Transfusion - Alexandre Ratel - E-Book

Transfusion E-Book

Alexandre Ratel

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Beschreibung

Six auteurs, six nouvelles, six récits plus effrayants les uns que les autres.

Davy Mourier - Manon Guenot - Salomon de Izarra - Alexandre Ratel - Gary Laski - Jean-Christophe Malevil
se sont associés à Davy ARTERO pour raconter de petites histoires fantastiques teintées d'horreur...
Six récits étonnants et effrayants qui ne vous laisseront pas indifférents.

Découvrez sans plus attendre six nouvelles effrayantes et fantastiques, à frissonner d'horreur !

EXTRAIT de Idem de Davy Mourier et Davy Artero

Le générique de fin défile sur l’écran plat du salon. Chloé essuie un début de larme et se tourne vers son jeune époux installé auprès d’elle sur le canapé. Il a le boîtier Blu-Ray du film Ghost entre les mains. Il fronce les sourcils en voyant la date de sortie de cette comédie dramatique.
— Mille neuf cent quatre-vingt-dix… Ouille, ça ne nous rajeunit pas !
Chloé lui donne un coup de coude. Il la regarde tendrement.
— Mais rassure-toi. Malgré toutes ces années, je t’aime !
Chloé lui sourit.
— Idem, dit-elle le regard malicieux.
Il se recule, un peu vexé.
— Pff ! On n’aurait jamais dû revoir ce film ! Tu ne vas pas arrêter avec tes idem maintenant !
— Oh, tu t’en contentais pourtant, avant !
— Oui, mais bon.
Il croise les bras et fait mine d’être frustré.
— Et bien, monsieur est capricieux !
— Non, ce n’est pas vrai !
— Jaloux peut-être ?
— Jaloux de quoi, de ce Patrick Swayze ? Je suis tellement plus beau que lui ! Et bien plus vivant en plus…

CE QU'EN PENSE LA CRITIQUE

Encore un recueil de nouvelles que j'ai vraiment apprécié notamment de par son côté morbide . Les histoires sont toutes plus originales les unes que les autres. - Livrement-ka

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Davy Artero

Recueil de nouvelles en collaboration avec

Davy Mourier

Manon Guenot

Salomon de Izarra

Alexandre Ratel

Gary Laski

Il n’était pas tout seul dans sa tête,

Prologue

All work and no play makes Jack a dull boy

Un frisson. C’est un frisson qui l’a sorti de son sommeil. Il relève la tête, lentement, puis entrouvre les paupières.

— Qu’est-ce que…

Il ne termine même pas sa phrase. Sa voix est pâteuse, son esprit embué et il ne trouve pas les mots. Son lit est recouvert de poussière, ou de grains grisâtres. C’est son lit ou c’est du sable ? Il s’assied, se frotte les yeux puis les ouvre pleinement. Sa mâchoire inférieure descend, ouvrant grand sa bouche.

— Oh merde !

Ça ne ressemble pas du tout à sa chambre. Point de posters de films ou d’étagères remplies de figurines. Des murs défraîchis, un sol en béton granuleux et face à lui, des barreaux. Il regarde autour de lui. Mur gris, mur gris, mur délabré, et barreaux. Une cellule de quatre mètres carrés à peine. Dans un coin, une vieille couverture épaisse noire à rayures. Il baisse la tête. Il est habillé. Il la relève. Une vieille applique poussiéreuse éclaire péniblement les lieux.

Comment s’est-il retrouvé ici ? Aucun souvenir. Il n’a rien bu d’extraordinaire, n’a pas commis le moindre délit, enfin il le suppose.

Il se lève. Son dos lui fait mal. Il a dormi à même le sol apparemment. Mince, ils n’ont même pas de matelas dans les prisons maintenant ?

— Hé ! Il y a quelqu’un ? Qu’est-ce que je fous ici ? hurle-t-il en s’approchant des barreaux.

— Chut… ma tête ! lance une voix efféminée face à lui.

