Coming out des travestis politiques - Aimée Sossou - E-Book

Coming out des travestis politiques E-Book

Aimée Sossou

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Beschreibung

"Coming out des travestis politiques" est un essai éclairant sur la condition de l’Afrique dans le monde. Dans ce livre audacieux et percutant, l’auteure soulève des interrogations pertinentes sur l’évolution des sociétés et explore certaines dynamiques qui ont façonné le paysage politique et économique de l’Afrique et du reste du monde. L’auteure désigne par « travestis politiques », les Etats sur le continent africain, qui naviguent à grand-peine dans les eaux tumultueuses de la politique moderne. Elle explique les mécanismes de cette métamorphose qui brouille les frontières entre « l’Homme viril » qu’était l’Afrique et le « travesti » qu’elle est aujourd’hui. Et en s’appuyant sur une analyse rigoureuse et des exemples concrets, l’auteure examine les enjeux d’un changement de la manière d’aborder les questions relatives au « developpement » de l’Afrique. En fin de compte, cet essai invite le lecteur à reconsidérer, à questionner et à décrypter les codes d’un univers en perpétuelle mutation.

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Seitenzahl: 82

Veröffentlichungsjahr: 2024

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Aimée SOSSOU

Coming out des travestis politiques

Essai

Préface

Voici des siècles durant, du XVe à présent, les communautés humaines de part et d’autre de la méditerranée connaissent l’ère des femmes d’affaires et des hommes battus.

Autrefois, plutôt quelques siècles plus tôt, le monde affichait l’image d’un univers hétéroclite, où des groupes d’hommes voire races, chacun dans sa particularité tantôt déconcertante pour les uns ou fascinante pour les autres s’organisaient et réfléchissaient en fonction de ce qui a toujours été les leurs, l’héritage social et institutionnel légué par l’ascendance. Des groupes d’hommes avec des différences notables, à la fois intrinsèques, très profondes et ancrées dans chaque membre de la communauté à travers leur cosmogonie et appréhension de la vie, les valeurs incarnées et les convictions présidant l’ordre organisationnel et les rationalités politiques. Et des différences tout aussi, extrinsèques par les manières d’accoutrement, de langage et d’expression ; des attributs enfantés par le système de valeur partagé. S’il y a environ six siècles c’était l’image du monde, la prise actuelle est tout autre.

J’ausculte longuement, la résultante des forces qui ont sculpté les sociétés et qui continuent d’influencer leur avenir à travers le monde. Des civilisations ont dominé d’autres ; et plus que jamais, depuis que les civilisations naquirent sous différentes formes et circonstances et sous divers cieux, elles ont convergé de plus belle pour n’en former qu’une ; on assiste bien depuis à l’avènement de la mondialisation qui ne serait plus réalistique que lorsque toutes les sociétés penseront le futur de la même manière à quelques différences minimes près. Elle implique le partage d’un destin commun heureux ou malheureux. L’intensification des échanges commerciaux l’a propulsée, la Première Guerre mondiale l’a remise en cause et le défi environnemental la redéfinit. Elle se fait de gré ou de force, et pour les travestis politiques, faire un coming out ne semble plus être un choix, mais une nécessité. Mais qu’ils prennent garde, qu’ils gardent en mémoire que toutes les civilisations connaissent au cours de leur trajectoire une période de déclin avant de renaître ou disparaître. Pour l’heure, la civilisation occidentale, en vogue depuis deux siècles, se manifeste de plus en plus époumonée. Le modèle du monde non occidentalo-centré mais multipolaire est-il toujours possible ? L’élargissement du camp BRICS peut-il réconforter dans cette idée ? Le peuple qui n’est pas encore capitaliste au sens de la recherche maximale de profit du terme se doit-il de l’être pour faire le saut salvateur ? La Chine a bien joué la carte de capitalisme d’État pour redevenir puissante.

Les actualités sur le monde depuis la guerre froide, diffusent un match de trois équipes (les blocs de l’ouest, de l’est et du sud), pas très commode en soi pour une troisième équipe (le bloc du sud) qui n’a, au sens des règles du jeu, aucune place si ce n’est d’assister au spectacle ou de porter assistance. On se pose la question souvent, quels sont le sens et la direction des évènements du monde actuel ?

Chapitre 1 : Le travestissement d’Alkebulan

Jusqu’à la fin du XVIIIe siècle, la conscience de différence des niveaux de croissance économique entre les pays était moins présente dans les esprits qu’à notre siècle. Avant cette période marquée en Europe par « le contrat social » de Rousseau en 1762 et le début de la révolution industrielle, des peuples forts militairement et économiquement, avides de conquêtes et de progression ont assujetti et dominé d’autres en déphasage avec leur niveau de progrès technique. Il n’avait pas été question systématiquement d’envisager le monde comme un ensemble où chaque peuple serait un élément intégral à part entière, comme pourrait-on le clamer à ce jour en ces termes : « État souverain ». Dès lors que l’abolition de l’esclavage, et par la suite la Déclaration universelle des droits de l’homme ont été proclamées, le regard sur le rapport de force entre les sociétés a changé de nature, il s’est métamorphosé en prenant une forme plus subtile qui semble presque occulter son existence. Environ à la même période, le questionnement sur le sous-développement était devenu pressant, on cherchait les raisons qui expliqueraient, pourquoi certains peuples sont moins avancés techniquement et économiquement par rapport à l’occident ? Ensuite, après les indépendances des pays colonisés, l’attention s’est portée sur comment les pays décolonisés pouvaient à leur tour se développer.

