Eléments de Physiologie - Denis Diderot - E-Book

Eléments de Physiologie E-Book

Denis Diderot

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Beschreibung

Extrait : "Je voudrais que vous me dissiez quelle altération est survenue dans son organisme extérieur, à partir des bras, qui ont fatigué les premiers, jusqu'à l'extrémité de son corps ou le bout des pieds, et que vous me marquassiez quelles sont les parties de son corps qui ont le plus souffert de son violent exercice."

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EAN : 9782335016321

©Ligaran 2015

Êtres

Il faut commencer par classer les êtres, depuis la molécule inerte, s’il en est, jusqu’à la molécule vivante, à l’animal microscopique, à l’animal-plante, à l’animal, à l’homme.

Chaîne des êtres

Il ne faut pas croire la chaîne des êtres interrompue par la diversité des formes ; la forme n’est souvent qu’un masque qui trompe, et le chaînon qui paraît manquer existe peut-être dans un être connu à qui les-progrès de l’anatomie comparée n’ont encore pu assigner sa véritable place. Cette manière de classer les êtres est très pénible et très lente et ne peut être que le fruit des travaux successifs d’un grand nombre de naturalistes.

Attendons, et ne nous pressons pas de juger.

Êtres contradictoires

Ce sont ceux dont l’organisation ne s’arrange pas avec le reste de l’univers. La nature aveugle qui les produit les extermine ; elle ne laisse subsister que ceux, qui peuvent coexister supportablement avec l’ordre général que, vantent ses panégyristes.

Êtres contradictoires subsistants

Poitrine délicate et caractère violent, passe vite.

Mélancolique et malheureux, passe vite.

Esprit actif, ardent, pénétrant et machine frêle ; passe vite.

Elle laisse peu durer les mécontents.

La longue vie : l’organisation forte, l’insensibilité, l’ineptie, la fortune, les goûts modérés, etc.

Éléments

Les éléments en molécules isolées n’ont aucune des propriétés de la masse.

Le feu est sans lumière et sans chaleur.

L’eau, sans humidité et sans élasticité.

L’air n’est rien de ce qu’il nous présente.

Voilà pourquoi ils ne font rien dans les corps où ils sont combinés avec d’autres substances.

Divisibilité

L’extrême divisibilité de la matière lui donne le caractère du poison.

Les poussières très menues causent des ulcères.

À juger de la matière perspirable par la finesse de son crible, elle doit être très fine, très active, et sa suppression très dangereuse, comme l’expérience le prouve.

Durée, étendue

En nature : Durée, succession d’actions.

Étendue, coexistence d’actions simultanées.

Dans l’entendement, la durée se résout en mouvement ; par abstraction, l’étendue en repos.

Mais le repos et le mouvement sont d’un corps.

De l’existence

Je ne puis séparer, même par abstraction, la localité et la durée, de l’existence. Ces deux propriétés lui sont donc essentielles.

Végétaux

En Italie, M. Beccari, et en Alsace, à Strasbourg, MM. Kessel et Mayer, voulurent connaître les parties constituantes de la farine ; ils la lavèrent à plusieurs eaux, ils en séparèrent l’amidon, ils en tirèrent une substance qui ressemble beaucoup à une substance animale.

Aussitôt M. Rouelle, à Paris, M. Macquer et les plus savants de nos chimistes reprirent ces expériences et les poussèrent aussi loin qu’elles purent aller. Ils trouvèrent que l’amidon ne contenait, pour bien dire, que les parties végétales de la farine ; qu’en l’enlevant il restait un gluten qu’ils appelèrent végéto-animal. Toutes ses parties sont si rapprochées, si liées entre elles qu’on ne peut les séparer. Quand on le tire, il s’étend dans tous les sens ; et quand on l’abandonne, il se replie sur lui-même et il reprend sa première forme, comme fait le tissu de la peau, qui tour à tour s’étend et se resserre. Si on le brûle, il se grille comme la chair et répand l’odeur des matières animales.

Animal-plante

Le polype retourné ; il tend à reprendre sa forme première ; un fil l’en empêche-t-il ? il prend son parti : il reste et vit retourné.

Animal et plante

Qu’est-ce qu’un animal, une plante ? Une coordination de molécules infiniment actives, un enchaînement de petites forces vives que tout concourt à séparer.

