Le Coffre et le revenant - Ligaran - E-Book

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Beschreibung

Extrait : "Par une belle matinée du mois de mai 182., don Blas Bustos y Mosquera, suivi de douze cavaliers, entrait dans le village d'Alcolote, à une lieue de Grenade. A son approche, les paysans rentraient précipitamment dans leurs maisons et fermaient leurs portes."

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Seitenzahl: 40

Veröffentlichungsjahr: 2015

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Le Coffre et le revenant

AVENTURE ESPAGNOLE

Par une belle matinée du mois de mai 182., don Blas Bustos y Mosquera, suivi de douze cavaliers, entrait dans le village d’Alcolote, à une lieue de Grenade. À son approche, les paysans rentraient précipitamment dans leurs maisons et fermaient leurs portes. Les femmes regardaient avec terreur par un petit coin de leurs fenêtres ce terrible directeur de la police de Grenade. Le ciel a puni sa cruauté en mettant sur sa figure l’empreinte de son âme. C’est un homme de six pieds de haut, noir, et d’une effrayante maigreur ; il n’est que directeur de la police, mais l’évêque de Grenade lui-même et le gouverneur tremblent devant lui.

Durant cette guerre sublime contre Napoléon, qui, aux yeux de la postérité, placera les Espagnols du dix-neuvième siècle avant tous les autres peuples de l’Europe, et leur donnera le second rang après les Français, don Blas fut l’un des plus fameux chefs de guérillas. Quand sa troupe n’avait pas tué au moins un Français dans la journée, il ne couchait pas dans un lit : c’était un vœu.

Au retour de Ferdinand, on l’envoya aux galères de Ceuta, où il a passé huit années dans la plus horrible misère. On l’accusait d’avoir été capucin dans sa jeunesse, et d’avoir jeté le froc aux orties. Ensuite il rentra en grâce, on ne sait comment. Don Blas est célèbre maintenant par son silence ; jamais il ne parle. Autrefois les sarcasmes qu’il adressait à ses prisonniers de guerre avant de les faire pendre lui avaient acquis une sorte de réputation d’esprit : on répétait ses plaisanteries dans toutes les armées espagnoles.

Don Blas s’avançait lentement dans la rue d’Alcolote, regardant de côté et d’autre les maisons avec ses yeux de lynx. Comme il passait devant l’église on sonna une messe ; il se précipita de cheval plutôt qu’il n’en descendit, et on le vit s’agenouiller auprès de l’autel. Quatre de ses gendarmes se mirent à genoux autour de sa chaise ; ils le regardèrent, il n’y avait déjà plus de dévotion dans ses yeux. Son œil sinistre était fixé sur un jeune homme d’une tournure fort distinguée qui priait dévotement à quelques pas de lui.

– Quoi ! se disait don Blas, un homme qui, suivant les apparences, appartient aux premières classes de la société n’est pas connu de moi ! Il n’a pas paru à Grenade depuis que j’y suis ! Il se cache.

Don Blas se pencha vers un de ses gendarmes, et donna l’ordre d’arrêter le jeune homme dès qu’il serait hors de l’église. Aux derniers mots de la messe, il se hâta de sortir lui-même, et alla s’établir dans la grande salle de l’auberge d’Alcolote. Bientôt parut le jeune homme étonné.

– Votre nom ?

– Don Fernando della Cueva.

L’humeur sinistre de don Blas fut augmentée, parce qu’il remarqua, en le voyant de près, que don Fernando avait la plus jolie figure ; il était blond, et, malgré la mauvaise passe où il se trouvait, l’expression de ses traits était fort douce. Don Blas regardait le jeune homme en rêvant.

– Quel emploi aviez-vous sous les Cortès ? dit-il enfin.

– J’étais au collège de Séville en 1823 ; j’avais alors quinze ans, car je n’en ai que dix-neuf aujourd’hui.

– Comment vivez-vous ?

Le jeune homme parut irrité de la grossièreté de la question ; il se résigna et dit :

– Mon père, brigadier des armées de don Carlos Cuarto (que Dieu bénisse la mémoire de ce bon roi !), m’a laissé un petit domaine près de ce village ; il me rapporte douze mille réaux (trois mille francs) ; je le cultive de mes propres mains avec trois domestiques.

– Qui vous sont fort dévoués sans doute. Excellent noyau de guérilla, dit don Blas avec un sourire amer.

– En prison et au secret ! ajouta-t-il en s’en allant, et laissant le prisonnier au milieu de ses gens.

Quelques moments après, don Blas déjeunait.

– Six mois de prison, pensait-il, me feront justice de ces belles couleurs et de cet air de fraîcheur et de contentement insolent.

Le cavalier en sentinelle à la porte de la salle à manger haussa vivement sa carabine. Il l’appuyait par travers contre la poitrine d’un vieillard qui cherchait à entrer dans la salle à la suite d’un aide de cuisine apportant un plat. Don Blas courut à la porte ; derrière le vieillard, il vit une jeune fille qui lui fit oublier don Fernando.

– Il est cruel qu’on ne me donne pas le temps de prendre mes repas, dit-il au vieillard ; entrez cependant, expliquez-vous.