Trajectoires - Pascal Scimè - E-Book

Trajectoires E-Book

Pascal Scimè

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Beschreibung

Trajectoires relate le parcours de ces joueurs qui écument les pelouses de nos divisions inférieures. Des profils riches, intéressants, insoupçonnés, variés et semblables à la fois... Tous ont un dénominateur commun : l’amour pour le jeu et la foi dans le football. Certains ont côtoyé les sommets avant de toucher le fond, d’autres ont joué avec des « stars » avant de sombrer dans l’anonymat. D’autres encore avaient fait une croix sur le professionnalisme avant de percer. Trajectoires, ce sont des entretiens sans fioriture ni langue de bois. Il y est question de contrées lointaines, de bling-bling, de buts, de sensations, de stades mythiques, mais aussi de matches truqués... Dans ces textes, le joueur qui se livre cède sa place à l’être humain qui se dévoile.

Trajectoires est une série déclinée en Radio sur Vivacité et sur le Web, rtbf.be/sport. Avec des interviews de Théo Defourny, Denis André Dasoul, Jonathan Coquelle, Ignazio Cocchiere, Cesar Beltràn, Axel Bossekota, Frédéric Bosak, Habib Bellaïd, Vittorio Villano, Roméo Affessi Seka, Chris Makiese, Mohktar Toumi, Paul Put, Saliu Sodiq Popoola, Ieb Jelassi, Mamadou Diallo, Amara Diané, Jérémy Serwy, Roman Ferber, Jean-Marie Bombele Lifafu et Benoît Ladrière.

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Pascal Scimè

Trajectoires

20 récits

extraordinaires

defootballeurs

ordinaires

Avenue du Château Jaco, 1 – 1410 Waterloo

www.renaissancedulivre.be

fRenaissance du Livre

l@editionsrl

Trajectoires

Couverture et mise en pages : Philippe Dieu (Extra Bold)

Photo couverture : © naito8 (iStock.)

isbn:978-2507-05441-0

© Renaissance du livre, 2016

Tous droits réservés. Aucun élément de cette publication ne peut être reproduit, introduit dans une banque de données ni publié sous quelque forme que ce soit, soit électronique, soit mécanique ou de toute autre manière, sans l’accord écrit et préalable de l’éditeur.

Trajectoires

À mes parents qui ont trouvé leur trajectoire et guidé la mienne.

À Sabine pour son soutien et sa patience sans faille.

À Luca et Matias qui m’ont donné l’envie de raconter des histoires.

À Lahcen et Boris partis

PRÉFACE

France, Italie, Allemagne, Grèce, Belgique, Turquie. À 29 ans et 11 ans de carrière, moi aussi j’aurais pu prétendre avoir mes quelques pages dans cet ouvrage. C’est donc avec enthousiasme et réel plaisir que j’ai accepté d’écrire cette préface.

Trajectoires donc… Des carrières atypiques et particulières de joueurs qui le sont inévitablement devenus. À travers ces différents récits, ces 20 personnalités du football venues de divers horizons représentent notre sport de la manière la plus humaine qui soit. Mais également de manière inaccoutumée. Des trajectoires devenues aléatoires certes, mais avec la même constance pour chacun d’entre eux : l’amour et la passion du football. Des histoires quelquefois déroutantes, souvent amusantes ! Mais, en somme, toutes aussi originales les unes que les autres. Leurs espoirs, puis leurs déboires, et bien sûr leurs anecdotes succulentes nous sont narrés, exposés. Des témoignages d’autant plus captivants que je connais personnellement quatre de ces 20 joueurs : Habib Bellaïd (qui est de surcroît mon meilleur ami), Chris Makiese et Jonathan Coquelle que j’ai connu à L’Institut national du football à Clairefontaine. Enfin, il y a mon « grand frère », Amara Diané, que j’ai côtoyé lors de ma première saison en professionnel au Racing Club de Strasbourg.

  Au-delà de leur passion incontestable pour le foot, ces joueurs partagent également deux autres points communs. Ce sont, d’abord, des hommes avec de réelles qualités humaines ; des qualités développées et mûries au fil de leurs diverses expériences. Ensuite, bien que la moitié de ces footballeurs soient belges, tous ont eu, ou ont toujours, un attachement pour la Belgique. Avec un respect, voire un véritable amour pour le Plat Pays et ses contrées.

