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Extrait : "Le Châtelet de Paris était une juridiction royale inférieure de la même classe que les autres prévôtés ; mais il siégeait dans la capitale même, recevait les appels des différentes châtellenies de la vicomté et ressortissait nûment du parlement. Aussi son importance et sa juridiction méritent-elles d'être étudiées14. Dans quelques villes, à Paris, à Orléans, à Montpellier, à Melun, les justices s'abritèrent toujours dans les châteaux forts."

À PROPOS DES ÉDITIONS LIGARAN :

Les éditions LIGARAN proposent des versions numériques de grands classiques de la littérature ainsi que des livres rares, dans les domaines suivants :

● Fiction : roman, poésie, théâtre, jeunesse, policier, libertin.
● Non fiction : histoire, essais, biographies, pratiques.

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Veröffentlichungsjahr: 2016

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Préface

L’histoire judiciaire de la France, avant 1789, est entièrement écrite dans les registres du Châtelet et des Parlements. Ces redoutables et vigilantes juridictions étaient, à Paris, assises en face l’une de l’autre, sur les deux rives de la Seine ; le fleuve baignait les murs de leurs sombres prisons, – à leurs audiences, tenues dès l’aube, se déroulaient toutes les disputes, toutes les contestations, toutes les iniquités, tous les crimes des provinces et de la capitale. – La royauté, la noblesse, le clergé, le peuple portaient devant les juges, avec une même confiance ou une même résignation, leurs doléances et leurs divisions. – Alors, en effet, à cette époque déjà si loin de nous, le seigneur renfermait « les manants sous portes et gonds, du ciel à la terre, maître dans tout son ressort, sur tête et sur col, vent et prairie, tout était à lui, forêt chenue, oiseau dans l’air, poisson dans l’eau, bête au buisson, cloche qui roule, onde qui coule. » – Le fonctionnement de tous ces droits, la perception de tant d’impôts si divers par leurs titres, si lourds par leur assiette, amenaient de fréquents procès, de nombreuses violences, dont la justice examinait avec soin les pièces et dont elle réprimait avec fermeté les excès. – Le Parlement de Paris (arrêt de 1779) punit, comme rebelles, les habitants d’une paroisse, qui avaient osé réclamer judiciairement des indemnités pour dégâts aux champs, commis sur leur territoire ! – Devant le Châtelet, c’était, – sous les yeux du Prévôt, et chaque jour, un défilé moins solennel peut-être, mais tout aussi ; varié : – sorciers, empoisonneurs, faux-monnayeurs, convulsionnaires, filles de débauche, coupeurs de bourse, – détrousseurs de grands chemins, mendiants, sacrilèges, journalistes, auteurs de libelles, pamphlets, et gazettes secrètes, faux témoins, accapareurs de blé, fauteurs ou complices de rapts et enlèvements expiaient leurs crimes, sévèrement, punis. – Le Châtelet s’occupait même, dans sa sollicitude, de la religion de ceux qu’il condamnait : « Salmon de Barselonne, Juif et depuis convers, sera pendu par les pieds, entre deux chiens, d’un costé et d’aultre. – Et après, fust exhorté de soy faire crestien et batisier pour sauver son âme et sur les quarreaulx du Chastellet, fût batisié par les chapelains de Saint-Jacques et furent ses parrains : ung examinateur, un sergent à cheval et la geôlière. » Le temporel et le spirituel étaient là ainsi, jusqu’à l’heure suprême, tristement réunis. – Si je ne m’abuse, il y a, dans tous ces textes, pour la plupart inédits et toujours plus éloquents à mes yeux que les détails fournis par la seule imagination, de bien précieux enseignements sur la marche incessante de notre justice nationale vers le progrès, vers la civilisation. – Les Archives de l’Empire, aujourd’hui si libéralement ouvertes au public m’ont surtout offert une riche moisson, puissé-je en avoir recueilli la féconde récolte. – Que l’on songe qu’il existe aux Archives : liasses, 6 368 ; registres, 2 313 ; cartons, 11 ; cahiers, 27 ; en tout : 8 719 pièces, toutes intéressantes à explorer. – Les procédures sont encore suivies, depuis le XIVe siècle jusqu’à nos jours, des documents qui les éclairent et des pièces à conviction, qui les accompagnent. Voici encore l’argent volé par un coupeur de bourse (6 livres, 6 deniers), puis le couteau de Ravaillac, ici, la machine infernale de Fieschi, là une chemise, toute raide et rouge du sang, que versaient les trente plaies de la duchesse de Choiseul-Praslin, pratiquées à l’aide d’un yatagan et d’un pistolet d’arçon, maniés avec une fureur aveugle ! – Plus loin, un immense tableau, trouvé dans l’église de Billon, représentant une allégorie politique, qui n’a pas peu Contribué, sans doute, à la condamnation de l’ordre des Jésuites, en 1762. – Enfin, un plan en relief de la Bastille, fait avec une pierre du monument par le citoyen Palloy, chargé de la démolition. (Décret du 21 juillet 1793).

J’espère que le public accueillera, avec une indulgente bienveillance, cette nouvelle édition du Châtelet de Paris et qu’il ne la jugera pas dépourvue d’intérêt si : j’ai pu, en m’inspirant de sources inexplorées, y faire revivre les traits, déjà bien effacés par le temps, de notre histoire judiciaire. Qualis ab incepto.

Paris, juin 1870.

En 1854, avec les modestes ressources d’une bibliothèque de province, dans la bonne ville de Laon, j’avais écrit un Essai sur le Châtelet de Paris. Ce travail, si incomplet qu’il fût, renfermait le germe de celui que je publie aujourd’hui sur le même sujet, et pour lequel des matériaux plus nombreux et plus féconds ont été largement mis à ma disposition.

Par cette étude, on pourra juger du double rôle administratif et juridique confié, dans la capitale, aux magistrats des anciens jours. Sur ma route, j’ai toujours recueilli, d’une main pieuse, les débris flottants et épars du passé judiciaire de la France, recherche immense qu’on peut poursuivre sans l’épuiser jamais ; et d’où l’on peut tirer, pour le temps où nous sommes, d’utiles enseignements. Cette fois, mon but a été d’indiquer les sources principales auxquelles on doit puiser pour édifier l’histoire, encore à faire, de nos anciennes justices. Aussi, comme je l’ai tenté déjà pour le Parlement de Paris, ai-je cité dans leur ordre chronologique les textes, en grande partie inédits, toujours plus éloquents à mes yeux que tous les détails fournis par la seule imagination. Les archives de l’empire m’ont surtout offert une riche moisson : puissé-je en avoir su profiter ! Ici, et tout d’abord, c’est pour moi un devoir de gratitude de remercier M. le comte de Laborde, directeur général, et les savants archivistes MM. Duclos, Edgard Boutaric et E. Campardon, pour le désintéressement empressé avec lequel ils ont mis à ma disposition, en véritables érudits, ces nombreux trésors dont ils possèdent si bien la clef.

J’espère que le public accueillera ce livre sur le Châtelet de Paris avec une indulgente équité, et qu’il ne le jugera pas tout à fait dépourvu d’intérêt, si j’ai su y faire revivre quelques traits, déjà bien effacés par le temps, de notre histoire judiciaire.

Introduction

Le Châtelet, cette justice royale ordinaire à Paris, y a tenu une grande, une glorieuse place, même à côté du Parlement et à son ombre. Il était, en effet, chargé de maintenir la sûreté dans la capitale, de prononcer sur de nombreux différends, de contenir et de réprimer présidialement les agitations populaires, de réglementer les corporations et métiers, de vérifier la sincérité des poids et mesures, de déjouer les fraudes du commerce, de défendre les mineurs et les femmes mariées, de contenir les empiétements des juridictions jalouses de leurs privilèges, de calmer la turbulence des écoliers qui confiaient au prévôt lui-même la conservation des statuts et des droits universitaires, antiques et immenses prérogatives instituées par nos rois, confiées par eux au patriotisme éclairé des magistrats ! Au moment de l’invasion anglaise et dans nos troubles civils, le Châtelet a compté ses héros, ses martyrs, dont l’histoire a précieusement gardé les noms : Jean Filleul, Martin Doublé, François Baudran, Guillaume Perdriau, Hugues Aubriot, Villiers de l’Isle-Adam, Jacques de Luxembourg, Tanneguy Duchâtel ; plus tard, Nicolas Poulain, Jean Tardif, Brisson, Jean Séguier, François Miron. Après la Fronde, cette équipée d’écoliers entre deux grands maîtres, Richelieu et Louis XIV, ce monarque comprend qu’il faut réunir l’administration au lieu de la diviser, et il permet (11 décembre 1666) aux officiers du Châtelet de faire pénétrer l’action de leur police par toute la ville, même dans les lieux privilégiés. Qu’importaient en effet les personnes, et combien leurs misérables questions s’effaçaient devant la hauteur du but poursuivi alors par le grand roi !

