Extrait : "Qu'est-ce que l'adultère ? « C'est l'œuvre de chair sciemment et volontairement accomplie entre une personne mariée et une personne autre que son conjoint. » D'après Fournel, « l'adultère est une des trois espèces de délit dont les personnes de différent sexe peuvent se rendre coupables par fréquentation illégitime. » Les deux autres espèces sont la stupre et la fornication. L'adultère se commet avec une femme mariée, la stupre avec une femme libre."
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Seitenzahl: 298
Veröffentlichungsjahr: 2016
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Plaisant Chasseur, tu Cours et te Démènes
à la Chasse aux Cocus ; tu n’as pas de Raison de prendre tant de Peines,
Sous ton Plumet, un Niche en ta Maison ;
Vas exercer sur luy ton Arbaleste.
Jusqu’à la Lune Élevant mes Esprits
Jay tu ton Sort, et tant j’en fut surpris,
Les Cornes, comme on dit, m’en Vinrent a la Tête.
Il est question d’abroger les articles de notre Code pénal relatifs à l’adultère. Dès lors ne devenait-il pas intéressant de rechercher quels pouvaient être les châtiments appliqués, dès les premiers siècles, aux personnes qui tombaient dans ce crime ? C’est ce que nous avons pensé.
De tout temps et chez tous les peuples du globe, l’adultère a été réprimé. Les peines furent cruelles ou légères et, si l’on jette un coup d’œil en arrière, on est frappé par leur diversité. Les Grecs et les Romains avaient édicté contre les coupables des pénalités excessives, voire même la mort. En France, on sévissait également contre les deux amants. Parfois, notamment dans nos anciennes provinces, on les soumettait à une peine infamante et ridicule. Si le crime se trouvait aggravé par le rapt ou le vol, c’était la peine capitale qui frappait les deux complices. Quelquefois, les maris se rendaient justice eux-mêmes et inventaient mille moyens pour se venger de leurs infidèles moitiés. Certains peuples sauvages se montraient féroces et barbares et procédaient à des justices sommaires ; mais, à côté d’eux, quelques civilisations, plus pratiques, n’infligeaient aux coupables qu’une amende qui profitait au mari.
Nos rois, nos reines n’ont pas échappé à la contagion. Nos grandes dames de la Cour et de la Ville ont suivi leur exemple. Ce sont ces peines, ces vieilles coutumes, ces liaisons équivoques, ces passades, ces scènes libertines que l’on trouvera exposées au cours de notre ouvrage. Çà et là, nous avons glissé des anecdotes galantes, des situations plaisantes sur les célèbres amoureuses d’antan, sur leurs maris complaisants ou jaloux.
Nous avons puisé nos renseignements aux meilleures sources. Nous avons fouillé aussi loin qu’il nous a été possible. S’il se trouve parfois quelques mots un peu lestes, que le lecteur ne nous en garde pas rancune. Qu’il s’en prenne plutôt aux textes historiques qui ont servi à notre documentation.
Fernand MITTON.
Paris, 26 juin 1910.
DÉFINITION.– LE « PRÊT » DE L’ÉPOUSE À LACÉDÉMONE.– L’EXTIRPATION DES CHEVEUX ET LA MISE À MORT DE LA FEMME ATHÉNIENNE.– L’« EMPALEMENT » DE SON COMPLICE. SOURCE DE PROFITS POUR LE MARI. LE TRIBUNAL DOMESTIQUE À ROME.– CATON ET LA COMMUNAUTÉ DES FEMMES.– L’AMENDE ET LA RÉPUDIATION.– LA PROSTITUTION OBLIGATOIRE ET LE SUPPLICE DE L’ÂNE. AMANTS BATTUS ET « CASTRÉS ». FANTAISIES LUBRIQUES DES MARIS.– LE « BAISER MASCULIN » ET L’« IRRUMATION ». – LE RAIFORT ET LE MULET.– SCRIBONIA ET JULIE, ÉPOUSE ET FILLE D’AUGUSTE.– LA LOI JULIA.– CLAUDE ET MESSALINE.– NÉRON ET SA FEMME OCTAVIE.– LES PAILLARDISES DE DOMITIA LONGINA.– AURÉLIEN ET L’ÉCARTÈLEMENT DE L’AMANT.– ÉPOUSES PENSIONNAIRES DE LUPANARS.– LA « METANEA » DE JUSTINIEN.– MŒURS ITALIENNES CONTEMPORAINES.
Qu’est-ce que l’adultère ? « C’est l’œuvre de chair sciemment et volontairement accomplie entre une personne mariée et une personne autre que son conjoint. » D’après Fournel, « l’adultère est une des trois espèces de délit dont les personnes de différent sexe peuvent se rendre coupables par fréquentation illégitime. » Les deux autres espèces sont le stupre et la fornication.
