La chaîne d'or - Théophile Gautier - E-Book

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Théophile Gautier

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Beschreibung

Au temps de Périclès, Plangon la Milésienne et Bacchide de Samos « sont sans contredit les deux plus ravissantes hétaïres de toute la Grèce. » Mais Plangon apprend que le jeune Ctésias qu'elle aime à la folie a autrefois été l'amant de sa rivale Bacchide.

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La chaîne d'or

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La chaîne d'or

Théophile Gautier

-La chaîne d'or

Plangon la Milésienne fut en son temps une des femmes les plus à la mode d’Athènes. Il n’était bruit que d’elle dans la ville ; pontifes, archontes, généraux, satrapes, petits-maîtres, jeunes patriciens, fils de famille, tout le monde en raffolait. Sa beauté, semblable à celle d’Hélène aimée de Pâris, excitait l’admiration et les désirs des vieillards moroses et regretteurs du temps passé. En effet, rien n’était plus beau que Plangon, et je ne sais pourquoi Vénus, qui fut jalouse de Psyché, ne l’a pas été de notre Milésienne. Peut-être les nombreuses couronnes de roses et de tilleul, les sacrifices de colombes et de moineaux, les libations de vin de Crète offerts par Plangon à la coquette déesse, ont-ils détourné son courroux et suspendu sa vengeance ; toujours est-il que personne n’eut de plus heureuses amours que Plangon la Milésienne, surnommée Pasiphile.

Le ciseau de Cléomène ou le pinceau d’Apelles, fils d’Euphranor, pourraient seuls donner une idée de l’exquise perfection des formes de Plangon. Qui dira la belle ligne ovale de son visage, son front bas et poli comme l’ivoire, son nez droit, sa bouche ronde et petite, son menton bombé, ses joues aux pommettes aplaties, ses yeux aux coins allongés qui brillaient comme deux astres jumeaux entre deux étroites paupières, sous un sourcil délicatement effilé à ses pointes ? À quoi comparer les ondes crespelées de ses cheveux, si ce n’est à l’or, roi des métaux, et au soleil, à l’heure où le poitrail de ses coursiers plonge déjà dans l’humide litière de l’Océan ? Quelle mortelle eut jamais des pieds aussi parfaits ? Thétis elle-même, à qui le vieux Mélésigène a donné l’épithète des pieds d’argent, ne pourrait soutenir la comparaison pour la petitesse et la blancheur.

Ses bras étaient ronds et purs comme ceux d’Hébé, la déesse aux bras de neige ; la coupe dans laquelle Hébé sert l’ambroisie aux dieux avait servi de moule pour sa gorge, et les mains si vantées de l’Aurore ressemblaient, à côté des siennes, aux mains de quelque esclave employée à des travaux pénibles.

Après cette description, vous ne serez pas surpris que le seuil de Plangon fût plus adoré qu’un autel de la grande déesse ; toutes les nuits des amants plaintifs venaient huiler les jambages de la porte et les degrés de marbre avec les essences et les parfums les plus précieux ; ce n’étaient que guirlandes et couronnes tressées de bandelettes, rouleaux de papyrus et tablettes de cire avec des distiques, des élégies et des épigrammes. Il fallait tous les matins déblayer la porte pour l’ouvrir, comme l’on fait aux régions de la Scythie, quand la neige tombée la nuit a obstrué le seuil des maisons.

Plangon, dans toute cette foule, prenait les plus riches et les plus beaux, les plus beaux de préférence. Un archonte durait huit jours, un grand pontife quinze jours ; il fallait être roi, satrape ou tyran pour aller jusqu’au bout du mois. Leur fortune bue, elle les faisait jeter dehors par les épaules, aussi dénudés et mal en point que des philosophes cyniques ; car Plangon, nous avons oublié de le dire, n’était ni une noble et chaste matrone, ni une jeune vierge dansant la bibase [Sorte de danse bachique, chez les Spartiates.] aux fêtes de Diane, mais tout simplement une esclave affranchie exerçant le métier d’hétaïre.

Depuis quelque temps Plangon paraissait moins dans les théories, les fêtes publiques et les promenades. Elle ne se livrait pas à la ruine des satrapes avec le même acharnement, et les dariques de Pharnabaze, d’Artaban et de Tissaphernes s’étonnaient de rester dans les coffres de leurs maîtres. Plangon ne sortait plus que pour aller au bain, en litière fermée, soigneusement voilée, comme une honnête femme ; Plangon n’allait plus souper chez les jeunes débauchés et chanter des hymnes à Bacchus, le père de Joie, en s’accompagnant sur la lyre. Elle avait récemment refusé une invitation d’Alcibiade. L’alarme se répandait parmi les merveilleux d’Athènes. Quoi ! Plangon, la belle Plangon, notre amour, notre idole, la reine des orgies ; Plangon qui danse si bien au son des crotales, et qui tord ses flancs lascifs avec tant de grâce et de volupté sous le feu des lampes de fête ; Plangon, au sourire étincelant, à la repartie brusque et mordante ; l’œil, la fleur, la perle des bonnes filles ; Plangon de Milet, Plangon se range, n’a plus que trois amants à la fois, reste chez elle et devient vertueuse comme une femme laide ! Par Hercule ! c’est étrange, et voilà qui déroute toutes les conjectures ! Qui donnera le ton ? qui décidera de la mode ? Dieux immortels ! qui pourra jamais remplacer Plangon la jeune, Plangon la folle, Plangon la charmante ?