Je vous laisse découvrir ou redécouvrir ces Trajectoires réalisées par mon ami Pascal Scimè en espérant qu’elles vous plairont et vous toucheront autant qu’elles m’ont touchées.

BONNE LECTURE 

Ricardo Faty

« Ç’aurait pu être Manchester United… c’est Virton ! »

THEO DEFOURNY

INTERVIEW PUBLIÉE LE :

28 NOVEMBRE 2014

Naissance : 25 avril 1992 à Bourg-Saint-Maurice (France)

Taille : 1 m 94

Poste : gardien de but

Signes distinctifs : Franco-Belge ; ex-international espoir

Particularité : Paul Pogba a été son traducteur

Théo, tu es Belge, mais né en France ?

Mon père est parti de Liège pour travailler comme saisonnier aux Arcs (en Savoie) pendant la saison d’hiver… Il y a rencontré ma mère et n’est jamais revenu !

En Savoie, on skie plus qu’on ne joue au foot, non ?

Non, pourquoi ? Moi, je jouais au foot tout le temps à l’école ou en dehors avec mes copains…

Pourquoi gardien de but ?

Mon père était supporter du Standard. Il m’a fait découvrir les Rouches et Sclessin à travers des cassettes vidéo… Et c’est là que j’ai vu Michel Preud’homme. C’est lui qui m’a donné envie d’être gardien !

À 12 ans, c’est l’heure du premier choix de carrière. Choix de vie aussi… Avec le départ pour Lyon !

Je quitte la famille et mon cocon pour partir à 250 kilomètres. Le premier mois est vraiment difficile parce que, quand on se quitte, on pleure… Mais, à un moment donné, on se dit soit on arrête tout et on rentre, soit on arrête de pleurer et on ne regrette pas plus tard ! Finalement, on choisit la deuxième option, tous ensemble ! Et jusqu’à aujourd’hui, on n’a pas regretté !

Tu gravis les échelons petit à petit et côtoies de futurs grands joueurs…

Oui, Lacazette, Umtiti, Grenier. J’ai franchi tous les paliers en bossant encore et encore…

Raconte-moi l’histoire de ton transfert avorté à Manchester United ?

On a une superbe équipe en U19 avec plusieurs internationaux et on réalise un superbe parcours en championnat de France lors de la saison 2010-2011… Et là, en fin de saison, mon père reçoit un coup de fil de Manchester United qui m’invite à un stage d’une semaine. Moi, je crois à une blague et puis tout s’enchaîne… Lyon m’autorise à partir pour les tests et je débarque en Angleterre.

Et là, ça doit être un choc, non ? S’entraîner à Man U avec des stars…

Lyon, c’était déjà le top, mais Manchester, c’est plusieurs divisions au-­dessus ! Tout est parfait ! L’organisation, les terrains... J’ai été accueilli par Alex Ferguson en personne qui me parle en français ! Je m’entraîne avec l’équipe première : Rooney, Owen, Ferdinand, Vidić… Paul Pogba me sert de traducteur (sic) et Patrice Evra me prend sous son aile ! C’était le pied ! Et puis, il y a Edwin Van der Saar… Un grand gardien, mais surtout un grand monsieur ! Quelle humilité et quel professionnalisme ! Il aurait pu se la péter et me snober, mais il m’a donné des conseils et m’a coaché pendant toute la semaine. Il était dans le partage ! Il trouvait qu’on avait beaucoup de points communs… Tu sais, tous ces grands joueurs, ce sont des grands pros qui bossent énormément. J’ai vécu un rêve éveillé !

Au bout de ton stage d’une semaine, Man U est convaincu. Ferguson veut te transférer… Et puis ça coince…

Lyon accepte la proposition financière (250 000 euros) avant de se rétracter pour faire monter les enchères (l’OL demandera 1 million d’euros, NdA). Et là, Man U laisse tomber...

Il paraît que tu faisais des heures sup avec Johan Gourcuff ?