Une large et utile place était occupée par le Châtelet de Paris. Ses magistrats étaient, en dernier lieu, au nombre de cinquante-six. Auprès d’eux siégeaient quatre avocats du roi, un procureur du roi, huit substituts, un greffier en chef et ses commis, deux certificateurs de criées, un garde des décrets qui, après les avoir conservés vingt-quatre heures pour recevoir les observations, s’il y avait lieu, en délivrait les expéditions collationnées avec cette mention : ità est ; les scelleurs et chauffe-cire, un receveur des dépôts, un receveur des amendes, les huissiers audienciers, les huissiers priseurs, les huissiers d’escorte, les geôliers, le crieur assermenté, les quatre trompettes, le médecin juré, le chirurgien, la sage-femme, les soixante experts spéciaux, les deux cent vingt sergents à cheval. Ces derniers formaient une confrérie en l’honneur des glorieux corps de saint Martin et de saint Louis ; on chantait, chaque semaine, en l’église Sainte-Croix de la Bretonnerie, trois messes solennelles à diacre et à sous-diacre, l’une pour les trépassés, le lundi ; l’autre pour le Saint-Esprit, le jeudi, et enfin une troisième, le samedi, en l’honneur de Notre-Dame. Le personnel était nombreux et en harmonie complète avec l’étendue des attributions exercées.

Aussi la juridiction du Châtelet avait-elle prévention sur les justices seigneuriales de la ville et des faubourgs de Paris. Parfois contestée, elle fut maintenue même contre la puissante abbaye de Sainte-Geneviève (arrêt du 7 mars 1725) et contre l’abbaye de Saint-Germain-des-Prés (arrêt du 16 janvier 1739). Huit prévôtés ou châtellenies royales lui ressortissaient par appel : Montlhéry, Saint-Germain en Laye, Corbeil, Gonesse, la Ferté-Alais, Brie-Comte-Robert, Tournan et Chaillot.

Le service du Châtelet se faisait par les conseillers divisés en quatre colonnes, qui servaient tour à tour et par mois aux séances de la prévôté ou parc civil, du présidial, de la chambre du conseil et de la chambre criminelle.

Ces colonnes se réunissaient en différentes occasions dans la chambre du conseil, soit pour statuer sur certaines matières, soit pour les affaires de la compagnie, soit pour la réception de ses officiers. N’est-ce pas là le berceau de notre chambre du conseil ? Nous allons parcourir successivement les diverses fonctions du Châtelet, les attributions de ses magistrats, et le jurisconsulte y retrouvera sans peine l’origine des principales dispositions de nos lois sur la procédure civile. On verra, dans cette histoire, notre marche vers la civilisation, et l’on n’affectera pas de dédain pour nos pères, parce qu’ils n’ont pu jouir des conquêtes juridiques dont leurs efforts nous ont mis en possession. Ne soyons donc pas oublieux. Sans doute, la France doit à Napoléon, premier empereur, son admirable législation ; mais à côté des matériaux apportés par la Révolution de 1789, on peut compter encore les fécondes assises empruntées à nos vieilles institutions, tombées aujourd’hui en ruines, mais sur lesquelles nos codes modernes se sont élevés.

ISiège et juridiction du Châtelet
Son organisation

Le Châtelet de Paris était une juridiction royale inférieure de la même classe que les autres prévôtés ; mais il siégeait dans la capitale même, recevait les appels des différentes châtellenies de la vicomté et ressortissait nûment du parlement. Aussi son importance et sa juridiction méritent-elles d’être étudiées.

Dans quelques villes, à Paris, à Orléans, à Montpellier, à Melun, les justices s’abritèrent toujours dans les châteaux forts. Elles n’avaient, avec les châtellenies, rien de commun que le lieu même où elles siégeaient et d’où elles prirent souvent leur nom. À Paris, le château fort où la justice municipale tenait ses séances était situé à l’extrémité du pont joignant la Cité à la rive opposée. C’était, dans l’origine, une tour bâtie, après la conquête des Gaules, par Jules César, pour la défense de Lutèce. Il y avait là deux forts, le grand et le petit Châtelet. La justice de Paris se tenait dans le grand Châtelet. Une des salles porta longtemps le nom de Chambre de César, et on lisait encore en 1636, sur une tablette de marbre recouvrant un bureau, l’inscription suivante : Tributum Cœsaris, d’où on peut conclure que là se faisait le payement de l’impôt. Plusieurs empereurs romains, et surtout Julien, séjournèrent à Lutèce ; ils en augmentèrent les monuments ou en fondèrent de nouveaux.

Tous les rois continuèrent au Châtelet sa destination. Le 13 mai 1416, Charles VI fait abattre la boucherie qui était au-devant du grand Châtelet. Le 9 mai 1485, Charles VII ordonne que les confiscations, aubenages, seront employés aux réparations du Châtelet de Paris. Des lettres données par Charles VIII, à Rouen, le 23 novembre 1487, prescrivent l’accroissement du Chastellet de Paris, qui est ung des grans auditoires du royaume. Plusieurs maisons et édifices joignant aux murs du Châtelet de Paris n’étaient pas sûres pour la justice.

Parce que les criminels détenus aux prisons ont pu savoir des nouvelles par ceux qui demeurèrent ès dites maisons et édifices, ou par leurs gens et serviteurs, et que, par ces maisons tombant en ruines, ils ont pu s’échapper.

Il fut alors décidé que ces maisons seraient, à l’avenir, retenues pour l’accroissement de l’auditoire du Châtelet. Des lettres patentes à Blois, du 23 décembre 1506, attribuent le produit de toutes les amendes à la reconstruction du Châtelet, dont les audiences durent se tenir au Louvre. Il en résultait des inconvénients,

Tant à cause de la grande foule qui les suivait, que de la poudre déposée dans les caves de ce palais. (Archives judiciaires, vol. J.des Ord.)

Du 14 avril au 31 octobre 1202 (Paris). – Philippe Auguste donne à Pène, son écuyer, des fenêtres sises sous le Châtelet, qui avaient appartenu à Rodrigue, son arbalétrier.

Vers 1204. – Liste de Juifs qui doivent rester au Châtelet, secundum pontem. (Catalogue des Actes de Ph. Aug., par L. Delisle.)

Septembre 1206 (Paris). – Ph. Auguste atteste que Nicolas le Boucher, son sergent, a donné à l’église de Montmartre la voûte qu’il avait à Paris, devant le Châtelet.

Du 3 avril au 31 octobre 1211 (Melun). – Ph. Auguste cède à Eude Arrode deux maisons situées à Paris, près du Châtelet, et dont l’une avait appartenu à l’abbaye d’Hierre.

Le Châtelet s’élevait sur le terrain même encore aujourd’hui appelé Place du Châtelet. Il existait déjà lors du siège de Paris par les Normands, en 884. Souvent modifié, presque entièrement reconstruit à l’intérieur en 1506, 1537, 1544, 1684, le Châtelet se composait de trois tourelles reliées par des constructions de diverses époques. Deux de ces tourelles, en pendentif d’inégale grosseur, protégeaient les deux côtés d’une voûte qui donnait accès dans la ville. Au sommet de l’une des tourelles était une galerie entourée d’une balustrade en fer et surmontée d’un toit conique ; cette galerie servait aux gaites ou gardes de nuit. La voûte supportait deux étages au milieu desquels était un cadran couronné d’un écusson aux armes de France. Une grande statue de la Vierge, tenant le Christ enveloppé dans son manteau, était sculptée sur la clef de voûte et donnait au Châtelet le caractère distinctif des autres portes de Paris. (Sauvai, Antiquités de Paris, t. Ier, p. 31.)