L’adultère se commet avec une femme mariée, le stupre avec une femme libre, la fornication avec une femme publique. Dans le premier cas, la femme appartient à un seul ce qui fait de l’adultère une sorte de larcin ; dans le deuxième, elle n’appartient à personne ; dans le troisième, elle appartient à tout le monde.
De son côté, de Ferrière définit ainsi l’adultère : « L’adultère est simple ou double. On entend par adultère simple, la conjonction illicite qu’a une personne mariée avec une qui ne l’est pas. Par adultère double l’on entend la conjonction illicite qu’a une personne mariée avec une autre aussi mariée ».
Les canonistes distinguent trois sortes d’adultère : Celui qui se commet : 1° entre un homme marié et une femme libre, 2° avec une femme mariée et un homme libre, 3° entre deux personnes toutes deux mariées.
L’adultère peut donc se définir : la familiarité charnelle de deux personnes de différent sexe dont l’une est mariée. Ce point est essentiel car le mariage seul peut justifier le crime de l’adultère. Encore faut-il que l’union ait été contractée dans les formes prescrites par les ordonnances où lois en vigueur. Dans le cas contraire, le délit rentrerait dans la catégorie de ceux connus sous les noms de stupre et de fornication.
Ce crime a cela de particulier qu’il ne peut être l’œuvre d’une seule personne et qu’il implique nécessairement un complice. Ainsi, on ne saurait regarder comme un adultère les manœuvres criminelles qu’une femme se permettrait sur elle-même. Il en serait de même pour les privautés obscènes d’un homme sur une femme mariée.
Pour constituer le crime d’adultère, il faut donc trois éléments essentiels : 1° l’œuvre de chair, 2° le mariage de l’un des acteurs, 3° une intention coupable.
L’adultère commis par une femme passe pour un crime plus grand que celui dont un mari se rend coupable. On en attribue la raison à ce fait que l’adultère de la femme permet de douter de la paternité de ses enfants et par suite les légitimes héritiers voient souvent une partie de leurs biens leur échapper. En outre, l’impudicité de l’épouse semble entacher l’honneur du mari. C’est pourquoi les lois ont puni plus sévèrement ce crime dans les femmes que dans les hommes. Toutefois, le mari n’est pas plus maître de son corps que la femme l’est du sien.
Les Lacédémoniens, si l’on en croit Plutarque, ignorèrent l’adultère pendant près de cinq siècles. Les lois de Lycurgue autorisaient la communauté des femmes et permettaient à une épouse de s’abandonner à son amant avec la permission du mari. C’est ainsi que pratiqua Timée, femme d’Agis, roi de Sparte, en faveur d’Alcibiade. C’était à Lacédémone chose assez fréquente que de voir un ami solliciter le mari de lui prêter sa femme pour un certain temps. La proposition était quelquefois faite spontanément par le mari. D’après Plutarque « n’était-il par reprochable à un homme qui se trouvait sur l’âge et ayant une jeune femme, s’il voyait quelque beau jeune homme qui lui agréât et semblât de gentille nature, le mener coucher avec sa femme, pour la faire emplir de bonne semence et puis avouer le fruit qui en naissait comme s’il eût été engendré par lui-même. »
« Aussi était-il loisible à un honnête homme qui aimât la femme d’un autre pour la voir sage et pudique et portant beaux enfants, de prier son mari de le laisser coucher avec elle, pour y semer, comme en terre grasse et fertile, de beaux et bons enfants, qui, par ce moyen, venaient à avoir communication de sang et de parentèle avec gens de bien et d’honneur. »
Peu à peu les mœurs se modifièrent et les Spartiates ou Lacédémoniens punirent plus tard l’adultère comme le parricide, c’est-à-dire de la peine capitale Les Spartiates eurent, par la suite, une telle horreur de ce crime qu’ils le rangèrent au nombre des malheurs qui pouvaient affliger une famille. Suivant Suidas, quand ils avaient épuisé toutes leurs imprécations contre un ennemi, ils terminaient en lui souhaitant que sa femme devint adultère.
À Athènes, on pouvait impunément injurier et maltraiter la femme adultère. Solon croyait que la plus grande peine qu’on pût ordonner contre elle était la honte publique. La loi athénienne, dit Plutarque, permettait au mari de tuer sa femme coupable et au père d’immoler ou de vendre en servitude sa fille déshonorée. Le mari qui tuait les deux coupables était généralement absous. L’époux qui, témoin de son infortune, faisait grâce de la vie à la coupable ne pouvait plus habiter avec elle sous peine d’ignominie. De son côté la femme ne pouvait plus pénétrer dans les temples publics à moins de subir aussitôt toutes sortes de mauvais traitements, la mort exceptée. Le mari qui ne tuait pas le complice avait la faculté de l’abandonner à ses esclaves qui, généralement, en guise de pal, lui fourraient un gros radis noir dans le derrière ; puis, après l’avoir épilé tout autour, ils jetaient des cendres brûlantes sur cette partie vierge de poils. Parfois aussi l’amant était castré, c’est-à-dire amputé des organes nécessaires à la génération.
