et cela parce que l’Imaginaire vient la contaminer immanquablement.

Écoutons un peu cette clinique des pères en devenir et des jeunes pères.

Il y a par exemple monsieur A., venu consulter pour des crises d’angoisses inédites dans sa vie – enfin presque. Il ne comprend pas car tout va bien pour lui, peut-être quelques inquiétudes quant à sa reconversion professionnelle. Rien de plus. Après deux ou trois séances, il est amené, par ses associations, à parler de tout autre chose : lui et sa compagne sont dans un projet de PMA, à l’étranger. C’est une « super nouvelle » pour lui, je le cite, mais, je le cite aussi, « c’est peut-être ça qui me stresse ». Le symptôme qui aujourd’hui l’a poussé à consulter était déjà advenu, très furtivement, deux fois dans le passé. Une première fois dans son enfance et il l’associe à la mésentente de ses parents. La seconde occurrence de ce symptôme est apparue lorsqu’il était au lycée ; il l’associe à la décompensation psychotique de son père. Aujourd’hui, le symptôme advient concurremment au projet de devenir père. C’est alors qu’il peut, sur le divan, reconnaître dans sa peur voire son désir que ce projet n’aboutisse pas : « Y’a une part de moi qui a peur de devenir comme mon père. L’angoisse de ne pas pouvoir être père, c’est l’angoisse de devenir le même père que le mien. »

Il y a aussi monsieur B., un patient, père depuis quelques mois, qui, au moment où j’écrivais ces lignes, dépliait justement en séance : « J’ai eu une éducation très rigide, ma mère était très rigide. D’ordinaire, mon père l’était moins. Mais quand il disait non, c’était non négociable. Quand j’ai voulu aller faire mes études dans une autre région, il a dit non. Pas de discussion possible. Mon frère, il s’était opposé à mon père, très durement, c’était violent. Moi je voulais pas reproduire la même chose. Je me suis tu, et après j’ai fui, de plus en plus loin. À Paris d’abord, puis en Afghanistan, et après à Taïwan. J’ai mis une immense distance physique, mais en fait, son jugement, il est avec moi, moralement, dans mes pensées, tout le temps. Je ne l’ai pas affronté mon père, et ça me revient aujourd’hui où je suis à cette place de père vis-à-vis de mon fils. »

Que nous disent ces deux hommes, et d’autres avec eux ? Que dans les étapes qu’ils traversent s’invite une figure qu’ils aimeraient à tout prix éloigner, éviter, détruire peut-être, défigurer au moins : celle de leur propre père. Une figure à laquelle ils s’identifient pourtant, faute d’avoir pu la laisser, pourrait-on dire, reposer en paix. C’est, ainsi, le père imaginaire de leur propre Œdipe qui contamine la fonction paternelle dont ils ont à se faire les ambassadeurs.

Quelle difficulté pour un père de donner la castration – pour reprendre un mot cher à Françoise Dolto13 –, entendre la castration symbolique, lorsqu’il se trouve encore aux prises, imaginaires, avec celui censé la lui avoir prescrite ? Les tentatives pour faire régner l’ordre et pour endosser la fonction seront bien laborieuses pour celui qui voudrait, en quelque sorte, faire passer un message sans s’être reconnu, lui-même, tout à fait concerné par sa portée. En restera une dimension de semblant. Alors, difficulté pour certains de supporter agressivité, haine et envie qu’ils reçoivent en retour de leurs actions ; et excessivité pour d’autres qui, en cherchant à donner la preuve de leur statut par des démonstrations de pouvoir confinant à la toute-puissance, récusent par là même la castration et « conteste[nt] la dimension du manque pour [leur] propre compte »14.

À nous d’étudier maintenant comment la psychanalyse et concrètement comment la conduite des cures peuvent amener à ce que se conjoignent ces registres. Il me tarde d’écouter mes collègues que je remercie de s’être proposés pour intervenir aujourd’hui. Et je vous remercie d’être venus avec l’idée de sortir enseignés de ces interventions et du discours – psychanalytique – qui les peuple. Que nos discussions soient riches et animées. Je nous souhaite un excellent travail.

Références bibliographiques

Ouvrages

Dolto, F. Séminaire de psychanalyse d’enfants II, Paris, Seuil,1985.

Dor, J. (1989). Le père et sa fonction en psychanalyse, Toulouse, Érès,2012.