Tel était au dehors l’aspect de ce monument célèbre qui, depuis le XIIe siècle, devint le siège de la juridiction royale de Paris et la demeure du prévôt, institué par le roi pour veiller sur la ville ; il a été complètement détruit au commencement de ce siècle (1802).

Un trophée y représentait des arcs, des flèches, une arquebuse (Arcusbusius in Castelleto, Par – 1480), avec cette légende :

Flamma simul, fulgor que simul, tonitruque sequuntur.

Le Châtelet retraçait ainsi la date de sa fondation,

Arcis Parisiacae origo :

Jàm propè lapsa novem redivivo Caesare saecla.

Ex quo structa fui, quoad hunc pervenimus annum,

Quod superest vitae Deus ordinet et regat aeque.

Anno Incarnatione DCCC in quo Karolus magnus imperator et Augustus. Romae appellatus est.

Au-dessus de la porte de la buvette du Châtelet était ce vers :

Interpone tuis interdùm gaudia curis.

On lisait ces lignes au Châtelet sur une pierre rongée par le temps :

Anno MCCCXVI mense Martis Philippus V Longus dictus hanc aediculam seu Capellam in Castelleto extruxit ad honorem Dei et beatae Mariae et sancti Ludovici Regis et Sancti Desiderii episcopi ac martyris.

MCCLXXXII.– Vacation et deuil au parlement et au Chastelet pendant l’octave des x jors à la novele des Vespres siciliennes.

Les magistrats du Chastellet assistent au conseil teneu au Palais, en la grand-chambre, por adviser touchant la maladie de Charles VI.

Le Chastelet assiste à l’entrée solennelle à Paris, de :

Charles VII, 12 novembre 1437.

Louis XI, 31 août 1471.

Charles VIII, 5 juillet 1484.

Louis XII, 2 juillet 1498.

François Ier 23 février 1514.

Charles Quint, 1er janvier 1539.

Henry II, 16 juin 1549.

Charles IX, 6 mars 1571.

Louis XIV, 26 août 1660.

Et à Saint-Denys, aux funérailles de Henri IV, les 29, 30 juin, 1er juillet 1610.

Regnante Ludovico grosso Castellum reedificatur,

Præses erat Sugerus abbas Beati Areopagitae Dyonsii.

Li Chastellet estoyt encore en MCCCLVII li parlouer aux borjois qui fut par cy devant la hanse de Paris ou la maison de la marchandise de l’iaue.

On démolit l’église de Saint-Leufroy et trois maisons pour agrandir le Chastelet. MDCLXXXIV.

L’église collégiale de Saint-Germain-l’Auxerrois était la paroice du Chastellet 1582.

Sous les murs du Châtelet se vendait le poisson, sur les pierres du roi, où étaient inscrits les noms de chaque espèce de poisson : la carpe, la raie…

Veiz ci li pierres à poissons ou jus nos murs la grant boucherie vent li poisson de mer et d’iaue doulce par congié de Philippe-Auguste, MCLXXXII.

Sur le fronton de la porte de la chambre criminelle du Châtelet de Paris étaient inscrits ces vers de Santeuil :

Hic pœnæ scelerum ultrices posuêre tribunal,

Sontibus undètremor, civibus unde salus.

On lisait cette inscription, gravée sur du marbre noir, dans la chambre criminelle du Châtelet de Paris :

Basilicam hanc capitalium causarum cognitioni dicatam a fundamentis excitavit Guillelmus Gelœus præfectus urbi. – Anno 1592.

Le Châtelet était donc la justice ordinaire de la ville, prévôté et vicomte de Paris. La justice s’y rendait au nom du prévôt de Paris, qui est d’épée ; toutes les sentences de cette juridiction et tous les actes des notaires sont intitulés en son nom. Lorsque le siège est vacant, ces actes s’intitulent au nom du procureur général du parlement, qui est garde-né de cette prévôté.

Les comtes qui rendaient autrefois la justice s’étant, dans la suite, uniquement appliqués aux fonctions militaires, laissèrent le soin de rendre la justice à des substituts ou lieutenants qui furent appelés viguiers en Languedoc et prévôts partout ailleurs.

Le comté de Paris ayant été réuni à la couronne sous Hugues Capet, on y établit un prévôt, c’est-à-dire un lieutenant préposé par le roi pour administrer la justice au nom du roi. On ne peut préciser la date de cet établissement, mais il existait dès 1060 et 1067, car deux chartes datées de ces années-là, et données en faveur de Saint-Martin des Champs par les rois Henri Ier et Philippe Ier, sont souscrites par Estienne, prévôt, de Paris : Stephanus prœpositus Parisiensis.

Saint Louis et Philippe le Bel, ces deux rudes justiciers, s’appliquèrent à remédier aux abus qui se commettaient au Châtelet. (Olim, t. II, p. 517 ; t. III, 1514-1515. – Ord. de novembre 1302. – Ord. du 18 décembre 1311. – La France sous Philippe le Bel, par M. E. Boutaric, 1861.)

Le Châtelet de Paris n’avait pas, en droit, de supériorité sur les autres prévôtés ; mais sa position topographique, l’étendue de son territoire, les appels qu’il recevait des diverses châtellenies situées dans la vicomté, enfin l’absence d’un grand bailli à Paris (ce qui faisait porter l’appel des décisions directement à la cour du roi), lui avaient acquis une grande importance.

Après la suppression du prévôt des marchands, le roi voulut donner plus d’éclat au prévôt royal. Dans ses lettres du 27 janvier 1382, qui réunissaient la maison de ville de Paris à l’office, de la prévôté de Paris, Charles VI désirait que « les prévôts eussent honorable demeure et maison, et afin que tous ceux qui devront avoir recours à eulx comme à leurs juges, sçachent où aller plus promptement pour faire expédier leurs besoignes, il donne le Châtelet avec toutes les appartenances et dépendances au prévôt et à sa famille, et le Châtelet changera le nom de maison de ville en celui de maison de la prévôté de Paris. » Cette décision ne fut pas exécutée sur-le-champ ; le commis nommé par le roi pour remplacer le prévôt des marchands s’y était maintenu. Des lettres du 20 avril 1402 rappelèrent les premières et enjoignirent aux gens de comptes et trésoriers de mettre le prévôt réalment et de fait en possession du petit Chastelet. Ces lettres reçurent, cette fois, leur exécution. (Recueil Ord., t. VI, p. 688 ; t. XII, p. 578.)

Pour les assignations au Châtelet, il fallait observer l’article 4 du titre III de l’ordonnance de 1667, parce que cette juridiction était bailliage royal et en outre siège de conservation des privilèges de l’Université. Aussi l’assignation devait être, pour les domiciliés à Paris, de huitaine ; pour ceux qui sont dans l’étendue de dix lieues, de quinzaine ; ceux qui sont dans la distance de cinquante lieues, d’un mois, et de six semaines au-delà de cinquante lieues dans le ressort du Parlement de Paris ; mais lorsque l’assignation était donnée hors du ressort, le délai était de deux mois.

Tous les bourgeois de Paris avaient le privilège de ne pouvoir être contraints à plaider en matière civile, en défendant, ailleurs qu’au Châtelet. C’est là un droit fort ancien consacré par la coutume et successivement confirmé par lettres-patentes des 9 novembre 1465, septembre 1543, mars 1594, mars 1669, 19 novembre 1522. La police générale appartient aux seuls officiers du Châtelet. (Coll. Lamoignon, t. VI, p. 33.).

L’usage est comme un supplément à ce que la loi a omis de régler. De tout temps, on a exigé qu’il fût régulièrement attesté par des parères eu bonne forme ou constaté par quelque jugement contradictoire : Contradicto aliquando judicio. (Loi 34, § de Legibus.) Autrefois les usages étaient attestés par les actes de notoriété du Châtelet, rédigés avec grandes précautions, après avoir entendu les gens du roi et les praticiens les plus éclairés.

Au XVe siècle, la cour du Châtelet était composée de :

Jehan, seigneur de Foleville, chevalier, conseiller du roi nostre sire et garde de la prevosté de Paris ; présents, maistres Dreue d’Ars, lieutenant ; Martin Double, avocat ; Andrieu le Preux, procureur du roi en Chastellet ; Jehan de Bar, Robert de Tuillières, Nicolas Bertin, Jehan Soudant, examinateur audit Chastelet, et Regnault de Foleville, écuyer.