Selon Aristophane, on arrachait tous les cheveux de l’épouse adultère et l’on répandait aussitôt de la cendre chaude sur sa peau dans le but d’aviver la douleur. Les Athéniens punirent même ce crime de mort. Ils empalaient les deux complices au moyen d’une perche au bout de laquelle se trouvait fixée une pointe d’acier.
Dans d’autres contrées de la Grèce, on arrachait non seulement jusqu’à la racine des cheveux des coupables, mais encore les poils de toutes les parties du corps. On les exposait ensuite à la vue du public. Cette peine portait le nom de paratisme. Il existait encore une coutume très curieuse : Le mari trompé liait l’amant jusqu’à ce que celui-ci lui eût versé une forte amende, à défaut de laquelle il avait la faculté d’exercer sa vengeance.
Certains maris se montraient plus conciliants et préféraient, comme le bossu Poliagre, réclamer à l’amant une somme d’argent en retour des baisers de la femme.
Chez les Romains, les peines de l’adultère reçurent diverses modifications au cours de quatre époques qu’il y a lieu de distinguer ainsi :
1° Depuis la fondation de Rome par Romulus jusqu’à César (753 av. J.-Ch à 44 av. J.-C.)
2° Depuis l’avènement d’Auguste jusqu’à Constantin (31 av. J.-Ch à 306 ap. J.-Ch.)
3° De Constantin à Justinien Ier (306 ap. J.-Ch à 527).
4° Depuis Justinien 1er jusqu’à la destruction de l’empire Romain (527 à 1453 ap. J.-Ch.)
Anciennement à Rome il n’y avait point d’accusation publique pour adultère.
Romulus n’avait institué aucune peine ; mais il avait laissé le sort de la femme coupable entre les mains du mari. Celui-ci, réunissait alors un tribunal domestique composé de parents et d’amis, qui avait toute liberté pour prononcer la condamnation qu’il jugeait convenable. La peine du bannissement était d’ordinaire infligée à la femme par ces juges improvisés. Le mari exerçait un droit de justice sans appel. Aucune autorité n’avait le pouvoir de modifier ses arrêts. Il était le chef suprême dans sa famille. Cet usage se maintint encore après l’expulsion des rois.
Néanmoins, certains citoyens romains n’y regardaient pas de si près et pratiquaient, comme les Grecs, la communauté des femmes. On n’en peut douter par l’exemple laissé par le Caton le Censeur. Sur l’agrément de son beau-père Philippe, il céda son épouse à Hortensius pour qu’il en eut quelques enfants d’autant plus que Caton en avait suffisamment. Les historiens assurent que Caton reprit sa femme après la mort d’Hortensius.
À l’époque des rois, une répression fort rigoureuse était exercée contre l’épouse adultère. Il y avait alors deux classes de citoyens : les patriciens et les plébéiens. Les premiers habitaient le plateau du Palatin. Les seconds résidaient en dehors de l’enceinte de la ville, dans un quartier appelé « l’Asyle », sorte d’enclos situé sur la pente du mont Capitolin. Ils demeuraient étrangers à l’organisation de la cité et de la famille. Plus tard, les nouveaux plébéiens s’établirent sur l’Aventin au-delà du « promœrium » et de la ville religieuse.
Les patriciens ne connurent tout d’abord que deux peines : l’amende (multa) et la mort (pœna capitalis). Puis, ils en ajoutèrent une troisième : la répudiation. Ces trois peines étaient prononcées soit par le mari seul, soit assisté du tribunal domestique.
L’amende consistait en un paiement en argent ou en nature. L’amende la plus élevée (multa suprœma) nécessitait le versement de trente bœufs et de deux brebis. Pour éviter l’inégalité de la peine et empêcher qu’on se procurât du bétail d’une valeur tantôt moindre tantôt plus élevée, la loi « Aternia » fixa à dix as le prix de chaque brebis et à cent celui de chaque bœuf
La répudiation était le renvoi pur et simple de la femme par son mari.
En ce qui concerne la peine de mort, il y avait lieu de considérer si le mari avait surpris ou non sa femme en flagrant délit. Dans le premier cas, le mari pouvait tuer la coupable ; dans le second cas, le mari s’apercevant ou apprenant que sa femme le trompait convoquait le tribunal domestique pour lui demander de prononcer une peine sévère : la mort de préférence. Ce singulier tribunal restait seul juge de la nature des peines et de leur exécution.
