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Beschreibung

Au cours des dernières années, la participation criminelle s’est vue questionnée sous différentes facettes : la détermination des modes de participation (corréité et complicité), la participation par omission, l’élément subjectif et l’imputation des circonstances aggravantes aux coauteurs et complices... L’auteur fait le point sur ces différents aspects de la participation criminelle.

L’entraide judiciaire internationale active en matière pénale et la recherche des avoirs criminels. L’auteur présente les principaux outils de la coopération judiciaire internationale en matière pénale, qui tendent à permettre le gel ou la confiscation des avantages patrimoniaux tirés des infractions. Les traités conclus au sein du Conseil de l’Europe, reflets d’une prise de conscience de l’importance de l’approche économique de la criminalité organisée, sont tout particulièrement examinés. Ils constituent, pour les praticiens du droit pénal, les moyens les plus efficaces en vue de la localisation et de l’appréhension rapide de biens illicites.

L’introduction de l’indemnité de procédure en matière pénale ne s’est pas faite sans difficulté. Elle a suscité de nombreuses questions et a provoqué une efflorescence jurisprudentielle depuis son entrée en vigueur le 1er janvier 2008. Une mise au point s’imposait.

La loi du 17 mai 2006 relative au statut juridique externe des personnes condamnées à une peine privative de liberté et aux droits reconnus à la victime dans le cadre des modalités d’exécution de la peine a largement redessiné le paysage du droit pénitentiaire et participé à la création d’un véritable droit de l’exécution des peines. L’auteur rappelle les lignes de force de la loi de 2006, dresse le bilan des six premières années d’existence du tribunal de l’application des peines et fait le point sur les questions récemment posées par l’actualité et la réforme engrangée par la loi du 17 mars 2013.

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Seitenzahl: 528

Veröffentlichungsjahr: 2015

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DÉPARTEMENT DES RECYCLAGES EN DROIT ET GROUPE DE RECHERCHE EN MATIÈRE PÉNALE ET CRIMINELLE (GREPEC) DE L’UNIVERSITÉ SAINT-LOUIS – BRUXELLES

DROIT PÉNAL EN QUESTIONS

Sous la direction de Christine GUILLAIN et

Pierre JADOUL

Clothilde HOFFMANN

Frédéric LUGENTZ

Damien VANDERMEERSCH

Joëlle VAN EX

© 2013, Anthemis s.a. Place Albert I, 9, B-1300 Limal Tél. 32 (0)10 42 02 90 - [email protected] - www.anthemis.be

Toutes reproductions ou adaptations totales ou partielles de ce livre, par quelque procédé que ce soit, réservées pour tous pays.

Dépôt légal : D/2013/10.622/58 ISBN : 978-2-87455-792-7

Mise en page : MC Compo ePub : ebookme

Réalisé avec le soutien de la Fédération Wallonie-Bruxelles

Sommaire

La participation criminelle: questions d’actualité

Damien VANDERMEERSCH

L’entraide judiciaire internationale active en matière pénale et la recherche des avoirs criminels

Frédéric LUGENTZ

Indemnités de procédure en matière pénale… pas si simple

Joëlle VAN EX

Le tribunal de l’application des peines: enjeux et perspectives

Clothilde HOFFMANN

Table des matières

Nous remercions Yves Cartuyvels, Dimitri de Beco, Gian-Franco Raneri et Jean-Christophe Van den Steen, membres du GREPEC, pour leur lecture attentive.

La participation criminelle : questions d’actualité

Damien VANDERMEERSCH

Avocat général à la Cour de cassation Professeur à l’Université catholique de Louvain et à l’Université Saint-Louis – Bruxelles

Introduction

Notion classique incluse dès l’origine dans le Code pénal, la participation criminelle est régie par les articles 66 à 69 dudit Code. Ces dispositions s’ap pliquent aux infractions reprises dans le Code pénal et aux infractions aux lois particulières si ces dernières le prévoient explicitement (article 100 du Code pénal).

En règle, on considère que pour pouvoir être punissable, la participation doit répondre à trois conditions: les actes de participation doivent se rapporter à un crime ou un délit ou, à tout le moins, à une tentative punissable d’une telle infraction, le participant doit avoir eu la volonté de s’associer à la commission de l’infraction et l’acte de participation doit prendre la forme d’un des modes de participation visés aux articles 66 et 67 du Code pénal.

Au cours de ces dernières années, la participation criminelle s’est vu (re)questionnée sous ses différentes facettes: le lien de l’acte de participation avec l’infraction et l’auteur principal, le caractère punissable de la tentative de participation, l’élément subjectif exigé dans le chef du participant, l’imputation des circonstances aggravantes aux participants, la participation par omission, la détermination des différents modes de participation…

Il nous a paru intéressant de revisiter les conditions requises pour la participation criminelle à travers ces différents questionnements dont l’actualité a rappelé la pertinence.

Section 1L’existence d’une infraction et d’un auteur principal

Par essence, la participation criminelle se rapporte à une infraction (crime ou délit) à laquelle l’agent a « participé »: elle suppose une contribution effective à sa commission. S’il n’y a pas d’infraction, il ne peut y avoir de participation. L’acte de participation n’a pas de caractère autonome et n’est, en règle, pas punissable en tant que tel; par essence, il se greffe sur un fait infractionnel principal1.

La participation implique l’exigence d’un lien de causalité entre le comportement incriminé à titre d’acte de participation et l’infraction principale: « Entre le fait délictueux (ou son commencement d’exécution) et l’acte de participation doit exister un enchaînement ininterrompu et logique, tel que l’infraction puisse apparaître en “germe” dans l’acte de participation »2. Toutefois, suivant la Cour de cassation, la circonstance que l’infraction a été commise d’une autre manière que celle prévue, en telle sorte que la contribution du participant, si elle a été décisive pour que l’infraction se commette, ne s’est pas avérée a posteriori utile, est indifférente quant à l’implication du participant3.

§ 1. La distinction entre l’auteur principal et les participants

Bien que la Cour de cassation4 estime que les termes « auteurs » et « coauteurs » doivent être considérés comme ayant le même sens en droit pénal, la loi ne faisant aucune distinction à cet égard, il nous semble que la différenciation entre ces notions doit être faite, ne fût-ce qu’au regard du contrôle de la réunion des éléments constitutifs de l’infraction.

L’auteur de l’infraction est celui qui a commis l’infraction, c’est-à-dire celui qui a exécuté matériellement l’infraction en chacun de ses éléments constitutifs5. Pour pouvoir être déclaré coupable comme auteur, l’agent doit réunir, dans son chef, les éléments constitutifs matériels de l’infraction, de même que l’élément subjectif (moral ou intentionnel) propre à l’infraction (dol général, dol spécial). Lorsqu’il est constaté dans le chef d’un prévenu la réunion de tous les éléments constitutifs de l’infraction, ce prévenu est à considérer comme auteur de l’infraction même s’il en existe d’autres et il n’est pas nécessaire de vérifier en outre s’il a posé également un acte de participation au sens de l’article 66 du Code pénal6. Suivant la Cour de cassation, la circonstance que l’auteur n’a pas accompli directement lui-même un des éléments constitutifs de l’infraction, mais a sciemment laissé ce soin à un coauteur ne fait pas obstacle à ce que la réunion de tous les éléments constitutifs de l’infraction soit constatée dans son chef 7.

Par essence, le participant n’a pas lui-même accompli tous les actes répondant aux éléments constitutifs de l’infraction8, sinon il aurait la qualité d’auteur. Pour qu’un prévenu puisse être condamné en tant que coauteur ou complice d’une infraction, il n’est pas requis que les actes de participation contiennent tous les éléments de l’infraction9, ni que le coauteur ou complice ait lui-même l’intention requise pour commettre le délit auquel il participe; il suffit que l’auteur principal ait commis l’infraction et que le coauteur ou complice ait sciemment et volontairement coopéré à l’exécution de l’infraction par l’un des modes de participation définis par les articles 66 et 67 du Code pénal10. Ainsi, en matière de recel, lorsque plusieurs auteurs participent d’une des manières visées aux articles 66 et 67 du Code pénal à l’infraction, il n’est pas exigé, en outre, que chacun d’eux ait eu matériellement des objets recelés en sa possession ou à sa disposition11.