Bah, je m’entendais bien avec Gourcuff. Tu sais qu’après les entraînements, il restait tout seul pour tirer des coups francs sans gardien ? Moi, je lui ai alors proposé d’aller dans les buts. Du coup, s’il a perfectionné ses tirs, c’est peut-être grâce à moi (rires)…

À l’OL, tu es barré par Hugo Lloris. En quête de temps de jeu, tu es prêté à l’Antwerp…

Dès que Lloris est arrivé, on a tout de suite vu qu’il était d’une autre dimension ! C’est comme ça, il est très très fort ! Oui, Man U garde un œil sur moi et j’effectue une belle saison à Anvers. J’y rencontre des joueurs qui sont devenus des amis… Et puis, il y a les supporters qui m’adoptent dès mon premier match !

Ils t’ont même dédié une chanson…

Oui, le truc, c’est que, comme je ne parlais pas le flamand, je ne comprenais pas que c’était pour moi (rires).

Après une saison, tu retournes à l’OL qui te prête à Rouen en National !

Oui, et sans des problèmes financiers, on monte en Ligue 2 ! Par contre, on a réalisé un superbe parcours en Coupe de France…

Raconte-moi l’histoire du match contre Ajaccio préparé à la Saint-Sylvestre.

On avait tous envie de se qualifier pour les 16e. Et le match contre ­Ajaccio arrivait juste après le Nouvel An… Au lieu de faire la fête, on a passé le réveillon à la maison avec quatre ou cinq joueurs à manger une pizza devant la télé ! Et… on se qualifie aux tirs au but… J’en sors 3 et on va en 16e contre Marseille ! L’OM, c’était un niveau au-dessus, mais on est sortis la tête haute…

En fin de saison, tu retournes à l’OL… Tu prends même place sur le banc en préliminaire de Ligue des Champions en 2013-2014…

Contre Zurich… Et puis, c’est le début des galères, je joue en CFA et je me blesse à l’épaule. Pour un gardien, il n’y a rien de pire. Je me fais opérer et puis il y a eu des complications en postopératoire… Mon épaule a gonflé beaucoup… Ça s’était infecté… Finalement, ma saison est blanche… Mais j’en ai profité pour prendre le temps de me rééduquer parfaitement.

En Belgique, on ne te connaît pas et pourtant, tu intègres l’équipe nationale « espoirs »…

Oui, les U19 et les U21 avec qui j’ai disputé le tournoi de Toulon. J’ai même été titulaire contre le Mexique ! C’est un chouette souvenir.

De l’OL à Virton… C’est le grand écart, non ?

Cet été, j’achevais ma rééducation et j’attendais un club. Faut savoir qu’il me restait encore un an de contrat avec l’OL… Moi, je cherchais du temps de jeu et puis l’offre de Virton est arrivée ! Ça pouvait être Manchester, mais, pour l’instant, c’est Virton ! Et c’est tant mieux ! J’ai connu des galères, des blessures, donc je suis très serein et heureux d’être ici… Il y a une super ambiance.

Tu te sens chanceux, en fait !

Oui, parce que j’ai un club ! J’ai connu des gars ultradoués chez les jeunes à Lyon et, aujourd’hui, ils ne sont nulle part ! Donc, oui j’ai de la chance…

Je suppose qu’on ne gagne pas la même chose à Lyon et à Virton ?

Non (sourire), c’est sans commune mesure, mais je ne suis pas ici pour l’argent. Je veux juste jouer. D’ailleurs, je remercie le club de m’avoir donné cette possibilité.

Et le pâté gaumais dans tout ça ? T’en as goûté ?

Je n’en ai pas encore goûté, mais ça ne saurait tarder… On m’a dit que c’était lourd (rires) donc je vais essayer, mais pas avant un match !

Depuis cette interview, Théo Defourny a dû goûter le pâté gaumais, mais a surtout signé un contrat en Division 1 belge, au Royal Mouscron-Péruwelz.

« Aujourd’hui, je joue à Namur, mais mon objectif, c’est le Mondial 2018. »

Mokhtar Toumi

Interview publiée le :

5 décembre 2014

Naissance : 8 mars 1993 à Marseille (France)

Taille : 1 m 94

Poste : défenseur central

Signe distinctif : il a l’air vieux, mais ne l’est pas

Particularité : inscrit en Fac de médecine

Mokhtar, qui es-tu ?