Les plébéiens, vivant en marge de la loi et de la famille et étant par conséquent moins civilisés que les patriciens, réprimaient l’adultère d’une façon plus rigide, plus sauvage. Les peines qu’ils appliquaient étaient plutôt l’œuvre de la coutume que celle du législateur qui se désintéressait de leur sort. C’est ainsi que l’on retrouve les traces de l’antique punition par la prostitution. En effet, la femme plébéienne surprise en flagrant délit était conduite dans certains lieux spéciaux, très éloignés de la ville, et soumise aux outrages de nombreux athlètes qui en jouissaient à tour de rôle. On conserva ainsi, en l’atténuant, le supplice de l’âne infligé à une époque très reculée à Cumes, ville ancienne de la Campanieoù la femme coupable était dépouillée de ses vêtements et menée au « forum ». Là, on la plaçait à califourchon sur un âne et on la promenait par tous les carrefours de la ville. Elle était ensuite mise sur une pierre et exposée sur la place publique aux yeux et aux injures de la foule. La pierre était, dès lors, polluée et maudite et la femme frappée d’ignominie et appelée onobatis, « qui a monté l’âne ». À Rome, sous, les rois, la peine était à peu près analogue chez la plèbe avec cette différence que le premier être humain venu remplaçait l’âne. Mais, cette répression tomba en désuétude le jour où se produisit la fusion des patriciens et des plébéiens.
Cependant, les mœurs primitives des Romains perdirent peu à peu de leur pureté sous l’influence de causes multiples. Après la destruction de Carthage, la corruption ayant gagné de plus en plus les mœurs publiques, l’adultère devint si fréquent que les maris négligèrent le plus souvent d’en tirer vengeance. Ce crime devint effréné, immodéré, grâce à la profusion des richesses, à l’amour du luxe qui se répandit dans la société, notamment chez les femmes. Ainsi, Larga avait tant d’amants que sa fille, en même temps sa confidente, n’aurait pu les énumérer tous sans reprendre haleine trente fois.
La dissolution chez les hommes ne le cédait non plus en rien à celle des femmes. Les citoyens les plus illustres furent gagnés par l’amour des débauches.
Le mari continuait bien à exercer son pouvoir avec l’aide du tribunal familial ; mais on en comprit bientôt l’insuffisance et l’intervention de l’État devint nécessaire pour réprimer l’adultère.
Le mari trompé eut sur son épouse infidèle le jus occidendi, c’est-à-dire le droit de lui infliger la peine de mort. Il pouvait également immoler le complice s’il le surprenait en flagrant délit. Toutefois, à côté de cette vengeance légale, il y eût des peines corporelles privées telles que la bastonnade et la castration. D’après Valère Maxime, Sempromius Musca fit battre de verges C. Gallius qu’il avait surpris dans l’enlacement du baiser ; L. Octavius pris également en flagrant délit fut assommé par C. Memmius à coups de nerf de bœuf ; quelques-uns subirent la castration, comme Carbo Accienus de Vibienus, Pontius de P. Cernius.
Les époux outragés avaient encore imaginé d’autres moyens pour se faire justice. C’est ainsi que Ch. Furius Brocchus fut contraint par le mari de se prêter aux fantaisies lubriques des esclaves. Une autre fois, si l’on en croit Lucilius, un homme pour punir sa femme d’avoir prêté son corps, s’empara d’un tesson de bouteille et se coupa d’un seul coup « la verge et les testicules ».
Parfois, tout en satisfaisant leur vengeance, ils donnaient libre cours à leur lubricité. Lorsque l’amant était un jeune garçon, l’infortuné mari le « pédiquait », en d’autres termes pratiquait sur lui « le baiser masculin ». Ainsi le boulanger d’Apulée ayant trouvé sa femme en commerce d’amour avec un joli garçon adressa à ce dernier ces paroles conciliantes : « Je ne veux pas d’une séparation, mais d’une communauté de biens, de façon qu’il n’y ait qu’un lit pour nous trois. » Conduisant ensuite le garçon dans sa chambre à coucher, il le mit au lit, se coucha à ses côtés et lava dans les spasmes de la volupté les souillures faites à son honneur.
