Dis, c'est quoi le socialisme ? - Édouard Delruelle - E-Book

Dis, c'est quoi le socialisme ? E-Book

Édouard Delruelle

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Beschreibung

Dis c’est quoi le ou plutôt les socialismes ? Sous ce terme, on trouve en effet à la fois une grande variété d’idéologies politiques (de Proudhon à Marx, idéologies politiques (de Proudhon à Marx, de Gramidéologies politiques (de Proudhon à Marx, idéologies politiques (de Proudidéologies politiques (de Proudhon à Marx, idéologies politiques (de Proudhon à Marx, de Gramidéologies politiques (de Proudhon à Marx, idéologies politiques (de Proudhon à Marx, de Gramsci à De Man, de Honneth à Mouffe ) et un spectre tout aussi large de pratiques politiques (réformistes ou révolutionnaires, étatistes ou autogestionnaires, etc.) Ce livre s’efforce de montrer, de la façon la plus accessible, comment ce socialisme éminemment hétérogène a profondément marqué l’histoire depuis deux siècles, et quelle peut encore être son actualité à l’heure de l’ultra-libéralisme et des défis environnementaux. Le socialisme et la gauche, est-ce la même chose ? Qu’est-ce qui le distingue de la social-démocratie ? Et du communisme ? Après ces clarifications, on se demandera quelles ont été ses plus belles réalisations (en tête, certainement, la Sécurité sociale) comme ses échecs les plus retentissants (le « socialisme réel » de type soviétique, mais aussi la conversion progressive de la social-démocratie aux politiques néo-libérales). Enfin, on posera la question de savoir si nous assistons, en ce début de XXIe siècle, à la « chute finale » du socialisme, ou, au contraire, à sa renaissance sous la forme d’un « écosocialisme » qui reste à inventer...

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DIS, C’EST QUOI

le socialisme ?

Édouard Delruelle

Dis, c’est quoi le socialisme ?

Renaissance du Livre

Drève Richelle, 159 – 1410 Waterloo

www.renaissancedulivre.be

Directrice de collection : Nadia Geerts

Maquette de la couverture : Corinne Dury

Illustration de couverture : Shutterstock

Correction : Astrid Legrand

Édition et mise en pages : [nor] production – www.norproduction.eu

e-isbn : 9782507057671

Dépôt légal : D/2022/12.763/17

Droits de traduction et de reproduction réservés pour tous pays.

Toute reproduction, même partielle, de cet ouvrage est strictement interdite.

Édouard Delruelle

DIS, C’EST QUOI

le socialisme ?

Préface de Paul Magnette

Préface

Mon cher Édouard,

Si j’ai accepté de préfacer ton dialogue sur le socialisme, avant même d’en avoir lu une seule ligne, ce n’est pas seulement par amitié, mais c’est aussi parce que je sais tout ce que le mouvement socialiste doit à ses « compagnons de route », à ces intellectuels qui, sans jamais se départir de leur liberté de penser, entretiennent avec lui un dialogue critique et fraternel, comme tu le fais depuis une trentaine d’années. Tu le dis d’ailleurs toi-même d’emblée : le propre du socialisme, ce qui le distingue d’autres courants de pensée contemporains, c’est ce « constant va-et-vient entre théorie et pratique ». Le socialisme est à la fois une idée et une pratique, ce qui est assez banal, mais c’est aussi et surtout une idée qui n’a de sens qu’à travers la pratique qu’elle nourrit, et dont elle se nourrit en retour. C’est là que résident à la fois toute sa richesse et toute sa fragilité. Et c’est la raison pour laquelle le dialogue entre les élus, les militants et les intellectuels est une composante essentielle de la social-démocratie – c’est-à-dire la forme pratique du socialisme, comme tu le rappelles justement.

En quelques dizaines de pages, tu démontres que l’on peut être philosophe, attentif à la rigueur des termes et des concepts, tout en s’adressant au sens commun, et tu en dis plus que beaucoup de gros volumes prétentieux et indigestes. Et cela tombe bien car, entre les vociférations démagogiques qui forment le bruit de fond de la politique quotidienne et les longs discours ampoulés des « nouvelles critiques sociales », les gauches en général, et le socialisme en particulier, ont besoin d’esprits clairs qui remettent quelques points sur les « i » et qui, à défaut de proposer des solutions – ce n’est pas ce que l’on attend des philosophes –, nous aident au moins à bien nous poser les questions dont notre avenir dépend.