Je suis né à Marseille. J’ai été formé à Montpellier pendant six ans avant de signer à Sétif (champion d’Afrique en titre, NdA) en D1 algérienne. J’ai ensuite vécu une saison blanche avant d’arriver cet été à Namur pour me relancer.

Petit, tu n’aimais pas spécialement le foot, c’est vrai ?

Oui, à l’âge de 7, 8 ans, je préférais de loin le basket et le judo. Le foot ne m’intéressait pas trop… Je m’y suis mis un peu grâce à mon frère qui était un grand passionné de foot.

Grâce à ton frère et à un joueur de l’OM… Raconte-moi cette histoire incroyable ?

À Marseille, il y a eu un glissement de terrain dans notre quartier et on a été relogé dans un grand hôtel de Marseille, là où les joueurs de l’OM allaient en mise au vert... Du coup, pendant des semaines, on les a côtoyés, et je me souviens qu’on faisait des tennis-ballon avec Ibrahima Bakayoko (ex-international ivoirien, NdA). Et, à l’époque, il m’a dit : « T’es doué, pourquoi tu ne fais pas du foot ? »

Donc, l’amour du foot, ça tient à un glissement de terrain ?

C’est le destin ! (Rires)

Tu signes ta première carte d’affiliation au SO Caillols, un club réputé à Marseille !

Oui, c’est là que Tigana, Cantona ou Giresse ont été formés !

À 14 ans, tu es repéré par plusieurs clubs du top… dont l’OM !

Oui, il y avait une demi-douzaine de clubs intéressés, mais mes parents n’ont pas voulu que je signe à l’OM, car on n’y donnait pas la chance aux jeunes et puis parce qu’on n’y insistait pas assez sur le cursus scolaire. Finalement, avec mes parents, on choisit ­Montpellier, là où j’avais les meilleures garanties sportives et scolaires.

Tu as eu le bac ?

Oui, mon bac scientifique… Et je me suis même inscrit en Fac de médecine. Mais, quand j’ai quitté Montpellier, j’ai arrêté.

Et au centre de formation de Montpellier, ça se passe comment ?

Au début, c’est dur, loin de ma famille, de mes amis… Mais je m’accroche parce que je suis conscient d’être un privilégié. J’ai été titulaire pendant six ans et même capitaine jusqu’en CFA. D’ailleurs, en CFA, j’étais l’un des rares « minots » titulaires lorsque les pros redescendaient…

Quand on pense à Montpellier, on pense directement à son président Louis Nicollin…

Waouw ! Lui, c’est un personnage… Je me souviens d’une gueulante qu’il avait poussée dans le vestiaire lors d’un match de CFA… Il n’était pas content de certains pros et leur avait fait savoir (rires) !

Tout se passe tellement bien que tu décroches une sélection pour la CAN espoirs 2013 avec l’Algérie…

C’était une superbe expérience. J’étais capitaine de cette équipe et j’ai réalisé un très bon tournoi !

À tel point que tu tapes dans l’œil du sélectionneur des A, Vahid Halilhodžić !

Il a suivi le tournoi et était venu me trouver en disant que, si je continuais de la sorte, il y aurait peut-être une place pour moi à la Coupe du Monde ! Moi, je me suis mis à rêver du Brésil…

Mais, après cette période d’euphorie, tu déchantes rapidement. C’est le début des galères…

À la fin de la saison 2012-2013, je m’attends à signer mon premier contrat professionnel, mais l’arrivée du nouvel entraîneur (Jean Fernandez, NdA) bloque tout. On me fait comprendre qu’il ne comptera pas sur les jeunes…

Et là, il se passe quoi ?

On me propose juste de prolonger une saison comme semi-pro, mais je refuse. Je tombe de haut, car le club n’a pas respecté sa promesse. Mais c’est le milieu qui veut ça ! Dans le football, il n’y a pas de parole qui tienne. Dans ce monde-là, tu ne peux pas faire confiance aux gens !

Tu t’attends à signer ailleurs ?