Lorsque la loi exige pour l’auteur de l’infraction une certaine qualité comme élément constitutif de l’infraction (par exemple, la qualité de dépositaire du secret professionnel dans le cas de l’article 458 du Code pénal), cette condition doit être remplie dans le chef de l’auteur des infractions, mais non des coauteurs ou complices dont le comportement ne doit pas réunir tous les éléments constitutifs de l’infraction12. J. Van Heule cite, à ce propos, l’exemple du journaliste qui avait été poursuivi comme coauteur d’usage abusif d’informations obtenues en consultant le dossier répressif (article 460ter du Code pénal) alors que celui-ci n’était ni un inculpé ni une partie civile ayant eu accès au dossier répressif 13. Par contre, il a été jugé que le caractère « protectionniste » du droit pénal social s’oppose à ce que des travailleurs autres que les « préposés et mandataires » énoncés à l’article 35, § 1er, de la loi du 27 juin 1969 puissent être condamnés en tant que coauteurs ou complices de l’infraction visée par cette disposition; seules les personnes énoncées audit article ainsi que les tiers à l’entreprise14 peuvent faire l’objet d’une telle condamnation15.

Dès lors, toute forme de participation punissable requiert qu’il existe un auteur principal dans le chef duquel les éléments constitutifs matériels de l’infraction soient réunis. Il n’est cependant pas exigé que l’auteur principal soit condamné, voire même poursuivi. En effet, l’auteur principal peut être resté inconnu, il peut échapper aux poursuites pénales ou à la déclaration de culpabilité en raison d’une cause de non-imputabilité (état de minorité, état de démence…); il peut être exempté de peine à la suite de l’admission d’une cause d’excuse.

En revanche, si l’auteur principal se voit reconnaître une cause de justification (légitime défense, état de nécessité…), le participant pourra également en bénéficier, puisque dans une telle hypothèse, le fait perd son caractère illicite et il n’y a donc plus d’infraction.

Par ailleurs, les actes de participation dont il est question aux articles 66 et 67 du Code pénal constituent des comportements qui contribuent à l’exécution d’une ou de plusieurs infractions, et non des actes autonomes qui sont incriminés en tant que tels. Ceci n’empêche pas que ces actes soient également incriminés aux termes d’une autre disposition pénale: ainsi un acte de participation peut répondre également à d’autres incriminations telles que l’association de malfaiteurs ou l’organisation criminelle, la détention d’armes prohibées16, le recel17… Pour ces dernières infractions, l’agent n’est plus à considérer comme participant, mais bien comme auteur.

§ 2. La personne morale et les personnes physiques agissant pour son compte : auteurs ou coauteurs ?

Lorsqu’une personne morale agit par le truchement d’une personne physique, il ne peut être question de participation criminelle: en effet, la personne morale ne peut agir qu’à travers des personnes physiques agissant pour son compte et si une distinction peut être faite sur le plan de la responsabilité pénale entre la personne morale et la personne physique, le comportement de l’un s’assimile dans les faits au comportement de l’autre.

Cette question relève de la problématique de la responsabilité des personnes morales et non de la participation criminelle. Lorsque la responsabilité pénale d’une personne morale est engagée, tant cette dernière que la personne physique qui est intervenue pour son compte sont à considérer comme auteurs de l’infraction et non comme coauteurs ou complices, pour autant que tous les éléments constitutifs de l’infraction soient réunis dans le chef de la personne physique agissant au nom et pour le compte de la personne morale18.

Par contre, rien n’empêche que des personnes physiques (ou même d’autres personnes morales) puissent apporter une contribution au sens des articles 66 à 68 du Code pénal à la commission d’une infraction par une personne morale et par la personne physique à travers laquelle elle a agi: dans une telle hypothèse, les règles classiques de la participation criminelle trouvent à s’appliquer.

§ 3. La question de la tentative

A. La participation à une tentative punissable de crime ou de délit

Comme indiqué ci-dessus, la participation peut être réprimée dès qu’il y a tentative punissable. C’est dans le chef de l’auteur de l’infraction et non du participant que les conditions de la tentative doivent être appréciées.

Ainsi, lorsque l’acte de participation a été entièrement exécuté, mais que la résolution criminelle de l’auteur principal ne s’est pas (encore) traduite par des actes extérieurs qui forment un commencement d’exécution, il n’y a pas de tentative punissable et, partant, de participation criminelle. En ce sens, il a été jugé que le seul fait de commanditer un crime ou un délit à un tiers en lui versant une somme d’argent pour le commettre, sans que ce tiers n’ait agi, ne constitue pas un commencement d’exécution de ce crime ou de ce délit, mais un acte préparatoire de l’infraction19. En revanche, ces faits pourraient tomber sous l’incrimination prévue par la loi du 7 juillet 1875 contenant des dispositions pénales contre les offres ou propositions de commettre certains crimes.

De même, lorsque l’auteur principal s’est désisté volontairement en renonçant spontanément à son dessein ou à son intention de commettre le crime ou le délit20, il n’y a plus de tentative ni de participation punissables.

B. La tentative de participation et le désistement volontaire du participant

Si la participation à une tentative punissable de crime ou de délit peut être réprimée, une tentative punissable d’acte de participation ne saurait se concevoir21. En effet, l’une des conditions de la participation criminelle est d’accomplir l’un des actes visés aux articles 66 et 67 du Code pénal, la tentative de poser l’un de ces actes étant insuffisante à cet égard. En ce sens, la Cour de cassation a affirmé que la loi ne punit pas la tentative de participer à une infraction22.

Dès lors, de deux choses l’une, soit l’agent a posé un des actes de participation visés par la loi et il peut être poursuivi comme participant, soit il n’a pas posé un des actes visés, s’étant borné à une tentative d’acte, et son comportement ne tombe pas sous le coup de la loi pénale.

Mais, quelle est alors l’incidence du désistement volontaire de l’agent participant?

Deux hypothèses doivent être envisagées.

Soit le désistement intervient avant de poser l’acte de participation, l’agent y renonçant: dans cette hypothèse, il n’y a pas d’acte de participation posé et il ne peut être poursuivi comme participant.

Soit le désistement de l’agent intervient après avoir posé l’acte de participation en telle sorte qu’il est sans incidence sur le caractère punissable de sa participation, à moins que ce désistement ait eu pour effet ou conséquence que la commission de l’infraction soit interrompue ou échoue. Dans ce cas, on retombe dans l’hypothèse de l’interruption ou de l’échec de la tentative à la suite du désistement volontaire.

Ainsi, dans un arrêt récent, la Cour de cassation a considéré que l’absence de désistement volontaire n’est pas une condition d’existence de la participation punissable à une infraction consommée23.

Section 2La connaissance et la volonté de s’associer à la commission de l’infraction

§ 1. La coopération consciente et volontaire à la commission de l’infraction

La participation punissable présuppose un élément de connaissance et un élément de volonté qui permettent de conclure à la rencontre de volontés. L’exigence de volonté requiert que les participants aient l’intention de s’associer à la commission de l’infraction, d’y provoquer ou de la favoriser dans sa préparation, son exécution ou sa consommation.

Il n’est pas exigé qu’un concert préalable soit établi entre les participants24: il suffit que chacun des participants ait l’intention de participer à la commission de l’infraction d’une des manières prévues par la loi et que la rencontre des volontés ait eu lieu au plus tard avant la consommation de l’infraction25. Peu importe que la rencontre des volontés soit le résultat d’un plan préétabli ou le fruit du hasard.

Suivant la Cour de cassation, la participation criminelle ne requiert pas que l’intention requise pour commettre l’infraction à laquelle le participant coopère émane du coauteur ou complice même; il est nécessaire, mais il suffit, que ce dernier ait sciemment et volontairement prêté son aide à l’exécution de l’infraction voulue par l’auteur26.