Est-il donc étonnant que ces êtres passent si vite ?

Plantes

Dans l’arbre, les racines deviennent tiges, et les tiges deviennent racines.

Animalisation du végétal

En pétrissant longtemps la pâte et l’arrosant souvent d’eau, on lui ôte la nature végétale et on l’approche tellement de la nature animale que, par l’analyse, elle en donne les produits. (Mém. de l’Acad. de Bologne.)

Mobilité dans les principes animaux,

Fixité dans les principes végétaux,

Deux effets des nisus conservés ou détruits.

La substance gélatineuse des uns et des autres montre un état moyen entre l’animal et la plante.

Que produisent le vinaigre, les acides, les sels jetés sur les substances en fermentation ? Des composés où il y a nisus en surabondance.

L’eau détruit les nisus, isole les parties et leur rend l’activité.

Végétal

Par la chaleur et la fermentation, la matière végétale s’animalise dans un vase.

Elle s’animalise aussi en moi, et animalisée en moi, elle se ranimalise dans le vase.

Il n’y a de différence que dans les formes.

Les anguilles de la colle de farine sont vivipares.

Contiguïté du règne animal et du règne végétal

On tire de l’alcali volatil du champignon ; aussi sa graine est-elle vivace : elle oscille dans l’eau, se meut, s’agite, évite les obstacles, et semble balancer entre le règne animal et le règne végétal avant que de se fixer à celui-ci.

Plantes

Il y a des générations équivoques émanées du règne végétal, et des générations équivoques du règne animal.

Contiguïté du règne végétal et du règne animal

Plante de la Caroline appelée Muscipula Dionœa, a ses feuilles étendues à terre, par paires et à charnières ; ces feuilles sont couvertes de papilles. Si une mouche se pose sur la feuille, cette feuille, et sa compagne, se ferme comme l’huître, sent et garde sa proie, la suce et ne la rejette que quand elle est épuisée de sucs. Voilà une plante presque carnivore.

Il y a dans les plantes un endroit particulier dont l’attouchement cause de l’érection et l’effusion de la semence, et cet endroit n’est pas le même pour toutes.

Je ne doute point que la Muscipula ne donnât à l’analyse de l’alcali volatil, produit caractéristique du règne animal.

De l’ergot

Comment distingue-t-on le grain niellé simple et le grain niellé et ergoté ? Parmi la poussière noire, il y a des anguilles dans ce dernier.

Observations

Sous ces petites tumeurs ou galles de l’ergot, l’épi vert et non mûr.

Ouvrez ces tumeurs avec une aiguille tranchante et courbée, sans en offenser la cavité intérieure ; laissez-y tomber quelques gouttes d’eau, et vous verrez au-dedans quelques anguilles, mais grosses, mais vivantes, mais mues, mais pleines d’œufs, de vraies petites anguilles.

Ces grosses anguilles sont colossales en comparaison des petites qui se trouvent dans le même grain, mais plus adulte, plus mûr, ou dans le grain ergoté ordinaire, déjà sec et noir.

Ces grosses sont les mères. On les voit lâcher leurs petits œufs par une partie très sensible et non équivoque, caractérisant parfaitement leur sexe.

À travers la pellicule transparente de ces œufs on voit la jeune petite anguille se plier, se replier, se mouvoir, à la fin rompre son enveloppe, sortir, et se mouvoir, et vivre, et glisser dans l’eau.

Avec les grosses mères on en trouve d’autres grosses encore, ce sont les mâles, d’autant qu’ils ont au fond de leur corps un gros corps conique et mobile.

Donc ces anguilles sont des animaux, donc il existe un animal mâle et femelle qui vit et meurt à discrétion.

Les anguilles du vinaigre ne sont pas ovipares, elles sont vivipares ; Fontana a vu les filles se mouvoir dans le corps des mères avant l’accouchement.

Maladie du grain et du seigle, que les italiens appellent grain cornu ou l’éperon

Les anguilles du grain cornu, bien que sèches, reprennent mouvement et vie si on les humecte d’une goutte d’eau. Needham a connu ce phénomène.

Needham ne croit pas que ces anguilles soient des animaux, il en fait des êtres vitaux ; Buffon, des molécules organique vivantes ; Fontana, des animaux.

