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Extrait : "Pendant ma longue proscription, quelques amis zélés avaient imprimé cette pièce, uniquement pour prévenir l'abus d'une contrefaçon infidèle, furtive, et prise à la volée pendant les représentations. Mais ces amis eux-mêmes, pour éviter d'être froissés par les agents de la Terreur, s'ils eussent laissé leurs vrais titres aux personnages espagnols (car alors tout était péril), se crurent obligés de les défigurer, d'altérer même leur langage, et de..."
À PROPOS DES ÉDITIONS LIGARAN
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Seitenzahl: 103
Veröffentlichungsjahr: 2015
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EAN : 9782335091731
©Ligaran 2015
Cette Pièce n’aurait pas été imprimée, au moins dans ce moment, si de misérables Contrefacteurs n’en avaient pas annoncé une édition subreptice. Les amis de l’Auteur ont cru devoir la prévenir ; et pour épargner au Public une édition vicieuse, faite d’après une copie informe, ils ont pris sur eux d’en donner une correcte, et de la publier avant l’époque déterminée par l’Auteur lui-même. L’usage auquel il en destinait le produit a été pour eux une considération de plus, et en serait une nouvelle de poursuivre les Contrefacteurs avec la rigueur autorisée par la loi.
Il a fallu peu de travail pour mettre cette Pièce entièrement à l’ordre du jour. La manière connue de l’Auteur, trop hardie sous le règne du despotisme, respirait d’avance l’amour de la philosophie ; il avait pressenti le règne de la liberté : cependant le peu de mots qui auraient pu effaroucher des oreilles nouvellement républicaines, en ont été soigneusement retranchés ; et comme cet ouvrage contient une excellente leçon de mœurs, il ne pouvait être offert au Public dans un moment plus favorable que celui où notre Gouvernement s’établit sur les bases de la vertu.
ALMAVIVA, d’une famille noble, mais sans orgueil.
Mme ALMAVIVA, très malheureuse, et d’une piété angélique.
LÉON, leur fils, jeune homme épris de la liberté, comme toutes les âmes ardentes et neuves.
FLORESTINE, pupille et filleule d’Almaviva, jeune personne d’une grande sensibilité.
BÉGEARSS, Irlandais, Major d’infanterie espagnole, ancien secrétaire d’Almaviva, homme très profond, et grand machinateur d’intrigues, fomentant le trouble avec art.
FIGARO, valet de chambre, chirurgien et homme de confiance d’Almaviva, homme formé par l’expérience du monde et des évènements.
SUZANNE, première Camariste de madame Almaviva, épouse de Figaro, excellente femme, bien attachée à sa Maîtresse, et revenue des illusions du monde.
M. FAL, Notaire d’Almaviva, homme exact et très honnête.
GUILLAUME, Allemand, valet de M. Bégearss, homme trop simple pour un tel Maître.
La scène est à Paris, dans la maison occupée par la famille d’Almaviva, vers la fin de 1790.
Le Théâtre représente un Salon fort orné.
Que Madame s’éveille et sonne, mon triste ouvrage est achevé. Elle s’assied avec abandon. À peine il est neuf heures, et je me sens déjà d’une fatigue… Son dernier ordre, en la couchant, m’a gâté ma nuit toute entière. « Demain, Suzanne, au point du jour, fais apporter beaucoup de fleurs, et garnis-en mes cabinets. – Au portier ; que de la journée il n’entre personne pour moi. – Tu me formeras un bouquet de fleurs noires et rouge foncé ; un seul œillet blanc au milieu. »
Le voilà. – Pauvre Maîtresse ! Elle pleurait !… Pour qui ce méange d’apprêts ?… Eeeh ! si nous étions en Espagne, ce serait aujourd’hui la fête de son fils Léon… Avec mystère. et d’un autre homme qui n’est plus ! Elle regarde les fleurs. Les couleurs du sang et du deuil ! Elle soupire. Ce cœur blessé ne guérira jamais ! – Attachons-le d’un crêpe noir, puisque c’est là sa triste fantaisie. Elle attache le bouquet.
Suzanne, Figaro regardant avec mystère.
Cette Scène doit marcher très chaudement.
Entre donc, Figaro ! tu prends l’air d’un amant en bonne fortune chez ta femme !
Peut-on vous parler librement ?
Oui, si la porte reste ouverte.
Eh ! pourquoi cette précaution ?