Avant la CAN espoirs, j’avais des offres pour signer pro en Ligue 1 ou en Ligue 2 et je les ai refusées pour donner la priorité à ­Montpellier ! Les clubs intéressés six mois plus tôt ne l’étaient plus, car ils s’étaient déjà renforcés ! Sans oublier que mon agent de l’époque (Jean-Marie Cantona, le frère d’Éric, NdA) n’a pas non plus fait son boulot correctement !

Tu reçois aussi des offres farfelues à cette époque ?

Oui, de divisions 2 et 3 espagnole et anglaise. Je me suis même rendu sur place, mais comment dire… Il y avait à chaque fois une différence entre le salaire promis et celui stipulé sur le contrat ! (Sourire)

Et puis arrive l’appel de Sétif, le plus grand club algérien !

Sur papier, c’est une superbe opportunité ! Un grand club (double champion en titre) avec un très joli contrat de trois ans et, surtout, la possibilité de jouer en Algérie et de me montrer à quelques mois du Mondial !

Donc, tu fonces ?

Ma famille est contre à 100 %. Mon père, surtout, ne veut pas que j’y aille ! Mais moi, je suis tellement enthousiaste que j’arrive à le convaincre. La seule condition qu’il émet, c’est de m’accompagner là-bas.

Et, en Algérie, tu vas très vite déchanter…

Au début, ça se passe bien. J’ai un appartement, un chauffeur. Le niveau de l’équipe est correct… Mais je sens que, malgré tout, certaines choses me dérangent... L’organisation, la gestion, l’administratif font un peu défaut… Après quelques semaines, je me rends compte que ça ne va pas le faire…

Tu n’es plus payé ?

C’est ça ! Je constate qu’il y a de plus en plus de retard dans les salaires… Il faut savoir que certains de mes coéquipiers n’avaient pas été payés depuis dix mois ! Tout s’accumule et je résilie !

Fin 2013, tu rentres à Marseille. Tu es sans club, mais tu profites de ta famille et des derniers jours avec ton père !

Oui et, au mois de février 2014, mon père décède et, là, c’est dur, très dur…

Tu arrêtes le foot pour t’occuper de ta famille à seulement 20 ans !

Nous n’avons aucune famille en France et, donc, pour ma mère, ç’aurait été très difficile de gérer ça toute seule. Et puis, j’avais 20 ans quand même et, à 20 ans, on est un homme, je pense… En même temps, je n’avais pas de club, c’était donc logique que je m’occupe de ma famille.

Je n’ai jamais entendu un tel discours chez un footballeur, ni même chez un jeune qui n’est pas footballeur… Quelle humilité et quelle sagesse...

C’est comme ça, c’est mon éducation.

L’envie de rejouer au foot revient quelques mois plus tard… Pourquoi ?

Parce que j’aime ce sport. J’ai fait des sacrifices pendant six ans à Montpellier. Je pense que c’est ce que mon père aurait voulu !

Et, au mois d’août, tu quittes la Canebière pour débarquer en Belgique…

Mon nouvel agent m’a proposé de faire des tests en D1 ou en D2 belge, mais j’ai refusé. N’étant pas prêt physiquement, je ne voulais pas me griller auprès de ces clubs !

Et tu signes à Namur en Promotion.

Reprendre quasiment à zéro pour gravir à nouveau les échelons. Jouer en promotion, ça ne me pose pas de problème, je me sens bien à Namur… C’est un bon club, bien structuré et cette aventure doit me servir de rampe de lancement. Moi, je n’ai pas perdu toute ambition de goûter au haut niveau !

Que connaissais-tu de la Belgique avant ?

Je ne connaissais que le Sporting de Charleroi parce qu’un ancien de Montpellier, Algérien comme moi, Mohamed Chakouri, y avait joué. Et maintenant, j’habite à Marcinelle et je découvre Charleroi chaque jour (rires). Franchement, on vit bien en Belgique.

Je reviens là-dessus, mais ta maturité (à seulement 21 ans) m’a bluffé !

Bah… ça doit être ma taille (1 m 94) ou la barbe (rires) ! C’est vrai qu’à Namur, quand on m’a vu arriver, mes coéquipiers pensaient que j’avais 30 ans ! (Rires) Moi, j’aime prendre mes responsabilités. Être un leader, ça ne me pose pas de problème.