Needham veut qu’unies ou rassemblées, selon certaines lois, elles vont formant ou des animaux ou des végétaux.

Ces fils étaient si secs, si fragiles, que le choc subit de l’eau, que celui d’une aiguille si léger qu’il fût, que la pointe d’un cheveu, les mettait en farine, les réduisait en poudre menue. (Je voudrais bien que Fontana les eût triturés.) Eh bien, dans cet état de pulvérisation, où ils n’étaient sûrement pas des animaux vivants, un peu d’eau en quelques instants les ramenait à la vie.

Première expérience. Un seul grain de froment ou de seigle semé avec quelques grains d’ergot.

Deuxième expérience. Un seul grain de froment ou de seigle baigné dans la poussière noire et fétide de la nielle et semé avec des grains d’ergot.

Troisième expérience. Grain de froment semé, seulement aspergé de nielle.

Dans la précédente ou troisième expérience, épi où presque tous les grains niellés, très peu de sains.

Dans la première, épi à grains presque tous infectés d’ergot.

Dans la seconde, bonne partie des grains avaient et l’ergot et la nielle ensemble. Sous la même enveloppe, grains d’ergot pur, et, proche de ceux-ci, grains niellés remplis de poussière noire et aussi d’anguilles génératrices.

Donc l’ergot et la nielle sont deux maladies contagieuses dont on pourrait aisément infecter tout le grain d’une contrée.

Observation

Sous les mêmes enveloppes, ou l’on ne trouve jamais qu’un seul grain sain, ou l’on en trouve au contraire deux, trois, ou même davantage, jusqu’à dix, d’ergot, les uns à côté des autres ; et, où est l’ergot, on ne trouve jamais le grain adulte, produit de la semaille, mais bien ergot et germe d’ergot ensemble.

L’ergot n’est donc point un vrai grain, un produit de la semaille, mais un germe dégénéré, ainsi que la nielle.

On trouve aussi le germe non multiplié du grain, ou de l’ergot et avec ce germe un grain ou plusieurs ergotés, et enfin l’ergot, hors des enveloppes du grain.

L’ergot est tout de lui, il ne tient rien du germe.

Si cette multiplication de germes ne sert point à faire les galles de l’ergot, elle sert à multiplier les grains de la nielle viciée d’ergot.

Un seul grain niellé sous une enveloppe.

Plusieurs grains niellés et ergotés sous la même enveloppe.

De la Tremella

Adanson est le premier qui ait aperçu un mouvement singulier dans une plante aquatique appelée la Tremella.

Adanson refuse la vie et le sentiment à cette plante et par conséquent l’animalité, et la laisse plante.

Fontana en fait le passage du règne végétal au règne animal ; la Tremella est, selon lui, en même temps, et une vraie plante et un vrai animal.

1° Un fil s’approchant d’un autre, d’eux-mêmes ils se ficellent l’un sur l’autre et forment deux spirales droites ou dans une seule direction.

2° Un fil se recourbe de la tête à la queue, la tête va chercher la queue. Ces extrémités sont plus pointues et plus grêles.

3° Ces extrémités se meuvent en tous sens, précisément comme on le voit à la tête et à la queue des serpents.

4° Si l’une de ces extrémités est obtuse, comme on le remarque quelquefois, plus de ces mouvements bizarres et si ressemblants à ceux de l’animal vivant.

5° Ces fils ont le mouvement de progression d’un lieu à un autre.

6° Les fils, ou seuls ou plusieurs ensemble, ont le mouvement de translation, en tout sens, l’un d’un côté, l’autre de l’autre, avec des directions et des vitesses diverses.

7° Coupez-les en pièces, les mouvements seront moindres, mais ils se mouvront ; les morceaux de l’extrémité aiguë conserveront la même vivacité d’action qu’auparavant.

8° Les morceaux, ou coupés par morceaux ou détachés naturellement du tronc, s’élancent d’eux-mêmes sur la surface du vaisseau et s’y plantent par la partie coupée ou arrachée, tandis que la partie aiguë se tient droite ; dans l’eau c’est la même chose, la partie aiguë et redressée se plie, se replie, tandis que le reste s’agite doucement et fait différents coudes avec le plan.

Cette manière de tenir la partie aiguë relevée est ordinaire aux fils de la Tremella, s’il n’y a aucun obstacle.