Par contre, si c’était un homme d’âge mûr, le mari « l’irrumait », c’est-à-dire le contraignait à exercer ses lèvres sur l’engin dont il avait usurpé le domaine . « Celui qui est irrumé ne peut parler, sa bouche étant obstruée par la mentule en travail, donc il se tait ». Martial conseilla à Gallus d’éviter de se faire prendre dans les filets d’une femme célèbre par ses adultères de crainte que le mari ne lui fasse subir l’irrumation. « Tu es tranquille pour tes fesses ? Le mari n’est pas pédicon. Il ne fait que deux choses : il irrume ou il b…se. ». Ou bien encore le mari outragé, imitant les Grecs, enfonçait dans le fondement de l’amant d’âge rassis soit un raifort, soit un poisson, en l’espèce un mulet. « Certains adultères, dit Juvénal, se voient introduire un mulet. » « Surpris en adultère, en Arménie, écrit Lucien Sur la mort de Pérégrinus, il s’enfuit, le derrière bouché par un raifort. » « Les pieds liés, il aura la fente ouverte traversée d’un raifort ou d’un mulet. ».
Quand le mari ne tuait pas le complice ou n’exerçait pas sa vengeance d’une autre manière, il le conduisait devant le prêteur qui infligeait une forte amende au coupable et le rendait infâme, en un mot impropre de témoigner en justice. L’épouse qui avait eu la vie sauve comparaissait tantôt devant le peuple réuni en comices, tantôt devant les censeurs, tantôt devant le prêteur lesquels la condamnaient soit à l’amende ou à l’exil, soit à la note d’infamie, sorte de flétrissure morale.
Quelquefois, certains maris très philosophes, témoignaient au contraire d’une grande complaisance. Les uns savaient se retirer à temps pour ne pas gêner les amants de leurs femmes. Les autres, paraissaient se désintéresser de ce qui se passait autour d’eux, feignaient de ronfler sur les verres ou de compter les solives du plafond. C’était un moyen pratique de s’assurer des rentes.
Avec de semblables procédés, le nombre des adultères s’accrut dans de notables proportions. Ce crime devint chose commune et banale, malgré toutes les mesures prises sous la République pour enrayer le courant de corruption. Aucune catégorie de citoyen n’échappa au fléau qui atteignit même Scribonia, première femme d’Auguste, et sa fille unique, Julie, femme de Tibère. L’empereur, indigné de leurs déportements, dût sévir contre elles. Il répudia Scribonia pour sa paillardise et exila Julie dans l’île de Pandataria « pour avoir été une grande p…n qui lui faisait grande honte. ». Julie y mourut de faim et Auguste la priva de sépulture ainsi que sa mère Scribonia. Quant aux complices de Julie, rapporte Suétone, le souverain les fit mettre à mort.
Afin de restreindre le nombre d’adultères et obliger les maris à se montrer moins indulgents envers les écarts de conduite de leurs femmes, Auguste pensa qu’il était nécessaire d’établir une loi spéciale édictant des peines très sévères. Aussi en l’an 18 ou 17 avant Jésus-Christ, fit-il voter par le Sénat la loi Julia de adulteriis que les textes appellent aussi Julia de pudicitiâ. Cette loi fît de l’adultère un délit public et établit pour châtier les coupables tout un ensemble de peines principales et de pénalités complémentaires. Cependant, elle ne considéra pas ce crime comme capital. Une commission permanente (quœstio perpétua) présentant quelque analogie avec notre jury moderne avait mission de prononcer les jugements. Le rôle du tribunal domestique se trouvait de la sorte à peu près annihilé.
Les peines édictées contre la femme coupable consistaient dans la relégation, la confiscation du tiers de ses biens au profit du Trésor et la perte de la moitié de sa dot. Elle était, en outre contrainte de porter la « toga », tunique sans manches, spéciale aux hommes et aux courtisanes et ne pouvait revêtir la « stola », robe à longs plis tombant sur les talons, réservée aux matrones (matronœ, femmes respectables). Enfin, l’épouse infidèle était frappée d’une incapacité complète de se remarier et obligée de vivre dans un célibat perpétuel. Personne, pas même son ex-mari, ne pouvait l’épouser à moins d’être déclaré « leno » et de subir les peines fixées par la loi Julia contre le « lenocinium ».
Le complice se voyait frappé de la relégation et de la confiscation de la moitié des biens. Si c’était un esclave, il était condamné à mort. Le complice était enfin puni de mort ou de la déportation s’il avait commis son crime avec violence. La relégation de la femme et du complice s’effectuait toujours dans des îles différentes. À la relégation déjà rigoureuse, venait s’ajouter une peine infamante appelée à Rome « infamia » et correspondant de nos jours à la perte des droits civils.
Le mari qui surprenait le complice chez lui avait le droit de le mettre à mort. Cependant il ne pouvait exercer sa vengeance sur les « honesti » personnes d’une certaine condition ; mais seulement sur les « humiles » personnes viles telles que les esclaves, les affranchis, les gladiateurs, les athlètes de cirques.
