Dis, c’est quoi la citoyenneté ? - Thomas Gillet - E-Book

Dis, c’est quoi la citoyenneté ? E-Book

Thomas Gillet

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Beschreibung

Aujourd’hui, le terme « citoyen » et les concepts qui y sont liés sont utilisés à toutes les sauces. Il semble qu’à notre époque, la citoyenneté soit devenue le remède miracle aux maux de notre siècle. En mettant un peu partout de ce « mot valise » certains pensent pouvoir rendre la vie en société plus agréable, réglant d’un seul geste les différentes crises que traversent bon nombre de sociétés démocratiques. Et pourtant, comme souvent, cette notion est plus complexe et multiple que ce que la communication politique laisse à penser. Cet ouvrage propose de clarifier le terme et d’en présenter les enjeux afin d’éclairer les rapports que chaque individu entretient avec la société et les règles qui régissent cette dernière. Élément-clef de la démocratie, la citoyenneté permet de nous questionner sur la société dans laquelle nous vivons et celle dans laquelle nous voulons vivre mais également sur les conditions de l’action nécessaire pour y parvenir.

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Dis,

c’est

quoi

la citoyenneté ?

Thomas Gillet

Dis, c’est quoi la citoyenneté ?

Renaissance du Livre

Avenue du Château Jaco, 1 – 1410 Waterloo

www.renaissancedulivre.be

Renaissance du Livre

@editionsrl

directrice de collection : nadia geerts

maquette de la couverture : aplanos

illustrations : © monsieur iou

isbn : 978-2-507-05615-5

dépôt légal : D/2018.12.763/16

Droits de traduction et de reproduction réservés pour tous pays.

Toute reproduction, même partielle, de cet ouvrage est strictement interdite.

Remerciements

Beaucoup de noms me viennent à l’esprit au moment de rédiger ces remerciements et il me sera malheureusement impossible de citer tout le monde.

Je tiens à remercier particulièrement Nadia Geerts pour cette opportunité d’écrire qu’elle m’offre ici ainsi que Paul Magnette et François De Smet de l’honneur qu’ils m’ont fait d’accepter respectivement de préfacer et de postfacer ce livre.

Je ne peux m’empêcher de remercier mes collègues passés et présents pour les riches échanges qui ont nourri ma réflexion et m’ont permis d’accoucher de ce modeste ouvrage.

Évidemment, je me dois de remercier également mes étudiants, passés et présents, tant leur participation active à mes différents cours m’aura été d’une grande aide pour imaginer ce dialogue qui a quelque chose de réel.

Impossible de ne pas remercier mes parents et grands-parents ainsi que mes professeurs, de l’école primaire à l’université, de m’avoir donné le goût d’apprendre et la volonté de penser.

Enfin, je ne peux pas oublier mes proches, amis et famille pour le soutien sans faille qu’ils m’ont apporté dans la rédaction de ces quelques pages.

À JG…

Citoyen : un état et un idéal

Comme souvent chez nous, il aura fallu un élément « extérieur » pour que soit ouvert le débat sur une question de société, certes posée de longue date par certaines formations politiques et de la société civile mais dont l’examen ne cessait d’être reporté au nom des équilibres traditionnels de notre État. Ainsi, l’arrêt de la Cour constitutionnelle donnant raison aux parents qui refusaient de devoir inscrire leur enfant dans l’un des cours dits « philosophiques » proposés par son école a brisé le dogme de l’intangibilité de cet enseignement.

Cette obligation de prendre position a permis d’inscrire à l’agenda politique la réflexion sur la place des enseignements religieux dans l’école et, surtout, sur la pertinence d’opérer la séparation des élèves d’une même classe sur une base confessionnelle, a fortiori de nos jours, dans un monde d’ouverture et de diversité.