Le mouvement progressif et de tortillement, mais plus difficile, s’observe à la partie des fils qui tient à la plante même.

Quand les fils sont isolés ou qu’il y en a peu ensemble, ils s’avancent par la partie aiguë.

S’il n’y a qu’un fil, il s’agite en serpentant et fait des inflexions diverses à la manière des vers.

On en voit qui passent de la ligne droite par tous les angles possibles, se pliant par le milieu de manière que les deux extrémités pointues se touchent et que restes sont parallèles.

Ils forment des cercles, des ovales, des serpentements.

Si des fils sont serrés par leurs extrémités par d’autres fils, et qu’entre ces fils il y en ait un qui tienne au tissu de la plante ; alors le tout se démène comme si c’était un faisceau de serpents, se tord, s’élève, s’abaisse dans l’eau.

On les voit se plier au milieu du corps, former un ovale, s’entortiller par leurs extrémités, s’agiter et reprendre ensuite leur longueur.

Ces fils se multiplient par leurs extrémités ; s’il s’en détache une particule, cette particule croît, devient adulte et capable, en se rompant, d’engendrer d’autres fils vivants.

Alors le fil régénérateur reste avec son extrémité obtuse, sans aucun des mouvements propres à cette partie, jusqu’à ce qu’elle redevienne aiguë, ce qui se fait et se défait successivement sans qu’il y ait peut-être de terme à cette division et à cette production.

Le fil de la Tremella est un petit sac plein de petits corps oviformes, situés à différentes distances les uns des autres.

(Il fallait voir si, à chaque rupture d’extrémité, il ne disparaissait pas un de ces corps oviformes.)

Coupez à la Tremella un ou plusieurs de ces fils, remettez-la dans l’eau, et elle reprendra bientôt tous ses mouvements.

Et chaque fil s’agite et se meut sans qu’il y ait un instant de repos.

D’où viennent tous ces mouvements ? Ce n’est ni de l’eau ni de l’air, car ils se font en tout sens dans l’eau et l’air en repos, et ils se font en tout sens et en sens contraire à l’eau agitée. Unis ou séparés, ils suivent des directions opposées ; ils s’agitent à côté des petits corpuscules en repos. D’un mécanisme particulier ? Cela né se peut ; un mécanisme particulier fait voler l’oiseau, nager le poisson, mais il y a entre ces mouvements et la variété infinie de la spontanéité une différence très marquée ; or, cette variété infinie que nous attribuons dans les autres animaux à la vie, à la sensibilité, à la spontanéité, nous la voyons toute dans les filets de la Tremella et avec un caractère particulier, car il n’y a ni ralentissement, ni cessation, ni interruption pendant des mois, des années ; ils durent tant que la plante vit et végète. La Tremella et ses fils sont donc des animaux sensibles et vivants ; ses parties organiques obéissent donc à la sensibilité.

Sèche, elle perd ses mouvements ; humide, elle les reprend. Elle naît et meurt donc à discrétion.

La Tremella n’est point une plante simple, c’est un amas de petites plantes ou fils végétaux qui, unis ensemble, forment la plante de ce nom.

Il n’y a personne qui, voyant les phénomènes qu’elle offre et qui, ignorant que ces fils sont des fils d’un végétal, ne prononçât tout de suite que ces fils sont des vers vivants. Le doute ne naît que quand on vous dit que ces fils sont des portions de végétaux, mais ce doute ne tarde pas à s’évanouir.

Onctions huileuses

Nous ne faisons pas assez d’usage des indications de la nature. On a remarqué que les habitants des climats brûlants ont la peau huileuse, et aucun des étrangers ne s’avise de recourir aux onctions de la même nature.

Les Américains graissent leur peau quand elle cesse d’être huileuse ; on lui restitue la vigueur par l’onction de l’huile de palmier.

Il y a quelque apparence qu’on tirerait une liqueur spiritueuse de toutes les moelles contenues dans les plantes longues et divisées par nœuds : miel des abeilles, raisins, canne à sucre.

Animaux

L’animal est une machine hydraulique. Que de sottises on peut dire d’après cette unique supposition !

Les lois du mouvement des corps durs sont inconnues, car il n’y a point de corps parfaitement dur.

Les lois du mouvement des corps élastiques ne sont pas plus sûres, car il n’y a pas de corps parfaitement élastique.