Tu fais donc bien de commencer en rappelant que le socialisme est, historiquement et conceptuellement, indissociable de la question sociale et de la lutte contre le capitalisme. La révolution industrielle et urbaine du XIXe siècle a si profondément déterminé notre histoire – surtout nous qui vivons au cœur du croissant fossile, berceau de l’Anthropocène – que nous finirions presque par oublier la violence de cette rupture historique. Hommes et femmes arrachés aux villages où des dizaines de générations s’étaient succédé, enlevés à leur terre, massés dans les faubourgs des villes, condamnés à creuser les entrailles de la terre pour en extraire l’or noir, enrégimentés dans des fabriques organisées comme des casernes. Hommes et femmes privés de droits, contrôlés, réprimés, méprisés par une bourgeoisie arrogante et brutale. Entassés dans des taudis insalubres, dans le froid et l’humidité, nourris de peu, livrés à la maladie, à l’alcoolisme et à la violence. C’est contre tout cela que la conscience humaine s’est révoltée il y a bientôt deux siècles, affirmant le refus de l’exploitation et de l’oppression, exigeant que soit reconnue l’aspiration humaine fondamentale à l’autonomie et au développement complet de nos facultés. Ce n’est pas qu’un lointain souvenir, l’écho presque mythique d’un passé glorieux mais révolu. C’est l’essence même d’une idée et d’une pratique d’émancipation dont les formes changent au gré du temps, mais dont l’instinct fondateur reste intact. Il faut s’en souvenir pour mesurer combien l’idée du socialisme reste puissante : car si le mouvement ouvrier a fait reculer l’espace du capitalisme et éradiqué les pires formes de la répression et de l’exploitation, la volonté de tout soumettre, la nature, les humains et leurs créations, aux rapports d’échange et à l’accumulation sans fin du profit reste hélas très puissante, y compris dans nos pays démocratiques et hyperdéveloppés. Une gauche qui s’accommoderait du capitalisme, ou qui ferait de la question sociale un combat parmi d’autres, ne serait pas socialiste – et ferait probablement long feu.

Ce que cette histoire nous enseigne, rappelles-tu aussi, c’est que dans le tourbillon de cette idée agissante qu’est le socialisme, la forme compte autant que le but. Ce qui revient à dire que le socialisme est indissociable de la démocratie, et que cette ambition démocratique elle-même s’exprime à travers une pluralité de formes – le syndicalisme, le parti, le mutuellisme, les coopératives, les associations, les cercles d’éducation permanente… Chacune de ces organisations respecte l’autonomie des autres et, ensemble, elles forment ce que nous appelons ici l’« action commune ». Les conquêtes arrachées aux détenteurs du capital ne furent possibles que parce qu’à chaque moment décisif les différentes composantes du mouvement socialiste ont su coordonner leur action et développer une stratégie partagée. Et ce qui fut vrai hier le demeure aujourd’hui, comme le confirment les combats récents – refinancement massif des soins de santé, relèvement des pensions, des basses allocations ou du salaire minimum, défense des libertés et lutte contre l’extrême droite…

Mais ce qui fait notre force, nous dis-tu, peut être aussi notre faiblesse. Attachés à la question sociale, ne risquons-nous pas de passer à côté d’autres grandes luttes pour l’émancipation, luttes contre le racisme et le colonialisme, le sexisme et l’homophobie, sans oublier le grand enjeu du siècle, le dérèglement climatique ? Et si la forme compte autant que le fond, quelles garanties avons-nous que les méthodes d’hier fonctionneront encore demain ? Ces questions sont sans aucun doute celles que tout socialiste doit se poser sans délai.

Sur le plan des idées, il est relativement simple de démontrer que l’exploitation des travailleurs, la domination masculine et le privilège blanc ont tous leur source dans le régime capitaliste. On peut aussi aisément montrer que les inégalités sociales et environnementales sont les deux faces d’une même pièce, et que le socialisme est la manière la plus efficace de faire advenir la justice climatique – l’espace me manque, mais j’y reviendrai bientôt dans un livre dont je serai très heureux de débattre avec toi.