Sous l’empire de la loi Julia, le mari n’avait plus le pouvoir de tuer sa femme infidèle, ni de lui infliger aucun autre châtiment. La répression appartenait seule à la commission permanente. Par contre, la loi Julia accordait au père de l’épouse le droit de l’immoler avec son complice, mais il ne pouvait en user que sous certaines conditions. Il fallait, en effet : 1° que la fille soit en puissance paternelle ; 2° qu’elle soit surprise en flagrant délit ; 3° que le père tuât les deux coupables en même temps sans qu’il lui soit permis de frapper l’un et d’épargner l’autre ; 4° que l’adultère soit commis dans la maison paternelle ou sous le toit conjugal ; 5° que le père n’appartint pas à la catégorie des personnes viles et infâmes auxquelles l’accusation d’adultère était interdite. Lorsque toutes ces circonstances se trouvaient réunies aucune poursuite ne pouvait être exercée contre le père pour le meurtre des coupables quelle que soit la qualité du complice.
Les « fauteurs d’adultères », c’est-à-dire ceux qui prêtaient leur maison sachant qu’un adultère devait s’y commettre étaient passibles des peines de ce crime.
Les adultères commis avec des esclaves mariées ou avec des femmes déshonnêtes (inhonestœ) ne tombaient pas sous le coup de la loi Julia. Par femmes déshonnêtes, on comprenait à Rome les danseuses et chanteuses de théâtre, les courtisanes et prostituées s’adonnant à la corruption pour vivre ainsi que les servantes et tenancières d’auberges, de cabarets et d’établissements de bains qu’elles fussent mariées ou non.
Afin de tourner la loi, si l’on en croit Suétone, les femmes avisées, de concert avec leurs maris, se faisaient inscrire sur la liste des courtisanes. C’est ainsi que Zoile qui avait épousé une prostituée, recevait des amants de sa femme le prix de ses caresses. Celle-ci, de son côté, profitait du trafic des charmes de son mari avec des êtres mâles. Hérennius Rufus, également, ouvrit un lupanar où sa femme était la plus active des pensionnaires. On débattait avec lui le prix des nuits de sa femme ou de ses esclaves.
Cependant, Auguste, créateur de la loi Julia, donnait le mauvais exemple et commettait lui-même des adultères. Il chargeait ses amis de lui procurer des femmes mariées. Mais l’empereur se montrait exigeant et il fallait qu’ils procédassent à un examen minutieux de leurs charmes nus. Quand on lui reprochait son intempérance envers les femmes romaines de qualité, il répondait « qu’il ne les voyait qu’afin de connaître les secrets de leurs maris et ce qui se passait dans leurs familles ».
Tibère (14-37 ap. J.-C.), successeur d’Auguste, n’apporta pas de modifications sensibles aux peines de l’adultère. Il publia seulement un sénatus-consulte interdisant aux femmes, sous peine d’exil, de se faire inscrire comme courtisanes sur le registre des édiles afin d’échapper aux pénalités de la loi Julia. Celle-ci demeura en cet état jusqu’au règne de Constantin ; mais elle fut appliquée plus ou moins sévèrement.
C’est ainsi que Caligula (37-41 ap. J.-C) convaincu que sa femme Livia Hostilia le trompait n’usa pas à son égard de sa cruauté accoutumée et se contenta seulement de la bannir pendant deux années.
Claude (41-54) qui lui succéda toléra longtemps les débordements lubriques de sa femme Messaline. Les historiens assignent un nombre considérable d’amants à cette impériale prostituée. Le plus souvent elle faisait empoisonner ceux qui avaient eu l’honneur de la tenir entre leurs bras, de même que périssaient tous ceux qui refusaient d’assouvir sa passion.
Afin de donner le change à Claude, elle faisait coucher auprès de lui de jeunes servantes très versées dans les plaisirs érotiques.
« Pendant ce temps, préférant un grabat au lit impérial, cette auguste p…n sortait du palais suivie d’une seule servante ; et la tête encapuchonnée, sa chevelure noire recouverte d’une perruque fauve, se glissait au lupanar pour occuper la loge qui lui était réservée. Elle arborait aussitôt un écriteau portant le nom de Lysisca ; puis nue, la gorge retenue par un réseau d’or, elle prostituait les flancs qui portèrent Britannicus. Avec des caresses lascives, elle recevait les clients, réclamait le salaire, puis couchée sur le dos elle soutenait de nombreux assauts. Lorsque le leno congédiait ses pu…ns, elle se retirait à regret, fermant sa loge la dernière. ».
Toujours à l’affût de nouvelles jouissances, Messaline se prit à aimer éperdument, un habile danseur de l’époque du nom de Mnester. Ce dernier hésitait à céder et exigea, pour se livrer, l’autorisation de Claude. À force de ruses, elle obtînt de son époux qu’il ordonnât à Mnester d’obéir aveuglément à l’impératrice. Et le danseur dut se rendre aux désirs de cette jouisseuse de marque. Une autre fois, la fougueuse Messaline voulut montrer sa supériorité en exploits amoureux. À cet effet, elle fit appel à de vigoureux partenaires et se mesura avec une courtisane très réputée. Elle soutînt vingt-cinq assauts en un jour et une nuit et sortit victorieuse de ce tournoi peu ordinaire.