Les lois du mouvement des corps fluides sont tout à fait précaires.

Et les lois du mouvement des corps sensibles, animés, organisés, vivants, ne sont pas même ébauchées.

Celui qui, dans le calcul de cette dernière espèce de mouvement, omet la sensibilité, l’irritabilité, la vie, la spontanéité, ne sait ce qu’il fait.

Un corps brut agit sur un corps sensible, organisé, animal ; celui-ci a la conscience ou le sentiment de l’impression, et souvent du lieu de l’impression ; il est chatouillé ou blessé ; il veut ou ne veut pas se mouvoir.

Animaux par putréfactions

Chaque animal donne des animaux différents, et sa vermine.

Chaque partie de l’animal donne les siens.

Les ascarides qui viennent par milliers. Maladie épidémique accompagnée d’un vomissement sanguin et plein de vers.

Maladie pédiculaire, où un homme se réduit en poux.

Exemple d’une pareille maladie, où l’homme s’est résolu en puces.

Animaux microscopiques

Chairs grillées au feu le plus violent. Végétaux exposés dans la machine de Papin, où les pierres se réduisent en poudre, où les plus dures se mettent en gelée ;

Ce qui n’empêche pas ces substances de donner des animaux par la fermentation et la putréfaction.

Ne pas oublier la succession régulière des mêmes espèces d’animaux différents, selon la substance animale ou végétale mise en fermentation ou en putréfaction.

Cette génération descendante, par division, va peut-être jusqu’à la molécule sensible, qui montre sous cet état une activité prodigieuse.

Les particules détachées par l’action de l’eau des extrémités des nageoires des moules continuent à se mouvoir progressivement.

Animaux

Il ne faut pas croire qu’ils ont toujours été et qu’ils resteront toujours tels que nous les voyons.

C’est l’effet d’un laps éternel de temps, après lequel leur couleur, leur forme semblent garder un état stationnaire ; mais c’est en apparence.

L’organisation détermine les fonctions

L’aigle à l’œil perçant plane au haut des airs ; la taupe à l’œil microscopique s’enfouit sous terre ; le bœuf aime l’herbe de la vallée ; le bouquetin, la plante aromatique des montagnes.

L’oiseau de proie étend ou raccourcit sa vue, comme l’astronome étend ou raccourcit sa lunette.

Pourquoi la longue série des animaux ne serait-elle pas des développements différents d’un seul ?

Camper fait naître d’un seul modèle, dont il ne fait qu’altérer la ligne faciale, tous les animaux, depuis l’homme jusqu’à la cigogne.

Les animaux ont-ils de la morale ?

Conduite des oiseaux pendant l’incubation, difficile à expliquer mécaniquement.

Les peaux des animaux préparées s’étendent d’un tiers. L’animal dessiné sur l’empaillé est exagéré, Vue des figures de l’Histoire naturelle de M. de Buffon.

Chaque animal vivant a sa vermine particulière. Chaque animal mort a ses animaux particuliers.

Trois degrés dans la fermentation :

La vineuse,

L’acide,

La putride.

Ce sont comme trois climats différents sous lesquels les générations d’animaux changent.

L’anguille du blé niellé se tortille par ses deux extrémités.

Elle vit sept à huit semaines en lui fournissant de nouvelle eau.

La végétation, la vie ou la sensibilité et l’animalisation sont trois opérations successives.

Le Règne végétal pourrait bien être et avoir été la source première du Règne animal, et avoir pris la sienne dans le Règne minéral ; et celui-ci émaner de la matière universelle hétérogène.

Fonctions animales

Qu’on m’apprenne comment la jeune hirondelle fait son nid, et j’expliquerai toutes les actions qui appartiennent à l’homme non expérimenté, à l’homme animal.

Une observation qu’il ne faut pas négliger, c’est qu’il passe de la mère à l’enfant, qui pendant neuf mois ne faisait qu’un avec elle, des dispositions, des goûts, des aptitudes organiques dont il nous est impossible de bien connaître toute l’énergie.

On fait assez communément sur ce sujet deux suppositions absurdes ; on déduit ensuite des difficultés insolubles.

L’une de ces suppositions, c’est qu’il y ait sur la surface de la terre un être, un animal qui ait été de toute éternité ce qu’il est à présent.