Ainsi, l’intention du participant ne s’identifie pas à celle requise comme élément intentionnel de l’infraction principale27. À titre d’exemple, pour qu’une personne puisse être condamnée comme coauteur ou complice du délit d’organisation d’insolvabilité, il n’est pas requis qu’il ait agi avec l’intention spécifique (dol spécial) prévue à l’article 490bis du Code pénal; il suffit qu’il soit constant qu’un auteur ait commis le délit et que le coauteur ou complice ait coopéré sciemment et volontairement à l’exécution de celui-ci par l’un des modes de participation définis par les articles 66 et 67 du Code pénal28. De même, pour être reconnu coupable d’escroquerie en tant que coauteur, l’agent ne doit pas avoir eu l’intention de s’approprier frauduleusement une chose appartenant à autrui, mais seulement de prêter sa coopération à l’escroquerie29. En matière de blanchiment, lorsqu’il s’agit de la participation à l’infraction visée au 3° de l’alinéa 1er de l’article 505, le dol spécial requis par cette disposition est exigé seulement dans le chef de l’auteur principal, le dol général inhérent à la participation punissable étant suffisant pour les coauteurs et complices30.

À cet égard, le participant doit avoir connaissance de la circonstance qu’il participe à un crime ou à un délit déterminé, ce qui implique qu’il ait connaissance de toutes les circonstances qui donnent au fait auquel il participe par sa coopération, le caractère d’un crime ou d’un délit déterminé31. Cet élément de connaissance porte donc sur tous les éléments constitutifs de l’infraction de base (en ce qui concerne les circonstances aggravantes, voy. ci-dessous).

À défaut d’une telle connaissance, la participation ne peut être sanctionnée32. À cet égard, un dol éventuel ou une grave imprudence ne suffit pas33. Ainsi, lorsque les repreneurs d’une société ont agi ultérieurement en contravention de la législation fiscale, les vendeurs ne peuvent être condamnés comme coauteurs ou complices lorsqu’il n’est pas suffisamment établi qu’ils étaient au courant des intentions frauduleuses des acheteurs34.

La participation exige donc la connaissance de s’associer à une infraction déterminée35. La rencontre des volontés ne doit certes pas s’exprimer en termes exprès et peut être tacite. Il faut cependant une adhésion à un crime ou un délit déterminé, la conscience de la possibilité de faciliter une activité délictuelle quelconque ne suffisant pas36. Toutefois, dans un arrêt du 16 décembre 2003, la Cour de cassation a adopté une attitude plus souple en admettant que la circonstance que le participant renonce sciemment à une connaissance plus concrète et au but de l’infraction projetée n’a pas pour effet qu’il contribue inconsciemment à cette infraction, mais bien qu’il veut participer en connaissance de cause à n’importe quelle infraction déterminée37.

Par contre, il n’est pas exigé que le participant connaisse les circonstances de temps et de lieu de l’infraction ni l’identité des victimes, ni a fortiori les conséquences des faits pour ces victimes38, ni encore le mobile de l’auteur ou le montant du préjudice39.

Pour les infractions dites réglementaires, pour lesquelles le seul fait de la contravention à la loi constitue une présomption de faute, la qualité de coauteur peut être retenue lorsque la personne fournit une forme de coopération prévue par la loi en sachant qu’elle apporte sa collaboration à la commission de l’infraction et qu’elle ait l’intention d’y apporter sa coopération40.

Pour les infractions dont l’élément subjectif (élément fautif) est le défaut de prévoyance ou de précaution (infractions commises par imprudence), il ne peut, en principe, être question de participation criminelle, puisqu’il n’y a pas de rencontre de volontés pour aboutir au résultat, puisque ce dernier est involontaire41. Le cas échéant, il y aura seulement concours d’imprudences ou de défauts de prévoyance; dans cette hypothèse il y aura, à notre sens, concours de fautes entraînant la responsabilité pénale de chacun des fautifs en tant qu’auteurs de l’infraction (par exemple, lorsque plusieurs médecins ont chacun commis une faute médicale et que chacune de ces fautes est en lien causal avec le décès du patient, ils pourront chacun être poursuivis du chef d’homicide involontaire comme auteur). Toutefois, certains auteurs soutiennent qu’il y a place pour une participation punissable lorsque l’infraction « par imprudence ou défaut de prévoyance » est commise par différentes personnes de concert, volontairement et sciemment42.

§ 2. L’imputation des circonstances aggravantes aux participants43

L’élément intentionnel dans le cadre de la participation pose la question difficile de ce qu’on appelle l’emprunt de criminalité, c’est-à-dire l’imputation des circonstances aggravantes réelles44 aux différents participants.

Avec le fameux arrêt Goktepe45, la Cour européenne est venue bousculer la jurisprudence majoritaire qui considérait que les circonstances aggravantes « objectives » ou « réelles » s’appliquaient « de façon automatique » à tous les participants, indépendamment du fait de la connaissance de ces circonstances par les participants. Le juge européen s’est fait ainsi l’allié des adversaires de cette jurisprudence46 qui, suivant ces derniers, méconnaissait le principe de responsabilité personnelle et individuelle de l’agent.

Pour rappel, l’arrêt Goktepe condamne l’application automatique des circonstances aggravantes dites « réelles » à tous les participants de l’infraction (théorie de l’emprunt de criminalité) dans une cause où la cour d’assises n’avait pas posé de questions individualisées sur les circonstances aggravantes du vol et en particulier sur celle visée à l’article 474 du Code pénal (violences ayant entraîné la mort sans intention de la donner). En l’espèce, la Cour européenne a considéré que le fait pour la cour d’assises de refuser de poser des questions individualisées sur les circonstances aggravantes, alors qu’une réponse affirmative aux questions posées à cet égard entraîne une aggravation automatique et substantielle des peines encourues, doit passer pour incompatible avec le respect du principe du contradictoire qui est au cœur de la notion de procès équitable garanti par l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’homme.

Quelle portée en droit belge faut-il donner à cette jurisprudence européenne47? D’abord, on peut affirmer sans hésiter que la Cour européenne pose de façon claire l’exigence d’un examen individualisé de l’imputation des circonstances aggravantes objectives dans le chef de chacun des participants.

Pour la cour d’assises, cela implique que des questions séparées et individualisées doivent être posées au jury pour chacun des accusés. Le législateur l’a bien compris puisque l’article 329 nouveau du Code d’instruction criminelle, tel qu’introduit par la loi du 21 décembre 2009 relative à la réforme de la cour d’assises, prévoit explicitement que les jurés délibèrent pour chacun des accusés sur le fait principal et ensuite sur chacune des circonstances aggravantes tandis que l’article 329quater nouveau du même Code précise que les jurés doivent répondre séparément aux questions, d’abord sur le fait principal et ensuite sur chacune des circonstances aggravantes48. En ce qui concerne le tribunal correctionnel, aucune réforme législative n’était nécessaire pour que dorénavant, les juges procèdent à un examen individualisé de la culpabilité des participants au regard de chacune des circonstances aggravantes. Dans la foulée de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme, la Cour de cassation a considéré également que toute circonstance aggravante, qu’elle soit personnelle ou réelle, devait être appréciée séparément dans le chef de chacun des accusés ou prévenus49.

Mais la jurisprudence européenne implique-t-elle dorénavant l’exigence que l’agent ait agi de façon volontaire et en connaissance de cause de l’existence de la circonstance aggravante réelle ou, à tout le moins, de son caractère prévisible?

À notre sens, cette question doit recevoir une réponse positive. Nous nous référons à cet égard à l’arrêt rendu le 20 janvier 201150 par la Cour européenne. Cet arrêt considère que le juge n’impute pas automatiquement la circonstance aggravante de meurtre au participant de l’infraction principale de vol lorsqu’il examine, avec la plus grande attention et sur la base des éléments contradictoirement débattus devant lui, le comportement de celui-ci et le rôle joué par lui, de telle sorte qu’il subjectivise la circonstance aggravante de meurtre, avant de conclure qu’il est coauteur des faits ayant entraîné la mort de la victime. En l’espèce, le juge du fond avait certes constaté qu’il n’existait pas de preuve que le coauteur avait participé matériellement au meurtre de la victime, mais il avait relevé le rôle d’instigateur joué par l’intéressé, qui avait contacté les autres protagonistes et procédé à la répartition des charges et qui avait envisagé et accepté le fait que des violences seraient exercées pour maîtriser l’habitante de la maison à cambrioler.