En 1775, le Châtelet de Paris se composait :

De M. le procureur général du Parlement de Paris, comme garde de la prévôté ; d’un prévôt, d’un lieutenant civil, d’un lieutenant général de police, d’un lieutenant criminel, d’un lieutenant criminel de robe courte, de deux lieutenants particuliers, de soixante-quatre conseillers, d’un juge auditeur, de quatre avocats du roi, d’un procureur du roi, de huit substituts, d’un chevalier d’honneur ; d’un greffier en chef, ayant sous ses ordres soixante commis greffiers, deux certificateurs des criées, un scelleur des sentences et décrets, un garde des décrets et immatricules, un commissaire aux saisies réelles, un receveur des consignations, un receveur des amendes ; deux médecins, quatre chirurgiens, quatre matrones ou sages-femmes ; un concierge buvetier garde-clefs ; cent treize notaires, gardes notes et gardes scel ; quarante-huit commissaires, inspecteurs, examinateurs ; deux cent trente-six procureurs, vingt-huit huissiers audienciers, dont deux premiers et les autres ordinaires ; cent vingt huissiers, commissaires-priseurs vendeurs de biens meubles, dont six huissiers fieffés et douze appelés de la douzaine, servant de garde à M. le prévôt de Paris et pourvus par le roi, sur la présentation des huissiers à cheval, des huissiers à verge ; un juré crieur pour les annonces et cris publics ; quatre trompettes.

Outre les officiers du Chatelet, il y en a d’autres qui s’y rattachent parce qu’ils prêtent serment devant le lieutenant civil ; ce sont : les vingt avocats au Parlement, les banquiers expéditionnaires en cour de Rome et des délégations ; les quarante agents de change, banque et finances ; les soixante experts, dont trente bourgeois et trente entrepreneurs ; les seize greffiers des bâtiments ou de l’écritoire.

Il y avait encore les quatre compagnies du prévôt de l’Île, du lieutenant criminel de robe courte, du guet à pied et du guet à cheval.

Les princes du sang étaient soumis à la juridiction du Châtelet, dans les cas de garde noble de leurs enfants. Le fait est constaté par un procès-verbal de séance extraordinaire tenue, par le Châtelet, dans l’une des salles du palais du Luxembourg, où fut établi un tribunal qui déféra à M. le duc d’Orléans, son père, régent du royaume, la garde noble de madame la duchesse de Berry.

La juridiction du Châtelet de Paris a de tout temps été prévôté seulement, quoique par arrêt de 1288 on puisse induire qu’il y avait un prévôt et un bailli ; le prévôt était conservateur des privilèges de l’Université de Paris, comme nous l’avons déjà indiqué.

En 1522. – François Ier amoindrit la prévôté et la fit exercer par un bailli, mais il la réunit en 1532 ; et en 1551, Henri II y établit un présidial.

Il y a eu de tout temps au Châtelet un prévôt, ses lieutenants, des conseillers, avocats et procureurs du roi, examinateurs, notaires, auditeurs, scelleurs, sergents, audienciers, clercs de greffe, avocats et procureurs. Il n’y a jamais eu qu’un prévôt. Une lettre patente de 1407 dit : « Ab antiquo erant ibi duo auditoria distincta et separata, unum pro civilium magnus Parquetus, reliquum pro criminalium causarum expeditione parvus Parquetus. Sic duo locum tenentes præsepositi Parisiensis, sic clerici duo, videlicet civilis pro magno Parqueto, et pro parvo criminalis. »

Le 16 juin 1554, le roi créa un payeur des gages au Châtelet,

Et le 20 mai 1557, on y créa un président et on doubla le pouvoir des officiers du Chatelet pour les jugements en dernier ressort. Le premier président du parlement de Paris va au Chatelet, soit pour les prisonniers, la veille des bonnes fêtes, soit pour y faire des installations ou y publier des ordonnances. Deux présidents y furent, le 15 janvier 1400. On ôta des officiers du Chatelet, à cause qu’ils étaient ignorants. (Reg. du parlement, t. XX, fol 143.)

Mai 1313 et février 1320. – Les officiers du Chatelet furent suspendus de leurs charges pour leurs extorsions.

25 mai 1325. – Charles le Bel commet deux conseillers en la cour et le prevot de Paris pour faire une enquête sur les désordres des officiers du Chatelet et de la prévoté de Paris.

Février 1327. – Philippe de Valais approuva les conclusions de l’enquête des commissaires et en fit une ordonnance que les officiers jurèrent de garder ; en cas de contravention, le prévôt suspendait les officiers et en avertissait, sans délai, le roi, qui en ordonnait à sa volonté.

6 janvier 1348. – Le chancelier ayant emporté le grand sceau en un voyage, deux conseillers scellaient du sceau du Petit Chatelet.

1340. – Privilège de l’Université de Paris de plaider au Chatelet.

6 octobre 1380. – Lettres que la connaissance du fait de la marée appartiendra au prevot de Paris et non à des commissaires du parlement, conformément à un arrêt du parlement, entérinées. (Reg. du parlement, t. IX, fol. 86.)

1406. – On fit un nouvel auditoire au Chatelet.

4 novembre 1423. – Le parlement assemblé commet trois conseillers pour s’enquérir de l’état du Chatelet, et enjoignit au procureur du roi au Chatelet de travailler avec eux et les instruire. (Reg. du parlement, t. XXI, fol. 54.)

2 mai 1485. – Le roi ordonna que toutes les confiscations, successions qui lui pourraient échoir en la prévoté de Paris, seraient employées aux réparations du Chatelet de Paris. (Reg. de la chambre des comptes, t. IX, fol. 82.)

23 décembre 1506. – Le Chatelet menaçant ruine, le roi le transféra au Louvre et ordonna par lettres enregistrées le 13 janvier 1506, que les amendes seraient employées à réparer, réédifier et accroître le Chatelet.

14 juin 1509. – La cour a défendu aux officiers du Chatelet et à tous autres de prendre des épices, jusqu’après la prononciation des sentences. (Reg. du parlement, t 137, fol 413.)

12 mai 1525. – La cour a ordonné aux officiers du Chatelet de pourvoir aux exactions sur le pain et sur la chair, autrement elle transférera la justice ailleurs ou les suspendra de leurs états.

17 août 1530. – Défenses de laisser entrer au Petit Chatelet aucuns avec espées, poignards et bâtons.

1547. – Les haut-justiciers ne peuvent faire aucune exécution de mort à Paris, mais le seul prévôt de Paris. (Reg. du parlement, t 190, fol. 63.)

15 juin 1549. – Le roi avait permis aux officiers du Chatelet de porter robes rouges à son entrée, mais depuis il le leur défendit, sur les remontrances de la cour des aides. (Reg. du parlement, t. 39, fol. 36-272.)

21 mars 1555. – La connaissance des poids et mesures appartient au prévôt de Paris.

10 septembre 1562. – La peste étant au Chatelet, la cour permit au lieutenant civil de s’en aller aux champs pour quelque temps, le Chatelet se tenant à l’abbaye Saint-Magloire.

2 mars 1574. – Augmentation de 4 000 liv. pour les frais de justice et nécessités du Châtelet de Paris outre les 2 000.

Le 11 juillet 1592. – Translation du Chatelet de Paris à Saint-Denis.

12 juin 1598. – Les prévôts des marchands et échevins ont assisté avec les officiers du Chatelet, à la publication de la paix, les officiers du Chatelet tenant le côté droit.

16 mars 1656. – À cause de la peste, translation du Chatelet à l’hôtel de Charny. (Reg. du parlement, t 109, fol. 62.)

18 août 1666. – Arrêt que les officiers du Chatelet jugeront certains procès criminels, par voie de police souverainement et qu’on leur dira de vive voix que cette permission n’est que pour un an. (Reg. du parlement, t 115, fol 200.)

17 novembre 1523. – Le bailliage de Paris créé et établi d’abord à l’hôtel de Neelle fut transféré au Petit Chatelet. (Reg. du parlement, t 143, fol 108.)

5 janvier 1649. – Les commissaires du Chatelet feront la police au faubourg Saint-Germain, malgré l’opposition du bailli dudit faubourg. (Reg. du parlement, t 101, fol 409.)