Freud, S. (1905-14). Cinq psychanalyses : Dora, Le petit Hans, L’homme aux rats, Le président Schreber, L’homme aux Loups, Paris, Payot, 2017.

Freud, S. (1912). « Totem et Tabou », in Œuvres Complètes, Vol. XI, Paris, PUF, 2009, pp. 189-383.

Freud, S. (1937). « L’homme Moïse et la religion monothéiste », in Œuvres Complètes, Vol. XX, Paris, PUF, 1989, pp. 75-217.

Lacan, J. (1953). « Fonction et champ de la parole et du langage », in Écrits, Paris, Seuil, 1966, pp. 237-321.

Article de périodique

Izcovich, L. « Du Nom-du-Père au père qui nomme ». Champ lacanien, 2006, vol. 3, no 1, pp. 23-31.

Liens internet

Lacan, J. (1938). Les complexes familiaux en pathologie, 2016, https://ecole-lacanienne.net/wp-content/uploads/2016/04/1938-03-00.pdf

Lacan, J. (1953). Le mythe individuel du névrosé ou poésie et vérité dans la névrose, 2016, https://ecole-lacanienne.net/wp-content/uploads/2016/04/1953-00-00.pdf

Trésor de la Langue Française informatisé, Fonction, https://www.cnrtl.fr/definition/fonction

1 Freud, S. (1905-14). Cinq psychanalyses : Dora, Le petit Hans, L’homme aux rats, Le président Schreber, L’homme aux Loups, Paris, Payot, 2017.

2 Freud, S. (1912). « Totem et Tabou », in Œuvres Complètes, Vol. XI, Paris, PUF, 2009, pp.189-383.

3 Freud, S. (1937). « L’homme Moïse et la religion monothéiste », in Œuvres Complètes, Vol. XX, Paris, PUF, 1989, pp. 75-217.

4 Izcovich, L. « Du Nom-du-Père au père qui nomme ». Champ lacanien, 2006, vol. 3, no 1, p. 24.

5 Lacan, J. (1953). « Fonction et champ de la parole et du langage », in Écrits, Paris, Seuil, 1966, pp. 237-321.

6Lacan, J. (1938). Les complexes familiaux en pathologie, 2016, https://ecole-lacanienne.net/wp-content/uploads/2016/04/1938-03-00.pdf

7 Trésor de la Langue Française informatisé. Entrée « Fonction », https://www.cnrtl.fr/definition/fonction

8 Puisque la mère est le « pôle qui représente le facteur naturel, ce à quoi le sujet est lié par un lien, lui, incontestablement naturel », in Lacan, J. (1953). Le mythe individuel du névrosé ou poésie et vérité dans la névrose, 2016, https://ecole-lacanienne.net/wp-content/uploads/2016/04/1953-00-00.pdf

9 Dor, J. (1989). Le père et sa fonction en psychanalyse, Toulouse, Érès, 2012, p. 17.

10Ibid., p. 12.

11 Lacan, J. (1953). Le mythe individuel du névrosé ou poésie et vérité dans la névrose, op. cit.

12Ibid.

13 Dolto, F. Séminaire de psychanalyse d’enfants II, Paris, Seuil, 1985, p. 11.

14Dor, J. Op. cit., p. 75.

Devenir père : qu’est-ce que ça veut dire ?

Ouarda Ferlicot, psychanalyste, doctorante au CRPMS, 72 rue Maurice Thorez, 92000 Nanterre, 06.22.79.39.34, [email protected]

Résumé :Devenir père commence tout d’abord par un désir d’être père. Qu’est-ce que ce désir produit comme difficulté ? Est-ce que devenir père s’inscrit de la même manière pour un homme que la question du devenir mère pour une femme ? Ce désir d’être père peut relever de l’impossible. C’est ce que monsieur C. témoigne dans son discours. Il rend compte de l’articulation du désir de devenir père avec le complexe d’Œdipe dont il est la tâche d’une psychanalyse d’en permettre la traversée.

Mots-clés : père biologique – père symbolique – fonction paternelle – père mort – signifiant du Nom-du-Père.

Est-ce que l’homme devient père avant la grossesse ? Pendant le processus de grossesse ? Devient-il père à la naissance de l’enfant ? Ou alors se construit-il sa position de père au fur et à mesure que l’enfant grandit ? La question du devenir père se pose-t-elle à un homme de la même manière que celle du devenir mère ?