Ceci étant posé, quel est l’élément subjectif exigé dans le chef du participant pour pouvoir lui imputer la ou les circonstances aggravantes réelles? Comme la participation criminelle exige la connaissance et la volonté de s’associer à la commission de l’infraction (cf. supra), l’élément subjectif requis pour l’imputation de la circonstance aggravante au participant doit consister en un élément de volonté et un élément de connaissance.

Concernant le contrôle de ces conditions, il nous paraît toutefois excessif d’exiger, dans le chef de chaque participant, la preuve, d’une part, de la connaissance effective de la circonstance aggravante au sens d’une certitude quant à son existence ou à sa réalisation, d’autre part, de la volonté d’agir en connaissance de cause. Il semble qu’une circonstance aggravante devrait pouvoir être imputée à un participant à partir du moment où il avait connaissance de ladite circonstance aggravante ou qu’il avait conscience que cette circonstance constituait un élément ou une suite prévisible de la commission de l’infraction et que malgré la connaissance de cet élément, il a persisté dans sa volonté de s’associer à l’infraction telle que prévue.

Pour reprendre la terminologie de la Cour européenne51, le participant doit avoir envisagé (élément de connaissance) et accepté (élément de volonté) le fait de la réalisation (possible ou probable) de la circonstance aggravante. Ainsi, la circonstance aggravante doit être imputée au participant lorsque, sachant que la réalisation de cette circonstance s’inscrit dans le cours normal ou prévisible des événements, il a persisté dans sa volonté de s’associer en connaissance de cause (tant de l’infraction principale que de la probabilité de la réalisation des circonstances aggravantes) à la commission de l’infraction.

Afin d’illustrer notre propos, nous reprenons l’exemple suivant: une personne joue le rôle de chauffeur des auteurs d’un vol dans une habitation et fait le guet durant les faits. Si elle a la conviction que la maison est inoccupée, la circonstance aggravante d’escalade ou d’effraction pourrait être retenue, mais non celle de violences ou de menaces. En revanche, si elle avait pu ou dû envisager la présence possible d’occupants et qu’elle avait conscience que la détermination des auteurs du vol ne serait pas nécessairement ébranlée par la présence ou la résistance des occupants, la circonstance aggravante de violence ou de menace devrait pouvoir être retenue à sa charge. En outre, si elle savait que les auteurs principaux étaient en possession d’armes munies de munitions et prêtes à l’emploi, la circonstance aggravante de violence avec arme et, le cas échéant, celle de meurtre (pour faciliter le vol) pourraient lui être imputées dès lors qu’il serait établi qu’elle a persisté dans sa volonté de s’associer à l’infraction en connaissance de cause de l’éventualité de l’utilisation des armes.

En ce sens, la Cour de cassation a considéré qu’était légale la décision de retenir la circonstance aggravante de meurtre à charge d’un coauteur du vol avec violences dans la mesure où, étant sur les lieux avec une voiture volée, ganté, cagoulé et lourdement armé, il avait conscience que cette circonstance constituait un élément ou une suite prévisible de la commission de l’infraction et que, malgré cette connaissance, il ne s’est à aucun moment désolidarisé du tireur et a persisté dans sa volonté de s’associer au vol qu’ils avaient prévu de commettre52.

Il a également été jugé que lorsque l’accusé a eu connaissance au préalable du fait que le vol nécessitera des violences graves et connaissait les éventuelles conséquences ou devait les connaître tout en y consentant, il est également individuellement coupable des circonstances aggravantes du fait principal de vol en la qualité de coauteur53.

Dans un cas d’espèce, la cour d’assises de Bruxelles a considéré que dans la mesure où l’accusé connaissait la réputation de dangerosité de ses comparses et leur détermination commune à vaincre toute forme de résistance, ces derniers s’étant équipés d’armes redoutables et non seulement d’armes factices, il avait envisagé et accepté le fait que des violences puissent se commettre, en telle sorte qu’il y va d’une participation recherchée et donc consciente au projet criminel commun avec, en l’espèce, la prévisibilité que des violences soient exercées, mais aussi qu’un meurtre soit commis pour faciliter le vol ou pour assurer la fuite54.

Dans une autre cause, la cour a retenu la circonstance aggravante de meurtre pour les coauteurs d’une tentative de vol avec violences dès lors que « sachant que l’auteur était en possession d’un revolver P.38 chargé et donc susceptible de tirer malgré la chambre laissée vide pour un premier tir, ils avaient conscience que la circonstance aggravante de meurtre pour faciliter le vol envisagé constituait un élément ou une suite prévisible de la commission de l’infraction, et que malgré cette connaissance, ils ne se sont à aucun moment désolidarisés du tireur et ont persisté dans la volonté de s’associer au vol qu’ils avaient prévu de commettre et qui n’a manqué son objectif que pour des raisons indépendantes de leur volonté; la nature de l’arme dont le tireur était porteur à la parfaite connaissance des trois autres accusés ne pouvait laisser subsister aucun doute raisonnable quant à la connaissance, dans le chef de chacun, du risque de causer la mort de quelqu’un et l’acceptation de cette éventualité »55.

Faisant application des mêmes principes dans une cause concernant une tentative de vol avec violences commises par deux auteurs cagoulés et armés, au cours duquel une victime avait été tuée et l’autre gravement blessée, la cour d’assises de la province du Hainaut a déclaré établies à charge du coaccusé qui avait fourni divers renseignements (croquis des lieux, présence des caméras, rituel concernant le transfert d’argent liquide…) diverses circonstances aggravantes du vol sur la base des considérations suivantes:

l’accusé avait connaissance de l’immanquable confrontation qui devait nécessairement avoir lieu entre les auteurs et les victimes; il avait conscience du recours inévitable à la violence et avait accepté le risque d’une résistance des victimes, laquelle s’inscrivait dans le cours normal et prévisible des événements s’y associant en connaissance de cause;les fortes personnalité et constitution d’une des victimes, la présence présumée de membres du personnel sur les lieux à l’heure de la commission des faits, la situation isolée de l’entreprise rendaient prévisible la réalisation des circonstances aggravantes de pluralité d’auteurs matériels des faits et de l’usage d’un véhicule pour faciliter le vol ou assurer leur fuite ainsi que de l’utilisation d’armes ou d’objets qui y ressemblent, circonstances auxquelles l’accusé s’est donc volontairement associé en toute connaissance de cause;l’utilisation d’armes par les auteurs matériels de la tentative de vol avec violences rendait prévisible la survenance de blessures graves dans le chef d’une des victimes, celles-ci s’inscrivant dans le cours normal et prévisible des événements auxquels l’accusé s’est volontairement associé en toute connaissance de cause56.

Par contre, les jurés n’ont pas retenu à charge de ce même accusé la circonstance aggravante de meurtre sur la personne d’une des victimes en considérant que l’accusé n’avait pas eu de contact direct avec les auteurs matériels des faits qu’il ne connaissait pas, mais seulement avec un intermédiaire et que, par conséquent, il existait un doute raisonnable que cet accusé ait pu prévoir qu’un meurtre serait commis à l’occasion du projet criminel envisagé. La circonstance aggravante de meurtre a, en revanche, été retenue à charge de l’intermédiaire, les jurés considérant qu’à la différence de l’autre accusé, il connaissait la personnalité violente du tiers à qui il avait communiqué les renseignements en vue de la commission des faits tels qu’ils furent réalisés et a donc accepté le risque qu’un meurtre soit commis à l’occasion d’usage de violences lors de ceux-ci et s’y est volontairement associé57.

Dans une cause similaire où un bijoutier avait été tué par un des trois auteurs au cours d’un hold-up dans une bijouterie, la cour d’assises de Bruxelles n’a pas retenu la circonstance aggravante de meurtre à charge des deux autres auteurs sur la base de la considération suivante: « alors qu’ils avaient déclaré qu’était uniquement prévu un vol sans violence particulière et qu’ils avaient été surpris par la double circonstance que l’auteur demeuré inconnu était armé et avait fait un usage mortel de son arme, ni les parties civiles ni le ministère public n’avait apporté la preuve du contraire de leur affirmation suivant laquelle ils n’avaient jamais envisagé cette double circonstance et n’en avaient à aucun moment accepté, même tacitement, la réalisation éventuelle, totalement imprévisible selon eux »58.