Le droit de prévention appartenait aux officiers du Chatelet dans la ville et fauxbourgs de Paris. (Arrêt du parlement du 3 décembre 1569.)

Sur les vagabonds, voleurs à Paris, le 24 janvier 1634, ont été mandés les principaux officiers du Chatelet.

En 1674 (février) fut créé un nouveau Chatelet qui fut réuni à l’ancien, en septembre 1684. Il n’est résulté de cette fondation que la création d’une seconde charge de lieutenant particulier, de vingt-deux charges de conseillers et de deux d’avocats du roi. Le nombre des conseillers fut, eu avril 1685, fixé à cinquante-six, quatorze dans chaque chambre, et celui des avocats du roi à quatre.

12 mars 1674. – Édit du roi portant création d’un nouveau Chatelet en la ville de Paris.

7 septembre 1684. – Édit du roi pour la réunion du nouveau Chatelet à l’ancien ; et arrêt du conseil d’État du roi ordonnant que le sieur Lefebvre demeurera seul concierge, buvetier, garde clefs, tant de l’ancien que du nouveau Chatelet (du 10 août 1685). Lettres patentes données à Fontainebleau, le 18 août 1728, portant évocation et attribution au Chatelet de Paris pour faire le procès à plusieurs habitants du Vexin français, braconniers de profession, voleurs de grand chemin, armés de fusils brisez, pistolets.

Nous voyons en 1286, Philippe le Bel asseoir 40 livres sur le Châtelet :

Litteræ Philippi Francorum Régis quibus notum facit se in Castelleto Parisiensi assidere et assignare quadraginta libras annui reditûs, quas ratione excambii cum abbate et conventu S. Germani de Pratis facti, Rex ad opus duarum capellaniarum Universitatis persolvere debebat.

(Actum Parisiis, anno Domini 1286, mense Julio. – Charles Jourdain, Index Chron. Chartarum.)

Un édit de Charles IV, dit le Bel, porte :

Février 1324. – 1° Quant à ceux qui sont par nous à nostre conseil dudit Chastelet, dont ils étaient plusieurs clercs et laïcs et d’autres qui avaient affaire au siège dudit Chastelet et qui étaient avocats commis, pourquoi ils ont esté si occupés que les querelles et les procès en sont moult empêchés et y venaient peu audit Chastelet, au grand dommage de nous et du peuple,

Nous ordonnons qu’il y en ait huit tant seulement desquels il y aura quatre clercs et quatre laïcs et s’assembleront au Chastelet deux jours en la semaine, pour voir d’un accord et d’un assentiment les procès et les causes avec notre prévôt et viendront au mandement dudit prévôt, toutefois qu’il les mandera et iceux conseillers ne seront avocats, procureurs, ni pensionnaires demeurant en la vicomté de Paris, ni ressorts, ni d’autres qui ayent affaire au siège dudit Chastelet de quelque état et condition qu’ils soient.

En octobre 1467, le cardinal la Balüe, profitant des vacances du parlement, fit vérifier au Châtelet de Paris les lettres patentes du roi pour l’abolition de la pragmatique sanction. Il ne rencontra là aucune opposition ; il n’en fut pas de même au parlement, où le procureur général de Saint-Romain s’opposa courageusement à l’entérinement, répondant aux menaces du cardinal :

Qu’il était au pouvoir de Sa Majesté de lui ôter la charge qu’elle lui avait donnée, mais que tant qu’il l’exercerait, il n’agirait jamais ni contre sa conscience, ni contre les intérêts du royaume.

De son côté, le recteur de l’Université de Paris se rendit au Châtelet, appela au futur concile et demanda acte de son opposition.

23 décembre 1506. – Lettres du roi Lois XII, par lesquelles comme par la grande antiquité du Chatelet de Paris et les dangers, périls de ruine et cadence, il est convenu osier et transporter les auditoires, chambres et greffes de la prevosté de Paris en son chastel du Louvre, et en iceluy y mettre les prisonniers et tenir la geôle ainsi qu’ils étaient audit Chastelet, mais obstant que audit Chastel du Louvre étaient gardées les poudres à canon, il ordonne que ledit Chatelet sera rebâti et aura des édifices et pour ce que les amendes du parlement et dudit Chastelet seront appliquées.

En 1551, Henri II créa les présidiaux ; un siège présidial fut alors établi au Châtelet et réuni à la prévôté, présidé par un lieutenant particulier, et décidant sans appel les procès dont l’intérêt n’excédait pas 250 livres tournois et jugeait souverainement certaines affaires déterminées par les édits. Parfois aussi, à la suite d’une émeute, le parlement renvoie les inculpés devant le Châtelet, pour y être jugés présidialement.

Le parlement va tenir séance au Châtelet le mardi de la semaine sainte, le vendredi avant la Pentecôte, la veille de Saint-Simon Saint-Jude, et l’avant-veille de Noël.

Dès septembre 1574, une assemblée générale de police se tenait au Châtelet, une fois la semaine.

En 1656, le Châtelet tient ses séances aux Augustins de Paris. (Félibien, t. III, p. 152.)

Le 8 janvier 1633, est rendu un arrest de la Cour du parlement, portant défenses aux officiers du Chastelet de Paris de décréter prise de corps contre les bourgeois, sinon en matière importante et très griève :

Entre Philippes Robert, bourgeois de Paris, et Denise Laurier, sa femme, appelants de la permission d’informer, décret de prise de corps contre ledit Robert et ajournement personnel contre ladite Laurier décerné par le prévost de Paris ou son lieutenant criminel, emprisonnement dudit Robert, ensemble de l’ordonnance apposée au bas d’une requête du 14 août 1632, portant défenses d’exécuter le décret à leur profit, et intimé, d’une part,

Et Charles Gavoys et Nicolas Gonault, garçons drapiers, intimés et appelants de la permission d’intimer informations, décret décerné le 29 août 1632, ordonnance apposée au bas d’une requeste présentée au lieutenant criminel le 20 dudit mois, et de tout ce qui s’en est suivi d’autre, sans que les qualités puissent préjudiciel aux parties ; après que Humbelot, avocat des appelants, voulant déduire ses causes et moyens d’appel, Bignon, pour le procureur général du Roi, s’est levé, et dit qu’il y a eu rixe entre les parties, et pour raison de ce information de part et d’autre, desquelles ayant fait récit, a dit avoir lieu mettre les appellations respectueusement interjetées au néant, et condamner Gavoys et Gonault à quelques réparations, avec défenses de méfaire et médire à Robert et sa femme, et aux officiers du Chastelet plus décréter prise de corps contre les bourgeois de Paris, sinon en matière très griève, l’écroué rayé, et l’arrêt publié au Chastelet ; et Martin, avocat desdits Gavoys et Gonault, a été ouï.

La Cour a mis et met les appellations et ce dont a été appelé au néant, et évoque à elle le principal différend d’entre les parties, et y faisant droit, condamne Gavoys et Gonault en trente-deux livres parisis de réparations envers les intimés et ès dépens ; et sera l’écroué d’emprisonnement du mari biffé et rayé ; fait inhibitions et défenses à iceux Gavoys et Gonault de ci-après méfaire et médire ausdits Robert et sa femme, à peine de punition corporelle ; et faisant droit sur les conclusions du procureur général du Roi, fait inhibition et défenses aux officiers du Chastelet de cy après décréter prise de corps contre les bourgeois de ceste ville, sinon en matière importante, à peine de répondre, en leurs noms, des despens, dommages et intérêts des parties ; et sera le présent arrêt leu et publié au siège du Chastelet, l’audience tenant, à ce qu’aucun n’en prétende cause d’ignorance.

Fait en parlement, le 8 janvier 1633.

Signé : RADIGUES.

Arrêt de conflit entre le Grand conseil et le lieutenant criminel es Cour criminelle du Chastelet de Paris, à l’occasion d’un assassinat commis par un conseiller du Grand conseil sur sa femme. (Extrait des registres du Grand conseil du roi et du Conseil d’Estat.)

8 mars 1635. – Arrest du Conseil d’Estat du Roi, rendu à Paris, le 8 mars 1635, sous Louis XIII.