Claude n’eût pas le courage de châtier son épouse, mais il la laissa égorger par son entourage. Agrippine qui lui succéda dans la couche impériale ne fut pas moins prodigue de ses charmes. Elle ne se donna que pour servir son ambition et elle en arriva à faire empoisonner l’empereur pour placer son fils sur le trône.
Néron (54-68), ce monstre qu’elle mit au monde, se refusa de subir l’autorité maternelle. Il se lança dans la débauche, voulant connaître tous les excès, toutes les formes du baiser. Sa femme Octavie l’initia. Mais, ce prince sanguinaire la répudia et lui fit ouvrir les veines pour complaire à Poppée, femme du prêteur Othon, son favori.
Domitien (81-86) plus zélé que ses prédécesseurs et comprenant, par intérêt politique qu’il convenait à l’État de mettre un frein à la dépravation générale, veilla à la stricte application de la loi Julia. Il augmenta même les incapacités à l’égard des femmes adultères. Il répudia sa femme Domitia Longina parce qu’elle aimait un comédien et bateleur nommé Pâris et « qu’elle paillardait tout le jour avec lui sans tenir compagnie à son mari ; mais il la reprit au bout de peu de temps et en fût très content, le bateleur lui ayant appris certaines positions et tours de souplesse. »
L’empereur Adrien (117-138) augmenta les rigueurs de la loi. Il prescrivit, en effet, de soumettre à la question non seulement les esclaves des deux coupables ainsi que ceux de leurs père et mère, mais encore tout esclave quel qu’il soit.
Septime Sévère (193-211) apporta une nouvelle disposition à la loi Julia et autorisa contre la fiancée les poursuites pour adultère. Cependant, cet empereur se soucia peu des écarts de conduite de sa femme Julia Domna, une syrienne, fille de Bassien, prêtre du Soleil à Emère. Il disait que le nom de Julia « était prédestiné et que celles qui le portaient étaient sujettes à être très grandes p…ns et à faire leurs maris cocus. »
Alexandre Sévère (222-235) introduisit dans la loi une importante innovation. Il ordonna d’appliquer la peine de mort à la femme reconnue coupable d’adultère et rangea ce crime parmi les plus grands. Cependant, on trouve un rescrit de cet empereur autorisant le père à châtier ses enfants surpris en flagrant délit d’adultère, mais non à les tuer de sorte que le droit du père de tuer sa fille semble avoir disparu.
Aurélien (270-275) ordonna un supplice effroyable contre le soldat ayant abusé, avec la femme de son hôte, des faveurs de l’hospitalité. On faisait fléchir avec effort deux grosses branches de deux arbres voisins, auxquelles on liait les pieds du légionnaire. Puis on lâchait les branches et celles-ci en reprenant leur élasticité écartelaient le malheureux.
L’influence du christianisme s’étendant de plus en plus sous Constantin (306-337) d’importantes réformes furent apportées aux pénalités de l’adultère que l’on considéra comme un sacrilège. Ce crime fut regardé comme aussi grave que le parricide, l’empoisonnement et la magie. La femme infidèle et son complice furent punis de mort. Les femmes qui s’abandonnaient à leurs esclaves subissaient également la peine capitale ; leurs complices étaient condamnés au supplice du feu. Constantin autorisa, en outre, le mari à accuser sa femme sur simple soupçon, mais il lui interdit de la répudier avant qu’elle n’eût été reconnue coupable.
Les successeurs de Constantin n’observèrent pas ponctuellement la loi Julia et établirent d’autres peines. Théodose (379-392) notamment en institua une de bien singulière. Il ordonna de conduire l’épouse coupable dans une maison publique pour y souffrir toute sa vie la prostitution et les approches de tous les hommes qui la désiraient. Mais, ces derniers étaient obligés de se ceindre les reins de grelots et de clochettes afin que ces objets, mis en mouvement par l’effet du coït, attirassent les passants autour de la maison et leur apprissent que la coupable subissait à ce moment une partie de la punition. Par ce moyen, Théodose, au lieu d’enrayer le péché, ne fit que l’augmenter ou tout au moins l’entretenir.