Il se colle aux barreaux et regarde droit devant. Ce n’est pas un autre mur décrépi qu’il y a en face, c’est une cellule identique à la sienne, plongée dans l’obscurité. Il entrevoit une silhouette qui bouge et qui se rapproche. Soudainement une ampoule s’éclaire au-dessus de cette personne. Une jeune femme aux cheveux mi-longs, roux, en nuisette foncée.

— Je vous ai déjà vu, non ? demande-t-elle avant de masquer un bâillement.

— Peut-être… La réciproque n’est pas vraie. Vous êtes ?

— Manon. Et vous c’est… ah mince, je l’ai su ! Ce n’est pas « pieuvre » ou un truc comme ça ?

— Non, moi c’est Davy. On est où ?

— Dites ? tonne une voix caverneuse.

Davy ne peut s’empêcher de lâcher un cri de surprise. Un bras vient d’apparaître sur le côté gauche des barreaux de sa cellule.

Un raclement de gorge puis la voix reprend, plus claire.

— Vous n’auriez pas une paire de lunettes de votre côté ? Je n’y vois quasiment rien

Des scintillements puis une lumière vive se met à éclairer l’espace entre les cellules. Davy aperçoit deux autres cellules à gauche de celle de Manon, et rien à sa droite, à part un mur et une porte métallique verte, à la peinture écaillée.

— Des lunettes ? reprend le type d’à côté en bougeant le bras de bas en haut.

— Non je ne crois pas, répond un autre type en face, cheveux hirsutes, bermuda sombre, et tee-shirt noir sur lequel est apposé la tête d’une pieuvre aux multiples tentacules. Tiens Gary, s’exclame-t-il en regardant vers sa droite, qu’est-ce que tu fous là ?

— C’est une blague non ? répond une voix masculine au fond.

— Quelqu’un pourrait me dire ce que c’est que ce bordel ? s’énerve Davy.

— Je vous connais, vous, réplique une autre voix masculine, dans la cellule à gauche du type au curieux tee-shirt.

Davy fronce les sourcils pour mieux voir. Un homme à lunettes, chemise et pantalon sombre, se trouve derrière les barreaux.

— Pas moi, réplique Davy. C’est quoi cet endroit ? Vous êtes qui, vous ?

— Jean-Christophe, répond le type à gauche de la cellule de Manon.

— Alexandre, réplique le type au bras qui dépasse de sa cellule.

— Gary.

— Salomon, indique l’homme à la chemise.

— Oh, c’est original comme prénom ça, s’exclame Manon.

— Merci.

— Super… on s’en moque. Et c’est quoi ici ? Une prison ?

— C’est qui qui parle ? demande Gary.

— Davy.

— Davy ? Le Davy que je connais ?

— Nan, répond Jean-Christophe. C’est un modèle plus petit.

— Sympa ! Et donc, quelqu’un sait où on est, bordel ? demande Davy.

— Moi je ne vois rien, je ne peux pas vous dire.

— Là, par terre, sur ta gauche, précise Jean Christophe.

— Quoi ?

— Tes lorgnons. Ils sont sur ta gauche. Fais gaffe de ne pas marcher dessus.

Alexandre, un grand type au corps svelte, se penche et tâtonne le sol jusqu’à ce que ces doigts frôlent un bout de plastique.

— Ah, super ! clame-t-il d’un ton enjoué.

— On se croirait dans la partie prison d’un commissariat ou d’un truc comme ça, dit Salomon. C’est curieux d’avoir une pièce avec seulement six cellules.

— Et ça, c’est quoi ? demande Alexandre en montrant l’espace entre les cellules.

Au sol, devant les cellules, divers tubes translucides courent tout le long et s’enfoncent dans le mur jouxtant les cellules de Gary et Salomon.

— C’est horrible ! s’écrit Manon en fixant l’amas bizarre relié à tous les tubes, à quelques centimètres devant sa cellule.

Davy se baisse et observe. Un rictus de dégoût s’affiche sur son visage. Ce sont des poches de sang entassés les unes sur les autres. Chaque poche semble avoir quelque chose d’inscrit dessus. Davy penche la tête, et compte.