Voici l’analyse sommaire des faits exposés par le procureur général au Grand conseil, sur la requeste duquel est intervenu l’arrest du Conseil ci-dessus daté et ci-après relaté :

En l’année 1628, un sieur de Mézières Lenormand, conseiller au Grand conseil, assassina sa femme sur le grand chemin d’Orléans à Paris. Le Grand conseil du roi siégeait alors à Poitiers. Trois de ses membres sont délégués pour instruire cette affaire. L’instruction faite, ils en envoient le résultat à Poitiers ; puis, par arrest du 23 août de la même année 1628, le Grand conseil condamne Lenormand à avoir le poing coupé et la teste tranchée. Son office est déclaré vacant et supprimé. Il est condamné en plusieurs amendes, et le surplus de ses biens est acquis et confisqué au profit du Roi.

Néanmoins, au mépris de la jurisprudence du Grand conseil, qui luy est attributive de jurisdiction pour les crimes commis par ses membres, le lieutenant criminel de Paris avait fait prononcer contre ledit Lenormand, dès le 26 mai de la même année, une sentence de mort, dont le procureur général avait eu connaissance tant par les lettres de don, fait aux enfants dudit Lenormand, des biens acquis et confisquez au profit du Roi, que par celles du rétablissement de son office au profit de maistre René de Maupeou.

À la suite de cet exposé, le procureur général au Grand conseil concluait à la cassation des informations, décret, procédure criminelle et sentence du lieutenant criminel de Paris, et de tout ce qui s’en était suivi, au retrait des minutes de cette procédure du greffe criminel du Chastelet et à leur suppression, avec défenses au lieutenant criminel de Paris d’informer, décréter ny prendre connaissance, à l’avenir, du fait des officiers du Grand conseil, à peine de suspension de sa charge et de dix mille livres d’amende.

À l’appui de ces conclusions, le procureur général invoquait une suite de monuments de la jurisprudence du Grand conseil, qui embrassait les années de 1611 à 1634.

Sur ces conclusions, intervint l’arrest du 8 mars 1635, par y lequel le Roi, en son conseil, a cassé, révoqué et annulé les décret, procédure criminelle et sentence rendue par le lieutenant criminel de Paris à l’encontre dudit Lenormand, et tout ce qui s’en est suivi ; a fait défenses au lieutenant criminel et à tous juges autres que le Grand conseil d’informer, décréter ny prendre connaissance, à l’avenir, en fait de crimes, contre les officiers dudit Grand conseil, à peine de nullité, de cassation de procédure, dépens, dommages et intérêts.

Suit la formule exécutoire, puis la copie in extenso de l’exploit de signification de l’arrest à maistre Benigne Blondeau, lieutenant criminel au Chastelet de Paris ; ensuite une mention de signification à maistre Michel Letellier, procureur du roi au Chastelet de Paris ; et enfin la mention de l’enregistrement ; au Grand conseil, le 31 mars 1635.

Le 5 novembre 1666. Arrest du Conseil d’État, par lequel le roi ordonne que la police générale de la ville, fauxbourgs et banlieue de Paris sera faite par les officiers du Chastelet, avec défenses à tous autres juges de s’en entremettre. (Extrait des registres du Conseil d’État :

Sur ce qui a esté représenté au roi estant en son Conseil, que le droit de faire police générale dans l’étendue de la ville, fauxbourgs et banlieue de Paris, appartenant au Prévôt dudit lieu et ses lieutenants civil et criminel du Chastelet, à l’exclusion de tous autres officiers royaux et des justices des seigneurs particuliers, Sa Majesté aurait donné ses ordres audit lieutenant criminel, pour, avec son procureur audit Chastelet, faire ladite police générale et informer Sa Majesté des abus et désordres qu’ils y auraient remarqués contraires aux ordonnances, arrests et règlements de police ; à quoi ayant esté par eux procédé en différents jours à ladite police générale commencée, ils auraient esté troublés dans l’exécution desdits ordres par la concurrence de plusieurs officiers desdites justices particulières, et notamment par le bailliage de Ville-Levesque, lequel, sans titre et sans pouvoir, se serait ingéré d’entreprendre semblable visite de police générale ; et d’autant qu’il importe d’arrêter le cours de ces sortes d’entreprises contraires au bien du public, et qui pourraient empêcher le fruit d’une réformation si utile et si nécessaire, par la confusion de toutes sortes d’officiers, aux ordonnances desquels les bourgeois se trouveraient en peine d’obéir dans la différence des justices ; à quoy estant nécessaire de pourvoir, le Roi, estant en son Conseil, a ordonné et ordonne que la police générale en commencée par lesdits officiers du Chastelet sera par eux incessamment continuée, et à cet effet, pourront se transporter dans toutes les maisons, hôtels, collèges, communautés et autres lieux de ladite ville, fauxbourgs et banlieue de Paris, dont ouverture leur sera faite nonobstant tous prétendus privilèges, sur lesquels Sa Majesté se réserve de faire droit en connaissance de cause, ainsi qu’il appartiendra ; Et en conséquence a fait Sa Majesté très expresses inhibitions et défenses à tous les officiers des seigneurs haut-justiciers de ladite ville et faubourgs de Paris, même au lieutenant du grand prévost de l’hôtel et baillif du Palais, d’entreprendre de faire ladite police générale ny donner aucun trouble auxdits officiers du Chastelet pour raison de ce ; Et sera le présent arrest exécuté nonobstant oppositions ou appellations quelconques, dont si aucunes interviennent, Sadite Majesté s’en est réservé la connaissance, et icelle interdite à tous autres juges. Enjoint à son procureur du Chastelet de tenir la main à l’exécution d’iceluy, lequel sera publié et affiché en tous les lieux et endroits accoutumés, à sa diligence.

Fait au Conseil d’Estat du Roi, Sa Majesté y estant, tenu à Saint-Germain en Laye, le 5 novembre 1666.

Signé : DE GUENEGAUD.

Leu, publié à son de trompe et cri public, et affiché par tous les carrefours et fauxbourgs de Paris par moi, Charles Canto, juré crieur du Roi, en ladite ville, prévosté et vicomté de Paris, soussigné, accompagné de Hierosme Tronsson, Estienne du Cos, jurez trompettes du Roi, et de Jean de Beauvais, commis d’Estienne Chappé, aussi jurez trompette, le samedi 6 novembre 1666.

Signé : CANTO.

Janvier 1685. – Édit du Roi, en forme de Règlement, pour l’administration de la justice au Chastelet de Paris :

ARTICLES I À VI.

ART. VII.

Lorsqu’il s’agira de la liberté de prisonniers arrestez pour dettes, hors les cas portez par l’article précédent, de la main levée des meubles, chevaux et bestiaux saisis, et autres matières qui requièrent célérité, le lieutenant civil pourra permettre d’assigner les parties à un délai plus bref que ceux portés par le troisième titre de nostre ordonnance du mois d’avril 1667, à laquelle nous avons dérogé pour ce regard ; et ceux qui feront arrêter prisonniers leurs débiteurs, ou qui les feront recommander pour dettes dans nostre bonne ville de Paris, ou qui y feront saisir des carrosses, chevaux, bestiaux et autres meubles en conséquence de jugements rendus dans l’une des cours et juridictions qui y sont établies, ou autres actes, seront tenus de constituer procureur et d’élire dans ladite ville par les écrous d’emprisonnements, recommandations, saisies ou oppositions ; et en conséquence ils pourront estre assignez aux domiciles qu’ils auront élus. Défendons aux huissiers, sergens et tous autres officiers de constituer prisonnier aucune personne, ou de la recommander pour dettes civiles, ny de saisir aucuns meubles, ou de signifier aucunes oppositions aux saisies qui seront faites, s’il n’y a élection de domicile et un procureur constitué, et aux geôliers des prisons de recevoir lesdits prisonniers, le tout à peine de cinquante livres d’amende et de tous dépens, dommages et intérêts, tant contre lesdits officiers que contre les geôliers qui pourront contrevenir.

ART. VIII À XV.

ART. XVI.