L’autre, c’est qu’il n’y a nulle différence entre l’homme qui sortirait de la main d’un créateur, et l’enfant qui sort du sein d’une mère.

Animal et machine

Quelle différence d’une montre sensible et vivante, et d’une montre d’or, de fer, d’argent et de cuivre ?

Si une âme était attachée à cette dernière, qu’y produirait-elle ?

Si la liaison d’une âme à cette machine est impossible, qu’on me le démontre.

Si elle est possible, qu’on me dise quels seraient les effets de cette liaison.

Le paysan qui voit une montre se mouvoir, et qui, n’en pouvant connaître le mécanisme, place dans une aiguille un esprit, n’est ni plus ni moins sot que nos spiritualistes.

De la force animale

L’animal sain ne connaît pas toute sa force. J’en dis autant de l’animal tranquille.

M. de Buffon voit la flamme s’échapper avec de la fumée à travers les fentes d’un lambris, il arrache le lambris, il prend entre ses bras les planches à demi brûlées, il les porte dans sa cour, et il se trouve que deux chevaux n’ébranleraient pas le fardeau qu’il a porté.

Cette femme délicate est attaquée de vapeurs hystériques, de fureur utérine, et six hommes ne peuvent contenir celle qu’un seul d’entre eux aurait renversée, liée, dans son état de santé.

Le feu prend à la maison d’un avare, il prend son coffre-fort et le porte dans son jardin d’où il ne l’aurait pas remué pour dix fois la somme qu’il contenait.

C’est que, dans le désordre, toutes les forces de la machine sont conspirantes, et que dans l’état sain ou tranquille elles agissent isolées : il n’y a que l’action ou des bras, ou des jambes, ou des cuisses, ou des flancs.

Dans l’état sain et tranquille l’animal craint de se blesser, il ne connaît pas cette frayeur dans la passion ou la maladie.

Carnivores

Haleine, urine, excréments fétides. Chair corruptible et désagréable à l’odorat et au goût.

Lait des herbivores sain et balsamique. Il n’en est pas ainsi des autres.

Graisse des herbivores, ferme, et se fige facilement ; des autres, au contraire, molle et putrescible.

Carnivore plus malsain et plus cruel ; son caractère se rapproche de la bête féroce.

Carnivores vivent isolés.

Herbivores en troupeaux.

Habits malsains et contraires à nature.

La jeune fille poursuit un papillon, le jeune garçon gravit sur un arbre.

L’homme sans physionomie n’est rien. Celui qui a l’air d’un homme de bien l’est peut-être. Celui qui a l’air vil ou méchant l’est toujours.

L’homme d’esprit peut avoir l’air d’un sot ; un sot n’a jamais l’air d’un homme d’esprit.

L’écoulement périodique est une sécrétion-excrétion.

Il n’est pas nécessaire que ce qu’on appelle le germe ressemble à l’animal, c’est un point de conformation donné dont le développement produit un tel animal.

Les cornus en naissant n’ont point de cornes ; elles viennent nécessairement avec le temps, et ainsi de toutes les autres parties et organes qui les ont précédées ; ainsi des poils, de la barbe ; ainsi des testicules ; ainsi du fluide séminal.

Le renne, dont la femelle a des cornes, en reprend, malgré la castration.

Le bœuf ne perd jamais ses cornes, elles font partie de lui.

Animal ; forme déterminée par causes intérieures et extérieures qui, diverses, doivent produire des animaux divers.

Gestation d’autant plus courte que les ventrées sont plus considérables.

À quoi servent les phalanges au pied fourchu du pourceau ?

À quoi servent les mamelles au mâle ?

Amour en l’homme, constant, parce que ses besoins sont en toute saison également satisfaits. Il n’en est pas ainsi des animaux ; leur amour succède toujours au temps où ils ont surabondé en nourriture. L’extrême agitation des oiseaux est la cause de l’exception.

Les animaux vigoureux font plus de mâles que de femelles ; sans quoi, grand inconvénient.

Sensibilité

Qualité propre à l’animal qui l’avertit des rapports qui sont entre lui et tout ce qui l’environne.

Mais toutes les parties de l’animal n’ont pas cette qualité. Il n’y a que les nerfs qui l’aient par eux-mêmes.

Les doigts l’ont relativement aux houppes nerveuses.