La suite de ta carrière, tu la vois comment ?

Moi, je veux jouer le plus haut possible ! Et j’ai l’ambition de disputer la Coupe du Monde 2018 en Russie.

Mokhtar Toumi est retourné chez lui, à Marseille. Il cherche actuellement un club.

D’ouvrier à footballeur professionnel… L’histoire de Roman Ferber

RomanFerber

Interview publiée le :

12 décembre 2014

Naissance : 29 mai 1993 à Charleroi

Taille : 1 m 90

Poste : attaquant/milieu offensif

Signe distinctif : adore les blagues

Particularité : était ouvrier avant d’être footballeur

Roman… Tu n’as que 21 ans, mais ton parcours est pour le moins sinueux !

(Rires) Oui, c’est clair que j’ai connu pas mal de choses par le passé. À 10 ans, j’ai débuté le foot au Sporting de Charleroi, mais, en U19, j’ai arrêté le foot !

Pourquoi ?

À cause de mon entraîneur qui m’a dégoûté ! Il ne m’a plus fait jouer. Dans cette histoire, je l’avoue, j’ai une part de responsabilité ! J’ai fait le con (sic) ! Tant pis, je ne regrette rien.

Tu avais fait quoi au juste ?

Je rigolais tout le temps ! Moi, j’appréhendais le foot comme un jeu. J’allais aux entraînements pour me divertir avec mes potes…

Et le coach n’appréciait pas ton humour…

Non et il avait raison. Au Sporting, on forme des joueurs de ­Division 1 et il faut donc être sérieux et faire du football sa priorité et, moi, à cet âge-là, je ne le comprenais pas. Avec du recul, je me dis que j’ai commis une grosse erreur, mais c’est mon tempérament, je n’arrivais pas à me faire à l’idée de rester sérieux pendant une heure et demie !

À ce moment-là, tu ne penses pas du tout à ta carrière ?

Oui et non. C’est clair que j’aurais aimé jouer en équipe première au Sporting. Pour un Carolo, c’est le rêve ! Mais, franchement, je n’ai jamais eu comme objectif d’être footballeur pro parce que, si tu attends trop de quelque chose, tu es souvent déçu (sic) ! Moi, j’ai bien travaillé à l’école, j’ai un diplôme en soudure, donc, si je ne réussissais pas dans le foot, ce n’était pas grave…

Quand tu arrêtes de jouer au foot, quelle est la réaction de tes proches ?

Ils respectent ma décision. De toute façon, comme c’était en janvier, je ne pouvais plus jouer ailleurs… Donc, ils m’ont conseillé de faire ce que je voulais… Je suis allé m’entraîner avec mon frère à Gilly pendant six mois.

Et ensuite ?

La saison d’après, je signe à Farciennes en 2e provinciale. J’y avais pas mal d’amis et je reprends goût au football ! Et là, j’ai un déclic, je me dis « Et si j’arrivais à faire un truc dans le foot ? » Je termine meilleur buteur de la série avec 21 buts.

Et c’est là que l’Olympic te repère… Tu passes de la 2e provinciale à la Promotion…

En fait, moi, j’avais signé avec la JS turque en P1… Mais, à la fin du mois de juin, ses dirigeants ont racheté l’Olympic ! Au lieu de jouer en P1, je me retrouve en Promotion. Et, franchement, il est plus facile de jouer en Promotion qu’en P2. Le jeu y est plus réfléchi et on y trouve plus d’espace.

Comment ça se passe ?

La première saison, je manque de régularité, mais, la deuxième année, j’explose ! J’ai joué sur le flanc droit 28 matches sur les 30 ! J’ai inscrit 7 buts et fourni 14 assists. Je savais comment jouer à ce niveau et ce que mes coéquipiers attendaient de moi.

Pendant cette période, ta vie hors du football, elle se résume à quoi ?