Les conseillers du Chastelet seront partagé en quatre colonnes, en chacune desquelles il y en aura quatorze pour servir successivement, durant un mois, et à commencer par la première, à l’audience de la Prévoté, à celle du Présidial en la Chambre du conseil pour le jugement des procès civils et de police, et en la Chambre criminelle ; Et les quatre plus anciens conseillers seront mis à l’avenir à la teste de chacune desdites colonnes. Voulons néanmoins, pour bonnes considérations, que maistres… le Fevre, doyen,… Milet sous doyen des conseillers du siège, que nous avons supprimé, soient toujours mis à la tête de la troisième desdites colonnes, jusques à ce qu’ils soient en état, par leur ancienneté, de monter à la teste des autres colonnes, et qu’après eux, maistres… Racine et Petit pas occupent les mêmes places, sans tirer à conséquence pour les autres conseillers ayant servi dans ledit siège supprimé.

ART. XVII.

Aucun des conseillers ne pourra prendre place aux audiences ny assister au jugement des procès civils et criminels, s’il n’y est actuellement de service, ou s’il n’y est appelé par celui qui y présidera pour remplir le nombre de juges nécessaires, en l’absence et au défaut de ceux y servant actuellement, et ceux des conseillers qui se trouveront de service au criminel, sans avoir servi deux ans, assisteront seulement à la visitation et jugement des procès criminels, qui seront jugés en dernier ressort, sans y pouvoir opiner.

ART. XVIII.

Les lieutenants particuliers et conseillers pourront rapporter en la Chambre du conseil les procès civils dont ils seront chargés, encore qu’ils soient de service à l’audience et au criminel, pourveu que ce soit avant les heures destinées pour l’un et pour l’autre.

ART. XIX.

Les conseillers de service en la Chambre du conseil seront tenus d’assister assidûment au jugement des procès civils ou criminels qui regarderont la police, lesquels nous voulons estre expédiez diligemment, et par préférence à tous autres, de quelque nature ils puissent estre.

ART. XX À XXIV.

ART. XXV.

Le lieutenant criminel donnera audience les mardis et vendredis, et même un troisième jour de la semaine, s’il est besoin, depuis midi jusques à deux heures pour les affaires criminelles où il s’agira d’injures, rixes et autres matières légères qui ne méritent pas d’instruction ; et les informations et procédures faites seront mises entre les mains de l’un de nos avocats qui devra y assister, afin d’en faire le récit, et que ces contestations puissent être vidées sur le champ, ainsi que nous enjoignons au lieutenant criminel de le faire ; et s’il estimait de voir lui-même les informations ou autres procédures, il le pourra ordonner, et prononcera à l’audience suivante la sentence qu’il trouvera à propos de rendre, sans prendre aucuns droits pour ce sujet.

ART. XXVI.

Les commissaires auront soin d’informer soigneusement le lieutenant criminel et nostre procureur au Chastelet des crimes qui arriveront dans l’étendue des quartiers où ils sont distribués, dans le jour qu’ils en auront eu connaissance ; et s’il arrive quelque difficulté considérable au sujet des plaintes qu’ils recevront, ou des réquisitions des parties pour faire arrêter des personnes hors ce flagrant délit, ils en informeront le lieutenant criminel, lequel y pourvoira sur le champ, sans aucuns droits ni vacations.

ART. XXVII.

L’article dix-neuvième du titre dixième de nostre ordonnance du mois d’août 1670 sera exécuté, et en conséquence le lieutenant criminel et autres officiers du siège du Chastelet ne décerneront des décrets de prises de corps contre des personnes domiciliées, que lorsqu’elles seront accusées de crimes graves et pouvant mériter des peines afflictives ou infamantes ; et ils ne pourront élargir ceux qui auront esté constituez prisonniers en vertu de décret de prise de corps, si ce n’est du consentement de nostre procureur ou par délibération prise en la Chambre du conseil, en cas que nostre Procureur n’y consente pas, et lorsque, dans les affaires sujettes au jugement dernier, la compétence aura esté jugée.

ART. XXVIII.

Les officiers dudit siège du Chastelet, de l’ordonnance desquels des prisonniers auront esté arrestez, seront tenus de les interroger dans vingt-quatre heures après leur emprisonnement, et ne pourront prendre et recevoir des prisonniers aucuns droits pour leurs interrogatoires, ny pour les sentences d’élargissement, ny dresser aucuns procès-verbaux pour la réception des causes présentées, si les parties civiles n’y ont assisté pour en contester les facultés.

ART. XXIX.

Les prisonniers qui auront obtenu des ordonnances ou sentences portant élargissement, ne pourront être retenus sous prétexte des vacations des juges pour les interrogatoires ou autres procédures faites contre eux. Défendons aux geôliers, à peine d’interdiction pendant trois mois et de tous dépens et dommages-intérêts pour la première contravention, et d’estre déclarez incapables de leurs fonctions en cas de récidive, de les retenir, et aux greffiers, sous pareilles peines, de recevoir les vacations desdits prisonniers ou d’aucunes personnes autres que des parties civiles, quand même on leur offrirait volontairement ; leur enjoignons d’écrire, sur toutes les expéditions qu’ils délivreront, les droits qui auront esté payez tant pour les juges que pour nostre procureur et pour eux, et de faire mention du nom des personnes par les mains desquelles ils les auront reçus.

ART. XXX.

Lorsqu’il sera intervenu une sentence interlocutoire ou définitive sur un procès criminel portant élargissement où absolution d’un prisonnier, elle sera signée par les juges qui y auront assisté, avant qu’ils sortent de la Chambre, et prononcée sur le champ à nostre procureur et aux accusés, lorsqu’elle sera rendue à la charge de l’appel ; et si nostre procureur n’en interjette point d’appel, le greffier ira dans la matinée même mettre le prisonnier en liberté et décharger le registre de la prison, sans qu’il puisse recevoir aucuns droits du prisonnier ny de sa part, si ce n’est ceux qui sont deubs pour l’expédition de la grosse de la sentence, en cas qu’il la veuille lever après qu’il aura été mis en liberté, et ce, sur les peines portées par l’article précédent.

ART. XXXI.

Aussitôt que les procès criminels seront instruits, ils seront distribués par le lieutenant criminel, en présence du lieutenant particulier de service à l’audience du présidial, ou de l’autre en son absence, et du plus ancien des conseillers de service au criminel, et qui se trouvera au Chastelet lorsque la distribution se fera à l’issue de la dernière des audiences, qui sera tenue ce jour-là audit Chastelet.

La juridiction du Châtelet et celle de l’hôtel de ville étaient sans cesse en conflit. Cet état de choses est préjudiciable aux affaires, dont il entrave le cours, et aux habitants de Paris, qui, le plus souvent, sont incertains entre l’une et l’autre. Par l’édit ci-après le Roi détermine la juridiction du Châtelet et celle de l’hôtel de ville. Il indique ce qui est du ressort du lieutenant général de police et ce qui est du ressort du prévôt des marchands et des échevins ; le parlement est désigné pour juger des conflits ou contestations ou cas douteux qui pourraient naître dans l’avenir.

Juin 1700. – Édit du roi portant règlement pour la jurisdiction du lieutenant général de police et celle du prévost des marchands et eschevins de Paris.

Donné à Versailles au mois de juin 1700.

Registre au parlement.

Louis, par la grâce de Dieu, roi de France et de Navarre, à tous présents et à venir, salut :

Les inconvénients que causent les conflits de jurisdiction estant également contraires au bien de la justice, à l’ordre public et à la dignité des magistrats qui sont obligés d’y prendre part, Nous avons estimé nécessaire de nous faire rendre compte de quelques difficultés que la création de plusieurs charges, les intérêts des officiers qui en ont été pourvus, la diversité des usages dans les différentes jurisdictions, et la multitude des affaires que la grandeur de nostre bonne ville de Paris et le commerce que l’on y fait, ont produit depuis plusieurs années entre nos officiers du Chastelet et les prévôts des marchands et eschevins de notre dite ville ; Et voulant leur donner encore plus de moyens de continuer à nous rendre dans la suite les services que nous en recevons avec beaucoup de satisfaction, et garantir en même temps nos sujets de l’embarras où ils se trouvent, lorsqu’ils ne savent pas précisément à qui ils doivent s’adresser pour demander justice et pour recevoir les ordres qui doivent estre donnez suivant les différentes occurrences ; après avoir entendu le rapport qui nous a esté fait en notre conseil desdites difficultés. Nous avons estimé nécessaire de les terminer par nostre présent règlement, et de prévenir les suites fâcheuses qu’elles pourraient avoir à l’avenir, en déclarant ainsi notre volonté.