Les enveloppes des nerfs l’ont accidentellement.

Aponévroses, membranes, tendons sont insensibles.

Je serais tenté de croire que la sensibilité n’est autre chose que le mouvement de la substance animale, son corollaire, car si j’y introduis la torpeur, la cessation de mouvement dans un point, la sensibilité cesse.

La sensibilité est plus puissante que la volonté.

La sensibilité de la matière est la vie propre aux organes.

La preuve en est évidente dans la vipère écorchée et sans tête, dans les tronçons de l’anguille et d’autres poissons, dans la couleuvre morcelée, dans les membres séparés du corps et palpitants, dans la contraction du cœur piqué.

Je ne crois pas au manque absolu de sensibilité d’une partie animale quelconque.

Un organe intermédiaire non sensible entre deux organes sensibles et vivants, arrêterait la sensation, et deviendrait dans le système, corps étranger ; ce serait comme deux animaux couplés par une corde.

Que serait-ce qu’un métier de la manufacture de Lyon si l’ouvrier et la tireuse faisaient un tout sensible avec la trame, la chaîne, le sample et la gavassine ?

Ce serait un animal semblable à l’araignée qui pense, qui veut, qui se nourrit, se reproduit et ourdit sa toile.

De la sensibilité et de la loi de continuité dans la contexture animale

Sans ces deux qualités l’animal ne peut être un.

Aussitôt que vous avez supposé la molécule sensible, vous avez la raison d’une infinité de divers effets ou touchers.

Il y a l’infinie variété des chocs relatifs à la masse.

Il y a l’infinie variété des chocs relatifs à la vitesse.

Il y a l’infinie variété d’une qualité physique.

Il y a l’infinie variété des effets combinés, d’une seconde, d’une troisième, d’une multitude de qualités physiques.

Et tous ces infinis se combinent encore avec la variété infinie des organes et peut-être des parties de l’animal.

Quoi ! une huître pourrait éprouver toutes ces sensations ? Non toutes, mais un assez grand nombre, sans compter celles qui naissent d’elle-même et qui sortent du fond de sa propre organisation.

Mais n’y a-t-il pas dans tous ces touchers bien des indiscernables ? Beaucoup, il en reste cependant plus que la langue la plus féconde n’en peut distinguer. L’idiome n’offre que quelques degrés de comparaison pour un effet qui passe, par une suite ininterrompue, depuis la moindre quantité appréciable jusqu’à son extrême intensité.

Prenez l’animal, analysez-le, ôtez-lui toutes ses modifications l’une après l’autre, et vous le réduirez à une molécule qui aura longueur, largeur, profondeur et sensibilité.

Supprimez la sensibilité, il ne vous restera que la molécule inerte.

Mais si vous commencez par soustraire les trois dimensions, la sensibilité disparaît.

On en viendra quelque jour à démontrer que la sensibilité ou le toucher est un sens commun à tous les êtres. Il y a déjà des phénomènes qui y conduisent. Alors la matière en général aura cinq ou six propriétés essentielles, la force morte ou vive, la longueur, la largeur, la profondeur, l’impénétrabilité et la sensibilité.

J’aurais ajouté l’attraction, si ce n’était peut-être une conséquence du mouvement ou de la force.

Irritabilité

Certaines parties du corps conservent après la mort, plus ou moins longtemps, leur irritabilité ou vie propre.

Leur dernière décomposition en vers, etc.

Le cœur et les intestins longtemps irritables.

Cette force d’irritabilité est différente de toute autre force connue, c’est la vie, la sensibilité. Elle est propre à la fibre molle ; elle s’affaiblit et s’éteint dans la fibre qui se racornit ; elle est plus grande dans la fibre unie au corps que dans la fibre qui en est séparée.

Cette force ne dépend ni de la pesanteur, ni de l’attraction, ni de l’élasticité.

Dans l’animal mort, la moelle épinière et le nerf irrités, le muscle se convulse.

Si le muscle est lié, ou si le lien de la moelle épinière d’où le nerf émane est comprimé, le muscle s’affaisse et la longueur succède.

Des stimulants

Il y a les stimulants physiques, il y a les stimulants moraux qui n’ont guère moins de puissance que les premiers.

Les stimulants moraux ôtent l’appétit à toute une compagnie.

La peur fait cesser le hoquet.