Je bossais dans le bâtiment comme manœuvre ! Je me réveillais à 4 heures du matin et à 4 h 10 on venait me chercher pour aller sur le chantier ! Et souvent, on bossait loin, très loin. À la mer, à Malines où à Liège ! Je commençais à 6 heures, je terminais à 15 h 30. À 17 h 30, j’étais chez moi… Je prenais une petite collation, j’allais aux entraînements et je rentrais chez moi… Je mangeais et je dormais directement aux alentours de 20 h 30-21 heures ! Aucune vie sociale !

Pas une fois, tu n’as regretté tes bêtises ?

Si, une ou deux fois peut-être le matin au réveil (sourire)… Mais c’est tout. Moi, je suis quelqu’un qui n’aime pas se lamenter. Je vis dans le présent, pas dans le passé, ni dans le futur d’ailleurs ! Oui, j’ai fait des bêtises, oui, j’aurais pu… Mais il fallait que je me lève pour aller gagner ma tartine et, donc, ça ne servait à rien de s’apitoyer !

Dans les moments de doute, on s’appuie sur qui ?

Moi, sur personne parce que j’ai un mental de fer. Je suis blindé. Ma force, c’est que rien ne peut m’abattre.

Et puis Mons arrive lors du mercato d’été…

Pas tout de suite. À la fin du mois de juin, l’Olympic est rétrogradé en P1 à cause de problèmes administratifs. J’avais reçu six ou sept offres de clubs de Promotion, mais je suis resté fidèle aux Dogues. Jouer en P1 ne me dérangeait pas, et puis c’était à cinq minutes de chez moi.

Et, le 28 juillet, il y a ce match amical contre les Dragons…

On est battu 1-6, mais je réalise un bon match devant Didier Beugnies (l’entraîneur de Mons, NdA) qui me connaissait du ­Sporting de Charleroi ! C’est le facteur chance…

Beugnies fait le forcing pour te signer !

Le lendemain, il m’appelle… Et si je n’avais pas reconnu sa voix, j’aurais pensé à une blague (rires). En raccrochant, je réalise qu’il est en train de se passer un truc exceptionnel… Que j’allais pouvoir quitter ma vie d’ouvrier pour devenir professionnel et ne vivre que du foot ! Mais, moi, je n’y crois pas. Je pense que le transfert ne va pas se concrétiser… Les deux clubs ne trouvent pas d’accord et, pendant deux à trois semaines, je vais bosser tous les jours en pensant à Mons !

Et le 20 août, tu troques ton bleu de travail pour le maillot rouge des Dragons…

Et moi, je n’y crois pas… Passer de la 1re provinciale à la Division 2 dans un club comme Mons, c’est inespéré. D’ailleurs, la veille de mon premier entraînement, je n’ai pas dormi !

Et tu arrêtes le travail dans le bâtiment…

Oui (rires) ! J’ai appelé directement mon boss et je lui ai expliqué ce qui m’arrivait. Il m’a souhaité bonne chance…

Les débuts ne sont pas roses au niveau sportif, l’équipe se cherche et ne tourne pas… Difficile d’être heureux dans ces cas-là, non ?

J’étais trop content de venir aux entraînements, mais je ne pouvais pas le montrer aux autres, car, au début, les résultats ne suivaient pas… Tout le monde tirait la tête. Et donc, je suis resté sérieux. Je pense que j’ai mûri, je sais que je n’ai qu’un contrat de deux ans et que tout peut aller très vite… Il se peut que, dans deux ans, je doive retravailler ! Alors, je veux tout faire pour réussir. Je ne suis pas un miraculé du foot, mais disons, un chanceux !

Dans le vestiaire, comment tes partenaires te perçoivent lorsqu’ils découvrent ton histoire ?

Les anciens me disent de ne plus faire le con ! Parce que j’ai connu le pire… Ils me disent de me concentrer à 100 % sur le football et de saisir cette opportunité.

Paraît que Jérémy Sapina ne te croyait pas ?

Je lui ai demandé s’il avait déjà travaillé au moins un jour dans sa vie et il m’a répondu « Non » ! Alors, quand je lui ai expliqué, il m’a regardé avec des yeux ébahis (rires).

Roman, tu pourrais donner des conseils lorsqu’on va moderniser la tribune 4…

Oui, je vais venir avec mon casque (mort de rire) ! Vous saviez que la firme qui m’employait avait bossé sur le chantier de la tribune 1 ? Donc, qui sait, je pourrais donner des conseils après les entraînements…

Ton histoire est la preuve que rien n’est figé en football ! Tout est possible. Quel message désires-tu faire passer ?