Je n’ai pas rencontré d’homme venu en première consultation avec cette plainte ou cette difficulté d’être père. Je me suis donc arrêtée sur ce constat de ne pas rencontrer dans ma clinique des hommes qui viennent avec cette souffrance : « Je souffre de ne pas réussir à devenir père » ou « J’ai des difficultés dans mon rôle de père ». C’est plutôt la question de l’impossible à le devenir qui s’est présentée. De ce constat, me vient alors la question : qu’est-ce qui ne répond pas dans le devenir père à la question du devenir mère ? Autrement dit, comment s’inscrit cette question dans le trajet d’un homme et de quelle manière ?

Un père est important dans la vie d’un homme et dans la vie d’une femme. D’abord, c’est lui qui ouvre au champ du désir, de la culture, de la différence et de l’Autre du langage. Puis, plus largement, il permet l’inscription de la métaphore paternelle, régulatrice des pulsions, de la reconnaissance de l’autorité de l’Ⱥutre barré, du manque qu’il institue avec l’instauration du circuit de la dette symbolique.

Ainsi, la fonction paternelle et ce qui en découle, l’inscription du signifiant du Nom-du-Père, sont nécessaires pour rendre possible l’amour, la rencontre avec l’autre, l’échange et le partage. Ce signifiant vient en lieu et place du désir de la mère qui est refoulé, obligeant le sujet à faire reconnaître son désir propre au moyen de sa propre parole. Ainsi, la paternité rencontre la question de la métaphore paternelle et de la mise en place du signifiant du Nom-du-Père dans la chaîne signifiante. Celle-ci rend effective la fonction de symbolisation et de médiation pour un être parlant.

Dans les cures, qu’il soit présent, absent, défaillant, aimé ou haï, psychanalysants et psychanalysantes parlent de leur père, ou plutôt de l’imago paternelle, preuve qu’un père est aussi important dans la vie d’un homme que dans la vie d’une femme. Mais alors de quel père parlons-nous ? Du père biologique ? Du « père de cœur » comme le nommait un psychanalysant ? Du père adoptif ? Sigmund Freud rappelle que « le fait de l’engendrement par le père n’a pas, en effet, d’importance psychologique pour l’enfant »15. Autrement dit, cela ne laisse-t-il pas la chance à n’importe qui d’occuper cette position ? Je pense aux beaux-pères qui endossent très bien ce rôle et prennent assez simplement la place de père symbolique à côté du père biologique.

En 1938, dans son texte Les complexes familiaux dans la formation de l’individu, Lacan évoque le « déclin social de l’imago du père »16. La montée de la religion apparaît comme l’un de ses effets, tout comme semble l’être le multipartisme dans la vie politique, ou même cette relation nouvelle au travail où ce qui se dessine est une logique du moindre effort au profit d’une logique partisane du bien-être comme dû. C’est ainsi l’inversement du circuit de la dette qui est à l’œuvre et par conséquent l’absence de reconnaissance d’un Ⱥutre barré, celui de la castration.

En 1912, avec Totem et tabou17, Freud démontre comment s’institue le triomphe du père, en s’appuyant sur le mythe de la horde primitive. En effet, les fils du père, envieux et jaloux de voir celui-ci posséder à lui seul toutes les femmes, se liguent contre lui pour le tuer et le manger. C’est ainsi que s’instaure une identification au père mort, du fait de l’ambivalence de sentiment à l’égard du père, à la fois rival et modèle. En effet, après avoir réalisé le crime commis, les fils ressentent de la culpabilité. De ce sentiment de culpabilité découle alors l’interdit de la mise à mort du substitut paternel et de celui de profiter des femmes devenues libres. Freud écrit ainsi : « (…) le mort devenait maintenant plus fort que ne l’avait été le vivant »18. Autrement dit, le père symbolique est le père mort en tant qu’il instaure un sentiment de culpabilité à l’origine de l’ambivalence de sentiments elle-même issue de l’instance morale, le Surmoi, érigée à partir des deux interdits fondamentaux que sont l’interdit du meurtre et de l’inceste. Le père mort introduit à la dette symbolique nécessaire à la naissance du désir.