À ces causes et autres, et à ce nous mouvant, et de notre certaine science, pleine puissance et autorité royale, Nous avons dit, ordonné et déclaré, et par ces présentes signées de nostre main, disons, ordonnons, déclarons, voulons et nous plaît :

ARTICLE I.

Que le lieutenant général du prévost de Paris pour la police et les prévôts des marchands et eschevins exercent chacun sur le commerce des bleds et autres grains, et les fassent exécuter à cet égard, ensemble les règlements de police, ainsi qu’ils ont fait bien et deuëment jusqu’à cette heure. C’est à sçavoir que le lieutenant général de police connaisse dans l’étendue de la prevosté et vicomté de Paris, et même dans les huit lieues aux environs de la ville, de tout ce qui regarde la vente, livraison et voiture des grains que l’on y amène par terre, quand même ils auraient esté chargez sur la rivière, pourveu qu’ils en aient esté déchargez par la suite sur la terre, à quelque distance que ce puisse estre de ladite ville : comme aussi de toutes les contraventions qui pourraient estre faites auxdites ordonnances et règlements, quand même on prétendrait que les grains auraient esté destinez pour cette ville, et qu’ils devraient y estre amenez par eau, et ce jusqu’à ce qu’ils soient arrivés au lieu où l’on doit les charger sur les rivières qui y affluent ; et que les prévost des marchands et eschevins connaissent de leur part de la vente et livraison desdits grains, lorsqu’elles se feront dans le lieu où ils doivent estre embarquez sur lesdites rivières, et pareillement de la voiture qui s’en fera par icelles ; Et si dans les procès qui sont portés devant eux pour raison des ventes et livraisons ainsi faites, et des voitures desdits grains, ils trouvent qu’il y ait eu quelque contravention aux ordonnances et règlements de police, ils en prendront connaissance et pourront ordonner, sur la réquisition qui sera faite d’office par nostre procureur et de la ville, tout ce qu’ils estimeront nécessaire pour l’exécution de nos ordonnances et règlements.

ART. II.

Que les prévost des marchands et eschevins reçoivent en la manière accoutumée les déclarations de tous les vins qui arrivent en nostre ville de Paris ; qu’ils prennent connaissance de tout ce qui regarde la vente et le commerce de ceux qui doivent y estre conduits, dedans et depuis le lieu où l’on les charge sur les rivières, ensemble de leur voiture par icelles, et incidemment aux procès qui seront intentés pour ce sujet, des contraventions qui pourraient avoir été faites à nos ordonnances et règlements de police, lorsqu’ils seront dans les lieux où l’on les charge, et tant qu’ils seront dans les bateaux, sur les ports et sur l’étape de cette ville, et que le lieutenant général de police ait toute jurisdiction, police et connaissance sur la vente et commerce qui se fait desdits vins, lorsque l’on les amène par terre en cette ville, et des contraventions qui peuvent estre faites aux ordonnances et règlements de police, même sur ceux qui y ont esté amenez par les rivières aussitôt qu’ils seront transportés des bateaux sur lesquels ils ont été amenez des ports et étapes de ladite ville, dans les maisons et caves des marchands de vin, et sans que les officiers de la ville puissent y faire aucunes visites ny en prendre depuis aucune connaissance, sous prétexte des mesures ou sous quelque autre que ce puisse estre.

ART. III.

Que les prévost des marchands et eschevins connaissent de la voiture qui se fait par eau des bois mairain et de charonage, et qu’ils règlent les ports de cette ville où ils devront estre amenez et déchargez ; et que le lieutenant général de police connaisse de tout ce qui regarde l’ordre qui doit estre observé entre les charons et autres personnes qui peuvent employer lesdits bois de mairain et de charonage que l’on amène en notre dite ville de Paris ; Et pour prévenir les contestations qui peuvent arriver au sujet de la décharge desdits bois à terre, voulons que le voiturier qui les aura amené ou celui à qui ils appartiendront soient tenus de faire signifier au bureau des maistres charons, par un huissier ou sergent du Chastelet, l’arrivage desdits bois, afin que les jurez en fassent la visite et le lotissement dans les trois jours qui suivront celui de la signification ; et à faute par eux de faire la visite et le lotissement dans ledit temps, permettons au voiturier ou à celuy à qui lesdits bois appartiendront de les faire descendre à terre sans en demander la permission à aucun juge et d’en disposer, après néanmoins que la visite aura été faite.

ART. IV.

Que les prévost des marchands et eschevins connaissent de tout ce qui regarde les conduites des eaux et entretien des fontaines publiques, et que le lieutenant général de police connaisse l’ordre qui doit estre observé entre les porteurs d’eau pour l’y puiser et la distribuer à ceux qui en ont besoin, ensemble de toutes les contraventions qu’ils pourraient faire aux règlements de police, et qu’il puisse particulièrement leur faire défenses d’en puiser en certain temps et en certains endroits de la rivière, lorsqu’il le jugera à propos.

ART.V.

Que les prévost des marchands et eschevins prennent, connaissance et ayent jurisdiction sur les quais pour empêcher que l’on n’y mette aucunes choses qui puissent empêcher la navigation sur la rivière, et pour en faire ôter celles qui y auront esté mises, et pareillement celles qui pourraient causer le dépérissement des quais, et sans qu’ils puissent y faire construire à l’avenir aucune échoppe ni aucun autre bâtiment de quelque nature que ce puisse estre, sans en avoir obtenu nostre permission. Voulant au surplus que le lieutenant général de police exerce sur lesdits quais toute la jurisdiction qui luy est attribuée dans le reste de notre dite ville, et qu’il puisse même y faire porter les neiges lorsqu’il le jugera absolument nécessaire pour le nettoiement de la ville et pour la liberté du passage dans les rues.

ART. VI.

Ordonnons que la publication des traités de paix sera faite en présence de nos officiers au Chastelet et des prévost des marchands et eschevins, suivant les ordres que nous leur en donnerons, et en la forme en laquelle a esté faite cette publication à l’occasion des derniers traitez de paix qui ont esté conclus à Riswik.

ART. VII.

Lorsque l’on fera des échafaud pour des cérémonies ou des spectacles que l’on donne au sujet des fêtes et des réjouissances publiques, les officiers tant du Chastelet que de l’hôtel de ville exécuteront les ordres particuliers qu’il nous plaira leur donner sur ce sujet, et lorsqu’ils n’en auront point reçu de notre part, voulons que le lieutenant général de police ait l’inspection sur les échafaud et donne les ordres qu’il jugera nécessaires pour la solidité de ceux qui seront faits dans les rues et même sur les quais, et pour empêcher que les passages nécessaires dans la ville n’en soient embarrassés ni empêchés, et que les prévost des marchands et eschevins prennent le même soin et aient la même connaissance sur ceux qui pourront estre faits sur le bord et dans le lit de la rivière et dans la place de Grève.

ART. VIII.

Lorsqu’il arrivera un débordement d’eau qui donnera sujet de craindre que les ponts sur lesquels il y a des maisons bâties ne soient emportés, et que l’on ne puisse passer surement sur lesdits ponts, voulons que le lieutenant général de police et les prévost des marchands et eschevins donnent conjointement, concurremment et par prévention, tous les ordres nécessaires pour faire déloger ceux qui demeurent sur lesdits ponts et pour en fermer les passages, et qu’en cas de diversité de sentiments, ils se retirent sur le champ vers nostre Cour de parlement, pour y estre pourveu ; et en cas qu’elle ne soit pas assemblée, par devers celuy qui y préside, pour estre réglez par son avis.

ART. XII.

Enjoignons au surplus auxdits lieutenant général de police et prévost des marchands et eschevins d’éviter, autant qu’il leur sera possible, toutes sortes de conflits de jurisdiction, de régler, s’il se peut, à l’amiable, et par des conférences entre eux, ceux qui seraient formés et de les faire enfin régler au Parlement le plus sommairement qu’il se pourra, sans qu’ils puissent rendre des ordonnances ny faire de part et d’autre aucuns règlements au sujet desdites contestations, ni sous aucun prétexte que ce puisse estre.

Octobre 1712. – Édit du Roi, servant de règlement entre les officiers du Chastelet de Paris et ceux du bailliage du Palais :

LOUIS, etc., à tous présents et à venir, salut :