Il y a lieu de constater que tous les exemples jurisprudentiels évoqués ci-dessus sont issus de causes déférées aux cours d’assises. Faut-il en conclure que la question n’a pas été ou peu été soumise aux tribunaux correctionnels? Si c’est le cas, on peut s’en étonner, dans la mesure où la question devrait se poser également devant les tribunaux correctionnels, et ce d’autant plus que la liste des crimes correctionnalisables a été encore étendue aux termes de la loi du 21 décembre 2009.

Il convient de noter enfin que la question de l’imputation des circonstances aggravantes réelles se pose dans les mêmes termes pour celui qui se sera rendu coupable de recel de malfaiteurs au sens de l’article 68 du Code pénal.

Section 3L’accomplissement d’un des actes de participation visés par les articles 66 et 67 du Code pénal

Pour être coupable de participation à un crime ou à un délit, il faut que l’agent y ait contribué de la manière déterminée par la loi59. Ainsi, il suffit que l’auteur ait commis l’infraction et que le coauteur ou complice ait sciemment et volontairement coopéré à l’exécution de l’infraction par l’un des modes de participation définis par les articles 66 et 67 du Code pénal60.

Le juge du fond apprécie cette question souverainement d’après les éléments de fait qu’il relève61.

§ 1. Une liste limitative de comportements

Les articles 66 et 67 du Code pénal définissent les comportements qui constituent des actes de participation criminelle à la commission d’une infraction. Ces dispositions sont de stricte interprétation et leur champ d’application ne peut être étendu par une interprétation analogique62.

En dehors de ces comportements, et sauf dérogation prévue par une loi particulière, les comportements qui ne répondent pas à l’un de ces modes de participation ne sont pas punissables à moins qu’ils constituent une infraction autonome (par exemple, le délit de non-assistance à personne en danger ou l’association de malfaiteurs).

Ainsi, ne sont pas punissables au titre d’actes de participation:

la connaissance d’un projet criminel et l’abstention de réaction ou de désapprobation (le cas échéant, la personne pourra être poursuivie du chef de non-assistance à personne en danger);la simple approbation du projet de commettre une infraction;le fait de donner des renseignements ou des conseils quant à la commission d’une infraction pour autant que ces renseignements ou ces conseils n’aient pas facilité la commission de l’infraction ou sa consommation;le fait de profiter du butin résultant de l’infraction (le cas échéant, il pourra y avoir poursuites du chef de blanchiment).

L’article 68 du Code pénal, aux termes duquel est punissable au tarif de la complicité celui qui, en connaissance de cause, fournit le logement, un lieu de retraite ou de réunion à certaines catégories de malfaiteurs, ne constitue pas un mode de participation à une infraction, dans la mesure où aucun lien direct (causal ou autre) avec la commission de l’infraction n’est exigé. Il s’agit en réalité d’une incrimination autonome, celle de recel de malfaiteurs.

§ 2. Un acte préalable ou concomitant à l’exécution de l’infraction

Seul un acte préalable à l’exécution de l’infraction ou concomitant peut fonder la participation à un crime ou à un délit63.

La participation est envisageable tant que l’infraction n’est pas consommée. Ainsi, la Cour de cassation a considéré qu’une personne pouvait apporter son concours au crime d’empoisonnement tant que le décès de la victime n’était pas intervenu. En l’espèce, la cour d’assises avait constaté que le coaccusé avait appris l’administration de substances nocives avant que le décès de la victime n’intervienne, et ce à un moment où une intervention médicale aurait pu encore la sauver64.

En dehors de l’hypothèse d’une intervention préalable, l’aide fournie pour une personne après la commission de l’infraction ne constitue pas, en règle, un acte de participation punissable. Ainsi, la personne qui se borne à fournir après la consommation de l’infraction une assistance aux auteurs d’une infraction ne participe pas à cette infraction. On peut citer, à cet égard, l’exemple de la personne à qui il est fait appel après les faits pour cacher le cadavre de la victime d’un meurtre. Celle-ci ne peut être poursuivie comme complice du meurtre, mais bien du chef de recel de cadavre. Il en va de même pour la personne dont le rôle se limite à retirer de l’argent à l’aide d’une carte de crédit provenant d’un vol avec violences. Cette personne peut être poursuivie du chef de recel et de faux en informatique et non de vol avec violences.

Dans le même sens, il a été jugé que le seul fait d’encaisser sciemment des titres qui font l’objet d’une escroquerie ne peut constituer un acte de participation, dès lors qu’il intervient après la consommation du délit65. Un tel comportement peut, en revanche, tomber sous l’incrimination de recel ou de blanchiment.

La situation est différente si l’aide du participant est planifiée avant les faits et s’inscrit dans le dispositif criminel mis en place. Dans ce cas, il y a un acte positif préalable à la commission de l’infraction qui prend la forme de l’engagement ou de la promesse de fournir l’aide prévue au moment indiqué sans lequel les auteurs de l’infraction ne s’aventureraient pas à la commettre. Un tel acte de participation constitue une aide à l’exécution de l’infraction ou, à tout le moins, une aide dans les faits qui ont préparé ou facilité l’infraction66. Ainsi en est-il du participant dont le rôle planifié à l’avance consiste à attendre les auteurs d’un hold-up à un endroit déterminé pour assurer leur fuite.

La Cour de cassation a ainsi considéré comme des faits qui facilitent ou consomment le crime ou le délit au sens de l’article 67, alinéa 3, du Code pénal, les agissements du complice qui, en concertation préalable avec les auteurs, revient les chercher à l’endroit de la commission des faits, même si les objets volés ont été emportés par d’autres complices. La Cour estime que cet agissement posé par le complice en connaissance de cause s’intègre en effet dans le plan des auteurs principaux qui ont procédé au vol avec la conviction qu’ils pourraient quitter les lieux en sécurité, le complice ayant ainsi facilité la commission et la consommation de l’infraction jusqu’à ce que les auteurs principaux aient quitté l’endroit des faits67.

§ 3. L’omission d’agir comme acte de participation68

En principe, seul un acte positif, préalable à l’exécution de l’infraction ou concomitant, peut constituer la participation à un crime ou à un délit au sens des articles 66 et 67 du Code pénal69.

De façon générale, le Code pénal ne connaît que des modes de participation par « action » et non par « omission »70. Le terme « omission » ne vise pas ici les manquements à une obligation d’agir déterminée ou l’abstention de poser un acte de nature à empêcher la commission d’une infraction grave, mais il concerne la simple inaction face au déroulement d’un fait criminel71.

Il convient de rappeler ici que l’abstention coupable n’est pas incriminée de façon générale comme mode de participation à l’infraction principale, mais elle fait l’objet d’une incrimination autonome et distincte de non-assistance à personne en danger (article 422bis du Code pénal)72.

Toutefois, une attitude « non active » peut, à notre sens, constituer un acte positif de participation lorsque, en raison des circonstances qui l’accompagnent, l’inaction consciente et volontaire constitue, en connaissance de cause, une coopération directe ou une aide à l’exécution de l’infraction au sens des articles 66 et 67 du Code pénal73. On qualifiera un tel comportement d’abstention caractérisée par opposition à l’omission simple. En règle74, cette dernière n’est pas punissable. Ainsi, la simple manifestation d’un désintérêt ou même d’une approbation passive ne suffit pas75. Il en va de même pour la personne qui, ayant connaissance de la commission d’une infraction grave ou de son imminence, ne réagit pas et s’abstient de la dénoncer7677. La participation présuppose une contribution « positive » du participant à l’infraction78.

À cet égard, la terminologie de participation par omission peut être source de confusion et recouvrir des situations fort différentes: en cas de participation punissable, le comportement incriminé ne consiste pas en une simple omission, mais constitue réellement un comportement circonstancié et volontaire incitant à la commission de l’infraction, la facilitant ou l’encourageant suivant un des modes prévus aux articles 66 et 67 du Code pénal. Le comportement est dans ce cas caractérisé à un point tel que la prétendue inaction traduit un comportement positif79, explicite et non équivoque, qui ne peut être assimilé à une simple omission.

Plusieurs situations peuvent être distinguées à cet égard.