En effet, si la haine pour le père est inévitable pour le garçon, se traduisant par une rivalité, elle doit être surmontée, au nom de la culture, pour qu’une transmission du phallus ait lieu, et que le Surmoi se mette en place comme régulateur des pulsions agressives et de destruction. Ainsi, de manière plus concrète, c’est l’absence de l’autorité paternelle qui est à l’origine des comportements antisociaux, délictueux et criminels. En 1916, Freud parle alors de « criminels par conscience de culpabilité »19, soit les personnes qui commettent des actes répréhensibles pour rechercher la punition et laloi.

Avec Lacan, c’est la fonction symbolique du langage qui fait référence. La position de père n’est effective et ne vaut qu’à travers le langage qui l’institue et le reconnaît en tant que telle. En effet, le psychanalyste rappelle que l’absence du père réel est tout à fait compatible avec la présence du signifiant du Nom-du-Père20.

Plus précisément, Lacan revisite la lecture freudienne de l’Œdipe selon une théorie structuraliste qui s’organise en trois temps que je résume ici en quelques lignes. Dans le premier temps, le père est supposé dans le discours de la mère, ce qui permet à l’enfant de s’identifier imaginairement au phallus.

Puis, le père est investi comme celui représentant la loi et surtout celui qui suscite le désir de la mère et vers lequel elle se tourne. La mère reconnaît sa parole et y souscrit, ce qui permet à l’enfant de reconnaître la loi symbolique de la fonction paternelle. L’inscription du signifiant du Nom-du-Père en découle et oblige au refoulement du désir de la mère, un désir interdit.

Le troisième et dernier temps est marqué par le fait que le père doive faire preuve de ce qu’il énonce, autrement dit, doive faire preuve qu’il a le phallus et ainsi que ni mère ni enfant ne l’ont. À cette condition, l’enfant peut entrer dans le bal des identifications et s’engager dans la dialectique de l’avoir et non plus de l’être.

Pour le garçon, la résolution de l’Œdipe passe par la mise en place d’une identification à son propre sexe et à l’établissement d’une juste relation en rapport à la fonction du père qui lui permette à son tour « qu’il accède lui-même un jour à cette position si problématique et paradoxale d’être un père »21. Il souligne la difficulté d’accéder à autre chose que le père imaginaire, d’abord parce qu’il est articulé au père symbolique, mais surtout car appréhender la réalité telle qu’elle est constitue une difficulté pour l’être humain. Une psychanalyse permet la destitution de ce père imaginaire au profit de l’accès au père réel, un père tel qu’il est réellement avec ses manques. Lacan dit ainsi : « (…) c’est au père réel qu’est effectivement déférée la fonction saillante dans le complexe de castration »22.

Lacan illustre la défaillance de cette fonction métaphorique au travers du célèbre cas Schreber. Il introduit le signifiant du Nom-du-Père qui vient métaphoriser le vécu de l’enfant devant la perte d’objet. Il prend la place du désir de la mère qui est refoulé. Ce signifiant permet la naissance du sujet qui s’inscrit dans le langage et en use pour se faire reconnaître. Pour Schreber, il en est tout autre. Alors qu’il est appelé à devenir Président de la Cour d’appel de Leipzig, il déclenche un délire. Pour Lacan, c’est cette nomination qui le précipitera dans la crise délirante. Cependant, le désir de paternité y est concerné. En effet, en 1961, Robert B. White met l’accent sur la déception de Schreber de ne pas réussir à devenir père en mettant en évidence le fait que sa femme fera six fausses couches23. Ainsi, d’un côté, son désir de paternité ne peut se réaliser et le confronte à une déception et, de l’autre, il accède à l’une des plus hautes fonctions administratives d’Allemagne. En lieu et place du signifiant du Nom-du-Père, c’est un trou que Schreber rencontre auquel il répond par le délire.

Ici, l’impossibilité dans le Réel d’occuper la position de père rencontre une impossibilité symbolique du fait de cette faille laissée dans la chaîne signifiante pour Schreber, qui ne peut symboliser ce désir.

