Semoule de blé dur, suivi de Sablés amers - Amel Isyès - E-Book

Semoule de blé dur, suivi de Sablés amers E-Book

Amel Isyès

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Beschreibung

Deux récits psychologiques, des situations conflictuelles, parfois tragiques.

Comment échapper au modèle imposé par sa mère tout en conservant son amour ? Amira veut la liberté de choisir pour elle, sans pour autant renier les valeurs familiales.
Comment protéger les autres du mal que l’on subit quand on ne peut rien dire, et surtout pas à sa mère ?
Magalie choisit de sacrifier leur amitié pour sauver Naïma.

Deux images de l’enfance :
– dans les tourments naturels de l’adolescence pour Amira, entourée d’amour ;
– dans la tragédie de la violence et de l’impuissance pour Magalie, seule dans un monde indifférent.

Grandir, être soi-même tout en préservant l’amour maternel. Subir l’inceste tout en protégeant son entourage. Deux récits psychologiques, des situations conflictuelles, parfois tragiques.

Découvrez deux nouvelles qui abordent les relations mère-fille. A lire et faire lire !

EXTRAIT

Le quotidien à la maison s’adoucit lentement, certainement. Ma mère me laissa davantage en paix. En échange, j’exécutai pour elle certaines corvées sans jamais ni me mutiner ni la contrarier. Un accord tacite et efficace.
J’étais à présent au collège, dans ma classe, j’étais de loin la meilleure. Je travaillais beaucoup, j’étais concentrée, j’évitais les copinages inutiles, j’étais éveillée à l’essentiel.
Le quotidien en classe n’était pas toujours aisé, mais c’était toutefois bien moins dramatique et violent que le récit peint par les médias. Ils brossaient tous le tableau apocalyptique d’un monde à feu et à sang. Un tableau né d’un syllogisme. Je ne doutais pas que cette réalité existât, mais elle n’était pas la mienne.
De toute ma scolarité, je n’avais jamais vu un élève violenter un enseignant. Je n’avais jamais vu d’armes. Mais j’ai parfois vu, il est vrai, des larmes. Les larmes d’une jeune enseignante exaspérée. Les larmes de colère d’un élève sanctionné. Et toujours, toujours ce bruit. Un bruit omniprésent. Un bruit pétri de rires, de sarcasmes et de hurlements. Ce bruit s’érigeait tel un mur entre les élèves et les enseignants. Ce mur freinait les mots. Ce mur fractionnait les phrases. Ce mur était perte de temps. Ce mur contait nos pages de blanc.
Malgré tout, j’aimais l’école, je me levais toujours enthousiaste à l’idée d’aller en classe. Un matin pourtant, en troisième, ma joie s’envola.

CE QU'EN PENSE LA CRITIQUE

Ces deux petites nouvelles sont courtes, mais fortes et poignantes ! - Liyah Pandore, Les lectures de Liyah

A PROPOS DE L'AUTEUR

Enfant, Amel Isyès rêvait de devenir enseignante. Ses études l’ont éloignée un temps de cette voie, mais son rêve d’enfant murmurait à son coeur et elle a écouté l’évidence.
Son métier et ses enfants l’amènent à découvrir la littérature pour la jeunesse. Mais Amel n’écrit pas pour les enfants, elle écrit sur eux. Elle raconte des enfances ignorées, perdues, blessées. Un univers où la parole de l’enfant est souvent indicible. Un univers sombre mais toujours plein d’espoir.
Ses influences : Anthony Browne, Taslima Nasreen, Miyazaki et Marjane Satrapi.
Amel Isyès accepte de participer à des salons du livre et à des séances de dédicaces. Elle habite en région parisienne.

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Couverture

CollectionJASMIN LITTÉRATURE

1.Nouvelles d’Elles

Philippe de Boissy

2.De retour

Marie Geffray

CollectionJASMIN LITTÉRATURE POCHE

1.Temps croisés

Jean Clavilier

2.Une si brève rencontre

Jean Clavilier

3.Chemins de soi

Amel Isyès

4.Semoule de blé dur

Amel Isyès

5.Bonhomme Écriture

Titre

Copyright

Amel Isyès

Enfant, Amel Isyès rêvait de devenir enseignante. Ses études l’ont éloignée un temps de cette voie, mais son rêve d’enfant murmurait à son cœur et elle a écouté l’évidence.

Son métier et ses enfants l’amènent à découvrir la littérature pour la jeunesse. Mais Amel Isyès n’écrit pas pour les enfants, elle écrit sur eux. Elle raconte des enfances ignorées, perdues, blessées. Un univers où la parole de l’enfant est souvent indicible. Un universsombre, mais toujours plein d’espoir.

Tous droits de reproduction, de traduction

et d’adaptation réservés pour tous pays

© 2012 Éditions du Jasmin

www.editions-du-jasmin.com

Dépôt légal à parution

ISBN : 978-2-35284-703-8

Avec le soutien du

Du même auteur

DU MÊME AUTEUR

Chemins de soi, collectionJASMIN LITTÉRATURE POCHE, Éditions du Jasmin, 2012.

Remerciements

Aux enfants pour qu’ils ne soient plus silence.