— Nom de Zeus !… Nous sommes bien six dans ce fichu lieu ?

— Et mathématicien avec ça, répond Salomon.

— Ce sont des torchons ? demande Jean-Christophe.

— Non, ce sont des poches de sang… Il y a nos prénoms dessus, indique Davy.

— Merde, on m’a piqué ! Vous aussi vous avez un coton maintenu par du scotch sur votre bras ? demande Gary.

Chacun d’eux vérifie, et constate avec effroi que Gary n’est pas le seul. Jean-Christophe rompt brusquement le silence d’effarement qui s’était installé.

— Putain, ceux qui ont fait ça sont complètement barrés. J’ai trouvé un petit magnéto ici. C’est marqué « écoutez-moi » dessus.

— Non mais c’est juste une énorme blague ! s’écrit Davy. Où vous avez foutu les caméras, les mecs ? C’est un coup de François ça encore…

— C’est dingue, je ne me souviens de rien. On aurait été drogué, vous croyez ? demande Manon.

— Vous aussi vous avez une machine à écrire ? demande Alexandre.

— Quoi ? s’étonne Salomon.

— Taisez-vous, je fais « lecture » ! ordonne Jean-Christophe.

Tout le monde met sa colère de côté et se colle aux barreaux des cellules. Jean-Christophe presse le bouton du magnétophone archaïque. Des grésillements, puis une voix grave résonne entre les murs.

« Ici la voix !… Pardon, je m’égare… Vous êtes tous des personnes respectables, avec des univers différents et intéressants, et nous allons jouer à un jeu. Chacun d’entre vous va devoir user de son imaginaire pour me concocter une histoire ou une trame, quelque chose qui se tient et qui puisse choquer ou faire frissonner le lecteur. Vous trouverez dans vos cages respectives le matériel nécessaire… Mais votre temps est compté, et j’ai préféré utiliser quelque chose de plus sympathique qu’un simple compte à rebours. J’ai pris soin de vous prélever quelques centilitres d’hémoglobine, pour nourrir la bête. À la fin de cet enregistrement, ce qui la retient d’aspirer vos flux sanguins va se défaire, elle pourra alors s’abreuver et recouvrer pleinement ses forces. Défoncer le mur qui la sépare de vous et… et ensuite vous verrez bien ! Si vous parvenez à écrire à temps, vous serez libéré de votre cage et pourrez partir par l’unique porte qui vous relie au monde extérieur… Écrire ou mourir, à vous de choisir ! »

Un grésillement, le claquement du bouton du magnéto qui remonte, puis un étrange cliquetis.

— C’est une blague ? s’inquiète Salomon.

Un grand choc contre le mur faisant face à leur unique sortie. Si fort que le mur tremble et des morceaux de plâtre tombent du plafond.

— Oh putain ! Là, regardez ! s’exclame Alexandre en pointant d’un doigt tremblant le tas de poche de sang.

Les différents tubes plastiques reliés aux poches commencent à se teinter de rouge. Le sang se vide peu à peu des poches et se répand dans les tuyaux. Ces fichus tuyaux allant de l’autre côté du mur où il y a il ne sait quoi…

— Vite ! s’exclame Manon en allant s’asseoir au fond de sa cellule.

Davy ne comprend rien à ce qui se passe. Il fait un demi-tour sur lui-même et va devant l’épaisse couverture trainant au fond de sa cellule. Il la soulève. En dessous se trouve une vieille machine à écrire et une dizaine de feuilles de papier.

— C’est n’importe quoi !

Abasourdi, il prend une feuille, la glisse dans la machine et fait tourner le rouleau pour bien la positionner. Il tourne le rouleau dans les deux sens. Ce bruit lui rappelle quelque chose. Une vieille chanson dans un film avec Demi Moore.