A. L’abstention volontaire, en vue de faciliter l’infraction, de celui qui a le devoir d’agir

Un premier cas de figure est l’abstention volontaire de l’agent qui a le devoir d’agir en raison d’une obligation légale ou conventionnelle lorsque cette abstention constitue en elle-même soit une façon positive de commettre l’infraction, soit une approbation, une aide ou un encouragement à commettre celle-ci suivant un des modes visés aux articles 66 et 67 du Code pénal. L’accent est mis ici sur l’impact que l’abstention volontaire a sur la réalisation de l’infraction80. Ainsi, si l’inaction simple ne peut entraîner une coopération punissable, une abstention pourrait entrer en ligne de compte lorsque celui qui s’abstient avait une obligation caractérisée d’agir et que volontairement, à la suite d’un concert frauduleux, il a encouragé, par son inaction, la perpétration de l’infraction81.

Il est requis en outre que l’abstention volontaire caractérisée rentre dans une des formes de participation visées aux articles 66 et 67 du Code pénal82: on songe ici principalement à l’aide indispensable ou accessoire et à la provocation directe à la commission de l’infraction.

À titre d’exemple, peut être considéré comme coauteur de l’infraction le contrôleur des contributions qui, en vue de permettre à un contribuable d’éluder l’impôt, convient de mèche avec celui-ci qu’il s’abstiendra volontairement de procéder à un contrôle qu’il était tenu de réaliser ou qu’il fermera les yeux lors d’un tel contrôle83. Dans le même sens, la servante, qui, de concert préalable avec les auteurs d’un vol, omet volontairement de verrouiller une porte pour permettre à ceux-ci de pénétrer dans l’immeuble doit être considérée comme coauteur ou complice du vol84.

Dans le même ordre d’idées, la Cour de cassation considère que la corréité par provocation directe au sens de l’article 66, alinéa 4, du Code pénal peut consister en un acte d’abstention lorsqu’il y a un devoir juridique d’agir, que l’abstention est intentionnelle et qu’elle constitue une incitation positive au délit85.

De même, lorsque le juge constate que la prévenue, titulaire d’un mandat d’administrateur délégué, devait intervenir dans la gestion de la société et qu’elle avait renoncé à exercer ce mandat en permettant à son fils d’accomplir à sa place tous les actes relevant de la gestion de la société en sachant parfaitement que celui-ci n’avait plus qualité pour l’engager, il peut en déduire que l’attitude passive de la prévenue, adoptée volontairement, a favorisé la commission des infractions de faux et usage de faux commises par son fils, dès lors que sans son abstention volontaire, les infractions n’eussent pas été commises86.

Dans un arrêt récent, la Cour confirme qu’une abstention peut constituer une participation punissable au sens des articles 66 et 67 du Code pénal, notamment lorsque la personne concernée a l’obligation légale positive de faire exécuter ou prévenir un certain agissement et que son abstention est volontaire et qu’elle favorise ainsi la commission du fait punissable87. En l’espèce, les juges avaient fait une série de considérations, d’où il se déduisait qu’en tant qu’administrateurs délégués, les prévenus poursuivis pour des infractions en matière d’accises avaient sciemment omis d’exercer le contrôle qui leur incombait alors qu’ils devaient veiller au respect des normes en matière de droits d’accises dans le chef de la société88.

B. Le comportement « inactif » adopté sciemment et volontairement assimilable à un acte positif de participation

Même en l’absence d’un devoir positif d’agir, une omission peut constituer une participation punissable à la commission d’une infraction lorsque le comportement « inactif » adopté sciemment et volontairement par le participant est à ce point caractérisé qu’il doit être assimilé à un acte positif de participation, dès lors qu’il constitue un encouragement positif et non ambigu à la perpétration de l’infraction suivant un des modes prévus aux articles 66 et 67 du Code pénal89. Le simple fait d’assister à l’exécution d’une infraction peut constituer dans certaines circonstances une participation punissable lorsque la présence de l’agent et son absence de réaction contribuent directement à l’exécution de l’infraction soit en apportant une aide jugée essentielle ou accessoire, soit en provoquant à la perpétration de l’infraction, et traduisent cette intention de coopérer dans son chef.

Suivant la Cour de cassation, l’omission d’agir peut constituer un acte positif de participation lorsque, en raison des circonstances qui l’accompagnent, l’inaction consciente et volontaire constitue sans équivoque un encouragement à la perpétration de l’infraction suivant l’un des modes prévus aux articles 66 et 67 du Code pénal; ainsi le fait d’assister passivement à l’exécution d’une infraction peut constituer une participation punissable lorsque l’abstention de toute réaction traduit l’intention de coopérer directement à cette exécution en contribuant à la permettre ou à la faciliter90.

Ainsi, il existe des situations où la présence de la personne concernée a pour but ou effet conscient d’inciter ou de stimuler l’auteur principal, ou encore d’affaiblir la résistance de la victime91. C’est l’exemple de la victime d’un vol avec violences ou menaces confrontée à un groupe de plusieurs personnes, mais dont seul un membre adopte un rôle actif dans le fait de vol. Dans cette hypothèse, le comportement « inactif » des autres ne se résume pas à une simple omission d’agir ou abstention, mais est précédé ou accompagné d’un acte positif: la présence sur les lieux des faits en connaissance de cause et l’adhésion au groupe sans s’en désolidariser constituent un comportement que l’on peut qualifier de positif et de volontaire. D’ailleurs, dans ces conditions, la victime se sent confrontée non à un seul auteur, mais à plusieurs auteurs ou, à tout le moins, à un auteur agissant en bande.

En ce sens, il a été jugé qu’une présence vigilante auprès des auteurs de l’infraction, privant la victime de tout secours ou possibilité de fuite et permettant aux auteurs d’agir librement, pouvait constituer un acte de participation punissable92.

La Cour de cassation a également admis que pouvait constituer la participation criminelle au sens de l’article 66 du Code pénal le fait d’être présent lors d’agressions (en l’espèce, viol et attentats à la pudeur) commises par d’autres membres d’une bande et de contribuer ainsi à un effet de groupe qui tantôt a empêché la victime de pouvoir s’enfuir ou se défendre, ou tantôt a eu pour conséquence de renforcer les auteurs dans leur détermination et de déforcer les capacités de résistance de la victime93.

De même, lorsque, dans le cadre d’une bagarre, une victime isolée subit une agression massive et collective d’un groupe de jeunes, en telle sorte qu’elle fut littéralement piétinée et n’avait aucune chance de se sauver ni de se défendre, il y a lieu de considérer tous les membres de la bande exécutant en groupe la charge frontale comme coauteurs des coups et blessures sans qu’il faille distinguer qui a porté quels coups ou à quel endroit l’auteur a atteint la victime. En l’espèce, le juge avait constaté que le prévenu s’était précipité avec les autres sur la victime et qu’il était certain que ce n’était pas pour lui venir en aide ou la dégager, ni pour calmer les autres94.

Dans le même sens, la cour d’appel de Gand a considéré que lorsque la seule présence d’un membre d’une association constitue un élément crucial dans l’effet de surprise résultant d’une attaque sur une bande rivale, ce membre a apporté une aide nécessaire à l’infraction de coups et blessures, même s’il n’est pas prouvé qu’il a effectivement porté des coups aux victimes. En l’espèce, une action de vengeance avait été planifiée via l’internet et une expédition punitive avait été mise en place à l’aide d’appels donnés par téléphone portable dans le but de se venger de coups qu’avait reçus une personne. Les membres participant à l’expédition ont été tous reconnus coupables d’association de malfaiteurs, mais également comme coauteurs des coups et blessures portés par certains membres du groupe aux victimes95.

Toutefois, cette évolution jurisprudentielle peut faire craindre, dans certaines situations, un estompement de la frontière entre l’omission d’agir comme mode de participation et la non-assistance à personne en danger, peu compatible avec l’interprétation restrictive des modes de participation prévus aux articles 66 et 67 du Code pénal. Ainsi, sous le couvert de l’appréciation en fait du juge du fond, la Cour de cassation a admis que puisse être déclarée coupable de complicité d’empoisonnement la personne qui, ayant appris l’administration de substances nocives à la victime, s’est entendu avec l’auteur pour ne pas appeler les secours à un moment où ceux-ci auraient pu intervenir utilement pour sauver la victime, le juge du fond ayant considéré que ce faisant, l’intéressé avait assisté l’auteur dans les faits qui ont consommé l’infraction96.