Semoule de blé dur

Paroles d’une mère

Il était neuf heures et cinquante-huit minutes et la princesse n’était toujours pas réveillée.

Je l’appelais depuis plus d’une demi-heure, mais elle ne daignait pas me répondre. Elle semblait comme chaque matinée de vacances scolaires happée par la rêverie, la paresse et l’insolence.

Pendant un court instant, je repensai à la joie qui m’avait envahie en apprenant que j’avais donné naissance à une fille. Une perle de douceur, l’harmonie de ma vie. Mais cette demoiselle se révéla pire qu’un fils. Elle était indolente, oisive et ne s’intéressait nullement aux choses fondamentales de la féminité. Je rêvais d’une grenade sucrée, j’avais un citron révolté.

Malheureusement, mes reproches sonnaient comme des échos ennemis. Son père l’adorait par-dessus tout et prenait sa défense sans condition sous prétexte qu’elle était brillante. Il envisageait pour elle une carrière de médecin, d’avocate ou de ministre. Tout ce qu’elle faisait trouvait grâce à ses yeux de vieil homme fatigué et aveuglé.

De ce fait, moi, pauvre ignorante, illettrée, je ne pouvais préoccuper l’esprit de cette petite avec des futilités telles que le ménage ou la cuisine voire penser à son avenir : le mariage. Non ! Ma fille allait vivre un destin imaginé par un père absorbé comme un amoureux transi. Un adulateur engourdi et endormi par l’aveuglement.

Le temps me donnerait raison, mais il serait trop tard, ma petite Amira sera vite adolescente, bientôt vieille fille.

Mon cœur de mère ne pouvait se résoudre à un tel destin. Je ne pouvais laisser ma pauvre fille dans le dénuement et dans l’ignorance. Je devais l’aider à réaliser son destin de femme. Elle devait apprendre autre chose que ce qui figurait dans ses livres, c’était vital.

Je décidai donc à dix heures tapantes d’enfreindre les règles immuables de mon mari et de réveiller Amira. J’entrai dans sa chambre où régnait un désordre habituel. Des livres posés à même le sol formaient une pyramide baroque et instable, une poubelle pleine de papier froissé criait au désespoir et des vêtements sales trônaient majestueusement sur une chaise. Le chaos. La perdition de la féminité.

J’ouvris les rideaux et me mis à parler d’une voix volontairement stridente et autoritaire.

Amira

C’était l’aube des vacances. Le premier jour de repos. Un repos bien mérité. J’étais encore une fois la première de ma classe.

Pourtant ma mère, insensible, m’assaillit à nouveau.

Les autres, mes camarades de classe, n’avaient pas une vie aussi effrénée que la mienne. C’était simple, ma journée ne se terminait jamais. Entre les cours, les leçons, les devoirs, la vaisselle, les vêtements à plier, et la chambre de mon frère à ranger, je ne me reposais jamais. Ce rythme eut des conséquences sur ma scolarité. Je somnolais en classe, je perdais mon entrain et mon sourire. Mon père fut convoqué après la troisième poésie mal récitée, oubliée car mal apprise. La maîtresse lui parla explicitement de mes compétences et de mes aptitudes. Il prit alors conscience de la situation et promit de maîtriser les assauts de ma mère. Ce matin-là, il n’y parvint pas. Elle me réveilla aux aurores, en hurlant.

Ma mère ne comprenait rien à rien, j’étais en CM2, la veille j’avais passé la journée au concours local d’orthographe. Dépitée par ma défaite, j’étais naturellement épuisée. J’étais rentrée très tard. Le car nous avait déposés devant l’école vers dix heures du soir, à onze heures trente j’étais couchée. Je n’avais pas l’habitude de veiller si tard. J’avais donc besoin de dormir.

Ma mère ne comprenait rien à rien. Elle se plaignait toujours de moi et n’était jamais satisfaite de ce que je faisais. Elle me critiquait sans cesse. Elle m’accusait de paresse, de mensonge, de manipulation. Elle m’insultait souvent. Et quand elle parlait en arabe c’était que son agacement devenait rage.

Ma mère ne comprenait rien à rien, je n’étais pas indolente, j’étais débordée. J’étais une terre inondée, submergée. Une île en danger. Si j’étais une bonne élève, c’est parce que je travaillais, je n’avais aucune facilité particulière, je travaillais, c’est tout. Je n’étais pas plus intelligente que les autres.

Ma mère ne comprenait rien à rien. Pour elle, s’affairer assise devant un bureau était oisiveté.

Pour la première fois, je refusai de lui obéir. Je restai dans mon lit sans répondre à ses cris. Je posai mon oreiller sur ma tête pour me protéger.

J’étais une princesse dans sa tour. Mieux, si j’avais été un garçon, j’aurais été un paladin, un chevalier et au lieu de me protéger passivement, j’aurais combattu et pourfendu l’insensible dragon aux mots de feu.

Malheureusement, je m’appelais Amira, j’étais dans mon essence une princesse.

Le dragon pénétra dans mon donjon et chassa la rêverie en laissant pénétrer le jour.

Paroles d’une mère