Monsieur C. se présente pour la première fois à ma consultation avec la souffrance de ne pas réussir à s’engager. Il répète le même schéma depuis des années, schéma dans lequel, alors qu’il doit choisir de s’engager et renoncer à d’autres possibilités, surtout celle de passer à côté de la femme parfaite, la relation échoue. Alors qu’il est en couple depuis trois ans avec une femme qu’il aime, il souhaiterait mettre fin à cette angoisse, qui l’empêche de dormir et le pousse à rompre la relation, pour rester seul et ainsi s’épargner de choisir et de renoncer à « la femme parfaite ». Cette angoisse est d’autant plus forte que se pose la question de faire un enfant avec sa partenaire qui lui en a exprimé le désir.

Toutes les séances tournent autour de son impossibilité à choisir. De son enfance, il en sera très peu question. Dès qu’il s’approche un peu de son Œdipe, il s’en éloigne pour poursuivre le fil de ses associations sur l’actuel. L’augmentation des séances n’aideront pas à percer la résistance au changement, ni à nourrir le désir de savoir. Jusqu’à la fin, le Moi restera au rendez-vous et cela devant l’évidence dans son discours, qu’avancer rime avec se séparer de son Œdipe. Il pourra dire notamment : « Je m’accroche à ma vie d’adolescent, d’étudiant, pour rester avec mes parents. »

Il dira encore : « Au fond de moi, je voudrais avancer dans la vie mais d’un autre côté, je suis tellement intransigeant que je ne supporte aucun défaut. L’exigence que je ressens, elle me vient de mes parents. J’ai toujours l’impression d’être sous leur autorité. J’ai toujours du mal à être indépendant de mes parents. »

Ce terme « mes parents », en tant qu’entité indissociée, nous renvoie à ce maintien du couple archaïque formé par le père et la mère comme unité indifférenciée. Comment affronter la haine envers le père, ou plutôt la figure paternelle sans en passer par la reconnaissance d’une différenciation entre les signifiants père et mère ? Cette différenciation est essentielle et motrice dans la dynamique identificatoire et par conséquent à la traversée de l’Œdipe et l’intégration du Surmoi.

Cette indistinction se retrouve à l’une des rares séances, il me semble la seule, dans laquelle il évoque son désir de devenir père. En voici l’extrait : « Autour de moi, les gens construisent leur famille et moi j’ai toujours peur d’avoir des enfants. » Je relève alors « Avoir des enfants ? – Oui – Qui est-ce qui a des enfants ? – Des parents… (il se reprend) Plutôt être père. – Je lui demande alors « Associez cette phrase “avoir des enfants”. Il dit : « Passer à l’étape de parents c’est une responsabilité. J’appréhende de changer de statut. Je me sens encore comme un enfant vis-à-vis de mes parents. Devenir parent c’est changer de statut, changer de mentalité. J’ai l’impression que je me freine un peu pour me maintenir dans cette position d’enfant, de personne qui rend des comptes à ses parents. »

Vous entendez une nouvelle fois l’omniprésence du signifiant parents et la difficulté de s’en séparer, preuve que nous sommes bien en deçà de l’Œdipe et de l’accès à la différence des sexes et des générations. Freud y fait référence en écrivant que la première identification se réfère au « père de la préhistoire personnelle »24 tout en apportant cette précision en note de bas de page qu’il serait « plus prudent de dire avec les parents, car père et mère, avant la connaissance sûre de la différence des sexes, du manque de pénis, ne se voient pas attribuer valeur distincte »25.

D’ailleurs, cette peur de l’engagement, qu’il n’arrive pas à résoudre, va de pair avec cette peur de décevoir ses parents et cette pression « d’être l’enfant parfait ». Jusqu’à la fin, il évoquera en séance cette envie de « tout avoir et de ne pas choisir ». Au contraire de s’engager avec son désir, il semble, c’est une hypothèse, que monsieur C. ait choisi de s’engager avec son Moi. Il cesse de venir à ses séances en n’honorant pas sa parole d’être là le jour et à l’heure où il devait l’être. Cela se répète à plusieurs reprises jusqu’à ce qu’il ne vienne plus aux rendez-vous.

Plus récemment, j’ai été alertée d’une situation clinique dans laquelle, en tant que clinicienne, mes interventions incarnent l’Autre barré, celui qui produit de la castration, et par conséquent celui qui peut permettre à ce patient de devenir père un jour.