La question touche aux principes et renvoie au projet de société. Pourtant, tout acteur sait que, pour passer du positionnement théorique à la réalité concrète, on ne peut ignorer le poids du passé et la réalité des sensibilités persistantes sur le sujet. Voilà pourquoi le cours de philosophie et citoyenneté doit être perçu comme une étape importante dans ce qui se présente comme un cheminement. D’aucuns ont regretté l’extrême progressivité du processus, et je pourrais en être si je ne connaissais «la difficulté des grandes tâches et la lenteur des accomplissements ». D’autres ont ironisé sur l’intermède du « cours de rien », induit par la nécessité de répondre sans délai à l’injonction de la Cour. Beaucoup regrettent les différences d’approche entre les réseaux, une autre de nos réalités héritées des « grands accords » du passé. Et, finalement, tous pensent que cette évolution n’est pas encore parvenue à son terme, si tant est, d’ailleurs, qu’il y ait un terme à l’évolution.

L’étape est néanmoins déterminante et mérite que chacun saisisse l’opportunité qu’elle offre de renforcer la cohésion de nos sociétés. C’est vrai pour nos élèves et étudiants qui peuvent tirer parti de l’heure de cours inscrite dans leur cursus, voire opter pour son doublement optionnel. C’est vrai pour les parents, invités à les accompagner dans cette démarche qui appelle au partage. C’est vrai, bien sûr, pour les enseignants dans leur ensemble, et plus particulièrement ceux qui auront la chance de poser les fondements pratiques de ce nouveau cours.

Parmi ceux-ci, Thomas Gillet a choisi de pousser plus loin encore son implication, en valorisant son expérience de pédagogue et de « moraliste » pour s’interroger non pas sur la finalité du cours mais, plus fondamentalement, sur son objet même.

Afin de chercher à savoir ce qu’est la citoyenneté, il fait le choix d’appliquer la méthode cartésienne, certes pour sa rigueur d’analyse des réalités humaines mais aussi parce que son moindre mérite n’est pas, en l’occurrence, d’insister sur la centralité du doute, dans une démarche qui, justement, doit nous armer face à un monde qui souffre, tout au contraire, d’un excès de pseudo-certitudes.

Rappelant que le but du cours est d’appliquer la philosophie à l’objet précis de la citoyenneté, l’auteur adopte, pour aborder ce concept, une forme qui a fait ses preuves depuis Socrate : celle du dialogue. Son but ? Non pas accoucher l’esprit de son jeune interlocuteur par un cheminement plus ou moins suggestif, encore moins établir un « catéchisme du citoyen », mais bien faire « un bout de route » avec son compagnon, dans une résonnance aux profits mutuels.

Et ce voyage est riche ! Non pas qu’il soit sinueux mais parce qu’à l’instar d’une escapade en encyclopédie, une « entrée » nous conduit à cinq autres, offertes comme autant de renvois – ou de liens hypertextes – à l’attrait irrésistible. Et ainsi, de proche en proche, de l’agora athénienne jusqu’aux réseaux sociaux, se dessine un parcours cohérent où les concepts intemporels s’ouvrent à de grands dossiers d’actualité, et réciproquement, par l’universalisation de situations concrètes à vocation emblématique.

C’est ainsi que la citoyenneté, présentée dans sa dou­ble réalité, à la fois comme un état de fait et comme un idéal de vie, devient un véritable fil rouge, permettant d’aborder l’égalité des droits face à la réalité des faits, les libertés proclamées face aux moyens de leur exercice, la liberté face à ses limites, indissociables de la vie en société, les rapports entre l’individu et l’être social ou encore les valeurs et leur possible relativité, très éloignée du relativisme.

Ce parcours conduit immanquablement à évoquer l’État et son impartialité, vécue comme une neutralité active. Il conduit nécessairement à la laïcité, cadrede toutes les expressions respectueuses de la personne humaine. Il amène aussi à s’interroger sur la politique, présentée comme indissociable de l’action, et dont le vote – à la fois droit et devoir – n’est qu’une des composantes, certes essentielle.

Pister la citoyenneté, c’est également traiter de l’éthique et de questions aussi fondamentales en termes d’égalité homme-femme que la dépénalisation de l’IVG. C’est évoquer, bien sûr, la question de la distribution des richesses et du degré de cohésion que nous ambitionnons de garantir dans nos sociétés. C’est parler de la place de l’homme face au numérique, à la robotisation et à l’intelligence artificielle. Et c’est évoquer le travail, son rôle, matériel et sociologique, et la place qu’il doit occuper dans la vie de chacun.