Mais faire converger ces luttes, traduire la majorité sociale qui a objectivement intérêt à la rupture en une majorité politique capable de la traduire en actes, reste une tâche infiniment complexe. Les grandes avancées socialistes ont été rendues possibles par des circonstances historiques particulières – les récessions économiques et les guerres, la peur du rouge, la concentration géographique des ressources fossiles et des masses ouvrières… Or, nous vivons dans un monde où les menaces se sont diversifiées, où les frontières se sont estompées ; un monde où les identités collectives sont devenues plus fluides et les désirs individuels plus puissants… Nous ne pouvons donc reproduire les méthodes du passé. Mais nous pouvons en dégager l’esprit et lui donner une nouvelle vie, conforme au temps présent. Nous rappeler que la question des alliances électorales est certes importante, mais moins que celle des alliances sociales à former entre les composantes plurielles de la social-démocratie et avec toutes les autres organisations de la société civile qui partagent nos combats. Nous souvenir que, pour réduire les inégalités, il ne faut pas seulement changer les politiques publiques, mais transformer en profondeur la culture publique – à quoi sert l’abondance si elle détruit la planète et si elle ne contribue pas à l’émancipation individuelle et collective ?

Tu fais donc bien de conclure que la vraie question est de « savoir comment mener cette lutte » et de reconnaître « qu’aucun socialiste n’a aujourd’hui de réponse assurée ni définitive ». C’est vrai, même si cela ne signifie pas qu’il n’y a pas de réponse. Cela signifie plutôt que personne ne peut avoir de réponse seul, et que si nous voulons rester fidèles à l’histoire du socialisme, il faut commencer par réaffirmer que la question de la méthode est essentielle et qu’elle ne peut trouver de réponse que dans un dialogue critique et fraternel. De ce point de vue, le livre dont tu nous fais le cadeau constitue une pièce à verser à un processus collectif urgent, et un très précieux point de départ.

Avec toute ma gratitude et mon amitié, fraternellement, Paul.

Dis, c’est quoi le socialisme ?

L’autre jour, je passais avec une amie devant le Parlement européen et nous avons assisté à une scène étonnante. Un commissaire européen issu d’un parti socialiste est sorti d’une limousine pour s’engouffrer dans le bâtiment, tandis que de jeunes militants altermondialistes manifestaient au nom de « Stop capitalism! Socialism now! ». Mon amie m’apostropha d’un air goguenard :

Des hauts dirigeants politiques et des militants révolutionnaires, Karl Marx et François Mitterrand, Mao Zedong et Bernie Sanders, Che Guevara et Jacques Delors… Dis-moi un peu ce que tous ces gens ont en commun !

Oui, tu as raison, il vaut mieux parler des socialismes que du socialisme. Déjà, il y a une grande différence, selon que l’on parle des pratiques ou des théories politiques. Car le socialisme, c’est d’abord toute une gamme de pratiques politiques qui, à travers l’histoire, ont été portées par des dirigeants charismatiques (Vandervelde, Lénine, Blum, etc.), mais aussi par des millions de militants anonymes. Ces pratiques sont très hétérogènes sur le plan organisationnel – elles s’appuient tantôt sur le parti, tantôt sur le syndicat ou encore sur l’action directe – comme sur le plan gouvernemental – la social-démocratie adepte du compromis social est aux antipodes de l’étatisme soviétique entre 1917 et 1989.

L’autre angle possible pour appréhender le socialisme, c’est donc celui des théories, des idéologies ?

Elles aussi sont très hétérogènes : certaines se veulent scientifiques (le matérialisme historique de Marx et Engels), d’autres utopiques (les phalanstères de Fourier) ; certaines ont été inspirées par les Lumières, d’autres par le christianisme, etc. Sans oublier d’innombrables créateurs sensibles à la question sociale et aux combats socialistes – de Zola à Dos Passos, de Courbet à Frida Kahlo, de Eisenstein à Ken Loach, de Brecht à Pasolini…

Quel angle d’attaque privilégies-tu ?