§ 4. L’accomplissement d’un des actes de participation prévus par la loi

Comme rappelé ci-dessus, pour qu’un prévenu puisse être condamné en tant que participant à une infraction, il n’est pas requis que les actes de participation contiennent tous les éléments de l’infraction97, ni que le coauteur ou complice ait lui-même l’intention requise pour commettre le délit auquel il participe, mais il suffit que l’agent ait contribué sciemment et volontairement à la commission de l’infraction de la manière déterminée par la loi98.

Les comportements qui confèrent la qualité d’auteur ou de coauteur et celle de complice sont décrits respectivement aux articles 66 et 67 du Code pénal. Comme indiqué ci-dessus, l’article 68 du même Code ne constitue pas un mode de participation à une infraction, mais bien, à l’instar de l’association de malfaiteurs, une incrimination autonome d’un comportement en relation avec l’activité criminelle d’autres personnes, réprimé au tarif de la complicité.

A. La distinction entre la corréité et la complicité

L’article 66 du Code pénal vise les comportements qui confèrent à ceux qui les ont adoptés la qualité d’auteur ou de coauteur, tandis que l’article 67 vise les modes d’intervention en tant que complice.

La loi distingue donc les actes physiques ou moraux qui placent les codélinquants dans l’une ou dans l’autre catégorie, et elle consacre cette différence en prévoyant pour les complices une peine inférieure à celle encourue par les auteurs99.

Il en résulte qu’un même comportement ne peut constituer un acte de participation à la fois en qualité d’auteur ou coauteur et en qualité de complice. Suivant la Cour de cassation, la participation est soit principale, soit accessoire, en telle sorte qu’il est impossible que les mêmes faits constituent à la fois une participation principale et une participation accessoire100.

En revanche, des comportements successifs dans le chef du même agent peuvent être qualifiés d’actes de participation respectivement en qualité d’auteur ou coauteur et en qualité de complice. Ainsi, la Cour de cassation considère qu’un délinquant peut être à la fois coauteur et complice d’un autre, par exemple si, après l’avoir directement provoqué à l’action, il s’est borné à lui prêter une assistance accessoire dans les faits qui l’ont préparée ou consommée101.

B. La qualité d’auteur ou de coauteur

Les coupables de la participation, visée à l’article 66 du Code pénal, sont appelés auteurs de l’infraction: ils en sont la cause102. On parlera ici de participation principale, déterminante.

Il faut, mais il suffit, que le participant ait sciemment fourni la forme de coopération à l’infraction prévue par la loi103 sans qu’il soit exigé en outre qu’après avoir posé cet acte de participation, l’auteur accompagne, encadre, assume, ou encore ratifie l’exécution de l’infraction. Ainsi, il a été jugé que celui qui, par abus d’autorité ou de pouvoir, a directement provoqué une infraction est considéré comme auteur de cette infraction, indépendamment du fait qu’il soit resté étranger à l’exécution même des faits104.

L’article 66 du Code pénal énumère les modes de participation qui donnent la qualité d’auteur ou de coauteur à l’agent:

« Seront punis comme auteurs d’un crime ou d’un délit: Ceux qui l’auront exécuté ou qui auront coopéré directement à son exécution; Ceux qui, par un fait quelconque, auront prêté pour l’exécution une aide telle que, sans leur assistance, le crime ou le délit n’eût pu être commis; Ceux qui, par dons, promesses, menaces, abus d’autorité ou de pouvoir, machinations ou artifices coupables, auront directement provoqué à ce crime ou à ce délit; Ceux qui, soit par des discours tenus dans des réunions ou dans des lieux publics, soit par des écrits, des imprimés, des images ou emblèmes quelconques, qui auront été affichés, distribués ou vendus, mis en vente ou exposés aux regards du public, auront provoqué directement à le commettre, sans préjudice des peines portées par la loi contre les auteurs de provocations à des crimes ou à des délits, même dans le cas où ces provocations n’ont pas été suivies d’effet ».

L’article 66, alinéa 2, vise, d’une part, les auteurs principaux de l’infraction, c’est-à-dire ceux qui ont exécuté matériellement l’infraction en chacun de ses éléments constitutifs105et, d’autre part, la coopération directe. Ce dernier mode de participation comprend tous les actes qui, bien que ne rentrant pas strictement dans la définition de l’infraction, constituent une intervention active et directe dans la perpétration de l’infraction106. La Cour de cassation considère que celui qui, pour faire commettre une infraction, utilise un tiers comme simple instrument, est lui-même l’auteur de l’infraction au sens de l’article 66, alinéa 2, du Code pénal et non l’auteur moral par provocation au sens de l’article 66, alinéa 4, dudit Code107.

L’article 66, alinéa 3, vise, quant à lui, l’aide indispensable, c’est-à-dire celle qui est apportée, par un fait quelconque, à l’exécution de l’infraction en manière telle que, sans l’assistance de l’agent, le crime ou le délit n’eût pu être commis. Peu importe qu’elle ait été importante ou limitée, pourvu qu’elle s’avère nécessaire108. Elle se distingue de l’aide seulement accessoire ou utile qui constitue une forme de complicité (cf. infra). L’appréciation du caractère indispensable de l’aide constitue une question de fait relevant de l’appréciation souveraine du juge du fond et, dans la pratique, nombreux sont les juges qui considèrent que l’aide donnée est nécessaire plutôt qu’accessoire.

La provocation directe à commettre l’infraction est visée aux alinéas 4 et 5 de l’article 66 et constitue également une forme de corréité. Par provocation, on entend l’incitation à commettre une infraction de nature à faire naître, encourager ou renforcer de façon déterminante la résolution criminelle. La provocation doit être directe, c’est-à-dire non ambiguë et en relation causale avec le comportement criminel. Elle doit porter sur la commission d’une infraction déterminée et être suivie d’effet (exécution de l’infraction ou tentative punissable)109. Elle doit être suffisamment caractérisée, un conseil, un avis ou un simple encouragement ou approbation étant insuffisants110. La provocation privée (alinéa 4), est adressée à certaines personnes précises et doit avoir lieu suivant l’un des modes énoncés par la loi: dons, promesses, menaces, abus d’autorité ou de pouvoir, machinations ou artifices coupables. La provocation publique (alinéa 5) est celle qui s’adresse à des personnes indéterminées par un des moyens de publicité, écrit ou oral, décrits dans la loi.

C. La qualité de complice

Les coupables de la participation accessoire, visée à l’article 67 du Code pénal, sont appelés complices: leur secours a été utile à l’action sans avoir été nécessaire111.

L’article 67 du Code pénal définit les comportements pour lesquels les agents se voient attribuer la qualité de complice:

« Seront punis comme complices d’un crime ou d’un délit: Ceux qui auront donné des instructions pour le commettre; Ceux qui auront procuré des armes, des instruments, ou tout autre moyen qui a servi au crime ou au délit, sachant qu’ils devaient y servir; Ceux qui, hors le cas prévu par le paragraphe 3 de l’article 66, auront, avec connaissance, aidé ou assisté l’auteur ou les auteurs du crime ou du délit dans les faits qui l’ont préparé ou facilité, ou dans ceux qui l’ont consommé » (article 67 du Code pénal).

Il s’agit ici d’une participation accessoire, secondaire, utile, mais non indispensable. La frontière est souvent difficile à tracer entre l’aide utile, mais accessoire (complicité), et celle nécessaire et indispensable, c’est-à-dire sans laquelle l’infraction n’eût pu être commise (coauteur). En pratique, les juges ont tendance à considérer rapidement que la participation est principale, nécessaire, déterminante, en telle sorte que les condamnations du chef de complicité sont relativement rares.

L’article 67, alinéa 2, vise les personnes qui ont donné des renseignements ou des conseils pour faciliter la commission de l’infraction. Si ces renseignements sont déterminants ou décisifs pour la commission de l’infraction, le participant sera considéré comme coauteur, dès lors qu’il a apporté une aide indispensable.