— Unchainedmelody…

Il tremble. Dans quoi est-il embarqué ? Pas le temps d’y penser. Il attrape la couverture et s’enroule à l’intérieur. Les mains positionnées sur le vieux clavier mécanique, il commence à frapper quelques lettres.

Idem

Davy Mourier & Davy Artero

Le générique de fin défile sur l’écran plat du salon. Chloé essuie un début de larme et se tourne vers son jeune époux installé auprès d’elle sur le canapé. Il a le boîtier Blu-Ray du film Ghost entre les mains. Il fronce les sourcils en voyant la date de sortie de cette comédie dramatique.

— Mille neuf cent quatre-vingt-dix… Ouille, ça ne nous rajeunit pas !

Chloé lui donne un coup de coude. Il la regarde tendrement.

— Mais rassure-toi. Malgré toutes ces années, je t’aime !

Chloé lui sourit.

— Idem, dit-elle le regard malicieux.

Il se recule, un peu vexé.

— Pff ! On n’aurait jamais dû revoir ce film ! Tu ne vas pas arrêter avec tes idem maintenant !

— Oh, tu t’en contentais pourtant, avant !

— Oui, mais bon.

Il croise les bras et fait mine d’être frustré.

— Et bien, monsieur est capricieux !

— Non, ce n’est pas vrai !

— Jaloux peut-être ?

— Jaloux de quoi, de ce Patrick Swayze ? Je suis tellement plus beau que lui ! Et bien plus vivant en plus…

Chloé lui prend la jaquette des mains et compare l’image de l’acteur à celle de son mari. Cheveux longs blonds et sourire ravageur, contre cheveux courts bruns et sourire pincé. Peut-être ont-ils le même regard… En tout cas l’acteur n’a pas de fine cicatrice sous l’œil, lui.

Elle semble pensive. Son attitude l’interpelle.

— Non, mais je plaisantais. Inutile de vérifier ! Il est à craquer, il est svelte, il est bien foutu, il est…

— Oh mon petit chou, je l’ai vexé !

Elle se rapproche de lui et lui caresse la joue. Il marmonne.

— On aurait dû regarder un autre film. D’ici peu, tu vas me demander de me mettre à la poterie !

— Et si tu arrêtais un peu tes bêtises ? lui dit-elle en passant sa main sous son tee-shirt.

— Je ne sais pas…

— Montre-moi si tu es toujours aussi habile de tes mains.

Elle s’approche de lui et se met à l’embrasser langoureusement.

***

Chloé avance d’un pas pressé sur le trottoir, un gobelet de café en main. Elle évite un gamin vacillant sur son skate-board, à la manière d’un McFly hésitant, mais n’est pas assez habile pour éviter l’obstacle suivant.

— Hey, attention !

Chloé relève la tête et observe avec désarroi l’homme qu’elle vient de percuter et de salir avec son café.

— Oh, pardon ! Que je suis maladroite ! Je suis vraiment désolée…

— Vous pouvez, répond-il en constatant les dégâts sur sa chemise.

— Je m’en veux… C’est vraiment nul de vous tacher avec du café, j’ai l’impression d’être dans une mauvaise comédie romantique des années 80.

L’homme la regarde, sourit, puis recule légèrement et désigne du doigt le sol.

— Ça, c’est mon espace de danse et ça, c’est votre espace de danse. Vous n’envahissez pas mon espace avec votre café, je n’envahis pas votre espace.

Les yeux de Chloé scintillent. Son trouble se transforme en admiration.

— Oh, vous citez Patrick Swayze ! C’est une excellente référence !

Ils s’observent en silence, souriant tous les deux. Chloé cherche à reprendre ses esprits.

— Je suis vraiment désolée en tout cas, monsieur…

— Éric, dit-il en lui faisant un clin d’œil.

— Je suis désolée Éric, lui dit-elle en lui touchant le bras. Je peux vous payer un verre pour me faire pardonner ?

— Ce serait avec plaisir, mais…

— Mais ?

— Mais une prochaine fois. Je dois rentrer chez moi, car une charmante jeune femme a renversé du café sur ma tenue de travail.

