La Commune de 1871 - Jules Guesde - E-Book

La Commune de 1871 E-Book

Jules Guesde

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Extrait : "Pas plus que le successeur de M. Thiers, M. de Mac-Mahon, nous n'ignorons pas que dans toutes les dépêches officielles qui, du 18 mars au 31 mai 1871, se sont étalées sur tous les murs des 36000 communes de France, les communalistes de Paris ont été systématiquement qualifiés de communistes. Pour notre part, le terme de communiste n'a rien en lui-même qui nous effraie."À PROPOS DES ÉDITIONS LIGARAN : Les éditions LIGARAN proposent des versions numériques de grands classiques de la littérature ainsi que des livres rares, dans les domaines suivants : • Fiction : roman, poésie, théâtre, jeunesse, policier, libertin. • Non fiction : histoire, essais, biographies, pratiques.

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Note de l’éditeur

Nous rééditons aujourd’hui quatre des meilleurs articles que Jules Guesde a consacrés à la Commune de Paris. Les trois premiers sont du début de sa merveilleuse carrière de propagandiste socialiste.

Dans le premier : Un peu d’Histoire, paru en 1879 dans la Révolution française, Guesde, sous la forme incisive et tranchante qui lui est familière, comparant la révolution bourgeoise de 1789 à la révolution prolétarienne de 1871, n’a aucune peine à établir l’inanité des reproches faits à la grande insurrection ouvrière, qui n’eut souvent que le tort de se montrer trop généreuse pour ses adversaires.

Dans le deuxième article : Le 18 mars (Égalité, 18 mars 1879), l’auteur nous indique quelques-unes des réalisations des communards.

Dans le 18 mars en province, que publia en 1877 le périodique socialiste allemand Die Zukunft (l’Avenir), Guesde nous rapporte des faits trop peu connus concernant les répercussions nombreuses qu’eut sur le prolétariat français l’activité révolutionnaire des ouvriers parisiens. Guesde nous apporte ici des renseignements « vécus » : on se souvient, en effet, du rôle actif qu’il joua, en 1871, dans l’érection de la Commune de Montpellier. Enfin, dans le dernier article, écrit pour le 21° anniversaire de la Commune (Le Socialiste 20 mars 1892), le leader du marxisme français insiste sur la nécessité de la conquête révolutionnaire du pouvoir politique.

Nous sommes convaincus que tous les travailleurs nous sauront gré, aux heures graves que nous traversons, de leur avoir remis en mémoire, pour le 65° anniversaire de la Commune, quelques-unes des meilleures pages de celui qui fut, en France, il y a un demi-siècle, l’infatigable pionnier de l’idée socialiste.

Nous avons jugé utile de compléter cet opuscule par un Index des noms cités, nombre de ceux-ci, vu le recul des temps, étant insuffisamment connus.

Un peu d’histoire

Dans l’« exposé des motifs » de la contrefaçon des députés et le Sénat, les « fédérés » de 1871 d’amnistie qui vient d’être votée par la Chambre ne sont pas seulement représentés comme ayant « compromis l’existence de la République » – défendue et sauvée apparemment par la majorité des Baragnon, des Buffet et des de Broglie, qui s’apprêtaient dès lors à faire le 24 mai.

Lorsqu’il y est fait mention du 18 mars, c’est comme d’une « insurrection que son nom, ses moyens d’action, les actes accomplis sous les yeux de l’étranger, son but, tout enfin dénonce comme l’un des crimes les plus grands qui aient été tentés contre la souveraineté nationale ».

À vrai dire, peu nous importe ce que pense d’une révolution, dont l’histoire est tout entière à faire, un gouvernement dont les membres ont tous ou presque tous voté des « remerciements aux armées de terre et de mer » qui venaient de fusiller Duval, Millière, Tony-Moilin, etc. Mais pour Paris qui nous lit, pour la France et l’Europe dont le siège n’est pas fait, il ne sera peut-être pas inutile d’étudier successivement le nom, les moyens d’action, les actes et le but de cette commune, aussi fusillée et calomniée que peu connue.

Ce que faisant – est-il besoin de le dire ? – nous n’entendons nullement tenter une apologie, même indirecte, de la plus formidable explosion révolutionnaire de tous les temps, mais simplement élucider un point de fait dont l’importance peut être mesurée aux 1 300 et quelques Français que sa méconnaissance va maintenir hors de France ou dans les silos néo-calédoniens.