Si tu dois devenir professionnel, tu le deviendras, peu importe ton parcours ! Il ne faut jamais rien lâcher. Garder en tête que le football est un jeu, mais qu’il faut être sérieux pour réussir. Par rapport à une vie « normale », la vie de footballeur, c’est le rêve ! Le matin, je viens au club, je m’entraîne, et, à 12 h 30, je suis à la maison et je profite !

Ton rythme a été chamboulé. Pas de problèmes d’insomnie au début ?

Si, si (il rit). Les premiers jours, il m’arrivait de me réveiller en sursaut à 5 h 30 du matin, mais je me recouchais aussitôt parce que je savais que je pouvais dormir encore deux heures.

Où te vois-tu dans cinq ans ?

Je ne sais pas. Je ne me fixe aucun objectif. Vu mon passé et mon parcours… (Songeur) Je vis au jour le jour et ne pense qu’à une chose, jouer au football du mieux possible ! Parce que j’ai de la chance de vivre cette vie !

Roman Ferber est aujourd’hui un footballeur professionnel à part entière. Il évolue pour le compte du Sporting de Charleroi.

« Oui, j’ai joué au PSG… Mais pas avec Zlatan ! »

JonathanCoquelle

Interview publiée le :

19 décembre 2014

Naissance : 31 mai 1986 à Colombes (France)

Taille : 1 m 84

Poste : milieu de terrain

Signe distinctif : look de rock star

Particularité : a joué au PSG, mais pas avec Zlatan

Surnom : Coq

Parisien pur jus, le PSG te repère et ensuite, à 13 ans, tu intègres l’INF…

Oui, on a des horaires aménagés à l’école et on s’entraîne à ­Clairefontaine. Nous sommes pris en charge par les meilleurs entraîneurs.

Qui sont tes copains de promotion ?

Hatem Ben Arfa, Abou Diaby ou encore Ricardo Faty.

La fameuse génération 86, celle à qui Canal+ a consacré un documentaire qui a fait grand bruit à l’époque…

Même si les stars du documentaire étaient Abou Diaby et surtout Ben Arfa… Moi, on me voit quand même dans le film ! (Rires)

C’était comment la vie et le foot à l’INF ?

C’était une très belle expérience avec beaucoup de souvenirs… De l’amusement, mais aussi beaucoup de travail. Je me rappelle aussi que quand l’équipe de France A venait, c’était la fête ! Et puis, souvent, des anciens de l’INF comme Henry, Anelka ou Gallas passaient des soirées avec nous… Ils nous faisaient profiter de leur vécu et nous pouvions poser les questions que nous voulions. Il y avait un vrai échange… Et, à l’occasion, on recevait un maillot ou un short… C’étaient des moments magiques.

À Clairefontaine, vous êtes programmés pour devenir professionnels ?

Oui, c’est une évidence ! Mais les entraîneurs nous mettent en garde… Ils nous disent que, sur une « promo » de 25, seuls 4 ou 5 passeront pros !

À 16 ans, tu retournes au PSG, mais au bout de deux ans…

Il y a un tri qui se fait. Sur les 16 joueurs, trois passent en « espoirs » et je n’en fais pas partie.

À 18 ans, tu quittes la Ville lumière direction… Sedan ! Y’a plus glamour comme ville…

C’est vrai que, pour un Parisien, c’est un choc culturel et géographique. Je me souviendrai toujours de mon premier jour là-bas… Un pote m’a emmené en voiture pour me faire visiter la ville et il me la fait traverser en 30 secondes. Mais moi, j’avais rien vu ! Il n’y avait rien eu à voir ! (Rires)

À ce point-là ?

Franchement, les jours où on était en congé, on préférait aller s’entraîner plutôt que de rester à Sedan !

Pourtant, sportivement, Sedan, c’est un bon choix.

Oui, le club était à l’époque en Ligue 2 et avait des ambitions. En plus, c’est un club qui donne sa chance aux jeunes, donc je n’ai pas hésité.

Comment ça se passe ?