C’est alors que Walt Whitman Rostow, en pleine période postcoloniale et des indépendances, en réponse au questionnement sur le développement des nations a formulé la théorie selon laquelle chaque société passe à des rythmes différents, par cinq étapes pour se développer. Une société traditionnelle comme l’Afrique à l’époque passerait par une étape de convergence des conditions préalables au développement avant de connaître le décollage économique puis la marche vers la maturité et devenir une société de consommation de masse comme l’occident. Ainsi, chaque pays traverse les mêmes étapes pour passer du sous-développement au développement lorsque les conditions sont réunies. Tous les pays seraient alors en train de suivre les mêmes étapes, mais en sont à des étapes différentes en fonction de leur antécédent historique. On est donc selon la perspective de Rostow, dans une logique de rattrapage à la fois pour des facteurs sociologiques et pour des capitaux. Un rattrapage sociologique pour que la société traditionnelle outrepasse les facteurs sociologiques qui freinent l’émergence des conditions préalables qui vont enclencher le processus de développement. La société traditionnelle devra transgresser la pesante hiérarchie de la structure socio-économique, les croyances irrationnelles, le fatalisme, etc. Et un rattrapage capitalistique pour que la société traditionnelle devienne une société de consommation de masse à travers l’accumulation de capitaux et le progrès technique.

L’afrocentrisme reproche à cette théorie son eurocentrisme. Cette chronologie ne retracerait que l’histoire de l’évolution de la société occidentale. Qu’en est-il ?

La logique étapiste de Rostow est factuelle dans toutes les sociétés. Toutes les sociétés connaissent une évolution fondamentalement progressiste et généralement un passage du traditionnel rural à niveau technique modeste vers le moderne citadin plus élaboré. Foncièrement elles suivent des trajectoires semblables : de l’apparition, à un niveau donné de progression technique, et peuvent stagner en absence d’épisode exceptionnel comme peut l’être une révolte contre des dysfonctionnements sociétaux inacceptés, ou un désir d’améliorer les conditions de vie, amenant à des découvertes et innovations, pouvant susciter un changement. L’état de stagnation peut être fatal suite à une menace externe importante et conduire au déclin. Cet algorithme est commun à toutes les sociétés.

L’Afrique, dans son ensemble, a perduré dans une phase de stagnation qui lui a été fatale suite d’abord à l’esclavage puis à la colonisation. En comparaison avec l’Europe qui a connu une période de stagnation en termes d’innovation durant le moyen âge avant d’entrer dans les temps modernes, dans les sociétés européennes, notamment française, la phase préalable au décollage économique a été perturbée par des évènements comme la guerre de Cent Ans, les guerres de religion, etc. pour finir par s’enclencher progressivement à partir de la fin du moyen âge par la Renaissance, la Révolution française puis la montée de la bourgeoisie. Quant à l’Afrique, l’esclavage et la colonisation ont sans doute contribué à empêcher l’émergence de la phase préalable au développement. Mais, sans avoir connu ces troubles, aurait-elle fini par réunir les conditions du décollage économique grâce à ses facteurs internes ou pas pour une raison ou une autre?

En suivant la théorie de Rostow, les sociétés africaines devraient devenir aussi une société de consommation, où le revenu réel par tête élevé permet de consommer des biens dépassant les nécessités de subsistance de base alimentaire et vestimentaire. La croissance économique serait stimulée par un désir inexorable d’amélioration des conditions de vie et de recherche de profits. Prenons l’exemple de la Corée du Sud ; dans les années 1950, le pays était en pleine phase de la planification du développement économique et la théorie de Rostow était parue à point nommé. À cette époque, l’économie coréenne était à l’étape du décollage économique (Take-off) d’après Rostow. Sa théorie a connu un succès dans le pays, car elle pouvait servir de base théorique pour faire décoller l’économie coréenne. C’était, cependant, pour certains, un processus d’américanisation de la société coréenne.

On peut alors se poser des questions quant à ce devenir pour les sociétés africaines a priori de ce qui les caractérise fondamentalement. Très certainement, avec l’amélioration, même lente, des moyens de production, elles dépasseront des économies de subsistance, le revenu réel par tête augmenterait et elles atteindraient une forme de société de consommation. Mais très probablement, sans contact, avec l’occident, une projection du devenir des sociétés africaines, accuse une invraisemblance avec la société occidentale. Les deux sociétés n’auraient possiblement pas pu partager la même perspective idéologique du développement.

Le géographe américain, Jared Diamond, auteur de l’ouvrage « De l’inégalité parmi les sociétés : Essai sur l’homme et l’environnement dans l’histoire » évoque des raisons géographiques des différences fondamentales entre les continents. Il explique comment la localisation géographique a permis à certains continents de connaître un progrès précoce par rapport à d’autres. En effet le type d’environnement modèle la culture d’un peuple ; en fonction de l’environnement auquel l’homme est confronté, il développe une technicité pour façonner l’environnement qui lui est convenable, contrairement aux animaux qui sont biologiquement dotés des outils nécessaires suffisants. L’environnement et la culture s’impactent ainsi mutuellement ; la culture produite par l’environnement le modifie continuellement.