— Ah oui, pardon. Bien sûr, je comprends.

Éric commence à s’éloigner. Chloé reste figée, des milliers de pensées traversant son esprit, jusqu’à ce que l’une d’elles, plus importante que toutes, la fasse réagir.

— Hey, Éric, tu ne m’as pas demandé mon numéro !

***

Il se passe la main dans ses courts cheveux bruns, puis il regarde le numéro inscrit sur sa main, un petit rictus au visage. Il se sent fier. Il y a bien longtemps qu’une femme lui avait fait du rentre-dedans, au sens propre comme au sens figuré.

Il presse le bouton de l’ascenseur, puis saisit son téléphone portable glissé dans la poche avant de son jean. Les portes de l’ascenseur s’ouvrent. Éric se faufile à l’intérieur et presse machinalement le numéro de son étage. Pendant la courte montée, il note sur son téléphone le numéro griffonné sur sa main, qu’il frotte ensuite énergiquement contre son jean pour en effacer toute trace.

L’ascenseur émet un petit bruit et les portes s’ouvrent à nouveau. Éric sort. Il observe les dix chiffres affichés sur l’écran du téléphone. Il fait une moue, soupire et décide de ne pas l’enregistrer. Il remet le portable dans sa poche et traverse le couloir en direction de son appartement.

À peine a-t-il pénétré dans son vestibule et refermé la porte que Manon surgit pour l’enlacer.

— Tu as passé une bonne journée, mon chéri ? Oh, mais qu’est-ce que tu t’es fait ?

Éric tend le bas de sa chemise et regarde Manon.

— Je crois que tu as raison quand tu me dis que je prends trop de café au travail ! Voilà où a atterri le contenu de mon dernier mug !

— Tu ne t’es pas brûlé, au moins ?

— Non, rassure-toi !

— Pauvre chou, dis Manon en l’embrassant. Heureusement que ta jeune épouse a de l’expérience dans les produits détachants !

— Tu es un ange.

— Et toi, un gros cochon !

Éric l’enlace et l’embrasse longuement.

***

Il plonge la fourchette dans sa salade, tout en ne quittant pas des yeux l’article affiché sur sa tablette concernant les dernières péripéties boursières de la semaine.

— Éric ?

Il relève la tête et sent son cœur cogner singulièrement contre sa poitrine. C’est la femme de la dernière fois, celle qui lui a laissé son numéro sur la paume de sa main et à qui il a donné le sien.

— C’est curieux de te retrouver là. Je peux m’installer avec toi ? Pour manger, je veux dire…

Éric fait un signe de tête. Elle s’installe face à lui et lui fait un large sourire, avant de reprendre la parole.

— Tu ne m’as même pas laissé de message. C’était à toi de me contacter. J’ai attendu, tu sais…

— Je suis désolé…

Elle comprend qu’il cherche son prénom, ce qui l’agace quelque peu.

— Chloé.

— Je suis désolé Chloé, mais j’ai eu beaucoup de travail.

— Ah oui, tu fais quoi ? Tu es trader ?

Elle lui montre la tablette. Éric grimace.

— Non, pas du tout, je suis infographiste. Je mets en forme des sites web, comme celui-ci. Je vérifie si ça rend bien sur ce type d’écran.

— Ah oui ?

Elle vient de poser sa main sur la sienne. Éric rougit et retire aussitôt sa main.

— Écoute Chloé… Tu es très jolie et tout, mais…

— Mais quoi ?

— Je suis déjà en couple. Marié même.

Elle le fixe dans les yeux un instant, évitant de dévier sur la cicatrice qu’il arbore sous l’œil droit.

— Je ne suis pas jalouse.

Éric reste bouche bée. Différentes pensées envahissent son cerveau. Il sent son cœur cogner de plus belle. Il ferme les paupières quelques secondes, le temps de recouvrer ses esprits.

— Je suis fidèle, Chloé.

Il prend sa tablette et se lève brusquement.

— Sur ces bonnes paroles, bonne continuation à toi !