Dès lors, la punition pour crime d’adultère fut surtout appliquée aux femmes. Ce n’est qu’à partir de Justinien (527-565) que le sexe faible se vit absoudre et que toute la rigueur de la pénalité s’exerça contre les hommes. Justinien, en effet, à l’instigation de l’impératrice Théodora, femme adroite et galante, résolut de protéger les femmes et de rendre les hommes responsables de leurs débordements. Par la Novelle 134, il remplaça la peine de mort par celle du fouet et de la relégation dans un monastère. Toutefois, le mari eut pendant deux ans la faculté de pardonner à sa femme et de la reprendre. Ce délai écoulé, elle devait être rasée, voilée et recluse à perpétuité, tandis que son ex-conjoint pouvait se remarier. Cependant, cette réclusion perpétuelle dans un cloître n’eût pas l’approbation générale. Les ecclésiastiques trouvèrent indécent de choisir l’asile de l’innocence et de la chasteté comme retraite des femmes impudiques. Ils ajoutaient que la fréquentation de ces dernières pouvait même devenir dangereuse pour leurs compagnes. À diverses reprises, les monastères refusèrent même de recevoir de semblables femmes, ce qui obligea Justinien à faire construire une maison spécialement destinée à les recevoir et qu’il appela Metanea.
Quelques années après Justinien cette disposition tomba en désuétude et les maris qui avaient fait enfermer leurs femmes purent les retirer lorsqu’ils le jugèrent à propos. Il en fut ainsi jusqu’à la fin de l’empire romain d’Orient (1453). Cependant, dans cet intervalle, l’empereur Léon VI, le Philosophe (886-911), se montra fort sévère pour l’adultère qu’il rangea parmi les plus grands crimes. Il ne le punit pas de mort, mais de mutilation. Il ordonna que la femme et son amant auraient le nez coupé.
Quelques siècles plus tard, une Constitution du royaume de Naples, permit au mari de tuer sa femme sur le champ lorsqu’il la surprenait en flagrant délit. Il pouvait également mettre à mort son complice sans tenir compte de son rang ni de sa qualité. En Lombardie, il existait un usage semblable. C’est ainsi que François de Gonzague, duc de Milan fit trancher la tête à sa femme qui lui avait fait des infidélités.
À Ferrare, un mari s’éprit d’un jeune homme au physique agréable. Sa femme, non plus, n’était pas insensible à ses charmes. L’époux persuada sa moitié de céder aux sollicitations du jeune homme qui éprouvait pour elle une passion très vive. Elle accepta et prit rendez-vous. Au moment où, au jour fixé, la femme et le jeune homme faisaient le déduit, le mari, qui s’était caché, sortit de sa cachette. Les prenant sur le fait, il tira sa dague et la mettant sous la gorge de l’amant le jugea passible de mort pour un tel forfait. Cependant, il lui offrit de lui laisser la vie s’il consentait à se livrer à ses complaisances. Et les deux époux procédèrent à l’échange. Le mari abandonna sa femme au jeune homme et celui-ci se prostitua au mari.
À Florence, de nos jours, les mœurs sont plus dissolues dans les classes élevées que dans le peuple. Élégante et musicienne, la riche Florentine charme plutôt qu’elle n’éblouit. Sa famille lui choisit un époux ; mais il lui est loisible de se montrer partout « accompagnée d’un sigisbée » qui reste tout le jour avec elle, partageant ses plaisirs. Il la « serre de si près qu’on ne placerait pas un fil entre eux. ». On considérerait comme un scandale une infidélité à cet amant librement élu. La femme se soucie peu du mari.
Les Romaines d’aujourd’hui sont artistes et voluptueuses ; mais elles n’en conservent pas moins jusqu’au mariage la pureté de leurs mœurs. Une fois l’union consommée, elles peuvent disposer librement de leur cœur selon la passion ou l’intérêt. D’ailleurs, la complaisance des maris romains est proverbiale. Un ami de Taine rapporte qu’assistant un jour à une partie de campagne, il vit un jeune homme et une jeune femme qui paraissaient très épris. Se tournant vers son voisin il lui dit : « Voilà sans doute de nouveaux mariés, mais ils se croient dans leur chambre. » Le voisin, gêné, ne sut que répondre. Son embarras s’expliquait : c’était le mari.
LES GAULOIS ET LES FRANCS.– LES LOIS « SALIQUE, RIPUAIRE, BURGONDE ». – PÉNALITÉ RIGOUREUSE DES PREMIERS ROIS.– LA « COURSE DES BATTUS ». – LE « FOUET » ET LA « CLAUSTRATION » AU XVIe SIÈCLE : LA PEINE DE L’« AUTHENTIQUE » ET LE « MONASTÈRE DES FILLES REPENTIES ». – MARIE JOISEL.– FEMMES ÉPRISES DE LEURS DOMESTIQUES.– L’INCESTE ET L’ADULTÈRE.– LA PÉNALITÉ SOUS LA RÉVOLUTION ET DE NOS JOURS.