L’article 67, alinéa 3, concerne les personnes qui apportent une aide utile à la commission de l’infraction par la fourniture d’armes, d’instruments ou de logistique. La loi exige que le complice ait eu la volonté de participer à la commission de l’infraction en fournissant les moyens tout en sachant qu’ils devraient y servir112. Ici, à nouveau, il ne sera pas toujours simple de faire la distinction entre la fourniture de moyens logistiques utiles (complicité) et celle de moyens nécessaires ou indispensables (corréité). Dans la majorité des situations, les juges considèrent que la personne qui fournit, en connaissance de cause, l’arme pour commettre le crime, apporte une aide indispensable et doit être traitée comme un coauteur.

Enfin, l’article 67, alinéa 4, vise de façon générale l’aide accessoire. Il s’agit ici de l’aide non indispensable apportée aux auteurs de l’infraction, que ce soit dans la préparation de la commission de l’infraction, dans son exécution ou dans sa consommation. De même ici, la distinction, souvent difficile, entre l’aide accessoire (complice) et l’aide indispensable (coauteur) devra être faite: il s’agit d’une question de fait relevant de l’appréciation souveraine du juge du fond.

Conclusion

Pratiquement inchangés depuis l’apparition de notre Code pénal en 1867113, les articles 66 et 67 de ce Code continuent à donner lieu à une jurisprudence abondante et riche en enseignements. La Cour européenne y a mis également son grain de sel avec l’arrêt Goktepe.

Ainsi des notions aussi classiques que celles de la corréité et de la complicité placent le praticien devant des questions toujours nouvelles. Force est de reconnaître que la diversité des situations contraint les cours et tribunaux à rechercher des solutions pour des questions inédites.

Au terme de cette étude, on ne peut cependant se départir du sentiment que, ce faisant, la jurisprudence embrasse toujours davantage de situations sous l’égide de la participation criminelle et se pose dès lors la question de la compatibilité de cette évolution avec le principe d’interprétation restrictive du droit pénal.

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1 J. VAN HEULE, « Strafbare deelneming : een overzicht van rechtspraak (2000-2010) », N.C., 2012, p. 3 ; F. KUTY, Principes généraux du droit pénal belge, t. III, L’auteur de l’infraction pénale, Bruxelles, Larcier, 2012, p. 318.

2 C. HENNAU et J. VERHAEGEN, Droit pénal général, 3e éd., Bruxelles, Bruylant, 2003, p. 280.

3 Cass., 3 mars 2009, R.G. n° P.08.1451.N, Pas., 2009, n° 166, Arr. Cass., 2010, n° 166, concl. min. publ.

4 Cass., 15 octobre 1986, Pas., I, 1987, n° 90 ; Cass., 5 octobre 2005, R.G. n° P.05.0444.F, Pas., 2005, n° 481.

5 C. HENNAU et J. VERHAEGEN, Droit pénal général, 3e éd., Bruxelles, Bruylant, 2003, p. 267 ; J. VAN HEULE, « Strafbare deelneming : een overzicht van rechtspraak (2000-2010) », N.C., 2012, p. 2.

6 Cass., 10 avril 2013, R.G. n° P.12.2017, www.juridat.be.

7 Cass., 25 septembre 2001, R.G. n° P.01.1091.N, Pas., 2001, n° 494.

8 J. VAN HEULE, « Strafbare deelneming : een overzicht van rechtspraak (2000-2010) », N.C., 2012, p. 2.

9 Cass., 5 octobre 2005, R.G. n° P.05.0444.F, Pas., 2005, n° 481 Cass., 29 novembre 2011, R.G. n° P.11.1250.N, Pas., 2011, n° 656.

10 Cass., 12 mai 1998, Pas., 1998, n° 576 ; Cass., 26 février 2008, Pas., 2008, n° 129 ; Cass., 25 avril 2012, R.G. n° P.12.0125.F, Pas., 2012, n° 254 ; Liège, 17 février 2004, J.T., 2004, p. 925 et la note de S. DERRE intitule « Le principe de la responsabilité pénale personnelle à l’épreuve de la délinquance de groupe ».

11 Cass., 16 juin 1981, Pas., 1981, I, p. 1185 ; Cass., 23 juillet 1991, Pas., 1991, I, n° 569.

12 H.-D. BOSLY, « La responsabilité pénale des coauteurs et des complices en droit pénal social », note sous Cass., 20 janvier 2009, Rev. dr. pén., 2009, p. 865.

13 J. VAN HEULE, « Strafbare deelneming : een overzicht van rechtspraak (2000-2010) », N.C., 2012, p. 8 ; Cass., 7 décembre 2004, R.G. n° P.04.1006.N, Pas., 2004, n° 594.

14 La solution est critiquée en ce qui concerne la condamnation de tiers à l’entreprise (voy. J. VAN HEULE, « Strafbare deelneming : een overzicht van rechtspraak (2000-2010) », N.C., 2012, pp. 8-10).

15 Cass., 20 janvier 2009, Rev. dr. pén., 2009, p. 859 avec la note de H.-D. BOSLY, « La responsabilité pénale des coauteurs et des complices en droit pénal social ».

16 Ainsi en est-il lorsque le participant fournit des armes prohibées aux auteurs de l’infraction.

17 Par exemple, le recel du véhicule volé utilisé pour commettre l’infraction.

18 J. VAN HEULE, « Strafbare deelneming : een overzicht van rechtspraak (2000-2010) », N.C., 2012, p. 4.

19 Cass., 14 janvier 2009, R.G. n° P.09.0024.F, Rev. dr. pén., 2009, p. 452.

20 Cass., 23 mars 1999, Pas., 1999, n° 171.

21 F. KUTY, Principes généraux du droit pénal belge, t. II, L’infraction pénale, Bruxelles, Larcier, 2010, p. 539.

22 Cass., 20 mars 2013, R.G. n° P.13.0016.F, www.juridat.be.

23 Cass., 20 mars 2013, R.G. n° P.13.0016.F.

24 Cass., 5 octobre 2005, R.G. n° P.05.0444.F, Pas., 2005, n° 481 ; F. TULKENS, M. VANDE KERCHOVE, Y. CARTUYVELS et C. GUILLAIN, Introduction au droit pénal, 9e éd., Bruxelles, Kluwer, 2010, p. 467.

25 Voy. Cass., 3 avril 2012, T. Strafr., 2012, p. 453 et la note de J. VAN HEULE, « Strafbare deelneming door schuldig hulpverzuim ».

26 Cass., 26 février 2008, Pas., 2008, n° 129 ; Cass., 28 septembre 2010, R.G. n° P.10.0099.N, Pas., 2010, n° 554.

27 Cass., 12 mai 1998, R.G. n° P.98.0485.N, Pas., 1998, n° 246.

28 Cass., 9 octobre 1990, R.G. n° 3453, Pas., 1991, n° 69.

29 Cass., 25 septembre 2001, R.G. n° P.01.1091.N, Pas., 2001, n° 494.

30 R. VERSTRAETEN et D. DEWANDELEER, « Witwassen na de Wet van 7 april 1995 : kan het nog witter ? », R.W., 1995-1996, p. 699.

31 Cass., 25 septembre 2001, R.G. n° P.01.1091.N, Pas., 2001, n° 494 ; Cass., 7 septembre 2005, R.G. n° P.05.0348.F, Pas., 2005, n° 414 ; Cass., 29 novembre 2011, R.G. n° P.11.1250.N, Pas., 2011, n° 656.

32 Cass., 24 mars 1998, R.G. n° P.96.1683.N, Pas., 1998, n° 164.

33 A. DE NAUW, « Chronique semestrielle de jurisprudence - Principes généraux de droit pénal », in Rev. dr. pén., 2012, p. 425 ; P. WAETERINCKX, note sous Anvers, 10 février 2011, R.A.B.G., 2011, p. 991.

34 Anvers, 10 février 2011, R.A.B.G., 2011, p. 987 et la note de P. WAETERINCKX.

35 Voy. J. VAN HEULE, « Strafbare deelneming : een overzicht van rechtspraak (2000-2010) », N. Code, 2012, p. 7.

36 A. DE NAUW, « Chronique semestrielle de jurisprudence - Principes généraux de droit pénal »,