C’est que l’homme dont il s’agit peut entrer d’un moment à l’autre.
Honoré Tartuffe Bégearss ?
Et c’est un rendez-vous donné. – Ne t’accoutumes donc pas à charger son nom d’épithètes : cela peut se redire et nuire à tes projets.
Il s’appelle Honoré !
Mais non pas Tartuffe.
Morbleu !
Tu as le ton bien soucieux !
Furieux. Elle se lève. Est-ce là notre convention ?
Non, mais je crois qu’il se méfie de moi ; il ne me dit plus rien. J’ai peur, en vérité, qu’il ne nous croie raccommodés.
Feignons toujours d’être brouillés.
Mais, qu’as-tu donc appris qui te donne une telle humeur ?
Recordons-nous d’abord sur les principes. Depuis que nous sommes à Paris, et que M. Almaviva… (il faut bien lui donner son nom, puisqu’il ne souffre plus qu’on l’appelle Monseigneur.)
C’est beau ! et Madame sort sans livrée ! Nous avons l’air de tout le monde !
Aimeriez-vous mieux n’avoir l’air de personne ? – Depuis, dis-je, qu’il a perdu, par une querelle de jeu, son libertin de fils aîné, tu sais comment tout a changé pour nous ; comme l’humeur d’Almaviva est devenue sombre et terrible…
Tu n’es pas mal bourru non plus !
Comme son autre fils paraît lui devenir odieux…
Que trop !
Comme sa femme est malheureuse…
C’est un grand crime qu’il commet.
Comme il redouble de tendresse pour sa pupille Florestine ; comme il fait surtout des efforts pour dénaturer sa fortune…
Sais-tu, mon pauvre Figaro, que tu commences à radoter ? Si je sais tout cela, qu’est-il besoin de me le dire ?
Encore faut-il bien s’expliquer pour s’assurer que l’on s’entend. N’est-il pas avéré pour nous que cet astucieux Irlandais, le fléau de cette famille, après avoir chiffré comme secrétaire, quelques ambassades auprès d’Almaviva, s’est emparé de leurs secrets à tous ; que ce profond machinateur a su les entraîner de l’indolente Espagne en ce pays, remué de fond en comble, espérant y mieux profiter de la désunion où ils vivent, pour séparer le mari de la femme, épouser la jeune pupille, et envahir les biens d’une maison qui se délabre ?
Enfin, moi ! que puis-je à cela ?
Ne jamais le perdre de vue ; me mettre au cours de ses démarches.
Mais, je te rends tout ce qu’il dit.
Oh ! ce qu’il dit n’est que ce qu’il veut dire : mais, saisir en parlant les mots qui lui échappent, le moindre geste, un mouvement ; c’est là qu’est le secret de l’âme. Il se trame ici quelque horreur : il faut qu’il s’en croie assuré ; car je lui trouve un air… plus faux, plus perfide et plus fat ; cet air des sots de ce pays, triomphant avant le succès ! Ne peux-tu être aussi perfide que lui ? l’amadouer, le bercer d’espoir ? quoi qu’il demande, ne le pas refuser ?
C’est beaucoup !
Tout est bien, et tout marche au but, si j’en suis promptement instruit.
Et si j’en instruis ma maîtresse ?
Il n’est pas temps encore ; ils sont tous subjugués par lui. On ne te croirait pas ; tu nous perdrais sans les sauver. Suis-le partout, comme son ombre… et moi je l’épie au-dehors…
Mon ami, je t’ai dit qu’il se défie de moi ; et s’il nous surprenait ensemble… Le voilà qui descend… Ferme !… Ayons l’air de quereller bien fort.
Elle pose le bouquet sur la table.
Moi, je ne le veux pas. Que je t’y prenne une autre fois !…
Certes !… oui, je te crains beaucoup !
Ah !… tu me crains !… Tiens, insolente.
Des coups à moi ! chez ma maîtresse !
Le major Bégearss, Figaro, Suzanne
Eh ! mais quel bruit ! Depuis une heure j’entends disputer de chez moi…
Depuis une heure.
Je sors ; je trouve une femme éplorée…
Le malheureux lève la main sur moi !
Ah l’horreur ! Monsieur Figaro ! un garant homme a-t-il jamais frappé une personne de l’autre sexe ?