Il s’agit d’un homme acculé lorsque je le rencontre. Dès la première séance, il dit avoir quitté son pays d’origine pour échapper à sa mère. Il dit ainsi : « Je veux me séparer d’elle ». Durant les premières séances, il ne nomme pas les personnes dont il parle, voire se refuse à les nommer. J’interviens de la façon suivante : « Je vous demande cela car c’est important de nommer les personnes dont vous parlez ». Il hésite et reste en silence. Je ne cède pas et interviens alors : « Si vous ne voulez pas, vous me le dites, mais pourriez-vous me dire pourquoi que je sache ? » Il dit alors : « J’ai l’impression de les trahir », à quoi je réponds : « Ici, ça reste entre nous, vous dites parce que c’est dans le cadre du traitement, ce n’est pas une trahison. » La fonction de nomination relève de la fonction paternelle. Nommer les choses, c’est leur donner un statut symbolique et non plus imaginaire comme le serait un tabou.

C’est ainsi qu’il poursuit en m’apportant un rêve d’une rare crudité dans lequel il est question de sa mère. Quant au père il n’est plus là. Il est parti alors qu’il avait 15 ans et c’est ainsi qu’il s’est retrouvé avec sa mère.

Alors qu’il se présente à sa séance avec un pantalon présentant un trou au niveau de l’entrejambe, difficilement camouflable puisqu’il s’installe jambes écartées, je lui dis : « Dites-moi, avez-vous remarqué que vous aviez un trou dans votre pantalon au niveau de l’entrejambe ? – Hein ?! (Il croise ses jambes, surpris et gêné) » Sa posture jambes écartées est l’effet de la présence du Moi. En relevant la présence du trou dans le pantalon, intervention se situant dans le champ de l’Ⱥutre barré prime, le patient change de position et accède à son être puisqu’il entend l’intervention, ce dont témoignent sa gêne et sa réaction immédiate de croiser ses jambes.

Par la suite, il se met à expliquer les circonstances qui l’ont amené à ne pas changer de pantalon. Il n’a pas pu prendre sa douche car sa mère, qui s’est récemment installée temporairement chez lui, lui a demandé de laisser la porte de la salle de bain ouverte pour pouvoir entrer à tout moment. C’est alors que je lui dis : « Votre mère n’a pas à entrer pendant que vous prenez votre douche. » Il répond en levant les bras : « Mais oui ! C’est exactement ce qu’il y avait dans ma tête, ce que j’ai pensé et que je n’arrivais pas à dire. » Tout cela dans un éclat de rire et de joie ! Ce rire et cette joie de la part du patient sont la preuve qu’il rencontre l’Ⱥutre barré. Plus précisément, mon intervention est l’incarnation de l’Autre barré transformée en parole. Comme l’articule Fernando de Amorim : « C’est cela le père, l’Ⱥutre barré. Le père c’est celui qui porte la castration, pas de manière méchante, mais d’une manière symbolique qui produit un effet de jubilation, de joie. On est content quand on est castré. »26

Pour conclure, je reviendrais sur les questions abordées plus haut. Comme pour la maternité chez la femme, la paternité s’exprime d’abord par un désir. Par contre, là où se jouerait la différence, c’est que la position de père consisterait surtout en l’occupation d’une fonction symbolique. En effet, qu’est-ce qu’être père ? Voici les paroles d’un psychanalysant qui a élu un père de cœur : « Mon père de cœur c’est lui qui m’a appris à dire je t’aime, je sais qu’il était autour de la table. La différence qui existe entre les liens du sang qui sont obligatoires et les liens qui peuvent exister avec d’autres. Pour moi, il y a une famille qu’on a et une famille que l’on crée. »

Ainsi, le père est celui qui introduit à la dimension symbolique de l’amour et de la création.

Références bibliographiques

Ouvrages

Freud, S. & Jung, C.-G. (1906-14). « Lettre du 14.05.12 », in Correspondance, Paris, Éditions Gallimard, 1992, pp. 633-4.

Freud, S. (1912-13). « Totem et tabou », in Œuvres Complètes, Vol. XI, Paris, PUF, pp. 189-285.

Freud, S. (1916). « Quelques types de caractères dégagés par le travail psychanalytique », in Œuvres Complètes, Vol. XV, Paris, PUF, 1996, pp. 13-40.

Freud, S. (1923). « Le moi et le ça », in Œuvres Complètes, Vol. XVI, Paris, PUF, 1991, pp. 255-301.

Lacan, J. (1938). « Les complexes familiaux dans la formation de l’individu », in Autres écrits, Paris, Éditions du Seuil, 2001, pp. 21-84.