Un récit produit le dégoût, même le vomissement.

Toutes les sortes de désirs agissent sur les glandes salivaires, mais surtout le désir voluptueux.

Le chatouillement à la plante des pieds met en tressaillement tout le système nerveux. Un caustique ne produit qu’une sensation locale.

Les convulsions occasionnées par un stimulant violent sont intermittentes ; il y a un instant d’intensité, et un instant de relaxation ; cependant l’action du stimulant est constante. Mais cette dernière proposition peut être inexacte.

Après une stimulation violente il y a un frémissement général.

Ce frémissement est une suite de petites crispations et de petits relâches qui secouent le crible général et en expriment la sueur.

De l’homme

Un assez habile homme a commencé son ouvrage par ces mots : L’homme, comme tout animal, est composé de deux substancesdistinctes, l’âme et le corps. Si quelqu’un nie cette proposition, ce n’est pas pour lui que j’écris.

J’ai pensé fermer le livre. Eh ! ridicule écrivain, si j’admets une fois ces deux substances distinctes, tu n’as plus rien à m’apprendre. Car tu ne sais ce que c’est que celle que tu appelles âme, moins encore comment elles sont unies, et pas plus comment elles agissent réciproquement l’une sur l’autre.

L’homme double, animal et homme

Un musicien est au clavecin ; il cause avec son voisin, la conversation l’intéresse, il oublie qu’il fait sa partie dans un concert, cependant ses yeux, son oreille et ses doigts n’en sont pas moins d’accord entre eux ; pas une fausse note, pas un accord déplacé, pas un silence oublié, pas la moindre faute contre le mouvement, le goût et la mesure. La conversation cesse, notre musicien revient à sa partition, sa tête est perdue il ne sait où il en est ; l’homme est troublé, l’animal est dérouté. Si la distraction de l’homme eût duré quelques minutes de plus, l’animal eût suivi le concert jusqu’à la fin sans que l’homme s’en fût douté.

Voilà donc des organes sensibles et vivants, accouplés, sympathisants, soit par habitude, soit naturellement, et concourant à un même but sans la participation de l’animal entier.

De la perfectibilité de l’homme

La perfectibilité de l’homme naît de la faiblesse de ses sens dont aucun ne prédomine sur l’organe de la raison.

S’il avait le nez du chien, il flairerait toujours ; l’œil de l’aigle, il ne cesserait de regarder ; l’oreille de la taupe, ce serait un être écoutant.

Bêtise de certains défenseurs des causes finales

Ils disent : Voyez l’Homme, etc.

De quoi parlent-ils ? Est-ce de l’homme réel ou de l’homme idéal ?

Ce ne peut être de l’homme réel, car il n’y a pas sur toute la surface de la terre un seul homme parfaitement constitué, parfaitement sain.

L’espèce humaine n’est donc qu’un amas d’individus plus ou moins contrefaits, plus ou moins malades. Or, quel éloge peut-on tirer de là en faveur du prétendu Créateur ? Ce n’est pas à l’éloge, c’est à une apologie qu’il faut penser.

Ce que je dis de l’homme, il n’y a pas un seul animal, une seule plante, un seul minéral dont je n’en puisse dire autant.

Si le tout actuel est une conséquence nécessaire de son état antérieur, il n’y a rien à dire. Si l’on en veut faire le chef-d’œuvre d’un Être infiniment sage et tout-puissant, cela n’a pas le sens commun.

Que font donc ces préconiseurs ? Ils félicitent la Providence de ce qu’elle n’a pas fait ; ils supposent que tout est bien, tandis que, relativement à nos idées de perfection, tout est mal.

Pour qu’une machine prouve un ouvrier est-il besoin qu’elle soit parfaite ? Assurément, si l’ouvrier est parfait.

De l’homme abstrait et de l’homme réel

Deux philosophes disputent sans s’entendre ; par exemple, sur la liberté de l’homme.

L’un dit : l’homme est libre, je le sens. L’autre dit : l’homme n’est pas libre, je le sens.

Le premier parle de l’homme abstrait, de l’homme qui n’est mû par aucun motif, de l’homme qui n’existe que dans le sommeil, ou dans l’entendement du disputeur.

L’autre parle de l’homme réel, agissant, occupé et mû.

Histoire expérimentale de celui-ci. Je le suis et je l’examine.