La Commune – Son nom

Pas plus que le successeur de M. Thiers, M. de Mac-Mahon, nous n’ignorons pas que dans toutes les dépêches officielles qui, du 18 mars au 31 mai 1871, se sont étalées sur tous les murs des 36 000 communes de France, les communalistes de Paris ont été systématiquement qualifiés de communistes. Pour notre part, le terme de communiste n’a rien en lui-même qui nous effraie. Communiste était Platon dans sa « République », qui vaut bien celle d’aujourd’hui. Communistes, les premières églises chrétiennes, dont le catholicisme qui prétend les continuer n’est que l’exploitation. Communistes, Campanella dans sa Cité du soleil ; Thomas Morus dans son Utopie ; Babeuf et ses « complices » dans le Manifeste et la conjuration des Égaux ; Blanqui dans ses héroïques prises d’armes, et Cabet dans ses généreuses et folles tentatives de rénovation sociale aux déserts transatlantiques. On ne saurait, d’autre part, indiquer aucune société, si individualiste soit-elle, qui ne renferme une certaine somme de communisme, ne fût-ce que les routes, les promenades publiques, les phares, etc…

Mais la vérité est qu’il ne s’agissait pas, en 1871, de communisme, mais de commune – ce qui est bien différent ; et que, linguistiquement parlant, la commune affranchie, libre, maîtresse de ses écoles, de sa police, de son budget, de son armée et de son administration, ne fait, ne peut faire de ses défenseurs – défenseurs à coups de fusil et à coups de bulletin – que des communalistes.

Libertés communales, franchises communales, administration communale, autant de précédents terminologiques qui ne laissent planer aucun doute sur la validité et la portée de la rectification que nous devons tout d’abord faire au lapsus calami conscient et voulu de cet académicien qu’était M. Thiers.

Autant, en effet, le mot de communisme épouvante à bon droit notre bourgeoisie qui monopolise les avantages sociaux et n’entend « mettre en commun » que les charges sociales – impôts de sang et d’argent, que la noblesse d’avant 89 acquittait seule, au moins sous la forme de sang – autant le mot de « commune » n’éveille ou ne devrait éveiller chez elle que d’heureux et grands souvenirs.

N’est-ce pas comme commune que, dans tout le Moyen Âge, où elle n’était rien, elle s’est affirmée contre les seigneurs de la terre et de l’épée ? La commune, affranchie des redevances féodales, mise, insurrectionnellement ou par charte royale, à l’abri des brigandages seigneuriaux, a été, du XII° au XV° siècle, à la fois le refuge du tiers état et de son moyen d’action le plus puissant pour préparer son émancipation politique, qui devait être consommée, couronnée et consacrée par les derniers États généraux transformés révolutionnairement en Assemblée nationale constituante.

Il est vrai qu’entre les communes du Moyen Âge et la Commune de 1871, une autre Commune s’est produite, la Commune de Paris, de 1791, 92 et 93, et qu’à cette Commune intérimaire on est convenu d’attacher – depuis qu’elle a fait son œuvre et sauvé la Révolution – « les plus mauvais souvenirs de notre histoire ».

Mais ces souvenirs – qui pourrait exclusivement, mauvais pour les ordres privilégiés le contester ? – sont surtout, pour ne pas dire auxquels s’est substitué le tiers ; pour les émigrés de l’intérieur, dont l’énergie de cette Commune purgeait les Tuileries au 10 Août ; pour les émigrés de l’extérieur, soutenus par les armées de la coalition, qu’elle terrorisait aux journées de septembre, en attendant de les écraser sur le champ de bataille par son Bouchotte, le véritable « organisateur de la victoire » ; et pour les Vendéens et autres chouans, qui rentraient sous terre devant son « armée révolutionnaire ».

La grande Commune de Paris, qui a été l’âme, le moteur, la chaudière – si je puis m’exprimer ainsi – de la grande Convention admirée de Berryer lui-même, a été, de l’aveu de M. Thiers, le plus puissant instrument de salut de la Révolution qui a fait de la bourgeoisie la classe possédante, dirigeante et maîtresse d’aujourd’hui. Et, en admettant que ce fut à elle plus qu’aux communes des XIIe, XIIIe, XIVe et XVe, siècles que la Commune du 18 mars eût pris son nom, nos bourgeois-gouvernants de l’heure présente seraient les derniers à pouvoir lui faire un « crime » de ce nom.

Il n’en est d’ailleurs pas ainsi, et s’il s’est rencontré dans les élus du 28 mars 1871 des néo-jacobins et des néo-hébertistes, le plus grand nombre se rattachaient à la commune bourgeoise de l’ancien régime, qui, se présentant dans l’histoire comme l’instrument de l’affranchissement politique du tiers état, leur paraissait pouvoir et devoir devenir l’instrument de l’affranchissement économique du quatrième état ou prolétariat.

De là l’immobilité des bataillons fédérés le lendemain de leur victoire du 18 mars – ce que, parmi les vaincus, on a appelé plus tard « la grande faute du Comité central ». De là la proclamation du 6 avril aux départements, dans laquelle on lisait :

 

On vous trompe en vous disant que Paris veut gouverner la France et exercer une dictature qui serait la négation de la souveraineté nationale… Paris n’aspire qu’à conquérir ses franchises communales… Si la Commune de Paris est sortie du cercle de ses attributions, c’est à son grand regret, c’est pour répondre à l’état de guerre provoqué par le gouvernement de Versailles… Paris n’aspire qu’à se renfermer dans son autonomie, plein de respect pour les droits égaux des autres communes de France.