Toutes ces questions, l’auteur les aborde, tout en se gardant bien de les vider ou de les circonscrire, un peu comme si ce « premier contact » avec la citoyenneté était l’occasion de dresser une liste, par définition non exhaustive, des sujets à aborder dans l’approfondissement de sa connaissance, à travers un cours pour lequel le praticien à l’origine de cet essai ne peut cacher son enthousiasme.

Face à la nécessaire réinvention de la citoyenneté dans nos cadres contemporains, les autorités publi­ques de notre démocratie ont choisi de jouer la carte – maîtresse – de l’éducation et, pour cela, de faire confiance à celles et ceux qui ont embrassé cette carrière visant à produire plutôt qu’à reproduire la société ; une société dont l’évolution peut parfaitement – si nous le voulons – s’appréhender en termes de progrès.

Cet objectif ne peut être atteint que par la mobilisation de tous. Ce qui implique, encore et plus que jamais, d’armer les citoyens afin de leur donner les moyens de devenir acteurs d’une destinée que nul ne doit écrire à leur place.

Ce cours, ce livre, y contribuent !

Paul Magnette

Nous sommes fin août. C’est une de ces soirées que l’on passe sur la terrasse, entouré par une bande d’amis. Les grands enfants de ces derniers (entendez des adolescents presque adultes) ne sont pas encore lassés d’entendre leurs parents deviser sur tout et refaire le monde à coup de « Et si… », « Il est évident que… », « D’ailleurs, si ça ne tenait qu’à moi… ». La rentrée scolaire approche à grands pas, et il n’en faut pas plus pour qu’une discussion s’engage au sujet de la dernière grande réforme des programmes de l’enseignement secondaire belge1. C’est alors que l’un de ces jeunes nous apostrophe :

Dites, vous avez suivi la dernière lubie des politiques ?! Des cours de citoyenneté ! Comme si on pouvait enseigner la citoyenneté ! Ça n’a pas de sens, c’est du bourrage de crâne pour nous obliger à penser comme les adultes veulent qu’on pense ! Moi, je ne ferai que le strict minimum, c’est clair !

Si tu permets, il me semble qu’il y a déjà une confusion sur le nom que tu donnes à ce cours. En effet, il s’agit d’un cours de philosophie et citoyenneté. C’est-à-dire un cours de philosophie appliquée à un objet précis : la citoyenneté.

Et qu’est-ce que cela change ?

Tout. Car « mal nommer un objet, c’est ajouter au mal­heur de ce monde2 », comme le soulignait très justement le philosophe Albert Camus. Autant être d’accord sur le cadre de la discussion pour éviter des incompréhensions qui pourraient être sources de tensions ou de conflits, tu ne crois pas ?

Dans le cas qui nous occupe, il s’agit d’appliquer la démarche et la méthode philosophique à un objet de pensée. Aussi, il me semble important de rappeler que cette démarche a comme point de départ le doute, le questionnement. Cela devrait déjà calmer tes inquiétudes quant à un éventuel bourrage de crâne, puisque la remise en question et l’esprit critique sont deux outils indispensables de la démarche philosophique. Tout peut être questionné, il n’y a pas de tabous, pas plus que de dogmes3 ou d’autres vérités absolues et indiscutables qui viendraient empêcher l’exercice par chacun de la démarche philosophique, et donc la recherche de vérité(s).

Mais de quelle(s) vérité(s) parles-tu ? On dirait un peu un gourou qui nous mènerait vers la lumière divine…

D’accord, travaillons plutôt à l’envers. Laissons donc de côté dans un premier temps la citoyenneté et arrêtons-nous un instant sur la démarche philosophique, qui, comme je le disais, s’accompagne d’une méthode…

Comme la méthode scientifique ?

Tu ne serais pas inscrit en sciences fortes, toi ?

Blague à part, c’est l’idée, en effet. Il faut que le raisonnement témoigne d’une certaine rigueur pour qu’on