Il part, laissant Chloé abasourdie par sa dernière réplique.

***

Chloé triture ses mains et son époux ne dit pas un mot. Il a la tête baissée et essaye de ne pas fondre en larme.

Le silence règne dans le bureau du médecin. Chloé n’ose croire ce que ce dernier leur a annoncé. D’une voix chevrotante, elle ose poser la question fatidique.

— Combien de temps ?

— Trois mois, peut-être moins.

Elle éclate en sanglots. Lui non plus ne peut retenir ses larmes à l’annonce du diagnostic.

***

Il traverse la cour de son immeuble quand il sent son téléphone portable vibrer à nouveau. C’est Chloé, une fois de plus.

Allez Éric, s’il te plaît. Juste un dîner !

Il serre les dents. Elle ne le lâchera donc jamais ? Elle risque de faire vaciller son couple si jamais Manon tombe sur un de ces messages. Il faut qu’il lui réponde avant de bloquer son numéro pour qu’elle ne l’importune plus jamais.

Chloé, je suis marié. Lâche-moi maintenant, trouve-toi quelqu’un d’autre !

Il y est allé un peu fort, mais il faut qu’elle comprenne. Elle a beau être jolie et attirante, plus rien ne détournera son cœur de sa tendre épouse.

— Tu me dois un rendez-vous !

Éric se retourne. Chloé est là, à quelques mètres de lui. D’où a-t-elle surgi ? D’un des bosquets de la cour ? Elle est folle ! Elle le guette aux pieds de là où il habite !

— Mais enfin ? Tu m’espionnes ? Tu me suis ?

— Un simple rendez-vous…

— Tu es complètement tarée, ma pauvre fille ! Il faut laisser tomber ! Je ne veux plus te voir.

Éric tourne les talons et se hâte d’arriver au seuil de son immeuble. Chloé le suit. Il presse le pas, compose au plus vite le code sur le boîtier du digicode et s’engouffre aussitôt à l’intérieur du hall, en refermant immédiatement la lourde porte vitrée derrière lui.

Chloé se met à frapper contre la vitre. Elle est en pleurs.

— Éric ! S’il te plaît. Ne me laisse pas comme ça !

— Mais qu’est-ce que tu veux, bordel ?

— Juste un rendez-vous. Un moment toi et moi, que nous deux…

— Chloé ! Disparais de ma vie ! Si tu continues, je vais déposer une plainte chez les flics pour harcèlement !

Chloé se recule et s’essuie les larmes d’un revers de manche. Elle baisse légèrement la tête et fixe Éric.

— Tu n’as pas le droit…

Éric recule.

— Je vais me gêner. Adieu !

Il s’enfonce dans le hall pour rejoindre les ascenseurs.

***

Éric rentre dans son appartement. Manon, comme à son habitude, vient l’accueillir.

— Tu m’as l’air tout pâle mon chéri. Ça ne va pas ?

— Non, ce n’est rien. La fatigue sans doute.

Elle vient lui déposer un doux baiser sur les lèvres.

— Courage, les vacances sont pour bientôt.

— Oui… Je vais aller prendre ma douche. Je t’aime.

— Moi aussi.

Elle le suit des yeux pendant qu’il se dirige vers la salle de bain. Il a l’air épuisé le pauvre. Elle espère que la douche va le revigorer un peu, elle n’aime pas quand il est dans cet état.

Elle retourne dans la cuisine, mais des coups retentissent contre la porte d’entrée. Elle revient sur ses pas et regarde à travers le judas. Une femme attend de l’autre côté de la porte. Elle ne lui dit rien. Peut-être une jeune voisine qui a besoin de sel ou quelque chose dans le genre.

Elle ouvre. Alors qu’elle s’apprête à lui dire bonjour, elle sent une vive fraîcheur sous le cou. La femme la pousse violemment et Manon se met à reculer de quelques pas. Ses yeux s’écarquillent. La femme devant elle a le regard noir, un couteau ensanglanté dans la main droite.