Lacan, J. (1955-56). Le Séminaire, Livre III, Les psychoses, Paris, Éditions du Seuil,1981.

Lacan, J. (1956-57). Le Séminaire, Livre IV, La relation d’objet, Paris, Éditions du Seuil,1994.

Lacan, J. (1958). « D’une question préliminaire à tout traitement possible de la psychose », in Écrits II, Paris, Éditions du Seuil, 1999, pp.7-61.

White, R.-B. (1961). « Le conflit avec la mère dans la psychose de Schreber », in Le cas Schreber, contribution psychanalytique de langue anglaise, Paris, PUF, 1979, pp. 356-98.

15Freud, S. & Jung, C.-G. (1906-14). « Lettre du 14.05.12 », in Correspondance, Paris, Éditions Gallimard, 1992, p. 634.

16 Lacan, J. (1938). « Les complexes familiaux dans la formation de l’individu », in Autres écrits, Paris, Éditions du Seuil, 2001, p. 60.

17 Freud, S. (1912-13). « Totem et tabou », in Œuvres Complètes, Vol. XI, Paris, PUF, pp. 189-285.

18Ibid., p. 362.

19 Freud, S. (1916). « Quelques types de caractères dégagés par le travail psychanalytique », in Œuvres Complètes, Vol. XV, Paris, PUF, 1996, p. 38.

20 Lacan, J. (1958). « D’une question préliminaire à tout traitement possible de la psychose », in Écrits II, Paris, Éditions du Seuil, 1999, p. 35.

21 Lacan, J. (1956-57). Le Séminaire, Livre IV, La relation d’objet, Paris, Éditions du Seuil, 1994, p. 204.

22Ibid., p. 220.

23White, R.-B. (1961). « Le conflit avec la mère dans la psychose de Schreber », in Le cas Schreber, contribution psychanalytique de langue anglaise, Paris, PUF, 1979, p. 367.

24 Freud, S. (1923). « Le moi et le ça », in Œuvres Complètes, Vol. XVI, Paris, PUF, 1991, p. 275.

25Ibid.

26 Propos de Fernando de Amorim recueillis lors du contrôle du jeudi 30 mars 2023 par Ouarda Ferlicot.

Père et impairLa naissance dupère

Erwann Gouadon, psychothérapeute, membre du RPH-École de psychanalyse, Consultation Publique de Psychanalyse, 33, rue Jean-Baptiste Pigalle, Paris IXe, 06.85.19.20.74, [email protected]

Résumé : À partir du discours d’un psychanalysant de structure obsessionnelle et des théories freudo-lacaniennes, cette intervention propose de traiter des aspects dynamiques de la paternité. Les processus psychiques à l’œuvre au moment de la grossesse et les effets possibles de la perception d’une échographie seront explorés. Nous examinerons les manifestations de l’angoisse et de la haine éprouvées par le futur père vis-à-vis de l’enfant à venir et de la femme enceinte.

Mots-clés : paternité – grossesse – échographie – névrose obsessionnelle – rivalité.

Le père, voilà un objet de réflexion qui ne date pas d’hier et qui mérite pourtant que nous continuions de nous y pencher. Nous l’avons vu lors du précédent colloque, le devenir mère n’est pas une maigre affaire. Les mots utilisés pour désigner les institutions accueillant les parents autour de la naissance de l’enfant donnent à entendre l’importance de la maternité : centres de PMI (Protection Maternelle Infantile), maternités, unités d’hospitalisation mère-bébé… Quid du père et de la paternité ?

Travaillant auprès de futurs parents, de mères, de pères et de leur enfant, j’avais décidé de questionner des professionnels de santé au sujet de leurs représentations des pères. Des sages-femmes, notamment, m’avaient indiqué combien il leur était difficile de composer avec les pères en salle de naissance, lors des différents rendez-vous de préparation à l’accouchement et à la parentalité, ou encore dans les hôpitaux traitant les complications périnatales psychiques, corporelles et organiques. « Je ne sais pas où les mettre », m’avait confié l’une d’elles en précisant qu’il y a peu de temps encore, « les pères n’avaient pas de chaise, pas de place ». Une autre avait dit : « J’avoue que c’est plus simple quand il n’est pas là, ça me facilite la tâche, même si en soi c’est important pour la mère et l’enfant. »