Eh moi bleu ! Monsieur, laissez-nous ! Je ne suis point un galant homme ; et cette femme n’est point une personne de l’autre sexe : elle est ma femme ; une insolente qui se mêle dans des intrigues, et qui croit pouvoir me braver, parce qu’elle a ici des gens qui la soutiennent. Oh ! j’entends la morigéner…
Est-on brutal à cet excès ?
Monsieur, si je prends un arbitre de mes procédés envers elle, ce sera moins vous que tout autre ; et vous savez trop bien pourquoi !
Vous me manquez, Monsieur ! je vais m’en plaindre à votre maître.
Vous manquer ! moi ! c’est impossible.
Il sort.
BÉGEARSS, SUZANNE
Mon enfant, je n’en reviens point ! Quel est donc le sujet de son emportement ?
Il m’est venu chercher querelle ; il m’a dit cent horreurs de vous. Il me défendait de vous voir, de jamais oser vous parler. J’ai pris votre parti ; la dispute s’est échauffée ; elle a fini par un soufflet… Voilà le premier de sa vie : mais moi, je veux me séparer. Vous l’avez vu…
Laissons cela. – Quelque léger nuage altérait ma confiance en toi ; mais ce débat l’a dissipé.
Sont-ce là vos consolations ?
Vas ! c’est moi qui t’en vengerai. Il est bien temps que je m’acquitte envers toi, ma pauvre Suzanne ! Pour commencer, apprends un grand secret… Mais, sommes-nous bien sûrs que la porte est fermée ? Suzanne y va voir.Il dit à part : Ah ! si je puis avoir seulement trois minutes l’écrin au double fond que j’ai fait faire à sa maîtresse, où sont ces importantes lettres…
Eh bien ! ce grand secret ?
Sers ton ami ; ton sort devient superbe. J’épouse Florestine ; c’est un point arrêté : son père le veut absolument.
Qui, son père ?
Eh, d’où sors-tu donc ? Règle certaine, mon enfant : lorsque telle orpheline arrive chez quelqu’un, comme pupille, ou bien comme filleule, elle est toujours la fille du mari. D’un ton sérieux. Bref, je puis l’épouser… si tu me la rends favorable.
Oh ! mais Léon en est très amoureux !
Leur fils… je l’en détacherai.
Ha !… Elle aussi, elle est fort éprise !
De lui ?
Oui.
Je l’en guérirai.
Ha ! ha ! Madame, qui le sait, donne les mains à leur union !
Nous la ferons changer d’avis.
Aussi ! Mais Figaro, si je le vois bien, est le confident du jeune homme.
C’est le moindre de mes soucis. Ne serais-tu pas aise d’en être délivrée ?
S’il ne lui arrive aucun mal.
Fi donc ! la seule idée flétrit l’austère probité. Mieux instruits sur leurs intérêts, ce sont eux-mêmes qui changeront d’avis.
Si vous faites cela, Monsieur…
Je le ferai. – Tu sens que l’amour n’est pour rien dans un pareil arrangement. L’air caressant. Je n’ai jamais vraiment aimé que toi.
Ah ! si Madame avait voulu…
Je l’aurais consolée, sans doute ; mais elle a dédaigné mes vœux… Suivant le plan d’Almaviva, sa femme va au couvent.
Je ne me prête à rien contre elle.
Que diable ! il la sert dans ses goûts. Je t’entends toujours dire : Ah ! t’es un ange sur la terre !
Eh bien ! faut-il la tourmenter ?
Non, mais du moins la rapprocher de ce ciel, la patrie des anges, dont elle est un moment tombée… Et puisque dans ces nouvelles et merveilleuses lois le divorce s’est établi…
Il divorcerait !
S’il peut.
Ah les scélérats d’hommes ! quand on les étranglerait tous !…
J’aime à croire que tu m’en exceptes ?
Ma foi, pas trop.
J’adore ta franche colère : elle met à jour ton bon cœur. Quant au jeune amoureux, il le destine à voyager… longtemps. – Le Figaro, homme expérimenté, sera son discret conducteur. Il lui prend la main. Et voici ce qui nous concerne : Almaviva, Florestine et moi, habiterons le même hôtel ; et la chère Suzanne, à nous, chargée de toute la confiance, sera notre surintendant, commandera la domesticité, aura la grande main surtout. Plus de mari, plus de soufflets, plus de brutal contradicteur : des jours filés d’or et de soie, et la vie la plus fortunée !…
À vos cajoleries, je vois que vous voulez que je vous serve auprès de Florestine ?